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’’LE VATICAN CONTEMPORAIN’’, retracé du moins jusqu’en 1962

mardi 23 juillet 2013 (Date de rédaction antérieure : 1er avril 2013).

"LE VATICAN CONTEMPORAIN", retracé du moins jusqu’en 1962

Le pape, le Vatican, l’église catholique : les faces cachées et ignorées par ceux qui ne veulent pas (plus) savoir …

Intéressant pourtant de (se souvenir/connaître) le passé de cet État le plus anti-démocratique, le plus autocratique, le plus secret, réactionnaire, féodal, comploteur, qui existe au monde et basé uniquement sur une croyance religieuse. Ses pouvoirs, mis aussi au service du fascisme à une certaine époque, des exploiteurs, des systèmes monarchiques, des aventures sanglantes, et évidemment de l’ anti-communisme de combat…

On verra aussi que le rôle des cardinaux, réactionnaires ou réformistes, conservateurs ou “progressistes”, n’est pas seulement d’élire les papes à huis-clos, au cours de leurs tractations et manoeuvres secrètes…

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"LE VATICAN CONTEMPORAIN", retracé du moins jusqu’en 1962…

Je publierai progressivement ce retracé politico-historique, au fur et à mesure de mes disponibilités, …

Bienvenue et bonne lecture à tous mes correspondants qui auront la patience de le lire jusqu’ au bout ! Cela en vaut peut être la peine … (???).

RoRo

Chapitre premier

L’ÉTAT DE LA CITE DU VATICAN

Le Vatican est tout à la fois un État microscopique enclavé dans Rome et le centre de l’Église catholique romaine (1) .

II est devenu un État aux termes du traité de Latran, conclu en 1929 entre Pie XI et le gouvernement fasciste de Mussolini. L’article 3 de ce traité stipule : « L’Italie reconnaît au Saint-Siège l’entière propriété, le pouvoir exclusif et absolu, et la juridiction souveraine sur le Vatican dans sa composition actuelle, avec toutes ses dépendances et dotations, instituant ainsi, à des fins particulières et dans les modalités stipulées au présent traité, la Cite du Vatican. »

L’État du Vatican ne ressemble à aucun autre État du monde en ce sens qu’il n’a ni ouvriers, ni paysans, ni industrie, ni agriculture. C’est un minuscule État ecclésiastique dont le souverain absolu est le pape de Rome, chef de la catholicité.

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Chapitre premier

L’ÉTAT DE LA CITE DU VATICAN

Le Vatican est tout à la fois un État microscopique enclavé dans Rome et le centre de l’Église catholique romaine (1) .

II est devenu un État aux termes du traité de Latran, conclu en 1929 entre Pie XI et le gouvernement fasciste de Mussolini. L’article 3 de ce traité stipule : « L’Italie reconnaît au Saint-Siège l’entière propriété, le pouvoir exclusif et absolu, et la juridiction souveraine sur le Vatican dans sa composition actuelle, avec toutes ses dépendances et dotations, instituant ainsi, à des fins particulières et dans les modalités stipulées au présent traité, la Cite du Vatican. »

L’État du Vatican ne ressemble à aucun autre État du monde en ce sens qu’il n’a ni ouvriers, ni paysans, ni industrie, ni agriculture. C’est un minuscule État ecclésiastique dont le souverain absolu est le pape de Rome, chef de la catholicité.

(pages 1, 2, 3)

I Le Vatican est une colline située sur la rive droite du Tibre, dans le nord-ouest de Rome. Ce fut dans l’ antiquité un lieu de culte et de vaticinations, d’où, vraisemblablement, son appellation. L’un des dieux de la mythologie romaine était Vaticanus qui, assurait-on, faisait pousser à l’enfant son premier cri. (Voir Gaston Boissier : La religion romaine d’Auguste aux Antonins, Paris 1906, (page 4). Après que le christianisme fut devenu la religion d’ État de l’Empire romain, le Vatican devint un haut lieu du culte chrétien. C’est à la fin du Ve siècle et au début du VIe que I’ on a commencé à bâtir les édifices de l’ évêché de Rome. Depuis la fin du XIVe siècle, le Vatican est la résidence permanente des papes.

Pendant onze siècles, de 756 a 1870, il a existé sur le territoire de l’ Italie actuelle des États pontificaux (ou États de l’Église) où la plénitude du pouvoir temporel appartenait au clergé catholique. Le pape de Rome était chef de cet État caractérisé par l’exploitation féodale des masses populaires et le joug de l’Église catholique. Sur la fin, les États pontificaux comptaient parmi les puissances les plus réactionnaires d’Europe.

Laissons parler l’Histoire universelle de Schlosser (1776-1861) : « Les États pontificaux étaient régis par un enchevêtrement de lois, édictées depuis des siècles ; les législations civile et ecclésiastique étaient confondues. .. Partout sévissaient les espions et les délateurs … Le pape et ses conseillers n’avaient ni le temps ni l’envie de s’occuper de leurs sujets … Aussi, l’idée que des réformes fussent nécessaires ne pouvait leur venir à l’esprit. »

Un contemporain du pape Grégoire XVI (dont le pontificat dura de 1831 a 1846) nous rapporte que toutes les provinces des États de l’Église « se trouvaient en état de siège ; la cour martiale siégeait en permanence ; les prisons et les lieux de déportation étaient bondés ; le gibet et l’échafaud rivalisaient d’activité (2) ».

Dans l’ouvrage qu’il fit paraître en 1901 sur l’histoire de l’ Italie, le célèbre historien russe Eugène Tarlé écrivait au sujet du régime des États pontificaux : « Rome était administrée par un cardinal, exerçant les fonctions de préfet de police… Le désordre administratif était épouvantable, parce que les prélats, les prêtres subalternes et les moines-policiers s’acquittaient de leurs devoirs de façon détestable, ils volaient, et étaient connus pour leurs concussions et leurs dérèglements…"

1 F. Schlosser : Weltgeschichte tur das deutsche Volk, 2.Ausg. Bd.16, Oberhausen und Leipzig 1874, S. 404.

2 M. Pinto : Pie IX et La révolution, voir dans la revue Vestnik Evropy (Courrier de l’Europe), juin 1867, p. 264.

La justice était rendue par quatorze tribunaux ecclésiastiques, dispersés à travers le pays et composés exclusivement de clercs désignés. La censure était monstrueusement tatillonne. Dante était à l’index, et aussi l’ Ancien Testament, et Pétrarque. On était emprisonné pour avoir lu Boccace … Les jésuites avaient la haute main sur les universités de Rome et de Bologne, ils châtiaient durement les étudiants qui osaient parler de la rotation de la Terre. La misère des populations n’empêchait nullement l’administration ecclésiastique de les pressurer d’impôts et de redevances. Par sa cruauté irréfléchie, la fiscalité abusive pratiquée dans les États pontificaux obligeait les habitants des villages à fuir au hasard … ». Tel était le régime institué dans l’État où le pouvoir absolu était exercé par le pape et son clergé.

Selon Stendhal : « Le pape exerce donc deux pouvoirs fort différents : il peut faire, comme prêtre, le bonheur éternel de l’homme qu’il fait assommer comme roi (1). »

L’arbitraire sévissant dans les États pontificaux suscitait les protestations du peuple. Mais celles-ci étaient réprimées avec une extrême dureté. Dans ses dernières années, le pouvoir temporel du pape s’ appuyait sur les baïonnettes françaises et autrichiennes. Les meilleurs fils du peuple italien, luttant pour l’unification du pays, désiraient aussi la suppression des États pontificaux, qui constituaient un grave obstacle à l’unité nationale.

En 1870 l’unification définitive de l’Italie mit un terme à l’existence des États pontificaux. Leur territoire de 16000 milles carrés, avec sa population de plus de trois millions d’habitants, s’intégra dans le royaume d’Italie. Le pape se vit dépouillé de son pouvoir temporel ; et, dans ce pays où l’influence de l’Église catholique était et est encore très forte, il ne trouva guère de défenseurs.

1 Promenades dans Rome, t.1, Paris 1829, p. 7.

(Pages 4 et 5)

A l’heure actuelle, le pape et l’épiscopat catholique, qui répandent parmi leurs ouailles des notions fausses sur le communisme, voudraient les persuader que seule la stricte observation des préceptes du catholicisme peut conduire l’humanité à une société meilleure. Or, le pape et ses évêques avaient une magnifique occasion de faire éclater la supériorité de la voie où ils voudraient que s’engagent les hommes. Pendant onze siècles, ils ont gouverné tout un Etat ! Mais ils n’y ont pas fait régner, tant s’en faut, une vie de bonheur et d’équité pour les masses populaires.

La superficie de la Cité du Vatican est aujourd’hui de 108,7 acres (sans compter 13 édifices à Rome hors de l’enceinte du Vatican). Sa population est d’un millier de personnes, dont 700 sujets du Saint-Siège. Le Vatican possède une ligne de chemin de fer de quelques centaines de mètres, rattachée au réseau ferroviaire italien ; une centrale électrique, une station de radiodiffusion, une monnaie, des timbres - Poste, une école primaire et même une prison. Cet Etat gouverné par le vicaire du Christ, et qui compte à peine mille habitants, ne peut se passer d’une prison !

En tant que monarque temporel, le pape dispose d’une armée (100 gardes-suisses) et d’une gendarmerie de cent hommes environ. Les gardes-nobles (100 hommes, choisis parmi l’aristocratie romaine) et la garde palatine (500 bourgeois de Rome) sont des formations non permanentes créées pour les cérémonies solennelles du Saint-Siège.

Le Vatican est une monarchie absolue. En vertu de la loi fondamentale promulguée en 1929, le pape exerce la plénitude du pouvoir législatif, exécutif et judiciaire. Un gouverneur assume en son nom les fonctions administratives. Il existe une commission pontificale pour l’expédition des affaires de l’Etat, composée de deux cardinaux, d’un évêque-secrétaire et d’un conseiller général.

(page 6)

Autrefois, le pape était choisi parmi la grande aristocratie féodale, italienne le plus souvent. C’était au moyen âge un des signes du caractère foncièrement féodal de l’Eglise catholique et de sa hiérarchie.

Plus tard, on vit sur le trône pontifical des représentants des banques et de l’industrie. Cela traduisait la métamorphose de l’Eglise catholique qui, dans les pays capitalistes industriellement évolués, se mettait idéologiquement, politiquement et moralement au service de la bourgeoisie.

Ainsi, de 1914 à 1922, le titulaire du Saint-Siège fut Benoît XV (marquis Giacomo della Chiesa), membre d’une grande famille gênoise apparentée à la haute finance italienne. Son successeur, de 1922 à 1939, fut Pie Xl (Achille Ratti), issu de la grande bourgeoisie lombarde. C’est à lui que l’on doit la phrase fameuse, prononcée au lendemain de la signature du Traité de Latran : « Si c’était nécessaire pour le salut des âmes, je m’entendrais volontiers avec le Diable … (1) »

A Pie Xl succéda, de 1939 à 1958, Pie XII (Eugenio Pacelli), rejeton d’une dynastie de richissimes banquiers. Cette famille a des attaches étroites avec la haute finance italienne et internationale. En 1911, le prince Volkonski, représentant du gouvernement du tsar auprès du Saint-Siège, mandait à Pétersbourg que le Vatican et, plus particulièrement, la famille Pacelli avaient des intérêts dans la guerre qui venait d’éclater entre l’Italie et la Turquie. « La guerre déclenchée à l’occasion de Tripoli entre l’Italie et la Turquie, écrivait-il, ne peut manquer d’intéresser le Vatican … L’opinion publique est unanime à reconnaître l’intérêt que porte le Saint-Siège à la nouvelle crise … Les relations bien connues entre le Vatican et le Banco di Roma pèsent plus que toute autre chose dans la balance.

1 Ch. Hugo Doyle : We have a pope. The life of pope Pius XII, New Jersey" 1942, p. ll. .

(page 7)

Il suffit de rappeler qu’à la tête de cet établissement se trouve M. Ernest Pacelli, représentant des milieux cléricaux romains, oncle d’une étoile montante de la diplomatie vaticane, monsignor Eugenio Pacelli (le futur Pie XII. M.C.). Le rôle considérable joué par cette banque dans le conflit actuel est tellement évident qu’il est même surestimé dans l’opinion romaine, où l’on va jusqu’à affirmer que la crise a été provoquée précisément par les activités de la Banco di Roma (1). »

A la différence des trois souverains pontifes précédemment nommés, l’actuel pape Jean XXIII (Angelo Giuseppe Roncalli), porté au pontificat en octobre 1958, est issu d’une famille paysanne. La propagande cléricale voudrait en profiter pour attirer à l’Eglise les sympathies des couches prolétariennes. Mais l’accession du nouveau pape n’a pas mué le Vatican en un rempart de la démocratie, il s’en faut de beaucoup. Comme sous les autres papes, le Saint-Siège demeure le défenseur du capitalisme. Il n’est que de se reporter, pour s’en convaincre, à la politique actuelle du Saint-Siège et aux propos du pape lui-même sur les questions majeures de l’actualité internationale.

Le Vatican et les princes de l’Eglise catholique (et pas seulement catholique !) sont indissolublement liés au monde de l’Industrie et de la haute finance. Cette liaison avait été signalée dès le début de ce siècle par un grand militant du mouvement socialiste français et international, Paul Lafargue. Voici un texte de lui datant de 1903 : « Les Morgan et les Rockefeller sont des bâtisseurs d’Eglises et d’Universités… et prêtres et professeurs se dévouent à complaire aux volontés des manieurs d’or … Les prêtres de toutes les Eglises sont

1 Les relations internationales à l’époque de l’impérialisme, 2e partie, Moscou 1938, pp.125-126.

( page 8)

agenouillés devant les grands capitalistes, ces dieux pour de vrai, qui leur donnent le manger, le coucher et le reste ! … »

Depuis l’époque où Lafargue écrivait ces lignes, les intérêts économiques et politiques du Vatican et des oligarchies ecclésiastiques se sont confondus plus étroitement encore avec ceux de la bourgeoisie.

Le Vatican et beaucoup d’organisations qui lui sont affiliées possèdent d’énormes capitaux. Le détail de ces affaires financières est tenu strictement secret, et il est rare que quelque chose en filtre dans la presse. C’est pourquoi, il est impossible de recenser complètement les richesses du Vatican, d’analyser la totalité de ses liaisons avec la banque et l’industrie. Qu’il nous suffise de reproduire quelques données publiées à ce jour.

Le Vatican possède des actions pour une somme de 12 milliards de dollars (2).

Il faudrait des pages rien que pour dresser la liste des banques et compagnies d’assurances, des trusts et sociétés anonymes où le Vatican a des intérêts. « A travers 40 banques centrales, une centaine de banques publicitaires, le Vatican tient plus de 400 milliards sur les 600 milliards de l’épargne italienne (3) ».

L’ Osservatore Romano, organe du Vatican, publie des annonces publicitaires, le plus souvent pour le compte de produits pharmaceutiques, considérant sans doute qu’il sied à un journal ecclésiastique d’imiter la publicité du reste de la presse. Toutefois, des exceptions sont tolérées en faveur de certaines banques et sociétés anonymes dont les attaches avec le Saint-Siège sont particulièrement étroites. Ainsi, en page 2, à côté de textes éminemment édifiants, l’Osservatore Romano

1. Lafargue : Les trusts américains, Paris 1903, pp. 12-13

2. G. Heyden, H. Ullrich : Im Namen Gottes, Berlin 1959, p. 139

3. Roger Garaudy : L’ Eglise, le communisme et les chrétiens, Paris 1949, p. 156

(page 9)

insère la publicité de la Banco di Roma qui, lisons-nous, possède un capital de 12 milliards et demi de lires et compte 200 succursales en Italie et à l’étranger. Dans le même journal, nous trouvons la réclame de la Banco Commerciale Italiana, de la Banco Ambrosiano et autres établissements, également liés au Saint-Siège.

D’après le publiciste allemand G. Baumann, le Vatican est une grande puissance financière à l’échelle mondiale , et pas seulement italienne. Il est allié à la haute finance d’Italie, de France, de Belgique, du Luxembourg, de Suisse et d’Amérique du Sud. Le Vatican et, plus généralement, l’Eglise catholique possèdent des capitaux et des investissements énormes en Espagne, au Mexique, en Afrique, en Extrême-Orient, aux États ­ Unis. Le Vatican est l’associé de la maison Rothschild et de la dynastie américaine des Morgan.

L’oligarchie suprême de l’Eglise catholique, écrit P. Togliatti, « est devenue je ne dirais pas un appendice, mais une partie intégrante du grand capital. Cela est particulièrement vrai pour notre pays, où. nous apprenons chaque jour que le Vatican a acheté des actions tantôt d’une société, tantôt d’une autres ».

Comme l’indique R. Garaudy, le Vatican a investi des centaines de millions de francs en France, 35 milliards de francs aux États-Unis, et 60 milliards dans plusieurs autres pays. Il n’est pas jusqu’aux maisons de jeu de Monte-Carlo, de Vichy ou de Biarritz qui ne rapportent au Vatican, actionnaire de ces établissements. Encore tout cela ne donne-t-il qu’une idée approximative des richesses du Vatican, un des rares États au monde à ne pas publier son budget.

1 Osservatore Romano n°s 1, 2, 5, 7-8, 17, 19,25, 31 XII 1959 ; 1, 5-6, 7, 9, 14 16, 21 VI 1961, etc.
2 Voir G. Baumann : Atlantikpakt der Konzerne. Berlin 1952, S.97 .
3 Pour une paix ’ durable, pour une démocratie populaire, 15-I-1948.
4.Roger Garaudy : L’Eglise, le communisme et les chrétiens, p.159.

(page 10)

Il convient d’ajouter que diverses organisations affiliées au Vatican, comme par exemple l’ordre des jésuites, ainsi que les Eglises catholiques de différents pays (surtout aux Etats-Unis, en Espagne et dans les pays d’Amérique latine) sont également de grands propriétaires. Depuis le moyen âge, l’Eglise conserve de vastes domaines : 560.000 hectares en Italie, 100.000 en Grande-Bretagne, 540.000 en France, 670.000 en Amérique latine, 250.000 en Allemagne occidentale, 1.150.000 aux Etats-Unis !. En Espagne et au Portugal, les domaines de l’Eglise catholique sont immenses (2).

Mais à notre époque, c’est la possession de capitaux plutôt que de terres, la participation à l’entreprise capitaliste qui caractérise l’Eglise catholique et ses organisations.

Le fait que le Vatican et les congrégations aient d’innombrables attaches avec la haute finance internationale et soient intéressés à l’exploitation des travailleurs explique dans une grande mesure que les princes de l’Eglise se fassent les défenseurs du capitalisme et les adversaires des luttes libératrices de la classe ouvrière et des peuples coloniaux ; cela explique leur haine aveugle du communisme et des pays socialistes.

De temps à autre, l’opinion publique est informée de telle ou telle spéculation financière des hommes du Vatican. En 1948, à Rome fut éventé un grand scandale de trafic de devises, se chiffrant par plusieurs milliards de lires, où étaient compromis deux prélats du Vatican, Cippico et Guidetti. En 1958, nouveau scandale : la


1 K. A. Mollnau : Aus dem Schuldbuch des politischen Katholizismus, S. 66.

2 G. Heyden, H. Ulrich : lm Namen Gottes, S. 138. D’après cet ouvrage, les domaines de l’Eglise dans ces deux pays atteignaient 6 millions d’hectares.

(page 11)

fameuse affaire Giovanni Giuffre, l’escroc qui avait derrière lui l’Eglise catholique.

Dans d’innombrables bulles et encycliques, les papes prêchent la pauvreté, la résignation et, réprouvent la lutte révolutionnaire des masses contre l’ exploitation et la misère, corollaires du capitalisme. Les hommes du Vatican, qui vivent dans l’opulence et bénissent le parasitisme de la bourgeoisie, voudraient persuader les travailleurs que Dieu aime les pauvres et les opprimés, que les victimes du chômage et de la misère bénéficieront en revanche de tous les bienfaits d’un « monde meilleur ». Mais pour eux-mêmes, les apôtres de la misère préfèrent les biens d’ici-bas.

Le souverain du Vatican est le pape de Rome, chef de l’Eglise catholique. Il est élu à vie par le conclave, assemblée des cardinaux, à la majorité des deux tiers plus une voix. Les cardinaux viennent immédiatement après le pape dans la hiérarchie vaticane.

Le conclave se tient dans un local isolé du monde extérieur ce qui est censé rendre impossible toute pression de tel ou tel gouvernement sur les cardinaux. En réalité, l’élection du pape donne lieu chaque fois à d’orageuses luttes politiques. Les gouvernements des grandes puissances, même à prédominance non catholique, s’efforcent de faire accéder au Saint-Siège un candidat à leur dévotion.

Au moyen âge, le trône apostolique s’ acquérait par corruption des cardinaux. Référons-nous à Stefano Infessura qui fut, vers la fin du XVe siècle, secrétaire du Sénat romain et qui était fort au courant de ce qui se passait au Saint-Siège. Il évoque dans les termes que

1 La somme des traitements du personnel du Vatican se monte à 4,3 milliards de lires par an. Ces employés sont rémunérés beaucoup mieux que les fonctionnaires italiens. (Voire Times du 20-VII-1959 et Neue Züricher Zeitung du 11-X-1959.)

voici le conclave de 1492 à l’issue duquel un Borgia fut élu pape : « En l’an de grâce 1492, au matin du 11 août, qui était un samedi, fut élu pape Roderigo Borgia, un Espagnol, parent du pape Calixte et vice-chancelier ; il prit le nom d’Alexandre VI. Sitôt devenu pape, il distribua ses biens aux pauvres. Ainsi, il fit don de son palais au cardinal Orsini. Il offrit au même le château de Monicello et Soriano. Puis il nomma le cardinal Ascanio vice-chancelier de la sainte Eglise romaine. Au cardinal Colonna, il donna l’abbaye de Saint-Benoît avec toutes ses dépendances, et à sa famille le patronat perpétuel de l’abbaye. Au cardinal Sant Angelo il donna l’évêché de Porto avec le palais et tous les biens qui s’y trouvaient, notamment un cellier plein. Puis il fit du cardinal de Parme le souverain et protecteur de la ville de Nepi. Au cardinal de Gênes, il donna l’église Santa-Maria sur la Via Lata. Au cardinal Savelli, il offrit Civita a Castellana et l’église Santa-Maria Maggiore. Aux autres cardinaux il distribua plusieurs milliers de ducats …

Cinq cardinaux seulement ne reçurent rien : les cardinaux de Naples, de Sienne, du Portugal, de San-Pietro ln Vincoli et de Santa-Maria in Portico. Eux seuls refusèrent d’accepter quoi que ce fût en déclarant que, lors de l’élection du pape, les suffrages devaient s’exprimer sans aucune rétribution, et non contre des cadeaux. On dit aussi qu’au moment de se rendre au conclave, le vice-chancelier (c’est-à-dire Borgia. M.C.), afin d’obtenir les voix du sus dit Ascanio et de ses féaux, envoya au palais de ce dernier quatre mules chargées d’argent, sous prétexte que, pendant qu’il siégerait au conclave, cet argent y serait plus en sûreté que chez lui. Mais, dit-on, c’était un cadeau à Ascanio pour obtenir son suffrage. Et il avait beaucoup promis aux citadins de Rome .. .(1) »

1 Diario della citta di Roma di Stefano Infessura scribasenato, Roma 1890, pp. 281-282

C’est ainsi qu’Alexandre VI, un des hommes les plus dépravés qui aient jamais occupé le trône apostolique, se ménagea le soutien du conclave à coups de promesses et de cadeaux aux « pauvres » cardinaux. Encore un exemple entre cent autres.

Au début du XVIe siècle, l’empereur d’Allemagne, Maximilien, profitant d’une maladie du pape Jules II, résolut d’accéder au trône pontifical. En septembre 1511, il écrivait à sa fille : « J’endoctrine déjà le collège des cardinaux, et je serai victorieux si je peux disposer de 200.000 à 300.000 ducats ». La lettre se termine ainsi : « Ecrit de la main de ton père aimé, futur pape ». L’empereur croyait pouvoir obtenir cet argent du plus grand banquier de l’époque, Fugger. Mais il n’y parvint pas 1.

La corruption du conclave a été pratiquée à des époques plus récentes. Après la mort de Léon XII, en 1829, le gouvernement français avait l’intention d’envoyer à Rome un émissaire, nanti d’un million de francs, pour soudoyer les cardinaux et faire élire un personnage dévoué au roi de France. A la suite de diverses intrigues, l’affaire échoua (2).

L’histoire des conclaves tenus depuis quelque cinquante ans montre quelles pressions subissent les cardinaux. Aux premiers tours de scrutin du conclave réuni en 1903 pour désigner le successeur de Léon XIII, la majorité était allée au cardinal Rampolla. Il avait notamment pour lui les suffrages des cardinaux français. Mais Rampolla était l’homme de la France, ce qui le rendait

1 Cité dans S. Lozinski : Le pape de Rome, spéculateur, Editions "Atéïst", pp.39-40. Voir également Gôtz Freiherrs von Pölnitz : Jakob Fugger, Tubingen 1949, S. 266-271.

2 Dans son livre Stendhal et son temps (Moscou, 1938, p.161) l’écrivain soviétique A. Vinogradov, biographe de Stendhal,rapporte que le gouvernement français avait chargé Henri Beyle de se rendre à Rome porteur d’un million de francs, pour corrompre le conclave. Mais l’ambassadeur de France à Rome, Chateaubriand, qui haïssait Stendhal, fit avorter l’entreprise.

(page 14)

indésirable aux gouvernements d’Allemagne et d’Autriche-Hongrie. Avant le troisième tour, le cardinal de Cracovie annonça que l’empereur d’Autriche faisait opposition à la candidature de Rampolla. Il n’en fallut pas davantage pour que celui-ci fût éliminé.

En 1939, quand le Sacré-Collège eut à pourvoir le Saint-Siège après la mort de Pie XI, le gouvernement de l’ Allemagne nazie usa de tous ses moyens de pression sur les cardinaux pour faire élire le candidat de son choix. Le conclave désigna alors le cardinal Pacelli (Pie XII), qui, durant de longues années, avait été étroitement lié à des milieux influents en Allemagne pendant sa nonciature, de 1917 à 1929.

(Avec Hitler, et plus tard Pinochet (Chili) et Videla (Argentine). On les retrouve toujours omniprésents auprès des tyrans nazis, fascistes et d’ extrême-droite).

En, octobre 1958, alors que le conclave siégeait pour donner un successeur à Pie XII, on vit arriver à Rome les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, de la France et de la République fédérale allemande, ainsi que des hommes d’Etat de nombreux autres pays. Et la presse n’a pas manqué de signaler que la candidature du nouveau souverain pontife figurait en bonne place dans l’agenda de leurs pourparlers.

Cela pour dire que la thèse accréditée par l’oligarchie catholique et selon laquelle l’élection du pape serait un acte accompli par les cardinaux avec le concours de l’inspiration divine n’a rigoureusement rien de commun avec la réalité.

En 1586, le pape Sixte-Quint fixa à 70 le nombre des cardinaux du Sacré-Collège. Son décret resta en vigueur jusqu’en décembre 1958, quand Jean XXIII porta ce nombre à 75, pour l’élever à 79 en 1959 et à 85 en mars 1960.

Pour la première fois dans l’histoire de la papauté, on vit au nombre des cardinaux, en 1946, un Chinois (de Tchang Kaï-chek), en 1953 un Indien, en 1959 un Mexicain, en 1960 un Japonais, un Philippin et un Noir (du Tanganyika). Ces changements témoignent du regain (page 16) d’ activité politique du Vatican dans les pays d’ Asie et d’ Afrique.

Jusqu’en 1946, la majorité absolue du Sacré-Collège appartenait aux Italiens. Ce qui donnait des chances décisives aux candidats italiens au Saint-Siège. Après la deuxième guerre mondiale, en raison des visées « oecuméniques » du Vatican, le Sacré-Collège fut complété par des évêques de nombreux pays, et les Italiens y perdirent la majorité. En avril 1960, ils n’étaient plus que 33 sur un total de 85. Le nombre de cardinaux originaires d’ Amérique du Sud et des États-Unis s’est considérablement accru.

Chaque promotion d’un cardinal par le pape s’inscrit dans le cadre des desseins politiques du Vatican.

Un certain nombre de cardinaux résident en permanence à Rome et dirigent les administrations pontificales dont l’ensemble porte l’ appellation de Curie romaine. Les autres cardinaux appliquent, dans le pays où ils habitent, la politique vaticane (1).

Sont généralement élevés à la dignité cardinalice des prélats d’ âge vénérable, dans l’ espoir que leur prompt décès ouvrira au Sacré-Collège l’ accès de nouveaux prétendants. Sous le pontificat de Léon XIII (1878-1903), près de 150 cardinaux sont passés de vie à trépas. Depuis l’avènement de Pie XII (1939) jusqu’en 1957, il en est mort 60 (2).

Immédiatement après le pape, dans la hiérarchie vaticane, vient le cardinal secrétaire d’ État. Ses attributions sont celles généralement imparties dans les autres États, au premier ministre et au ministre des Affaires étrangères.

1 Pendant ces dernières dizaines d’années, une seule et unique fois un cardinal a résisté à l’ emprise politique du Vatican. C’est le cardinal de Tarragone (Espagne), Vidal-e-Barraquer, qui refusa de reconnaître Franco. Il mourut exilé en Suisse, en 1944.

2. Annuario Pontificio 1958, pp. 79-85.

(page 16)

La Curie romaine est composée de 12 congrégations -pratiquement des ministères- expédiant les affaires administratives du Saint-Siège, de trois tribunaux et de six chancelleries. Les congrégations sont présidées par les cardinaux qui sont leurs préfets. Le pape lui-même est préfet de trois congrégations : le Saint-Office (l’Inquisition), la congrégation du Consistoire et celle des Eglises orientales.

Les administrations vaticanes ne se bornent pas à expédier les affaires du culte. Leurs activités ont, en outre, un caractère politique nettement prononcé.

L’Inquisition en tant que tribunal spécial de l’ Eglise catholique, institué pour combattre les "hérésies" (entendez par là les soulèvements populaires, la pensée progressiste et scientifique et les adversaires de la papauté) date du XIIIe siècle. Jusqu’au premier tiers du XIXe siècle, les tribunaux de l’Inquisition envoyaient au bûcher les ennemis de l’ Eglise. Depuis sa création, l’ Inquisition a tué, brûlé, torturé des dizaines de milliers de gens (1) parmi lesquels de grands penseurs, des savants illustres, des combattants pour la cause des peuples. Actuellement, l’ Inquisition qui existe au Vatican sous l’ édifiante appellation de Congrégation du Saint-Office, n’ a plus le pouvoir de brûler vifs les adversaires de la papauté, au grand regret sans doute de nombreux princes de l’ Eglise. En 1895 encore, Léon XIII exaltait la "flamme purificatrice des bûchers" de l’Inquisition. Un historien français, P.-L. Couchoud, cite des propos récents de prélats catholiques prônant l’extermination pure et simple des "mécréants". L’État, affirmait un jésuite italien en 1927, doit avoir un tribunal compétent, ecclésiastique (page 17), qui puisse, aussitôt sa sentence prononcée, déférer le condamné à l’ autorité temporelle qui le châtiera, sans hésiter à appliquer la peine capitale (1)".

1. P.-L. Couchoud : Théophile, l’ étudiant de la religion.

2. A. Tondi : I Gesuiti, Firenze 1954, p. 77.

Alighiero Tondi, qui fut de 1943 à 1952 prêtre catholique et jésuite, et rompit ensuite avec l’ Eglise pour embrasser la cause démocratique, écrit : "Il est utile de rappeler que de nombreux jésuites, avec qui je me suis fréquemment entretenu de ces sujets dans mes années de quête religieuse, attribuent à l’ Eglise le droit imprescriptible de punir de mort les contempteurs de la foi. D’aucuns ajoutaient même : Si cela ne fait pas aujourd’ hui, c’est uniquement parce que la conjoncture politique ne s’y prête pas. Mais si c’ était possible, cela se ferait (2)".

A l’ époque actuelle, l’ Inquisition s’ attaque au mouvement progressiste par des procédés différant de ceux employés au moyen âge. Sous prétexte de veiller à la pureté du dogme catholique, elle persécute les croyants qui se joignent au mouvement démocratique. Sorte de police secrète de l’ Eglise, elle harcèle tout ce qui est susceptible de contrarier les visées des milieux ultra-réactionnaires qui font la pluie et le beau temps au Vatican. La papauté a confié au Saint-Office l’établissement des "index", listes d’ouvrages dont la lecture est interdite aux catholiques sous peine d’excommunication.

C’est depuis 1559 que le Vatican publie des index. Le plus récent date de 1948. Il proscrit plus de titres. C’est une liste des plus beaux sommets de la pensée humaine, des chercheurs, de philosophes et d’ écrivains dont l’humanité s’ enorgueillit à juste titre. Ainsi l’index de 1948 interdit la lecture d’ auteurs tels que Balzac, Beyle (Stendhal), Bodin, Giordano Bruno, Voltaire, Helvétius, Hobbes (page 18), Holbach, Hogo Grotius, Victor Hugo, Descartes d’ Alembert, Diderot, Dupuis, Zola, Cabanis, Kant, Cabet, Condorcet, Lamennais, La Metrie, La Fontaine, Locke, Mirabeau, Montaigne, Montesquieu, Morelli, Aulard, Pascal, Proudhon, Renan, Rousseau, Spinoza, Fontenelle.

1. P.-L. Couchoud : Théophile, l’ étudiant de la religion.

2. A. Tondi : I Gesuiti, Firenze 1954, p. 77.

L’index est continuellement remis à jour. En octobre 1948, on y ajoute les oeuvres de Sartre (1) ; en 1952, c’ est le tour de l’ Italien Alberto Moravia.

Il n’ est pas rare de voir mis à l’ index des ouvrages d’ auteurs catholiques, ainsi que des périodiques publiés par des catholiques pour peu qu’ils expriment des vues -politiques le plus souvent- ne coïncidant pas avec la ligne vaticane. Ainsi, en 1955, deux revues hongroises ont été mises à l’index pour avoir exposé impartialement la situation de l’ Eglise en Hongrie et affirmé que, sur bien des points, les catholiques sont d’ accord avec les communistes. En janvier 1955, la Congrégation du Saint-Office a condamné et frappé d’interdit La Quinzaine, revue catholique française paraissant depuis 1950, pour avoir, à l’ encontre des consignes du Vatican, préconisé l’ unité d’ action des communistes et des catholiques, et la participation des catholiques au Mouvement de la Paix, et pour avoir condamné la guerre d’Indochine et le réarmement allemand. La rédaction se soumit et la revue cessa de paraître. Le 4 juin 1958, l’ Inquisition a condamné quatre ouvrages de l’ écrivain catholique français Henri Duméry (2).

Nous n’ avons cité là que quelques-unes des publications frappées d’ anathème par l’ Inquisition au cours des dernières années.

C’est l’ Inquisition -congrégation qui a le pape pour préfet, on s’ en souvient- qui a publié en juillet 1949 un décret frappant d’ excommunication les membres du (page 19) Parti communiste, les sympathisants de ce parti et tous les lecteurs de journaux communistes. Motivant sa décision, le Saint-Office affirma avoir agi pour "la sauvegarde de la foi et des moeurs (1) ".

1. Actes de S. S. Pie XII, Vol. I, Paris 1949, p. 58

2. Britannica book of the year 1959, London, p. 431.

Commentant le décret inquisitorial dans son discours de Grenoble, le 17 juillet 1949, Maurice Thorez, secrétaire général du Parti communiste français, a déclaré : Cette intervention dans les affaires intérieures des nations n’est pas un signe de force, mais de faiblesse. "Nous poursuivrons notre politique d’ union, nous persévérerons dans notre politique de la main tendue aux catholiques. Nous sommes sûrs que les mains qui se sont scellées dans les batailles de la Libération ne se désuniront pas (2)".

Le décret pontifical, réprouvé par les progressistes de tous les pays, ne rencontra guère d’ appui auprès des travailleurs catholiques eux-mêmes. Néanmoins, sous le successeurs de Pie XII, Jean XXIII, le Saint-Office promulgua un nouveau décret interdisant aux catholiques, sous peine d’ excommunication, de soutenir non seulement le Parti communiste, mais les organisations chrétiennes au cas où elles feraient cause commune avec lui. L’ Observatore Romano a précisé que cet acte du Vatican a une portée plus que locale et vaut pour tous les pays et tous les mouvements (3).

Le Vatican met tout en oeuvre en vue de briser l’ unité des travailleurs, d’ empêcher l’ alliance des catholiques et des communistes dans la lutte pour la paix, pour les intérêts vitaux des masses laborieuses.

Non moins politique est l’ activité d’une autre congrégation vaticane, celle des Eglises orientales dont le pape en personne est, encore une fois, le préfet.

Elle fut fondée en 1917, l’ année même de la Grande (page 20) Révolution d’ Octobre.

1. La Pensée n°28, janvier-février, p. 41

2. L’ Humanité, 18-VII-1949.

3. La documentation catholique, Paris 10-V-1959, p. 591.

Son influence s’ étend aux fidèles du rite oriental et gouverne les églises du Proche et du Moyen-Orient d’ obédience vaticane. Dès sa naissance, elle a été un foyer d’ intrigues contre l’ Union soviétique.

Dans une harangue qu’ il fit en mars 1952 à l’ Université catholique de Louvain (Belgique), le cardinal Tisserant, alors secrétaire de cette congrégation, a révélé ce qu’ était son activité (1). Il ressort de son discours que, dès les premières années qui suivirent la Révolution d’ Octobre, la Congrégation orientale a rassemblé les immigrés russes gardes-blancs pour en faire les instruments des desseins antisoviétiques du Saint-Siège.

Après la deuxième guerre mondiale, la congrégation étendit le champ de ses activités. Sous couleur d’ aide aux "réfugiés", elle organisa les originaires des pays d’ Europe orientale qui, ayant collaboré avec les nazis pendant la guerre, avaient dû ensuite déguerpir. Les prélats du Vatican recrutent des gardes-blancs russes, des nationalistes bourgeois ukrainiens, des fascistes et des traitres de toutes nationalités, ils en font leurs agents qui, sous l’ habit ecclésiastique, prennent part à la lutte contre les peuples qui ont secoué impérialiste et bâtissent leur vie dans la liberté.

Parmi les centres où sont formés les agents du Vatican, il faut citer le "Russicum" (Collège pontifical russe), fondé en 1929 sur l’ ordre de Pie XI pour la préparation de propagandistes et de conspirateurs antisoviétiques sous l’ auspice de l’ ordre des jésuites, et dont les premiers pupilles furent des aristocrates russes émigrés. Battus au cours de la guerre civile, ils avaient fui la Russie soviétique pour continuer le combat contre le pouvoir des Soviets avec l’ aide de leurs protecteurs étrangers. D’ aucuns, convertis au catholicisme, avaient (page 21) trouvé asile au Vatican.

1. Revue d’ histoire ecclésiastique, vol.XL.VII, 1952, n° 3-4, pp. 616-618

C’est avec leur concours que fut fondée l’ organisation antisoviétique "Russicum", sous le haut patronage de la Compagnie de Jésus. L’ Observatore Romano, dans un article consacré au vingt-cinquième anniversaire du "Russicum", cite tout un groupe d’ aristocrates russes émigrés, les princes Golitsyne, Gagarine, Volkonski, Chouvalov et d’ autres qui sont passés au catholicisme et aident le Vatican dans ses vieux projets de conversion des orthodoxes et aussi dans ses intrigues antisoviétiques (1). La moitié des agents formés en vingt-cinq ans par le "Russicum" travaillent pour le compte des jésuites. Le jésuite Wetter, alors directeur de cet établissement, déclarait en décembre 1949 dans un interview à un journal monarchiste italien que les élèves de son établissement "religieux" apprennent entre autres choses la boxe, le parachutisme et autres disciplines qui peuvent leur être d’un grand secours dans leurs activités de "missionnaires" en Russie (2).

Les activités de la Congrégation de la Propagande s’ étendent principalement aux pays coloniaux et dépendants. Elle dispose d’ un énorme personnel de prédicateurs, de missionnaires, de journalistes, et contrôle des maisons d’ éditions, des journaux et des revues. S’ appuyant sur le formidable appareil de l’Eglise et sur ses organisations affiliées, utilisant la presse, la radio, le cinéma, la télévision, le Vatican répand dans les masses ses idées réactionnaires, attisant la haine envers les pays socialistes, envers le communisme et la démocratie.

La Congrégations des affaires extraordinaires de l’ Eglise, l’une des plus importantes, a la haute main sur les questions de la politique internationale du Saint-Siège, de la diplomatie vaticane, des concordats. Depuis 1930, il existe auprès de cette congrégation une "commission (page 22) russe" permanente fondée par le pape Pie XI (1). On lit dans les documents officiels du Vatican que la juridiction de cette commission s’étend à l’inexistant "diocèse de Vladivostok" et au mythique "vicariat de Sibérie" (2). Voilà qui témoigne assez des visées du Saint-Siège à l’ égard de l’ Union Soviétique.

1. Osservatore Romano, 28-XI-1954.

2. L’ Humanité du 7-III-1949.

Comme l’ on pense, le Vatican possède des services secrets. L’ évêque américain Ryan, recensant en mai 1940, dans le New York Times, les avantages que le gouvernement des États-Unis pourrait retirer de l’ établissement de relations diplomatiques avec le Vatican, écrivait que celui-ci a à son service des milliers de personnalités officielles ou non et des diplomates bien instruits qui collectent sans cesse des renseignements concernant l’ opinion publique, chacun travaillant dans son secteur particulier. Et l’ évêque de citer avec satisfaction un journal de Washington affirmait que "l’ espionnage du Vatican est le plus efficace du monde. Il a pour agents les représentants du clergé catholique qui ont des contacts dans toutes les couches sociales (3)". Les services de renseignements du Vatican prennent appui sur l’ Eglise catholique et ses organisations.

Plus de 40 États entretiennent des relations diplomatiques avec le Vatican et sont représentés auprès de lui par des ambassadeurs. De son côté, le Saint-Siège a des représentants officiels -nonces (ambassadeurs), internonces (ministres) et légats (envoyés du pape non revêtus de fonction diplomatiques- dans plus de 50 États (4). Le Vatican est en relations diplomatiques non seulement avec les pays à populations (page 23) essentiellement catholiques (Espagne, Portugal, Irlande, Italie, États d’ Amérique latine, etc…), mais aussi avec des États où la population catholique est presque nulle, comme l’ Iran, le Pakistan et quelques autres pays à prédominance musulmane, et aussi le Japon où 0,2% seulement des habitants sont catholiques et où la majorité de la population est "païenne" (shintoïste, bouddhiste).

1. Annuyario Pontificio 1958, p. 989.

2. Annuario Pontificio 1958, pp. 495 et 792.

3. NewYork Times, 12-V-1940.

4. "Conformément à l’ article 4 des réglementations de Vienne (1815), le nonce est doyen du corps diplomatique." Ernest Satow : Guide de pratique diplomatique, vol. I, London, New-York, Toronto 1922, p. 259.

Parmi les rares diplomates accrédités auprès du "gouvernement" de Tchang Kaï-chek dans l’ île de Taïwan, il y a le nonce du pape. Et un ambassadeur de Tchang Kaï-chek est accrédité auprès du Vatican. Il y a des légats du pape en Corée du Sud et dans le Sud-Vietnam.

Dans leurs interventions publiques, les prince de l’ Eglise catholique se réclament de buts exclusivement religieux et "sublimes". Mais quels motifs ont-ils pu pousser le Saint-Siège à entrer en relations diplomatiques avec Tchang Kaï-chek ?

Parmi les diplomates accrédités au Vatican, il en est de fantomatiques. Voilà quinze ans que la Pologne est une démocratie populaire ; le gouvernement de la République populaire de Pologne est le seul représentant authentique du peuple polonais. On sait également que la Lituanie est une république socialiste soviétique, partie intégrante de l’ U. R. S. S. Et pourtant, jusqu’ en décembre 1958, il y a eu au Vatican des "ambassades" des gouvernements bourgeois -depuis longtemps inexistants- de la Pologne et de la Lituanie.

Le seul changement introduit dans cet absurde état de choses par le pape Jean XXIII en décembre 1958, c’ est que les chefs de ces "ambassades" ont été ravalés au rang de "chargés d’ affaires". Selon toute apparence, le Vatican ne tient pas à rompre avec les différents groupuscules d’ émigrés qui poursuivent la lutte contre les pays socialistes. Il n’ est pas inutile de rappeler que longtemps après la victoire de la Révolution socialiste d’ Octobre, alors que les États capitalistes eux-mêmes (page 24) avaient été contraints de reconnaître l’ existence du pouvoir des Soviets, l’ "ambassadeur" du défunt gouvernement Kérenski se trouvait toujours au Vatican.

Si plus de 40 États ont des ambassadeurs au Vatican, ce n’ est nullement par respect pour la religion catholique, ni en général pour des considérations d’ ordre religieux, mais parce que le Vatican est pour eux un excellent "poste d’ observation". Sur ce terrain prétendument neutre (en vertu du traité de Latran, la "cité du Vatican sera toujours et en toutes circonstances considérée comme territoire neutre et inviolable"), les représentants des États capitalistes ont la possibilité de se rencontrer pour mener des tractations politiques, pour rassembler des informations. En 1914, dès qu’ éclata le premier conflit mondial, le gouvernement britannique, sans même prendre la peine de consulter le Parlement, dépêcha un ambassadeur au Vatican. Selon J. D. Gregory, secrétaire de la légation de Grande-Bretagne alors instituée auprès du Saint-Siège, le gouvernement britannique avait compris, en octobre 1914, que le Vatican était une des forces les plus puissantes "pour le bien comme pour le mal", et c’ était là la raison de l’ envoi d’ une légation. Le même auteur indique que le Vatican dispose des services de renseignements les plus efficaces d’ Europe. Il était mieux informé des causes et du déroulement de la guerre que n’ importe quel autre gouvernement. "On ne pouvait manquer de voir l’ ampleur du réseau international d’ organisations catholiques, surtout des ordres religieux, dont les comptes rendus, provenant des pays des deux camps, affluaient chaque jour au centre, c’ est-à-dire au Vatican (1).

Le diplomate britannique invoquait donc en faveur de l’ établissement des relations diplomatiques avec le (page 25) Vatican, au début de la première guerre mondiale, les mêmes motifs d’ espionnage qu’ allégua plus tard, en 1940, l’ évêque américain Ryan quand il appelait le gouvernement des États-Unis à entrer en relations diplomatiques avec le Saint-Siège. En 1939, dès qu’ éclata la deuxième guerre mondiale, le gouvernement de Washington envoya au Vatican un "représentant personnel du président" ayant rang d’ ambassadeur.

1. J. D. Gregory : On the edge of Diplomacy. London 1928, pp 87, 91.

Pour les diplomates des pays bourgeois, le Vatican est un terrain rêvé d’ intrigues politiques, d’ autant plus que l’on peut tout y couvrir de principes moraux, religieux, chrétiens, etc.

En règle générale, les diplomates du Vatican prennent appui sur les éléments ultraréactionnaires. Ils s’ ingèrent dans les affaires intérieures des pays où ils sont accrédités, font pression sur les évêques, sur les organisations catholiques, sur différentes personnalités catholiques. Qu’ on nous permette de citer un exemple se rapportant aux relations des relations franco-vaticanes. Au début de 1907, on apprit qu’un certain Montagnini, membre de la nonciature de Paris, avait trempé dans un complot contre la République et qu’il avait reçu mission du Vatican d’ aider à la victoire des royalistes et des cléricaux aux élections de 1906. Le 20 mars 1907, Georges Clémenceau, alors président du Conseil et ministre de l’ Intérieur, déclarait devant la Chambre : "Il y avait à Paris, rue de l’ Elysée, un prêtre italien qui était mêlé à toutes ces manœuvres de la politique cléricale en France, qui en était le chef, que les députés consultaient avant de venir à cette tribune, à qui l’ on demandait par exemple : "Je dois parler aujourd’hui. Que faut-il dire ?".

(page 26)

1. Auparavant, il y avait des relations diplomatiques entre les États-Unis et le Vatican de 1848 à 1868.

Nous avons la preuve que des ordres avaient été donnés à certains curés de Paris leur enjoignant de violer ouvertement les lois de la République française.

… Une instruction a été ouverte, et comme cette instruction conduisait nécessairement au domicile de M. Montagnini, nous n’ avons pas pensé que, parce qu’il était prêtre, il était au-dessus des lois de la République française (1)".

Ce genre d’ activités des diplomates apostoliques n’ est nullement l’ apanage du passé.

Après la deuxième guerre mondiale, les nonces, dans certains pays socialistes, se trouvèrent impliqués dans des complots des impérialistes étrangers et de la réaction intérieure. Ce fut le cas en Tchécoslovaquie, en Roumanie, en Chine.

En mars 1950, un certain De Livio, représentant de la nonciature de Prague, fut expulsé de Tchécoslovaquie pour avoir profité de ses fonctions diplomatiques à des fins hostiles à l’ État tchécoslovaque.

En 1946, le gouvernement roumain demanda le rappel du nonce de Bucarest, Cassulo, qui avait soutenu le régime fasciste en Roumanie. Son successeur, l’ évêque américain O’Hara, fit de la nonciature un foyer de conspirations contre le pouvoir populaire. En 1950, il dut quitter la Roumanie avec les autres chefs de la nonciature de Bucarest.

En septembre 1951 fut expulsé de Chine l’ émissaire du Saint-Siège Antonio Riberi, qui donnait asile à des espions étrangers et participait à la lutte contre le pouvoir populaire.

(page 27).

1. Annales de la Chambre des député. 9-ème législature. Débats parlementaires. Session ordinaire de 1907. Paris 1907, p. 888.

2 Ce Riberi fut peu après nommé internonce dans l’ île de Taïwan, auprès de Tchan Kaï-chek. En avril 1959, il fut décoré par le gouvernement de ce dernier, et reçut peu après un poste en Irlande.

Arthur Wynen, historien catholique de la diplomatie vaticane, signale qu’ en règle générale, les nonces étaient presque toujours des Italiens : sur 300 nonces écrit-il, on n’en a connu que trois non-Italiens(1). Il en fut ainsi jusqu’ à la deuxième guerre mondiale. Maintenant, la situation a quelque peu changé : les évêques américains sont nombreux dans la liste des nonces et légats.

Entre le Vatican et certains États sont conclus des traités appelés concordats, qui définissent le statut et privilèges de l’ Eglise catholique dans tel ou tel pays. Les concordats prévoient les allocations de l’ État à l’ Église et l’ enseignement religieux dans les écoles publiques ; ils garantissent les privilèges matériels de l’ Église (exemptions fiscales), reconnaissent les fêtes religieuses, le droit de l’ Eglise d’ intervenir dans les domaines des rapports familiaux (mariages religieux, interdiction du divorce, etc…) ; ils rattachent encore plus étroitement l’ Église et l’ État et légitiment l’ ingérence du Vatican dans les affaires intérieures des pays.

Un nombre relativement important de concordats ont été conclus par le Vatican dans la période de l’ entre-deux-guerres. Ayant répudié les libertés démocratiques, la bourgeoisie abdiquait aussi le principe de la laïcité, de la séparation de l’ Eglise et de l’ État. Elle s’ alliait à l’ Eglise, au Vatican, pour mieux utiliser la religion et ses organisations afin d’ endiguer la montée du mouvement révolutionnaire.

Parmi les concordats conclus après la première guerre mondiale, il faut citer celui de 1929, passé avec le gouvernement fasciste de Mussolini en Italie, et celui de 1933 avec le gouvernement hitlérien en Allemagne.

(page 28)

1. A. Wynen : Die päpstliche Diplomatie ; Freiburg 1922, S. 80.

Le concordat de 1929, conclu simultanément avec les accords de Latran, scellait l’ alliance de la papauté avec le fascisme, étrangleur du peuple italien. Il conférait à l’ Eglise des privilèges considérables en Italie ; l’ État prenait le catholicisme sous sa protection, les autorités s’ engageaient à aider le clergé. L’ Eglise bénéficiait de dégrèvements fiscaux et le clergé de prérogatives juridiques. Dans toutes les écoles l’ enseignement religieux devenait obligatoire, le mariage religieux était seul valable, les divorces ne pouvaient être prononcés que par les autorités ecclésiastiques.

De son côté, le clergé s’ engageait à prier, les dimanches et jours fériés, pour la prospérité de l’ État et du roi ; les évêques devaient prêter serment au chef de l’ État, vénérer le roi et le gouvernement, et combattre tout élément nuisible à l’ État. Dans les conditions de l’ époque, sous la terreur fasciste, cela signifiait que les évêques s’ engageaient à combattre toute tentative d’ ébranler la dictature mussolinienne.

Dans l’ idée du gouvernement fasciste italien, le concordat devait l’ affermir dans son pouvoir -surtout dans les campagnes- et rehausser son prestige auprès des paysans croyants.

Deux jours après la signature des accords de Latran, Pie XI déclara que Mussolini était "l’ envoyé de la Providence". En concluant cet accord avec Mussolini, l’ Eglise donnait sa bénédiction au régime fasciste, et cela aux yeux des catholique de l’ Italie et du monde entier.

La presse fasciste écrivit que le concordat apportait à Mussolini l’ appui direct ou indirect de centaines de milliers de prêtres, de moines, de nonnes, de missionnaires représentant le Vatican dans de nombreux pays du monde (1).

(page 29)

(avec Mussolini)

1. P. Schmid-Amman : Der Politische Katholizismus, Bern 1947, S. 38.

Le concordat de 1929, confirmé par la Constitution italienne de 1947, est encore en vigueur. Le concordat conclu le 20 juillet 1933 avec le gouvernement hitlérien marqua une nouvelle étape du resserrement de l’ alliance entre le Vatican et le camp du fascisme.

Comme toute la bourgeoisie réactionnaire, les princes de l’ Eglise voyaient dans l’ Allemagne nazie une force de choc contre le communisme et l’ U.R.S.S. C’ est pourquoi le Vatican accueillit avec joie l’offre l’offre de concordat qui lui était faite par Hitler. Celui-ci en confiant la négociation à von Papen, représentant des milieux catholiques de l’ aristocratie allemande. Papen, qui fut vice-chancelier du Reich hitlérien, relate dans ses Mémoires que Hitler, ayant hâte de conclure le concordat avec le pape, mena les pourparlers par des canaux autres que ceux de la diplomatie ordinaire. Il souhaitait un accord avec le Saint-Siège parce que cela lui donnerait d’importants appuis dans le pays. Mussolini aussi conseillait à Hitler de conclure un concordat, afin d’ accroître le crédit au gouvernement hitlérien à l’ étranger. 1. Pour les nazis, l’ alliance avec le pape était un moyen supplémentaire de renforcer leurs positions en Allemagne même auprès des autres puissances. Ajoutons que le concordat passé avec Hitler est resté en vigueur en Allemagne occidentale.

Plus récemment des concordats ont été conclus par le Vatican avec le gouvernement de Franco (août 1953) et avec la République Dominicaine (1954).

Le concordat espagnol légitime la répression de la liberté de conscience : la religion catholique est proclamée "unique religion de la nation espagnole". L’ État ne reconnaît que le mariagereligieux et accorde à l’ Eglise une compétence absolue en matière de divorce.

1. Franz von Papen : Memoirs, London 1952, pp. 280-281

(page 30)

L’ Eglise obtient des privilèges exceptionnels qui lui permettent de s’ingérer dans la vie sociale et privée. Le concordat place l’ école sous la protection de l’ Eglise, légitime la participation du clergé aux comités de censure littéraire, théâtrale, cinématographique (1). Le concordat avec l’ Espagne fut signé presque en même temps que le traité militaire entre l’ Espagne et les États-Unis (septembre 1953).

On voit que les plus importants concordats de ces dernières dizaines d’ années ont été conclus avec des régimes réactionnaires par excellence.

Comme tout État qui se respecte, le Vatican décerne des décorations. Qui donc donc les papes couvrent-ils d’ honneur ? La chose n’ est pas sans intérêt.

En 1900 éclata en Chine un soulèvement populaire contre les impérialistes qui pillaient le pays et tyrannisaient la population. Pour réprimer le mouvement insurrectionnel, les gouvernements de plusieurs pays européens et des États-Unis dépêchèrent en Chine une expédition punitive sous le commandement du feld-maréchal allemand Waldersee. La répression fut marquée d’ atrocités sans nom, de massacres de civils ; des agglomérations entières furent rasées, d’ inestimables monuments culturels détruits et pillés. Trois ans après cette campagne criminelle, le feld-maréchal Waldersee accompagne l’ empereur Guillaume II lors d’ une visite que celui-ci rendit au Vatican et fut reçu par le pape Léon XIII. Il rappelle dans ses mémoires (2) que le pape le remercia de son action en Chine et lui décerna un ordre apostolique.

A différentes époques, des décorations pontificales furent attribuées à Mussolini et à son ministre de Affaires (page 31) étrangères Ciano, ainsi qu’ au roi d’ Italie Umberto. En 1933, après la conclusion du concordat avec le gouvernement hitlérien, le pape décora von Papen. En 1936, ce fut le tour de Horthy, le chef des fascistes hongrois, et, en 1938, celui des banquiers américains Morgan et Lamont. En 1942, lorsque l’ Espagne aidait les puissances de l’ axe à faire la guerre aux peuples d’ Europe et du monde, Pie XII décora Serrano Sugner, ministre des Affaires étrangères du gouvernement franquiste.

1. Annuaire diplomatique 1953, Genève 194, pp. 215-216.

2. Alfred von Waldersee : Denkwûrdigkeiten, Band III. Berlin 1923, S. 211.

Après la deuxième guerre mondiale vinrent s’ ajouter à cette liste les noms de Dinkelbach, un des magnats de l’ industrie de guerre allemande, et de Randolph Hearts, le roi de la presse américaine. En décembre 1953, c’ est Franco qui reçut l’ Ordre du Christ, distinction suprême du Saint-Siège.

Les distinctions pontificales ne vont donc pas aux champions de lutte pour la paix, pour les intérêts des travailleurs, pour la liberté des peuples, mais aux leaders fascistes, aux politiciens réactionnaires, aux marchands de canons, à "’l’élite" du monde capitaliste.

État nain, le Vatican n’ en joue pas moins un rôle important dans la vie internationale parce qu’ il est le centre mondial de l’Eglise catholique, et que le pape de Rome est le souverain de cette Eglise.

Les capitalistes proclament volontiers leur respect pour les "valeurs impérissables" de la religion. Les politiciens et les généraux qui prêchent la guerre atomique se prétendent en même temps "les défenseurs de la civilisation chrétienne". Tout cela est hypocrisie pure : en réalité, les capitalistes ont de la religion une conception foncièrement utilitaire, en tant que moyen de renforcer leur domination et de combattre le mouvement de libération des peuples. Leur propagande s’ efforce d’ accréditer une notion fausse du communisme et de persuader les travailleurs de la supériorité du régime capitaliste. Entre autres moyens d’ actions idéologique figure le recours à la religion, qui explique l’ inégalité sociale par les lois divines éternelles etintangibles et promet aux travailleurs une récompense dans l’au-delà.

Que sont ces organisations et quelles idées inculquent-elles aux masses populaires ?

(page 33)

Chapitre II

L’EGLISE CATHOLIQUE ET SES ORGANISATIONS.

Les statistiques des pays capitalistes , et notamment celles émanant des milieux ecclésiastiques, ne sauraient fournir de données vraiment exactes sur la diffusion de la religion dans le monde. Elles ont coutume d’ exagérer le nombre des croyants et de minimiser celui des gens qui ont rompu avec la religion. Elles ne tiennent généralement pas ompte des changements survenus dans le domaine religieux au cours de ces dernières dizaines d’ années par suite de la prise de conscience des masses populaires, et aussi des succès prestigieux de la science. Or, la rupture avec la religion a pris une rupture considérable, principalement parmi les ouvriers d’ industrie. Selon le témoignage de représentants de l’ Eglise eux-mêmes, il existe en France, par exemple, des régions entières où des groupes importants de la population, surtout dans les villes, ont répudié la religion : dans de nombreuses paroisses les ouvriers ne constituent qu’ une infime partie du nombre des pratiquants. Des enquêtes effectuées en 1953-1954 dans différentes villes de France ont montré que, même le dimanche, seule une minorité de catholiques vont à l’ Eglise ; le jour de l’ enquête -un dimanche- 15% seulement des catholiques de Paris sont allés à la messe ; le pourcentage a été de 22% à Lyon, 15% à Toulouse, 26% à Nancy, 28% à Saint-Etienne, 15% à Reims, 14% à Grenoble, 13,1% à Marseille (1). (page 34)

1. Dokumente, Zeitschrift im Dienst Internationaler Zusammearbeit, Offenburg (Baden) 1954, n°5, S. 395-396.

"Les recherches de sociologie religieuse ont dégagé certaines constantes : le taux de pratique religieuse s’ établit dans les villes entre" 1 et 30% (1)".

Dans sa lettre pastorale, le cardinal-archevêque de Paris, Mgr Feltin, écrivait au début de 1954 : "… les données les plus récentes montrent que la rupture entre l’ Eglise et le monde ouvrier est plus profonde qu’ on ne l’ imaginait (2)". Et il a rappelé les paroles de Pie XI disant que "l’ Eglise a perdu la classe ouvrière".

En Grande-Bretagne, une commission de l’ Eglise anglicane, présidée par l’ évêque de Rochester, a avoué la rupture entre les travailleurs et l’ Eglise en termes presque identiques : "Il ne fait aucun doute qu’un large et profond fossé s’ est creusé entre l’ Eglise et le peuple (3).

En ce pays, 10 à 15% seulement des habitants restent en contact avec des églises chrétiennes ; 25 à 30%, ne fréquentent les églises que pour des services solennels, 45 à 0% témoignent envers la religion d’ une indifférence bienveillante, 10 à 20% lui sont hostiles (4). La chute d’ influence de l’ Eglise est également sensible en Italie, en Espagne et dans d’ autres pays. Dans de grandes villes italiennes comme Milan, Turin, Bologne, Gênes, Venise, 10% seulement des paroissiens pratiquent régulièrement, et 40% irrégulièrement. Cette perte de terrain est surtout visible parmi les ouvriers d’ industrie.

En Espagne, la presse catholique s’inquiète des défections ouvrières. Les mêmes préoccupations alarment les auteurs cléricaux dans la République fédérale allemande.

(page 35)

1. Le Monde, 3-V-1957.

2. Dokumente, 1954, n°2, S. 92

3. Christianity to-day, New York 1947, p. 140.

4. Ibid p. 141

Une véritable révolution idéologique s’ est produite dans les pays socialistes, où les idées du communisme scientifique, du marxisme-léninisme, s’ ancrent de plus en plus profondément dans l’ esprit des travailleurs. Eclairés par la lutte pour l’ édification du socialisme, beaucoup d’ entre-eux ont rompu et rompent avec la foi.

C’ est dire qu’il faut considérer avec la plus grande circonspection les statistiques relatives à la religion et d’ après lesquelles il y avait dans le monde, en 1959, un peu plus de 870 millions de chrétiens, dont 527 millions de catholiques romains (1). Selon les mêmes données, les catholiques se répartissent comme suit : 239 millions dans les pays d’ Europe, 229 millions en Amérique, 34 millions en Asie, 21 millions en Afrique et plus de 2 millions en Australie et Océanie (2).

En Europe, les catholiques sont surtout concentrés en Espagne, au Portugal, en Italie, en Irlande, en Autriche, en Allemagne occidentale. Dans les pays socialistes, ils sont relativement nombreux en Pologne, en Tchécoslovaquie et en Hongrie. En U.R.S.S., les catholiques se rencontrent principalement en Lituanie, dans les régions occidentales d’ Ukraine et de Biélorussie.

Au cours des cinquante dernières années, l’ influence du catholicisme s’ est notamment accrue aux États-Unis où les catholiques sont 37 ou 39 millions.

La grande majorité des catholiques est constituée par des petites gens, dont les intérêts se confondent avec ceux de tous les travailleurs, quelles que puissent être leurs opinions politiques et leurs convictions religieuses.

Diamétralement opposés, par contre, sont les intérêts de la hiérarchie ecclésiastique, étroitement liée aux (page 36) classes exploiteuses, qui se font, contre le gré des travailleurs catholiques, l’ alliée des capitalistes et des grands propriétaires fonciers.

1. Signalons au surplus que l’ Eglise catholique tient a priori pour catholique toute personne née dans une famille catholique, même si elle rompt avec l’ Eglise

2. The World Almanac 1961, New York World-Telegram, p. 712.

Par sa structure, l’ Eglise catholique est une monarchie strictement centralisée. Sou souverain, le pape de Rome, est vénéré en tant que vicaire de Dieu sur la terre. Au sein de l’ Eglise, il est revêtu de pouvoirs illimités. Sa juridiction s’ étend sur quelque quinze cents provinces de l’ Eglise (archidiocèses, diocèses, préfectures apostoliques, etc…) ayant à leur tête des "gouvernements ecclésiastiques" (archevêques, évêques, etc…). Ces derniers sont tous subordonnés au Vatican, doivent l’obéissance absolue au pape et sont choisis en fonction de leurs liens avec la haute bourgeoisie et l’ aristocratie terrienne.

La formation de nouveaux diocèses comme la promotion de l’ épiscopat sont liées aux objectifs de la politique vaticane. Le Vatican crée fréquemment des diocèses non pas là où les catholiques sont nombreux, mais dans les contrées qui, pour des considérations politiques, entrent dans la sphère des intérêts du Saint-Siège. Au cours de son pontificat, Pie XII a créé 200 évêchés et archevêchés, des centaines de vicariats, de préfectures, de missions. La plupart de ces bastions du Vatican son situés dans les pays d’ Asie et d’ Afrique. Ils y ont toujours été des appuis du colonialisme et le sont encore aujourd’ hui, et leur rapide prolifération après la deuxième guerre mondiale s’ explique par la volonté de renforcer et d’ élargir l’ appareil de la propagande ecclésiastique pour contrecarrer le mouvement de libération nationale des peuples coloniaux.

Le Saint-Siège montre le plus vif intérêt pour l’ Inde, l’ Indonésie, le Pakistan, les Philippines et d’ autres pays d’ Asie et d’ Afrique. En 1958, il y avait dans l’ Inde plus de 60diocèses catholiques, dont 16 créés après 1949. Après la deuxième guerre mondiale, le Vatican a (page 37) remanié ses organisations en Chine. De 1946 à 1949, il a créé dans ce pays 4 nouveaux archidiocèses. En avril 1946, il y a élevé au rang d’ archidiocèses et diocèses plus de 100 vicariats apostoliques et préfectures. En 1950, le Vatican possédait en Chine près de 120 archidiocèses et diocèses, sans compter divers établissements et organisations. Nous verrons plus loin que les hommes du Vatican se sont révélés les ennemis du mouvement de libération du peuple chinois.

Vers la fin de la deuxième guerre mondiale, il n’y avait dans l’ île de Taïwan (Formose) qu’ un très petit nombre de prêtres catholiques. Mais au cours des dernières années, le Saint-Siège a créé dans l’ île, avec le complaisant appui de Tchang Kaï-chek, un archidiocèse et quatre préfectures apostoliques. En 1950, on y comptait une quarantaine de prêtres catholiques. Ils étaient près de 300 en 1955 (1). En 1958, ce chiffre atteignit 500, sans compter les moines catholiques et les missions religieuses. Le pape Jean XXIII, inquiet de la rupture des catholiques chinois avec le Saint-Siège, a fait de l’ île un point d’ appui de son activité en Extrême-Orient et, au début de 1960, y a nommé un administrateur apostolique, le cardinal Tien. En 1961, trois nouveaux diocèses ont été créés dans l’ île de Taïwan. Selon le magazine américain Time (12-IX-60), le Vatican y a créé une université catholique (elle comptera 12.000 étudiants en 1965). Les capitalistes américains s’ y intéressent au point que le cardinal de Boston, Cushing, a versé 900.000 dollars pour son organisation, alors que l’ apport du Vatican n’a été que de 100.000 dollars.

Les agents du Vatican affluèrent en Corée en même temps que les forces d’ invasion. En 1950, on institua en Corée du Sud une abbaye, trois vicariats et une préfecture.

(page 38).

1. Voir Directory of Taïwan, Taïpeï, 1955, p. 54 et Die Enheit, Berlin 1959, n°6, S. 782.

Une étude attentive montre que l’ expansion du Vatican coïncide géographiquement avec celle de l’ impérialisme.

Les évêques sont les capitaines d’ une armée de prêtres dont l’ effectif mondial se monte, dit-on, à 400.000 hommes. En Italie, par exemple, il y a près de 26.000 paroisses, avec 70.000 prêtres. En Espagne, les prêtres catholiques sont environ 50.000 ; en comptant les moines et les religieux, l’ armée ecclésiastique dans ce pays se monte à 200.000 personnes. Aux États-Unis, où le catholicisme n’ est pas la religion prédominante, on dénombre 17.000 paroisses catholiques avec 3.000 prêtres, sur un total de 220.000 "soldats du Christ".

Sans doute aurait-on tort de croire que tous les serviteurs du culte catholique (comme des autres cultes, d’ ailleurs) sont des défenseurs convaincus du capitalisme. Mais la structure de l’ Eglise est telle que tout ecclésiastique qui voudrait s’ opposer à l’ épiscopat dans les grandes questions de l’ actualité s’ exposerait aux sanctions des autorités religieuses. D’ autant plus que les prêtres catholiques ne dépendent pas de leurs paroissiens mais des évêques et des riches fidèles. Souvent aidés en cela par l’ État capitaliste, les évêques et le Vatican châtient durement les prêtres qui nourrissent des sympathies envers l’ action révolutionnaire des travailleurs pour une vie meilleure, pour la paix entre les peuples. Rappelons, par exemple, que le prêtre italien Gaggero fut cassé de son ministère en raison de sa participation active à la lutte pour la paix. Les multiples ordres religieux sont, eux aussi, les instruments du Saint-Siège. Obéissant à leurs généraux, indépendants du clergé local et souvent même des évêques, les ordres monacaux (masculins et féminins) sont des organisations spécialisées, dont le Vatican se sert pour appliquer sa politique et répandre l’ influence de l’ Eglise parmi les couches de la population. A côté des ordres liés à l’ aristocratie et (page 39) la haute bourgeoisie, il en est de spécialement créés pour agir auprès des pauvres, des ouvriers, des minorités nationales, et dans les pays coloniaux.

Depuis le moyen âge, il existe des ordres mineurs ou mendiants (franciscains, dominicains, carmes, etc…) dont la tâche première est de persuader les déshérités que la vraie béatitude est dans la misère.

Le plus influent des ordres, et en même temps le plus hostile à la lutte libératrice des travailleurs et au socialisme scientifique, est celui des jésuites. Fondé au milieu du XVIe siècle pour combattre la Réforme et appuyer les aspirations théocratiques du Saint-Siège, il n’ a jamais cessé d’ être un pilier de la réaction pour parvenir à ses fins. Tel est-il encore aujourd’hui. En 1958, il comptait près de 35.000 membres. Son organisation (province) la plus importante se trouve aux États-Unis, où elle totalise environ 8.000 membres.

Le Vatican est fortement influencé par la Compagnie de Jésus. C’ est elle qui détient les postes clés dans les organisations du Saint-Siège, surtout dans sa diplomatie, dans la Congrégation de la propagande et dans les services secrets. Il est utile de signaler que les plus proches collaborateurs de Pie XII furent trois jésuites allemands (Leiber, Gentrich et Béa (1).

Les jésuites dirigent de nombreux établissements d’ enseignement supérieur dans différents pays, ils contrôlent des journaux, des maisons d’ édition. Ils ont pratiquement la haute main sur la formation des cadres supérieurs du clergé catholique. Ils ont des établissements dans les pays d’ Asie, d’ Afrique, d’ Amérique latine (près de 6.000 jésuites sont missionnaires dans les pays d’ Orient). Ils recherchent activement es contacts (page 40) avec la haute société des pays capitalistes, les milieux gouvernementaux, la finance, l’ industrie, pourmieux influencer les leaders politiques, les députés, les ministres.

1. Béa a été nommé cardinal par Jean XXIII en décembre 1959.

L’ ordre des jésuites possède d’ énormes richesses en Espagne, aux États-Unis, en Amérique latine et ailleurs. D’après des données de presse, il possède des actions d’ entreprises industrielles pour une somme de 5 milliards de dollars (1). Soit 250 milliards de francs belges en 1960 …

A l’ époque de la deuxième guerre mondiale, le comte Ledochowski, général de l’ ordre, collabora avec les services secrets hitlériens. Dans la période d’ après-guerre, les jésuites furent convaincus d’ avoir comploté contre les pays de démocratie populaire.

En Allemagne occidentale, des jésuites haut placés, comme Gundlach, Leppich, Hirschmann, prêchent la guerre atomique et couvrent de leur bénédiction les projets d’ anéantissement de millions d’ être humains par l’ arme nucléaire.

En décembre 1950, un congrès général des ordres catholiques s’ est tenu au Vatican. Les dirigeants étaient le prélat Kaas (ancien président du Parti catholique allemand du centre, qui aida Hitler à venir au pouvoir en 1933 et se retira ensuite au Vatican pour y devenir conseiller privé de Pie XII), le cardinal Tisserant (alors secrétaire de la congrégation des Eglises d’ Orient), le jésuite Wetter (directeur du Collège anti-soviétique "Russicum") et d’ autres personnages du même acabit. Le Congrès délibéra sur la participation efficace des ordres religieux à la lutte contre la démocratie, le communisme, les pays socialistes.

Il convient cependant de signaler que même parmi les dirigeants réactionnaires des ordres religieux, il se trouve des gens pour dénoncer la politique de la papauté (page 41) et des princes de l’ Eglise. On peut citer l’ exemple déjà mentionné dans cet ouvrage, du professeur Alighiero Tondi, de l’ Université Grégorienne de Rome, qui se retira en 1952 de l’ ordre des Jésuites, dont il était membre depuis seize ans.

1. H. Ullrich, G. Heyden : Im Namen Gottes, Berlin 1959, S. 142

Du temps qu’il était jésuite, Alighiero Tondi, sur mission du Vatican, s’ était livré à une étude approfondie du marxisme, ainsi que de la situation intérieure de l’ U.R.S.S. et des pays de démocratie populaire, afin de mieux combattre le communisme et le camp socialiste. Ayant appris à connaître la doctrine communiste, il fut convaincu de sa justesse. En avril 1952, il déclara publiquement qu’il se retirait de l’ ordre des jésuites et décidait de soutenir dorénavant le Parti communiste italien. Il ajouta, dans une interview, que sa décision avait été préparée par de longues années de méditation et que le communisme était à ses yeux, l’ unique vérité, la doctrine qui restitue à l’ homme ses droits et sa dignité, et lui offre la possibilité de conquérir le bonheur.

Sans doute, il est rare que de hauts dignitaires des jésuites rompent ouvertement avec la Compagnie. Néanmoins, les faits attestent que, dans d’ autres ordres aussi, la politique du Vatican fait de nombreux mécontents. Ainsi, à la fin de 1953, le Vatican révoqua trois provinciaux dominicains de France (de Paris, Lyon et Toulouse) pour avoir pris trop au sérieux les déclarations du Saint-Siège concernant les sympathies de l’ Eglise pour la classe ouvrière. Ainsi donc, même dans ce milieu si fortement lié spirituellement et matériellement au Vatican, un certain trouble arrive à se manifester. Toutefois, la pression de l’ épiscopat et du Vatican, les préjugés et les notions fausses au sujetdu communisme et des pays socialistes, inculqués par des années d’ intense propagande, empêchent encore ces hésitants de prendre le parti de ceux qui luttent pour le progrès, pour la paix, pour une authentique justice sociale. (page 42).

En plus de ses organisations proprement religieuses, l’ Eglise catholique a fondé des organisations laïques, qui groupent des millions de travailleurs. Dès la fin du XIXe siècle, dans les pays d’ Europe occidentale, particulièrement en Allemagne, en France et en Belgique, l’ Eglise catholique, inquiète des progrès du mouvement socialiste, a créé des syndicats et des partis catholiques afin de rassembler les travailleurs dans des associations hostiles au socialisme et contrôlés par l’ Eglise.

Après la première guerre mondiale l’ Eglise a redoublé d’ ardeur pour fonder des organisations prolétariennes de masse. Aujourd’ hui encore, il existe toutes sortes d’ associations cléricales d’ ouvriers et de jeunes. Elles sont appelées à endiguer la diffusion des idées du socialisme scientifique dans la classe ouvrière.

A l’ heure actuelle, la papauté accorde une attention toute particulière à l’ "Action catholique", fédération de sociétés et alliances catholiques (groupements de femmes, de jeunes, d’ouvriers, sociétés de bienfaisance, fédérations sportives, associations scientifiques, etc…). Les organismes dirigeants de l’ "Action catholique" sont présidés par des évêques et, dans les paroisses, par les prêtres.

Les sections de l’ "Action catholique" créées en Italie dès avant le premier conflit mondial durent, après la fin de celui-ci, réorganisés sur l’ ordre de Pie XI, afin de mieux contrecarrer le mouvement révolutionnaire qui gagnait alors de très larges couches de la population.

Un historien italien progressiste, Giorgio Candeloro, écrit qu’ à notre époque caractérisée par l’ existence d’ un vaste mouvement ouvrier organisé, la bourgeoisie s’ efforce de garder son emprise sur les masses. L’ Eglise, elle aussi, juge indispensable d’ intensifier sa propagande ; mais, pour gagner le peuple à sa cause, elle ne peut plus se contenter de le faire participer à des cérémonies religieuses (page 43). Aussi l’ Eglise et le pape Pie XI ont-ils eu le souci de renforcer partout l’ "Action catholique" "pour en faire une organisation capable de déployer une large activité -directement et par l’ entremise des organisations affiliées- propre à stimuler et à contrôler tout le travail politique, syndical et économique des catholiques, la propagande et l’ action culturelle dans toutes les couches de la population, et aussi pour superviser la presse, le théâtre, le cinéma, la radio et les sports (1)".

L’ "Action catholique" existez dans de nombreux pys, où elle apporte un appui massif à l’ Eglise et aux partis catholiques. En Italie, elle est présidée par une commission d’ évêques. La structure de sa direction est calquées sur celle de l’ administration ecclésiastique : paroissiale, diocésaine et nationale. L’ organisation groupes les sociétés indépendantes suivantes : 1) hommes catholiques ; 2) femmes catholiques ; 3) jeunes gens ; 4) jeunes filles ; ) étudiants ; §6 enseignants ; 7) scientifiques et autres intellectuels.

Cette "Action catholique" largement ramifiée joue un rôle funeste dans la vie politique de l’ Italie. Sous le régime mussolinien, ses chefs, approuvés en cela par le Saint-Siège, collaborèrent avec les fascistes et adoptèrent même leur drapeau. Depuis la fin de la guerre, l’ "Action catholique" continue d’ appliquer avec zèle la politique réactionnaire du Vatican et du parti démo-chrétien actuellement au pouvoir.

Les force réactionnaires qui sont derrière le Vatican et l’épiscopat profitent des attaches de l’ "Action catholique" avec l’ Eglise pour gagner des suffrages aux élections en faveur de candidats cléricaux, pour développer la propagande contre le communisme, pour briser l’ union des travailleurs en lutte pour la paix et le progrès (page 44) social. Il est à noter que, de longues années durant, jusqu’ en 1959, l’ "Action catholique" a été présidée par Luigi Gedda, dont les sympathies profascistes étaient notoires.

1, G. Candeloro : Il movimento cattolico in Italia, Roma, p. 487.

Malgré la brutalité de cette dictature spirituelle, le mécontentement envers la politique de l’ Eglise se fait jour jusqu’au sein de l’ "Action catholique".

Toujours en Italie, au cours du second semestre 1954, on révoqua à deux reprises, sur l’ ordre du Vatican, la direction de l’ organisation de jeunes de l’ "Action catholique". Pour commencer, on congédia le président de l’ organisation, accusé de "gauchisme" pour avoir conseillé au parti au pouvoir de faire une politique plus progressiste et pour avoir défendu une ligne distincte de celle de Gedda. Une vingtaine d’ autres dirigeants subissent le même sort. Six mois plus tard, le comité exécutif de l’ organisation fut dissous pour avoir revendiqué un changement d’ orientation politique et ue démocratisation de la société italienne.

Le désaccord avec la politique antidémocratique de l’ Eglise et des dirigeants catholiques s’ est également manifesté en France. En septembre 1956, le président de l’ Association catholique de la jeunesse française fut révoqué à la suite d’ un conflit sur l’ orientation des jeunes catholiques. En mai 1957, 80 dirigeant de la jeunesse universitaire catholique furent démis de leurs fonctions. En même temps, les dirigeants des Scouts de France démissionnaient en déclarant qu’ils voulaient pouvoir discuter librement d’ une situation politique, économique et sociale qui met en danger l’ avenir de la jeunesse.

La réaction contre la tutelle exercée par la hiérarchie ecclésiastique et contre la politique imposée aux groupements catholiques de masse n’ est pas l’ apanage exclusif de la jeunesse. (page 45)

Les membres des organisations catholiques étant pour la plupart des travailleurs, il est évident qu’ on ne saurait les assimiler à leurs dirigeants. Il faut aussi faire une différence entre les dirigeants centraux et ceux des organisations locales. Ces dernières sont plus proches de la masse des travailleurs, et acceptent plus volontiers de réaliser ’’ unité d’ actions avec les organisations ouvrières et démocratiques.

L’ Eglise catholique déploie de grands efforts pour pénétrer dans le mouvement syndical. Il existe une Confédération internationale des syndicats chrétiens (C.IS.C.), qui compte près de 6 millions d’ adhérents, ce qui n’ est guère important en comparaison de la Fédération Syndicale Mondiale (92 millions) et de la Confédération Internationale des Syndicats Libres (55 millions). Dans certains pays pourtant (France, Belgique, Pays-Bas, Suisse), les syndicats chrétiens sont des organisations de masse. Dans son programme, la C.I.S.C. affirme son attachement à la doctrine chrétienne, prône le maintien de la propriété privée des moyens de production et prêche également la "paix des classes", ce qui lui vaut le soutien du patronat, qui voit dans son activité un moyen d’ affaiblir le mouvement ouvrier et de propager les thèses de l’ anticommunisme.

Là où il apparaît difficile de fonder les syndicats d’ obédience religieuse, l’ Eglise catholique crée dans les syndicats existants des cellules de l’ "Association des syndiqués catholiques". C’ est en 1937, aux États-Unis, que fut instituée pour la première fois une organisation religieuse indépendante sur ce modèle Elle constitue un bastion du Vatican dans le mouvement américain. En paroles, l’ "Association" prêche l’ action syndicale, mais en réalité elle s’ attache surtout à décomposer et à scinder le mouvement ouvrier (1).

(page 46)

1 Voir V Perlo : American Imperialism, N.Y. 1951, p. 236.

Mgr Herrera, évêque de Malaga (Espagne) a fort bien expoé les raisons de la "sollicitude" de l’ Eglise envers la classe ouvrière. "Par la pure prédication, nous ne réussirons pas à amener rapidement les hommes à l’ accomplissement de leur devoir (c’ est-à-dire à l’ acceptation docile du jour de la bourgeoisie. M.C.). Plusieurs générations seraient nécessaires, et avant que l’ évolution se soit produite dans les consciences, la révolution sociale sera accomplie (1)". C’ est donc par peur de la révolution sociale que le Vatican se fait l’"ami" de la classe ouvrière.

Malgré le redoublement d’activité de l’ Eglise dans les masses laborieuses, surtout parmi les ouvriers d’ industrie, les organisations catholiques n’ont pu attirer qu’un petit nombre de ces derniers. Même les ouvriers pratiquants, en Italie, en France et d’ autres pays, préfèrent souvent adhérer aux syndicats de classe, comprenant que ce sont eux, et non les syndicats catholiques, qui défendent leurs intérêts essentiels.

En même temps, les membres des syndicats catholiques sont de plus en plus enclins à pratiquer l’ unité d’ action avec leurs camarades des syndicats de classe ; dans les organisations de base des syndicats chrétiens, l’ emprise des partis catholiques provoque un mécontement croissant.

L’ Eglise catholique s’ efforce de gagner à sa cause les femmes ouvrières pour influencer par leur truchement les familles, orienter l’ éducation de la jeunesse et capter les suffrages lors des élections.

L’ Eglise a toujours sanctifier et approuvé l’ asservissement de la femme, en se référant notamment à la légede bibique, selon laquelle la femme aurait "apporté le péché au monde" en faisant goûter à Adam le "fruit défendu" cueilli à l’ "arbre de la connaissance du (page 47) bien et du mal".

1. Cahiers internationaux n° 50, nov. 1953, p. 62.

L’ Église catholique est opposée à l’ égalité en droits de la femme et de l’ homme, à la participation des femmes aux activités politiques et sociales. En même temps, profitant de la conscience politique relativement moins avancée des femmes travailleuses, l’ Eglise s’ efforce de es faire voter pour les candidats des partis cléricaux et réactionnaires Pour tenir les femmes à l’ écart des luttes communes des travailleurs, l’Église a créé des associations féminines catholiques, qui sont placées sous le contrôle des évêques et des partis catholiques L’ Association internationales des ligues féminines catholiques groupe des millions de femmes de différents pays.

Le rayonnement croissant des idées progressistes parmi les jeunes ne laisse pas d’ alarmer la hiérarchie vaticane. Pour éduquer la jeunesse dans la haine du socialisme, elle utilise les organisations culturelles, sportives et autres, ainsi que les unions catholiques de la jeunesse ouvrière.

Dans de nombreux pays, l’ Eglise catholique s’ est solidement implantée dans l’ enseignement Là où le catholicisme est la religion d’ État, l’ enseignement religieux dans les écoles est obligatoire. Lorsque l’ Eglise est officiellement séparée de l’ État, les cléricaux combattent la laïcité, principalement dans le domaine de l’ enseignement C’ est le cas en France, en Belgique, et dans d’ autres pays.

Pendant de longues années, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, les forces progressistes françaises ont lutté pour qu’ il soit interdit aux congrégations d’ avoir des écoles Dans ces établissements, où l’ enseignement était dispensé par des religieux, on inculquait aux enfants la haine de la république et de la démocratie. On peut juger des positions du cléricalisme dans l’ enseignement, d’ après les quelques années que voici : fin 1898, 2 millions d’ élèves (page 48) de l’ enseignement primaire (sur 6 millions) et 50% au moins des élèves du secondaires fréquentaient les écoles des congrégations. Dans l’ enseignement supérieur aussi, l’ influence cléricale était considérable.

En 1902-1904, le gouvernement Combes prit des mesures contre l’ emprise cléricale sur l’ école. Une loi de 1904 interdit aux congrégations de pratiquer l’ enseignement. Mais les cléricaux se sont ingéniés à la tourner. A l’ heure actuelle, il existe un grand nombre d’ écoles catholiques dites "libres" et "privées", qui comptaient en 1957-1958, un million et demi d’ élèves des deux sexes (1). Ces écoles sont placées sous e patronage des évêques et des curés Les enseignants y sont astreints aux directives épiscopales Ce qui revient à dire que, comme à la fin du XIXe siècle, l’ éducation d’ une grande partie de la jeunesse est de nouveau livrée aux cléricaux.

Les Cahiers du communisme écrivaient à ce propos : "C’est un fait d’ expérience depuis un siècle : dans les régions de France où domine l’ enseignement confessionnel, l’ hégémonie politique est acquise aux ennemis de la République. Les quatre départements où la part de l’ école confessionnelle est la plus grande sont : la Vendée (70%), le Morbihan (70%), le Maine-et-Loire (70%) et la Loire-Atlantique (62%). Ces départements sont ceux qui élisent les députés les plus réactionnaires, d’ inspiration monarchiste, et ceux où subsiste la grande propriété sous la forme féodale .. (2)".

L’ Église ne se contente pas de l’ acquit. Arborant hypocritement le slogan de liberté de l’ enseignement, les princes de l’ Eglise travaillent à assurer la cléricalisation totale de l’ instruction publique, la suppression de (page 49) l’ école laïque et le contrôle de l’ Église sur l’ enseignement.

1 Soit 15,4% des élèves des écoles primaires, et 40% des élèves du secondaires. En outre, 130.000 enfants sont élèves des écoles techniques catholiques.

2 Cahiers du Communisme n°1, 1960, p. 7.

Il s’ agit d’une offensive de grand style contre les traditions démocratiques du peuple français, puisque les écoles confessionnelles enseignent le mépris de la République, des traditions révolutionnaires et vouent aux gémonies le souvenir de ces grands penseurs du siècle des lumières. Le 31 décembre 1959 a été promulguée une loi accordant aux écoles confessionnelles d’ importants avantages : elles recevront dorénavant de l’ État au moins 40 milliards de francs par an, sans compter les subventions des administrations locales. Rappelons qu’ en vertu de la loi Barangé de 1953, l’ État versait déjà aux écoles confessionnelles 5 milliards de francs par an, sans compter les 2,3 milliards accordés par diverses municipalités.

De cette façon, les écoles confessionnelles seront, en fait, entièrement subventionnées par le budget de l’ État, ce qui réduira d’ autant les crédits affectés à l’ école laïque.

La nouvelle loi scolaire a provoqué dans le pays un vif mécontentement. Le mouvement de défense de l’ école laïque a reçu une forte impulsion. Une campagne pour l’ abrogation de cette loi réactionnaire lancée en février 1960, a permis de recueillir en deux mois près de 10 millions de signatures.

En Belgique aussi, les cléricaux mènent l’ offensive contre l’ école laïque. En 1955, ils ont organisé des manifestations pour intimider le gouvernement et le Parlement (la "Guerre scolaire"). Pour donner droit aux réclamations de l’ Église, la direction du parti social-chrétien (Psc) a, en juillet 1955, appelé les catholiques a boycotter les emprunts de l’ État et à retirer leurs dépôts des banques et des caisses d’ épargne pour mettre le gouvernement en difficulté.

La presse et les organisations progressistes se montrent fort inquiètes de l’ emprise cléricale dans les écoles d’ Italie

(page 50)

Cette page a été mise à jour le 01/04/13.

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