A.G. Intervention N°9

 ( 18 février 2000 )

                                      Salut,

           J'aurais dû réagir plus tôt, mais le fait que le débat soit placé publiquement sur le net suscite une réaction plutôt négative au sein du petit noyau de rédacteurs du CS. Il faut faire une différence entre des correspondances privées, dans laquelle les idées s'élaborent, et les textes publiés sur un site, où, sans avoir trouvé leur forme définitive, elles sont plus abouties dans leur formulation. A la limite nous aurions préféré la forme d'un forum, dans la mesure où chacun prend lu même la responsabilité des textes qu'il envoie à la publication. De plus, si on apprécie toujours un " lien " supplémentaire, il est difficile à avaler, pour des mondialistes révolutionnaires et libertaires, de se trouver aux côtés de l'UCK, officine nationaliste de l'impérialisme allemand, et du CEPS, organe éditorial consciencieusement dédié à diffuser les textes des fascistes Staline et Hoxha (mais ces gens là semblent apprécier ta prose, puisqu'ils la reprennent à leur compte !). Notre antinationalisme n'est pas une lubie, cDans ce sens, j'estime que l'internationalisme classique a fait son temps, il a battu en brèche le chauvinisme pur et simple (" je ne m'occupe que de ce qui se passe chez moi et je fais la guerre à tout les voisins ") et s'est diffusé dans tout " l'é (-pou ?) ventail politique. Effectivement, il y a des fascistes internationalistes.

           Le mondialisme, ce n'est pas seulement la solidarité des luttes, mais leur fusion au niveau mondial. Les exemples récents de Vilvoorde, Seattle, de Davos, et de Vienne (dès demain), ou le regroupement en cours des communistes libertaires en Amérique du Nord-Est, montrent qu'il n'y a désormais plus aucune frontière nationale pour les militants anticapitalistes et antifascistes. Il est donc parfaitement imaginable de concentrer les forces sur les organes internationaux du capitalisme pour faire les faire exploser dans leurs contradictions.

           Cette façon de voir les choses n'a rien a voir avec le soutien potentiel de Cuba au Vietnam. D'abord, la révolution vietnamienne est morte, tuée par les Vietminh. Quand les staliniens soutenaient Ho Chi Minh, des communistes " internationalistes " rappelaient l'assassinat de Tha Tu Tau. On ne peut pas confondre expansion de l'aire d'influence du bloc " socialiste " (c'est-à-dire capitaliste d'état) avec un mouvement révolutionnaire réellement libérateur. Les premières victimes de cette confusion, ce sont les vietnamiens eux-mêmes.

           Contrairement à ce que tu penses, le nationalisme est une pensée beaucoup plus complexe à l'heure actuelle. Très loin du simple chauvinisme à l'ancienne, les nationalistes actuels se basent sur l'idée d'un monde divisé en nations " naturelles ", et s'opposent simplement entre eux sur l'échelle choisie (régionale, " nationale ", continentale) ou sur le camp à choisir dans les cas de revendications croisées sur un même territoire (serbes ou croates, israéliens ou palestiniens). Ils reconnaissent donc en principe les droits de chaque nation à se défendre contre un ennemi commun : le mondialisme ! De ce point de vue, les arguments des nationalistes " de gauche " comme de droite se rejoignent sous des vocabulaires différents.

           La confusion idéologique naît de plusieurs sources : l'influence stalinienne (national-communisme) et surtout le travail conscient de la nouvelle droite pour brouiller les distinctions (les " rouges-bruns "). Précision sur ce point : le club de l'horloge fait plutôt le lien entre droite libérale et extrême-droite, en diffusant dans la droite les thèmes primitivement développés par le GRECE (groupe d'étude et de recherche sur les civilisations européennes), qui lui se réclame tout à la fois du paganisme indo-européen, de l'élitisme et de l'anticapitalisme. Ils ont, ouvertement, mis au point une stratégie d'infiltration de la gauche et de conquête du champ culturel, c'est-à-dire d'occupation systématique du terrain des idées, concept défini par le " marxo-bergsonien " Gramsci. Cette stratégie leur permet d'influencer des pans notables de la gauche, notamment au PCF et au MDC, ainsi que bon nombres d'intellectuels (tu peux regarder les textes qu'on a consacré à ce problème :

http://www.altern.org/cerclesocial/bohttp://www.altern.org/cerclesocial/books/mots.htm

http://www.altern.org/cerclesocial/ladous.htm

           Autrement dit, la plus grande méfiance est de mise, parce que des idées communément divulguées à gauche véhiculent des idéologies fascistes. C'est l'une de meilleurs mise en application de la théorie du Spectacle, dont les néo-droitiers sont de fervents lecteurs : ils la détournent simplement de son orientation conseilliste. Notre objectif, c'est précisément de mener le combat culturel inverse, d'affirmer et de renouveler les valeurs de la gauche (ce que j'appelle hypergauche) : mondialisme, athéisme, égalitarisme.

 

          Quelques notes en vrac

           Sur l'Algérie, le lien entre le nazi Genoud et le FLN, dont il était le banquier, n'est pas une nouveauté inventée par Péan, c'est une histoire qui était déjà connue auparavant. Il n'a fait que l'étudier plus en détail, en interviewant le vieux facho avant sa mort. Genoud est également le " père spirituel " de Carlos...

          La récupération de Proudhon est une vieille histoire puisque l'Action Française se réclamait de lui à la fin du XIXe s., assez logiquement puisqu'ils partageaient son fédéralisme, sa misogynie et son antisémitisme virulent.

           Sur Israël et la Palestine, la position mondialiste révolutionnaire est claire : nous ne sommes ni dans l'un, ni dans l'autre camp. Nous sommes du côté de la poignée de juifs et d'arabes qui se battent contre le racisme et l'antisémitisme, le capitalisme, l'état et toutes les religions. Et nous nous refusons de mettre le sionisme au sommet de nos ennemis, comme l'on fait certains gauchistes, vite récupérés par les fachos. Tant pis si on nous traite d'agents sionistes. De toute façon, nous sommes déjà le complot mondialiste, alors au point où nous en sommes !

           Le nazisme est tout sauf monolithique. Il n'a pas cessé d'éclater en tendances, qui continuent d'influencer chacune les différents courants de l'extrême-droite. Et dans la SS, qui se voulait l'élite du Reich, le parti faisait figure de plèbe gênante, comme ça avait été le cas pour les SA. En outre, à la fin de la guerre, la SS est composée d'éléments venus de partout en Europe (et de musulmans du Proche-Orient), dont l'approche n'est pas du tout dans la ligne strictement germanique de ses débuts. En outre, il y a ait des dissensions entre Hitler et Himmler, qui ne cessaient de croître.

 

          Quelques bouquins pour la théorie du concept :

           L'intelligence animal, Jacques Vauclair ( ?), Point Seuil.
          Bien que je désapprouve les expériences décrites, ce bouquin contient pas mal de choses sur la pensée conceptuelle chez les animaux.

           Frans de Waal, Le bon singe, Bayard (chez les cathos, hélas).
           Il a également écrit la Politique du chimpanzé, et récemment un bouquin sur les Bonobos (chimpanzés nains). Malgré quelques désaccords, je trouve que c'est un bon moyen de piger la morale politique chez les grands singes anthropoïdes.

          Shirley C. Strum. Voyages chez les babouins (Point Seuil)
           Un peu mise au ban des éthologues pour ses positions féministes, Strum décrit de manière intéressante plusieurs groupes de babouins en milieu naturel, sans toujours en tirer les conséquences au niveau de la variabilité culturelle.
           Sur ce dernier point, tu peux également lire " La culturelle est elle naturelle " paru chez Errance. Je n'ai pas la réf. exacte ici. Ca fait le point sur les avancées récentes dans ce domaine, de manière assez complète.

 

A +

Nico

 

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