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L’islamophobie est plus vieille que la France

lundi 27 janvier 2014

Dans ce raz-de-marée, certaines déclarations (et proclamations) se distinguent par leur particulière trivialité. C’est le cas, par exemple, de celles de l’écrivain Michel Houellebecq, qui a théorisé, peu de jours avant les attentats du 11 Septembre, que «  l’islam  » était «  la religion la plus con  ». Claude Imbert, fondateur de l’hebdomadaire Le Point, déclare, au mois d’octobre 2003, dans le cours d’une émission de télévision : « Je suis un peu islamophobe, ça ne me gêne pas de le dire. J’ai le droit de penser que l’islam – je dis bien l’islam, je ne parle même pas des islamistes – apporte une certaine débilité qui, en effet, me rend islamophobe. ». Sans doute sait-il parfaitement que l’aversion, lorsqu’elle s’applique contre les musulmans, peut être publiquement dite sans que nul ne s’en émeuve – hors quelques rares antiracistes. Son confrère Jean Daniel Bensaïd, né à Blida (Algérie), co-fondateur du Nouvel Observateur et autre haute figure de la presse dominante, expose dans un éditorial daté du 4 novembre 2004, que son « désenchantement actuel, c’est de voir ce que devient la France », et « avoue » sa « tristesse de ne plus reconnaître son pays » (la France, et non pas l’Algérie). Il avait même prévenu Mitterrand : « Le clocher de votre affiche électorale, dans peu de temps, vous le verrez entouré par deux minarets ».

En janvier 1983 : confronté à un vaste mouvement social dans une industrie automobile en crise, le gouvernement « socialiste », en pleine reconversion néolibérale (déjà) et décidé à ne rien céder aux ouvriers (déjà), discrédita médiatiquement les grévistes, dont beaucoup étaient immigrés, en les assimilant aux mollahs iraniens. « Des grèves saintes d’intégristes, de musulmans, de chiites ! », s’enflamma le ministre de l’intérieur. La presse obéissante fit ses choux gras des « intégristes » en col bleu. Satisfaites, la droite et l’extrême droite constatèrent à cette occasion qu’il était plus efficace, pour insulter les « bougnoules », de les appeler « musulmans ».

Dans sa « Lettre à Madame Roger des Genettes » en janvier 1878 », Gustave Flaubert (1821-1880) écrivait déjà : « Sans doute par l’effet de mon vieux sang normand, depuis la guerre d’Orient, je suis indigné contre l’Angleterre, indigné à en devenir Prussien ! Car enfin, que veut-elle ? Qui l’attaque ? Cette prétention de défendre l’Islamisme (qui est en soi une monstruosité) m’exaspère. Je demande, au nom de l’humanité, à ce qu’on broie la Pierre-Noire, pour en jeter les cendres au vent, à ce qu’on détruise La Mecque, et que l’on souille la tombe de Mahomet. Ce serait le moyen de démoraliser le Fanatisme."

Et dans son ouvrage paru à Paris en 1910, Alain Quellien, relève qu’«  il y a toujours eu, et qu’il y a encore, un préjugé contre l’islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne », chez qui, « pour d’aucuns, le musulman est l’ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l’Européen, l’islamisme est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des musulmans ». Ces préventions, portent un nom : cela s’appelle, dit-il, «  l’islamophobie  ».

L’islamophobie est donc ce néologisme qui désigne l’hostilité envers l’islam et les musulmans. Le terme peut être également employé pour décrire un sentiment négatif ou une attitude xénophobe envers l’islam ou certaines de ses formes et, par amalgame, envers les personnes d’origine arabe ou supposée « arabe » : Maghrébins, Turcs, Iraniens, etc. Cette haine est, par essence, névrotique : on se met à prêter à des personnes, au nom d’une croyance qu’on reconnaît, ou qu’on croit reconnaître chez elles, un ensemble de caractéristiques stéréotypées. Cette névrose se trouve quantité de cautions, qui vont du "choc des civilisations" d’Huntington en passant par certaines caractéristiques de l’islam, jusqu’au simple fait qu’elle concurrencerait la toujours première religion de France, le christianisme. Mais dans tous les cas, elle verse dans la généralisation, l’amalgame, le refus du rapport individuel à la croyance, et ne veut voir dans les croyants musulmans que des automates, imperméables à leur milieu, conquérants et forcément dominateurs. On peut, à raison, parler de paranoïa.

Enfin, voici la fonction de l’islamophobie des temps modernes, telle que décrite par Alain Gresh : "encoder le racisme pour le rendre imperceptible, donc socialement acceptable. C’est cette machine à raffiner le racisme brut, lancée par les socialistes en 1983, qui tourne à plein régime depuis trente ans, à gauche comme à droite. On ne parle évidemment jamais de « bougnoules » à la télévision et dans la presse. Mais on diffuse à flux continu des reportages où se déverse un magma confus de « musulmans », d’« islamistes » et autres « communautaristes ». Rien de raciste, bien sûr ! C’est simplement que ces gens-là posent « problème », nous dit-on, car ils menacent la « république », la « laïcité », le « féminisme », le « vivre ensemble ». Ainsi encodé, ce racisme raffiné, produit dans les beaux quartiers, imprimé dans les journaux, mis en scène à la télévision, propagé par Email et sur réseaux sociaux, se dissémine dans toute la société. Laquelle, ainsi habituée à vivre dans un mélange de peur identitaire et d’angoisse sécuritaire, est sommée de traquer les voiles litigieux, de mesurer les poils de barbe et de signaler le moindre « colis suspect ». "

Charles Martel exploite "la haine du Sarrasin" pour régner

Nous sommes en l’an 732 de l’ère chrétienne. Ce n’est pas encore la France, mais des principautés, plus ou moins liées aux territoires des églises ou des couvents. Au sud, le Languedoc, la vallée du Rhône, les marches pyrénéennes sont sous administration musulmane.

Un seigneur de mauvaise réputation campe non loin de l’ancienne voie romaine (faisant partie de la voie principale VP2 allant de l’Espagne à la Gaule du nord). C’est Charles, (690 - 741), duc d’Austrasie (Belgique actuelle). Sa mauvaise réputation, il la tient de sa naissance et des pillages dont lui et ses hommes d’armes ont l’habitude. On l’appelle d’ailleurs Charles « Martel » (le marteau), à cause de cette violence dont il use contre les communautés religieuses chrétiennes, et contre les autres seigneurs francs et gallo-romains. Ainsi, selon l’historien allemand Karl Ferdinand Werner, la Provence fut si bouleversée par les exactions de Charles Martel que le surnom « Martel-Marteau » pourrait venir de là et non de la victoire contre les musulmans à Poitiers en 732 (les chroniqueurs musulmans nient la réalité de la bataille de Poitiers). Peu importe : une légende est née. En prétendant avoir écrasé les musulmans, Charles acquiert une aura et une supériorité sur tous les autres chefs francs et gallo-romains. Une nouvelle dynastie, celle des Carolingiens, est née. La Gaule, morcelée en plusieurs principautés, va être unifiée et deviendra la France, environ cinq siècles plus tard, grâce au combat contre les musulmans. En effet, le nom de France ne fut employé de façon officielle qu’à partir de 1190 environ, quand la chancellerie du roi Philippe Auguste a commencé à employer le terme de rex Franciæ (roi de France) à la place de rex Francorum (roi des Francs).

Ces guerres contre les Sarrasins donneront, entre autres, une trame pseudo historique à beaucoup d’oeuvres culturelles françaises, dont la Chanson de Roland : « La plupart des historiens s’accordent maintenant pour dire qu’à la bataille de Roncevaux, les chevaliers carolingiens ont, en fait, affronté la milice vasconne (basque) et non l’armée sarrasine. En pleine époque de reconquête de l’Europe et de conquêtes en Orient, il est fort possible que le texte de la Chanson de Roland ait été écrit pour donner un fondement historique aux croisades, et transformer une guerre territoriale en guerre sainte ».

Le Musulman ou la malédiction de l’Autre

Les chrétiens du Moyen Âge qui essayèrent de comprendre, de définir et de caractériser l’Islam étaient tout sauf des “observateurs objectifs et détachés”. Ils ne se différencient en rien d’un Michel Houellebecq, d’un Nostradamus, d’un Lepen ou d’un Claude Imbert. Leur perception des musulmans s’appuie moins sur l’Islam que sur leurs préconceptions chrétiennes de l’histoire et de la géographie divines. Autrement dit, quand les chrétiens du Moyen Âge se penchèrent sur l’Islam, ils le firent à travers le filtre de la Bible et d’auteurs tels qu’Eusèbe, Jérôme, Augustin et Isidore de Séville. La représentation des musulmans est bien le résultat d’une sorte de prophétie : elle est annoncée par les textes de la tradition chrétienne ; elle s’y trouve pré inscrite. Leur existence ne ferait que manifester sur le plan de l’histoire la fonction qu’ils incarnent : celle habituellement dévolue aux puissances maléfiques qui ne cessent de revenir sous différentes formes dans l’Ancien et le Nouveau Testament, les écrits des Pères de l’Église ou les récits hagiographiques (idolâtres qu’a dû affronter le peuple d’Israël, meurtriers du Christ, païens qui vouèrent au supplice les premiers martyrs ou sectes hérétiques combattues par le pouvoir ecclésiastique afin d’affirmer la vérité de son dogme). Ils correspondent surtout aux nations associées à la Bête contre lesquelles le chevalier christique de l’Apocalypse (exemple : Charles Martel) a entrepris de faire la guerre, le manteau trempé de sang et une épée sortant de la bouche (au lieu de la parole employée par les apôtres pour répandre l’Évangile). L’altérité de l’Islam est pensée sur le mode de la répétition. L’Autre n’est pas vraiment différent de ce que l’on connaît : il est toujours plus ou moins le même – c’est-à-dire, ici, le diable.

L’Autre est non seulement un repoussoir nécessaire pour construire l’identité de la France ou du christianisme, il doit être exclu des territoires dominés par l’Église (comme cela est le cas avec les hérétiques et les juifs). La société chrétienne ne saurait cependant se contenter de se replier à l’intérieur de ses propres frontières. Avec les Croisades , il lui faut chasser l’Islam pour s’étendre au monde entier et lui imposer son ordre. Ceci est l’ambition de l’universalisme chrétien qui entend couvrir la terre entière jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien d’autre que lui. Le prix à payer pour une telle entreprise « totalitaire » est la constitution d’une société fondée sur l’intolérance. Exclus de la société chrétienne, les autres sont assimilés à des bêtes dépourvues de raison (les juifs comme les musulmans sont comparés souvent à des ânes(*)). Après le haut Moyen Âge, la malédiction qui a pesé sur les « Autres », juifs et musulmans, ne s’est pas arrêtée avec la Renaissance (comme en témoignent notamment l’esclavage, la Shoah et l’islamophobie actuelle). Ces brefs rappels invitent le lecteur, non pas à condamner simplement une période qui serait heureusement révolue, mais plutôt à en sortir. Ce que, comme nous l’avons vu ci-dessus, beaucoup de Français contemporains sont incapables de faire.

Faut-il avoir peur de l’islam ?

Certaines études réalisées dans différents pays, établissent à 6 % le nombre de personnes supposées musulmanes (de par leurs parents) dans l’Europe de 2010, soit 44,1 millions. Les projections montent à 8 % en 2030. Et les rapports précisent qu’une possibilité d’Eurabie comme disent les thuriféraires de l’arrêt de l’immigration et de l’expulsion, est sans fondement. Le Financial Times écrit : "L’islamisation, et a fortiori la charia, n’est pas une perspective envisageable grâce à une poussée démographique". L’INED arrive au même résultat pour la France : en 2010, 2,1 millions de personnes se sont déclarées musulmanes pratiquantes en France - pour 63 millions d’habitants. D’autre part les démographes Youssef Courbage et Emmanuel Todd ont démontré que la fécondité des pays musulmans chute partout et finit par rejoindre celle des Européens. Malgré ces chiffres, dont il faut bien tenir compte, l’extrême droite européenne fait semblant de les ignorer et se réfère à d’autres chiffres alarmistes dont ils se servent politiquement.

L’anthropologue des religions Malek Chebel, s’en inquiète : "[…] Marine Le Pen passe sous silence les milliers de musulmans éduqués, les cadres, les médecins, les ingénieurs, les militants politiques et syndicaux, les étudiants" bref, l’intégration réussie mais silencieuse. Il ne reste que la peur de l’islamisme intégriste terroriste et conquérant. Mais ce dernier fait infiniment plus de dégâts en terre d’islam qu’en Europe. Tous les jours, des centaines d’innocents Arabes (musulmans et chrétiens) sont suppliciés, sans que cela émeuve beaucoup d’Européens. Au contraire, ces derniers arment les assassins, car, pour eux, comme le disent les sionistes «  un bon Arabe est un Arabe mort », . Hannibal GENSERIC http://numidia-liberum.blogspot.com…

(*) Dans un article intitulé « les Arabes, précurseurs de l’ère numérique » j’avais écrit : "Lorsque les écrits d’Al-Bîrunî (savant mathématicien ; 973-1048) parviennent en Europe, son nom fut francisé en Aliboron. Pour les savants européens d’alors, ses œuvres apparaissent comme ardues, voire ésotériques. Au lieu de reconnaître leur incompétence, les savants français se sont moqués du contenu de ses livres. Par dérision, Al-Bîrunî, alias Aliboron, fut affublé du sobriquet de Maître Aliboron. Au 14e siècle, Jean Buridan (1300-1358), maître scolastique et philosophe aristotélicien, nomma Aliboron son célèbre âne affamé et assoiffé qui, placé à égale distance d’un seau d’eau et d’une botte de foin, mourut de faim et de soif, faute d’avoir su choisir dans quelle direction aller en premier. Par la suite, d’autres ânes furent nommés Aliboron, et "Maître Aliboron" devint une périphrase pour désigner l’âne par excellence, comme on le lit chez La Fontaine.  Du reste, je suis convaincu que La Fontaine n’aurait pas utilisé ce mot s’il savait l’ânerie qui en a été l’origine. Autrement dit, les ânes ne sont pas toujours ceux que l’on pense !"

2 Messages de forum

  • Oui, cette phobie est ancienne et même plus ancienne encore que l’islam lui-même, pourquoi pas. C’en fait un phénomène d’attrait et de répulsion entre l’Europe et le monde arabe. A l’époque et pendant des siècles, les Européens étaient complètement en retard par rapport à la civilisation des Arabes.

    Il y a eu les Croisades de triste mémoire mais il y a eu après, bien plus tard, la Renaissance et tout l’intérêt qui s’est alors porté à l’héritage arabe incontestable dans les domaines scientifique et culturels.
    Mais la grande différence, c’est que la haine dont Genséric parle, est démultipliée à l’infini par les technologies des télécommunications et cela n’existait pas à l’époque de Flaubert et Cie puisque ce dernier est cité.

    C’est comme la pornographie qui a toujours existé, quoique jamais à chaque coin de rue et dans tous les foyers du monde. Par contre, il y eu dans les années 80 un saut quantique avec les télécommunications. Les impérialistes ont pu commencer à utiliser la pornographie pour dominer le monde (Asie et Afrique) à la fois comme opium des peuples pour les uns (à la place de la religion) et comme arme de destruction massive de leur mode de vie pour les autres.

    Usrael l’a d’ailleurs bien compris : il exploite ces deux armes à la fois : l’islamophobie et la pornographie. LENINE (cité dans nos articles) y verrait aujourd’hui les signes annonciateurs d’un Grande Révolution, encore plus grande que celle de 1917. Des pays comme Cuba l’ont bien compris le truc (liberté sexuelle socialiste oui, pornographie/pornocratie capitaliste, non) et la Corée aussi (la démocratique, pas l’autre). Voir nos amis du PARTI JUCHE DE FRANCE

    https://twitter.com/Parti_Juche

    Quand à MALEK CHEBEL, l’anthropo-loQue cité par Genséric (il a quand même tendance à renchérir), c’est un obsédé sexuel qui cherche à plaire avec ce sujet à ses maîtres. Dans son livre « L’esprit de sérail », il ose même diffamer encore plus et sans aucune preuve les « Maghrébins » (que Genséric semble défendre beaucoup) des campagnes en écrivant qu’ils pratiquent pratiquement tous la zoophilie. Cherchez le lien avec l’islamophobie.
    L’avenir est au socialisme.

    Sources à consulter pour comprendre le monde arabe

    Tunisie : pardonner aux deux faux-athées Jabeur Mejri et Ghazi El-Béji, sans rien cacher de leurs faits.
    http://www.mathaba.net/news/?x=633935

    « Comment les Tunisiens peuvent pardonner aux deux faux-athées Jabeur Mejri et Ghazi El-Béji, admirateurs de la Torah et d’Israël, obsédés sexuels, violents et co-assassins du Prophète avec l’aide de l’orientaliste anglais nommé Sharki. »

    Tunisie : La vérité censurée sur les `Versets Sataniques` de Ghazi El-Béji et Jabeur Mejri
    http://www.mathaba.net/news/?x=630227

    « Mise en scène hyper-pornographique du Prophète de l’Islam puis son assassinat, suite à une comparaison avec Mouammar Al-Gaddafi, par un orientaliste anglais… Tel fut le prix à payer par des chômeurs tunisiens, faux-athées, mendiant un visa pour Israël… »

    Les Pacifistes de Tunis
    Méga site interactif et convivial en couleurs : http://bit.ly/yd15JY

  • Charles Martel était déjà français à la bataille de Poitiers, non ?

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