PALESTINE Hamas, le produit du Mossad
http://www.humanite.fr/node/257048
mai68.org/ag/452.htm
Vendredi, 14 Décembre, 2001
Hassane Zerrouky
Pour de nombreux Palestiniens, peuple sans territoire, soumis à la répression, aux humiliations et aux bouclages à répétition, le radicalisme des intégristes du Hamas incarne l’ultime recours face à l’occupation. Comment s’est créée et développée cette organisation qui a pris en retard le train de la " résistance " à Israël ? On ne le dit pas assez, c’est bien Israël qui a, au fond, créé le Hamas, " en pensant, assure Zeev Sternell, historien, professeur à l’université hébraïque de Jérusalem, que c’était intelligent de jouer les islamistes contre l’OLP ".
Quand au début des années soixante-dix, Ahmed Yassine, de retour du Caire, fonde une association islamique de bienfaisance, Golda Meir, alors premier ministre d’Israël, escompte ainsi dresser un contrepoids au Fatah d’Arafat. « Les associations islamiques et l’université recevaient tous les encouragements du gouvernement militaire » en charge de l’administration de la Cisjordanie et de Gaza, écrivait en octobre 1987, l’hebdomadaire israélien, Koteret Rashit, cité par le Monde du 18 novembre 1987, ajoutant qu’elles "étaient autorisées à faire venir de l’argent de l’étranger". Les islamistes créent des orphelinats et des dispensaires, mettent en place un réseau scolaire, des ateliers de confections pour l’emploi des femmes, et dispensent une aide financière aux plus démunis. Et en 1978, ils créent une "université islamique" à Gaza. Koteret Rashit ajoutait : « Le gouvernement militaire était convaincu que ces activités affaibliraient l’OLP et les organisations de gauche à Gaza. » Fin 1992, on comptait six cents mosquées dans Gaza. Et c’est ainsi, grâce au Mossad, que les islamistes ont tissé leur toile, à l’ombre d’une répression impitoyable frappant les militants du Fatah et de la gauche palestinienne.
En 1984, Ahmed Yassine est arrêté et condamné à douze ans de prison, après la découverte d’une cache d’armes. Mais une année plus tard, il est libéré et reprend ses activités. Et quand débute l’Intifada, en octobre 1987, laquelle a pris au dépourvu les islamistes, ceux-ci décident de prendre le train en marche, créant le 14 décembre 1987, sans être inquiété, le Hamas (Mouvement de la résistance islamique). "Dieu est notre but, le prophète notre modèle, le Coran notre constitution", proclame l’article 7 de la charte de l’organisation. À vrai dire, Ahmed Yassine n’y était pas favorable, craignant que la répression ne mette fin à l’activité des "frères". Deux ans plus tard, il est arrêté et condamné à la prison à vie.
Il est en détention quand, en septembre 1993, sont signés les accords d’Oslo. Le Hamas les rejette. Mais à cette époque, 70 % des Palestiniens condamnent les attentats contre les civils israéliens. Il va tout faire pour torpiller les accords. Il sera aidé par Israël qui applique avec beaucoup de réticence les accords de paix, et ce, du vivant même de Rabin. Le Hamas se lance alors dans une campagne d’attentats obéissant à un calendrier politique précis - veille de rencontre entre négociateurs palestiniens et israéliens ou de réunion du Conseil national palestinien qui allait décider de la reconnaissance d’Israël… - permettant ainsi à la droite israélienne de revenir au pouvoir en mai 1996.
En 1997, contre toute attente, Netanyahu libère Cheikh Ahmed Yassine pour "raison humanitaire", au moment même où de concert avec Bill Clinton, ils exigent tous deux d’Arafat de mettre au pas le Hamas. Une libération qualifiée par Yossi Sarid, député de gauche, de "machiavélisme à la petite semaine". En fait, Netanyahu savait qu’il pouvait compter, encore une fois, sur les islamistes pour torpiller les accords d’Oslo. Pis, après avoir expulsé Yassine vers la Jordanie, il l’autorise à retourner à Gaza où il est accueilli en héros en octobre 1997.
Arafat est désemparé. De plus, pour avoir soutenu Saddam Hussein lors de la guerre du Golfe, alors que le Hamas s’est prudemment abstenu de prendre parti, les pays du Golfe lui coupent les fonds, privant ainsi l’Autorité palestinienne de financement pour sa politique d’aide sociale aux démunis. En revanche, à l’issue de sa tournée dans ces mêmes pays et en Iran, entre février et avril 1998, Cheikh Yassine récolte plusieurs centaines de millions de dollars, au point que, dit-on, le budget du Hamas est supérieur à celui de l’Autorité palestinienne. Un budget qui va permettre aux islamistes de poursuivre le financement des activités de bienfaisance. On estime qu’un Palestinien sur trois perçoit une aide financière du Hamas. Et là, également, Israël n’a rien fait pour interdire l’entrée de cette manne financière dans les territoires occupés.
Le Hamas a bâti sa force en se nourrissant des échecs successifs du processus de paix, échecs auxquels il a contribué de concert avec Israël qui a multiplié les entraves à l’application des accords d’Oslo. En poursuivant sa politique du pire, le Hamas remplit ainsi la fonction pour laquelle il a été créé : empêcher l’avènement d’un État palestinien. En cela, il est sur la même longueur d’onde qu’Ariel Sharon.