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Che Guevara - 1967 - Créer deux, trois ... de nombreux Vietnam. Voilà le mot d’ordre !

mercredi 11 novembre 2015, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 11 novembre 2015).

Che Guevara. "Créer deux, trois … de nombreux Vietnam. Voilà le mot d’ordre". Un grand texte anti-impérialiste.

http://linter.over-blog.com/article…

23 novembre 2014

Nous publions le texte tel qu’il est paru en 1967 dans la brochure Partisans. Tel que nous l’avons reçu à l’époque.

Pour permettre à chacun de réfléchir aujourd’hui à ce que peut être le combat anti-impérialiste.

Un grand texte anti-impérialiste, un de ceux qui nous ont constitués et qui font que ce combat, nous continuer à le mener sur des bases de classes.

Vingt et un an se sont déjà écoulés depuis la fin du dernier conflit mondial, et diverses publications dans un grand nombre de langues célèbrent l’événement symbolisé par la défaite du Japon. Il règne une atmosphère d’optimisme apparent dans de nombreux secteurs dissemblables qui divisent le monde.

Vingt et un an sans guerre mondiale, en ces temps de suprêmes affrontements, de chocs violents et de brusques changements, cela paraît bien long. Mais, sans analyser les résultats pratiques, de cette paix pour laquelle nous sommes tous disposés à lutter, (la misère, la déchéance, l’exploitation de plus en plus grande d’énormes secteurs du monde) il convient de se demander si cette paix est réelle.

Ces notes ne prétendent pas faire l’historique des divers conflits de caractère local qui se sont succédé depuis la reddition du Japon ; notre tâche n’est pas non plus de dresser le lourd bilan croissant des luttes civiles qui se sont déroulées au cours de ces années de prétendue paix. Il nous suffit d’opposer à cet optimisme démesuré les exemples des guerres de Corée et du Vietnam.

Dans la première, après des années de lutte sauvage, la partie nord du pays a été l’objet de la dévastation la plus terrible des annales de la guerre moderne ; criblée de bombes ; sans usines, sans écoles et sans hôpitaux ; sans aucun abri pour dix millions d’habitants.

Dans la guerre de Corée, sont intervenus sous le drapeau déloyal des Nations Unies, des dizaines de pays sous la conduite militaire des Etats-Unis, avec la participation massive des soldats américains, et l’emploi de la population sud-coréenne enrôlée comme chair à canon.

Dans le camp adverse, l’armée et le peuple de Corée et les volontaires de la République Populaire de Chine étaient ravitaillés et assistés par l’appareil militaire soviétique. Du côté américain, on s’est livré à toutes sortes d’essais d’armes de destruction : si les armes thermonucléaires ont été exclues, les armes bactériologiques et chimiques ont été utilisées à échelle réduite.

Au Vietnam se sont succédées des actions de guerre, menées presque sans interruption par les forces patriotiques, contre trois puissances impérialistes ; le Japon, dont la puissance devait subir une chute verticale après les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki ; la France qui récupéra sur ce pays vaincu ses colonies indochinoises et ignora les promesses faites dans les moments difficiles ; et les Etats-Unis, à cette dernière étape de la lutte.

Sur tous les continents il y a eu des affrontements limités, encore que sur le continent américain, il ne s’est produit pendant longtemps que des tentatives de lutte de libération et des coups d’Etat jusqu’au moment où la révolution cubaine sonna le clairon d’alarme sur l’importance de cette région et provoqua la rage des impérialistes, ce qui l’obligea à défendre ses côtes, d’abord à Playa Giron, et pendant ensuite la Crise d’octobre.

Ce dernier incident aurait pu provoquer une guerre aux proportions incalculables, à cause de l’affrontement entre Américains et Soviétiques à propos de Cuba.

Mais, évidemment le foyer des concentrations, en ce moment se trouve dans les territoires de la péninsule indochinoise et dans les pays voisins. Le Laos et le Vietnam sont secoués par des guerres civiles, qui cessent d’être telles dès l’instant où l’impérialisme américain est présent, avec toute sa puissance ; et toute la zone devient un dangereux détonateur prêt à exploser.

Au Vietnam, l’affrontement a pris une extrême acuité. Nous n’avons pas non plus l’intention de faire l’historique de cette guerre. Nous signalerons simplement quelques points de repère.

En 1954, après la défaite écrasante de Dien-Bien-Phu, on signa les accords de Genève qui divisaient le pays en deux zones et stipulaient que des élections interviendraient dans les dix-huit mois pour décider qui devait gouverner le Vietnam et comment le pays se réunifierait. Les Américains ne signèrent pas ce document et commencèrent à manoeuvrer pour remplacer l’empereur Bao-Dai, fantôche français, par un homme répondant à leurs intentions. Ce fut Ngo Dinh Diem dont tout le monde connaît la fin tragique - celle de l’orange pressée par l’impérialisme. L’optimisme régna dans le camp des forces populaires durant les mois qui suivirent la signature des accords de Genève. On démantela au sud du pays les dispositifs de lutte anti-française et on s’attendait à à l’exécution du pacte. Mais les patriotes ne tardèrent pas à comprendre qu’il n’y aurait pas d’élections à moins que les Etats-Unis se sentent à même d’imposer leur volonté aux urnes, ce qui ne pouvait pas se produire, même s’ils avaient recours à toutes les formes de fraude dont ils ont le secret.

Les luttes reprirent de nouveau au sud du pays, et devinrent de plus en plus intenses, juqu’au moment actuel où l’armée américaine est composée de près d’un demi-million d’envahisseurs, tandis que les forces fantoches diminuent et perdent totalement leur combativité.

Il y a près de deux ans que les Américains ont commencé le bombardement systématique de la République Démocratique du Vietnam dans une nouvelle tentative pour freiner la combativité du Sud et lui imposer une conférence à partir d’une position de force. Au début, les bombardements étaient plus ou moins isolés et prétextaient des représailles contre de prétendues provocations du Nord. Par la suite, ces bombardements augmentèrent d’intensité, devinrent méthodiques, jusqu’à se transformer en une gigantesque battue réalisée par les unités aériennes des Etats-Unis, jour après jour, dans le but de détruire tout vestige de civilisation dans la zone septentrionale du pays. C’est l’un des épisodes de la tristement célèbre escalade.

Les objectifs matériels du monde yankee ont été pour la plupart atteints malgré la résistance résolue des unités aériennes du Vietnam, malgré les 1 700 avions abattus, et malgré l’aide du camp socialiste en matériel de guerre.

Il y a une pénible réalité : le Vietnam, cette nation qui incarne les aspirations, les espérances de victoire de tout un monde oublié est tragiquement seul.

La solidarité du monde progressiste avec le peuple du Vietnam ressemble à l’ironie amère que signifiait l’encouragement de la plèbe pour les gladiateurs du cirque romain. Il ne s’agit pas de souhaiter le succès à la victime de l’agression, mais de partager son sort, de l’accompagner dans la mort ou dans la victoire.

Si nous analysons la solitude vietnamienne, nous sommes saisis par l’angoisse de ce moment illogique de l’humanité.

L’impérialisme américain est coupable d’agression ; ses crimes sont immenses et s’étendent au monde entier. Cela, nous le savons, messieurs ! Mais ils sont aussi coupables ceux qui, à l’heure de la décision, ont hésité à faire du Vietnam une partie inviolable du territoire socialiste ; ils auraient effectivement couru les risques d’une guerre à l’échelle mondiale, mais ils auraient aussi obligé les impérialistes américains à se décider. Ils sont coupables ceux qui poursuivent une guerre d’insultes et de crocs-en-jambe, commencée il y a déjà longtemps par les représentants des deux plus grandes puissances du camp socialiste.

Posons la question pour obtenir une réponse honnête : le Vietnam est-il oui ou non isolé, se livrant à des équilibres dangereux entre les deux puissances qui se querellent ?

Comme le peuple est grand ! Comme il est stoïque et courageux ! Et quelle leçon sa lutte représente pour le monde !

Nous ne saurons pas avant longtemps, si le président Johnson pensait sérieusement entreprendre certaines des réformes nécessaires à un peuple pour enlever leur acuité à des contradictions de classe qui se manifestent avec une force explosive et de plus en plus fréquemment. Ce qui est certain, c’est que les améliorations annoncées sous le titre pompeux de lutte pour le "grande société" sont tombées dans la bouche d’égoût du Vietnam.

La plus grande puissance impérialiste éprouve dans ses entrailles la perte de sang provoqué par un pays pauvre et arrieré et sa fabuleuse économie se ressent de l’effort de guerre. Tuer cesse d’être le commerce le plus lucratif des monopoles. Tout ce que possèdent ces soldats merveilleux en dehors de l’amour de la patrie, de leur société et d’un courage à toute épreuve, ce sont des armes de défense, et encore en quantité insuffisante. Mais l’impérialisme s’enlise au Vietnam, il nee trouve pas d’issue et cherche désespérement une voie qui lui permette d’éluder dignement le péril où il est pris. Mais les "Quatre Points" du Nord et "les Cinq Points" du Sud le tenaillent, et rendent l’affrontement encore plus décidé.

Tout semble indiquer que la paix, cette paix précaire à laquelle on n’a donné ce nom que parce qu’aucun conflit mondial ne s’est produit, est de nouveau en danger de se rompre contre une initiative irréversible, et inacceptable, prise par les Américains.

Et à nous les exploités du monde, quel est le rôle qui nous revient ? …

Et à nous, les exploités du monde, quel est le rôle qui nous revient ? Les peuples de trois continents observent et apprennent leur leçon au Vietnam. Puisque les impérialistes, avec la menace de la guerre, exercent leur chantage sur l’humanité, la réponse juste c’est de ne pas avoir peur de la guerre. Attaquer durement et sans interruption à chaque point de l’affrontement doit être la tactique générale des peuples.

Mais, là où cette paix misérable que nous subissons a été brisée, quelle sera notre tâche ? Nous libérer à n’importe quel prix.

Le panorama du monde offre une grande complexité. La tâche de la libération attend encore des pays de la vieille Europe, suffisamment développés pour ressentir toutes les contradictions du capitalisme, mais si faibles qu’ils ne peuvent pas suivre la voie de l’impérialisme où s’engager. Là les contradictions atteindront dans les prochaines années un caractère explosif, mais leurs problèmes - et par conséquent leur solution - sont différents de ceux de nos peuples dépendants et économiquement arriérés.

Le principal champ d’exploitation de l’impérialisme embrasse les trois continents arriérés : l’Amérique, l’Asie, et l’Afrique. Chaque pays a ses caractéristiques propres, mais les continents dans leur ensemble les présentent aussi.

L’Amérique constitue un ensemble plus ou moins homogène et dans presque tout son territoire les capitaux monopolistes américains maintiennent une primauté absolue. Les gouvernements fantoches, ou dans le meilleur cas, faibles et timorés, ne peuvent s’opposer aux ordres du maître yankee. Les Américains sont parvenus presque au faîte de leur domination politique et économique et ils ne pourraient guère avancer désormais ; n’importe quel changement dans la situation pourrait se changer en un recul de leur primauté. Leur politique est de conserver ce qu’ils ont conquis. La ligne d’action se limite actuellement à l’emploi brutal de la force pour étouffer les mouvements de libération quels qu’ils soient.

Le slogan "Nous ne permettrons pas un autre Cuba" dissimule la possibilité de commettre impunément des agressions comme celle perpétrée contre la République dominicaine, ou précédemment, le massacre de Panama, et le clair avertissement que les troupes yankees sont disposées à intervenir n’importe où en Amérique où l’ordre établi est troublé, mettant en péril les intérêts américains. Cette politique bénéficie d’une impunité presque absolue ; l’O.E.A. pour discréditée qu’elle soit, est un masque commode ; l’O.N.U. est d’une inefficacité qui confine au ridicule et au tragique ; les armées de tous les pays d’Amérique sont prêtes à intervenir pour écraser leurs peuples. De fait, l’internationale du crime et de la trahison s’est constituée. Par ailleurs, les bourgeoisies nationales ne sont plus du tout capables de s’opposer à l’impérialisme - si elles l’ont jamais été - et elles forment maintenant son arrière-cour. Il n’y a plus d’autres changements à faire : ou révolution socialiste ou caricature de révolution.

L’Asie est un continent aux caractéristiques différentes. Les luttes de libération contre diverses puissances coloniales européennes ont entraîné l’établissement de gouvernements plus ou moins progressistes, dont l’évolution ultérieure a été, dans certains cas, l’approfondissement des objectifs premiers de la libération nationale, et dans d’autres le retour à des positions pro-impérialistes.

Du point de vue économique, les Etats-Unis avaient peu à perdre et beaucoup à gagner en Asie. Les changements les favorisent ; on lutte pour évincer d’autres puissances néocoloniales, pour pénétrer dans de nouvelles sphères d’action sur le terrain économique, parfois directement, d’autres fois en utilisant le Japon.

Mais il existe des conditions spéciales, surtout dans la péninsule indochinoise, qui donnent à l’Asie des caractéristiques d’une importance exceptionnelle et qui jouent un très grand rôle dans la stratégie militaire globale de l’impérialisme américain. Celui-ci étend un cercle autour de la Chine à travers la Corée du Sud, le Japon, Taiwan, le Sud-Vietnam et la Thaïlande, au moins.

Cette double situation : un intérêt stratégique aussi important que l’encerclement militaire de la République populaire de Chine et l’ambition des capitaux yankees d’avoir accès à ces grands marchés qu’ils ne dominent pas encore, font que l’Asie est l’un des lieux les plus explosifs du monde actuel, malgré l’apparente stabilité qui règne en-dehors de la zone vietnamienne.

Appartenant géographiquement à ce continent, mais avec des contradictions qui lui sont propres, le Moyen- Orient est en pleine ébullition, sans que l’on puisse prévoir les proportions que prendra cette guerre, froide entre Israël, soutenu par les impérialistes, et les pays progressistes de la zone. C’est un autre des volcans qui menacent le monde.

L’Afrique offre les caractéristiques d’un terrain presque vierge pour l’invasion néocoloniale. Il s’y est produit des changements qui, dans une certaine mesure, ont obligé les puissances néocoloniales à céder leurs anciennes prérogatives de caractère absolu. Mais quand les processus se développent sans interruption, au colonialisme succède, sans violence, un néo-colonialisme dont les effets sont les mêmes en ce qui concerne la domination économique.

Les Etats-Unis n’ont pas de colonies dans ce continent et maintenant ils luttent pour pénétrer dans les anciennes chasses gardées de leurs partenaires. On peut assurer que l’Afrique constitue dans les plans stratégiques de l’impérialisme américain un réservoir à long terme ; ses investissements actuels ne sont importants qu’en Union Sud-africaine et sa pénétration commence au Congo, au Nigéria, et dans d’autres pays où s’amorce une concurrence violente, (de caractère pacifique pour l’instant) avec d’autres puissances impérialistes.

L’impérialisme n’a pas encore de grands intérêts à défendre sauf son prétendu droit à intervenir dans n’importe quel endroit du monde où ses monopoles flairent de bons profits ou la présence de grandes réserves de matières premières.

Toutes ces données justifient que l’on s’interroge sur les possibilités de libération des peuples, à court ou à moyen terme.

Si nous analysons l’Afrique, nous verrons qu’on lutte avec une certaine intensité dans les colonies portugaises de Guinée, du Mozambique ou de l’Angola, avec un succès notable dans la première, un succès variable dans les deux autres. Qu’on assiste encore à la lutte entre les successeurs de Lumumba et les vieux complices de Tshombé au Congo, lutte qui semble pencher actuellement en faveur des derniers, qui ont "pacifié" à leur propre profit une grande partie du pays, si bien que la guerre y demeure latente.

En Rhodésie, le problème est différent : l’impérialisme britannique a utilisé tous les mécanismes à sa portée pour livrer le pouvoir à la minorité blanche qui le détient actuellement. Le conflit, du point de vie de l’Angleterre n’est absolument pas officiel ; avec son habileté diplomatique habituelle - appelée clairement aussi hypocrisie - cette puissance se contente de présenter une façade de réprobation face aux mesures prises par le gouvernement de Ian Smith ; son attitude rusée bénéficie de l’appui de certains pays du Commonwealth qui la suivent, et elle est attaquée par une bonne partie des pays de l’Afrique Noire, qu’ils soient ou non de dociles vassaux de l’impérialisme anglais.

En Rhodésie, la situation peut devenir extraordinairement explosive, si les efforts des patriotes noirs pour prendre les armes se cristallisent et si ce mouvement reçoit effectivement l’appui des nations africaines voisines. Mais, pour le moment, tous ces problèmes sont discutés dans des organismes aussi inopérants que l’O.N.U, le Commonwealth ou l’O.U.A..

Néanmoins, l’évolution de la politique et sociale de l’Afrique ne laisse pas prévoir une situation révolutionnaire continentale. Les luttes de libération contre les Portugais doivent déboucher sur la victoire, mais le Portugal ne signifie rien sur la liste des employés de l’impérialisme. Les affrontements de portée révolutionnaire sont ceux qui mettent en échec tout l’appareil impérialiste mais nous ne devons pas pour autant cesser de lutter pour la libération de trois colonies portugaises et pour l’approfondissement de leurs révolutions.

Quand les masses noires de l’Afrique du Sud ou de la Rhodésie auront commencé leur authentique lutte révolutionnaire, une nouvelle époque aura commencé en Afrique ; ou quand les masses appauvries se lanceront à l’action pour arracher des oligarchies gouvernantes leur droit à une vie digne.

Jusqu’à maintenant les coups d’Etat se succèdent où un groupe d’officiers en remplace un autre groupe ou un gouvernant qui ne sert plus ses intérêts de caste ni ceux des puissances qui les manient sournoisement, mais il n’y a pas de convulsions populaires. Au Congo, le souvenir de Lumumba a animé ces mouvements caractéristiques qui ont perdu leur force au cours des derniers mois.

En Asie, comme nous l’avons vu, la situation est explosive et les points de friction ne se trouvent pas seulement au Vietnam et au Laos où on lutte. Ils se trouvent au Cambodge où l’agression américaine directe peut commencer à n’importe quel moment, de même qu’en Thaïlande, en Malaisie, et évidemment en Indonésie, où nous ne pouvons penser que le dernier mot ait été dit, malgré l’anéantissement du Parti communiste de ce pays quand les réactionnaires ont pris le pouvoir. Et, il y a bien sûr le Moyen-Orient.

En Amérique latine, on lutte les armes à la main au Guatémala ; en Colombie, au Vénézuela et en Bolivie, et les premiers signes se manifestent déjà au Brésil. Il y a d’autres foyers de résistance qui surgissent et s’éteignent. Mais presque tous les pays de ce continent sont mûrs pour une pareille lutte, qui pour triompher exige pour le moins l’instauration d’un gouvernement de tendance socialiste.

Dans ce continent, on parle pratiquement une seule langue sauf le cas exceptionnel du Brésil dont le peuple peut être compris des peuples de langue espagnole, étant donné la similitude entre les deux langues. Il y a une identité si grande entre les classes de ces pays, qu’ils parviennent à une identification de ce caractère "international américain", beaucoup plus compliqué que sur d’autres continents. Langue, coutumes, religion, le même maître sont les facteurs qui les unissent. Le degré et les formes d’exploitation sont identiques quant à leurs effets, tant pour les exploiteurs que pour les exploités de la plupart des pays de notre Amérique. Et la rébellion est en train d’y mûrir à un rythme accéléré.

Nous pouvons nous demander : cette rébellion comment fructifiera-t-elle ? Quelle forme prendra-t-elle ? Nous soutenons depuis longtemps qu’étant donné les caractéristiques similaires, la lutte en Amérique atteindra, le moment venu, des dimensions continentales. L’Amérique sera le théâtre de grandes batailles nombreuses livrées par l’humanité pour sa libération.

Dans le cadre de cette lutte de portée continentale, les luttes qui se poursuivent actuellement de façon active ne sont que des épisodes, mais elles ont déjà donné les martyrs qui auront leur place dans l’histoire américaine pour avoir donné leur quote-part de sang nécessaire pour cette dernière étape de la lutte pour la pleine liberté de l’homme. Dans ce martyrologue figureront les noms du commandant Turcio Lima, du Père Camilo Torres, du commandant Fabricio Ojeda, des commandants Lobaton et Luis de la Puente Uceda, figures de premier plan des mouvements révolutionnaires du Guatemala, de Colombie, du Venezuela et du Pérou.

Mais la mobilisation active du peuple crée ses nouveaux dirigeants : César Montes et Yon Sosa lèvent le drapeau au Guatemala ; Fabio Vasquez et Marulanda le font en Colombie ; Douglas Bravo à l’Ouest et Américo Martin dans les montagnes du Bachiller dirigent leurs fronts respectifs au Venezuela.

De nouveaux foyers de guerre surgiront dans ces pays-là et d’autres pays américains, comme c’est déjà le cas en Bolivie, et de plus en plus ils augmenteront, avec toutes les vicissitudes qu’implique ce métier dangereux de révolutionnaire moderne. Beaucoup mourront victimes de leurs erreurs, d’autres tomberont dans le dur combat qui s’approche ; de nouveaux lutteurs et de nouveaux dirigeants surgiront dans l’ardeur de la lutte révolutionnaire. Le peuple formera peu à peu ses combattants et ses guides dans le cadre sélectif de la guerre même, et les agents yankees de répression augmenteront. Aujourd’hui, il y a des conseillers dans tous les pays où se poursuit la lutte armée et l’armée péruvienne a réalisé, à ce qu’il paraît avec succès, une battue contre les révolutionnaires de ce pays, lui aussi conseillé et entraîné par les yankees. Au Pérou même, de nouvelles figures, pas encore connues, réorganisent la lutte de guérilla avec ténacité et fermeté. Peu à peu, les armes périmées qui suffisent à réprimer de petites bandes armées cèderont la place à des armes modernes et les groupes de conseillers seront remplacés par des combattants américains, jusqu’à ce que, à un moment donné, ils se voient forcés d’envoyer des effectifs croissants de troupes régulières pour assurer la stabilité relative d’un pouvoir dont l’armée nationale fantoche se désintègre sous les coups de la guérillas. C’est la voie prise par le Vietnam ; c’est le chemin que doivent suivre les peuples : c’est le chemin que suivra l’Amérique, avec la particularité que les groupes en armes pourront former des Conseils de Coordination pour rendre plus difficile la tâche répressive de l’impérialisme yankee et faciliter leur propre cause.

L’Amérique, continent oublié par les dernières luttes politiques de libération, qui commence à se faire entendre à travers la Continentale par la voix de l’avant-garde de ses peuples, qui est la Révolution cubaine, aura une tâche d’un relief beaucoup plus important : celle de créer le Second ou Troisième Vietnam ou le Second et le Troisième Vietnam du monde.

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