Essayons de poser les choses de façon conceptuelle - pas personnelle.
Qu’est-ce que le Capitalisme ?
Marx n’utilise pas ce vocable, que je sache. Il évoque et décrypte un mode de production capitaliste.
Historiquement, le mode de capitalisme s’est développé sous dictature du Capital, masquée par les oripeaux des " républiques bourgeoises".
On a vu, avec la Commune de de Paris de 1971, mise à mal par un soulèvement populaire, les capacités sanglantes de la dictature du Capital.
La bourgeoisie en a tiré les leçons.
Par peur de nouvelles communes, elle s’est orientée vers le mode de production impérialiste, étendant la dictature du Capital à la planète entière, au nom des "Droits de l’Homme", tout en s’assurant l’intégration, économique et matérielle, autant qu’idéologique et culturelle, de larges fractions du prolétariat, de la classe ouvrière historique, industrielle. Dans les pays du "centre", c’est l’heure " social-démocrate"…
A son tour, cette stratégie impérialiste se heurte à des limites, avec les mouvements de Libération des peuples opprimés des lointaines " périphéries".
Certains de ces peuples, dans la Russie des tsars, sous étroite domination économique et politique des puissances dominantes d’Europe occidentale, dont la France, réussissent même, en 1917, à " renverser la table" en créant le premier État socialiste de l’Histoire, au prix d’une longue et cruelle guerre civile, qui laisse le jeune état " soviétique" exsangue, ravagé, durablement déformé, militarisé, mais debout, faisant souche.
Cet exemple, et la dynamique qu’il entraîne, en Europe, provoque une véritable panique dans les métropoles du Capitalisme européen, qui craint pour ses possessions coloniales, et même pour son propre pouvoir d’État, de Londres à Paris,ou Berlin.
Hitler représente la plus impressionnante tentative de refouler et de détruire le monstre surgi à l’ " Est". La force du " National Socialisme" allemand,et de ses compères de Rome, ou du Japon, est d’associer plusieurs dynamiques complémentaires :
- Guerre impériale, visant principalement l’Union Soviétique.
- Intégration économique et culturelle de la classe ouvrière allemande.
- Destruction, en terres germaniques, des forces communistes organisées, qui avaient eu la naïveté de croire en l’imminence d’une révolution prolétarienne au cœur du " capitalisme le plus développé", en Europe, alors que l’extension du mouvement révolutionnaire se fait vers le grand " Orient Rouge".
- Destruction des " libertés bourgeoises", parlementaires, presse, syndicats, concédées à contre-cœur, sous la pression des insurrections européennes du XIX ème siècle, et dans lesquelles s’était épanoui, puis dangereusement amolli, le prolétariat allemand et une large fraction du peuple.
- Politique de bouc émissaire à partir de la mythologie d’une " race supérieure" ( " aryenne"), tirée des textes hébraïques et retournée contre les infortunés ashkenazes d’Europe et de Russie, fils de l’Empire Khazar, sur les vastes territoires de l’Ukraine actuelle…
Cette puissante tentative de restauration, mondiale, de la Dictature du Capital, a connu de vrais succès. Mais elle a échoué. Hitler perd, et meurt. Mussolini, à qui JLM ressemble de plus, en prenant de l’âge,pareil. Croc de boucher.
L’Histoire ayant tendance à repasser les plats, une deuxième tentative de rétablissement de la Dictature du Capital a lieu, de, 1945 (Hiroshima) à 1968-75), sous hégémonie de Washington, cette fois.
Elle échoue également, quand l’offensive du Printemps Lunaire de l’année du Singe Rouge Bondissant ( Têt) vient démontrer, de façon spectaculaire, aux yeux de la planète entière, que l’Amérique des B52, du Napalm, de la CIA, et d’Apocalypse Now, a perdu ce " big stick" dont parlait JFK, convaincu que l’enjeu central de la Guerre du Vietnam était de prouver, de façon définitive, état de prouver qu’il était toujours dans les mains des États-Unis d’Amérique.
1968 amorce la fin de l’ère impérialiste. Rien n’est éternel. Face aux stratégies, défensives, de guerre populaire prolongée ( gpp), le système de domination s’avère incapable de poursuivre son extension, donc, fait faillite, et craque, partout, par pans entiers. Afrique Australe (Cuito Canavale…). Iran. Nicaragua, Salvador, puis Vénézuela, protégeant et sauvant Cuba. Etc.
La contre-offensive des années Reagan-Thatcher-Mitterrand échoue sur toute la ligne.
Sous la direction éclairée d’Andropov, et du KGB, l’URSS peut enfin amorcer une stratégie de sortie de crise, sous la forme d’une retraite/restructuration organisée dans la longue durée, plus ou moins maîtrisée, jusqu’à ce que Poutine stabilise.
La Chine, enfin, peu, dès 1968,puis 72, amorcer, avec la "diplomatie du ping-pong", puis ’ "ouverture",une " Nouvelle Nouvelle Politique Économique" ( N.N.E.P.), réalisant une intuition stratégique de Lénine que les rapports de force géopolitiques mondiaux des années 20, 30, et 40, et, notamment, la montée du Nazisme à ses frontières, n’avaient pas permis de mettre en œuvre, sous la forme de la première N.E.P. ( " Lénine, les paysans, Taylor", thèse initiale de Robert Linhart)…
Nous sommes dans cette " nouvelle ère". Elle ne sera pas éternelle. Rien ne l’est. Mais elle est durable, structurelle.
On a fait toute une montagne du coup d’État, fasciste, de Pinochet, en1973. Sans analyser les causes de la défaite de ce brave Allende et de ses alliés d’extrême-gauche, incapables d’anticiper la menace, de la gérer, et de la vaincre, comme les divers mouvements révolutionnaires ou révolutionnaristes d’Amérique du Sud avaient, trop longtemps, été incapables d’affronter les autres dictatures militaires, fascistes, de cette région, tenues à bout de bras par Washington.
Ma génération - quel âge as-tu, au fait, ami ? - a failli tomber dans le piège, confusionniste, tendu par le trouble Glucksman, et d’autres, pour lesquels Pompidou, c’était Pinochet ; Marcellin, Eichmann ; un capitalisme modernisateur autoritaire, certes, capable de violence, une improbable résurrection de Hitler, etc.
Si nous étions tombés dans ce piège, nous ne nous serions pas contenter d’exécuter l’assassin de Pierrot, nous aurions saisi cette occasion pour déclencher la " guerre populaire prolongée", sans passer par l’étape, indispensable, légitimante, de vastes soulèvements populaires, sauvagement réprimés, rebondissant sous forme de guerre organisée.
Si l’on fantasme la répression des Gilets Jaunes comme une répétition de la Semaine Sanglante, et le petit Darmanin en Pinochet, ou Macron en Pétain, alors, qu’attend-on pour passer à la lutte armée ?
Un serpent tentateur est là, sur l’arbre d’Adam et Eve, pour nous tendre cette pomme, et nous suggérer, en ondulant, de la croquer.
Je crois avoir montré, avec rigueur, dans les tomes 2 et 3, comment Renato Curcio,Balbara Balzerani, et tant d’autres, avaient cédé à cette tentation - et le prix que nous avions, tous, payé.
Heureusement, pour nous, ici, en France, l’expérience fondatrice de la lutte clandestine armée, maîtrisée, avec la NRP, jamais dissoute et qui n’a jamais rendu ni ses armes, ni quoi que ce soit de son petit "matos", s’est développée sous la forme d’un petit service de renseignement performant, le SR/NRP, créé sur les conseils d’experts, vietnamiens, palestiniens, libanais, etc., tirant eux-mêmes l’enseignement principal de la lutte armée prolongée, en Chine : sans un service de renseignement efficace, créé, dès les débuts, et doté, tôt des moyens nécessaire, sur le plan humain, et matériel, toute lutte armée clandestine est aveugle,et vouée à l’échec.
C’est, donc, par une immersion méthodique, profonde, et continue, au sein de l’ " État profond" d’un pays portant, pour des siècles, l’empreinte de Charles Tillon, de Charles Debarge, de Guingouin, de Passy, Brossolette, et Jean Moulin, que nous avons pu contourner le précipice, conjurer un jeu de massacre, préparé, et compléter une immersion au sein des masses, tout aussi " ininterrompue par étapes", jusqu’à prétendre, aujourd’hui, éclairer le chemin dans la nuit, en évitant les fondrières.
Rebelles ! n’a été écrit que dans cet objectif. Il continue à infuser, doucement. Tout n’y est pas, mais l’essentiel s’y trouve.
A ceux qui ont assez d’envie, de rigueur, de patience, et de modestie, aussi, pour étudier, en profondeur, notre expérience, passée, présente, et à venir,je propose le mot sublime d’un grand-maître du renseignement, de la clandestinité, de la lutte armée, et de Sagesse asiatique : " Je ne suis qu’une petite pierre au bord de la route. Si les gens me le demandent, je leur indique la voie".
- Je ne me prends, certes, ni pour Mao, ni pour Hô : mais je lui ai demandé la route, et je reste prêt à la montrer à qui le demande.
A qui sait, ou prétend savoir, et ne se donne pas les moyens, offerts sur un plateau, de progresser sur le chemin, je n’imposerai pas mes paroles - ni quelque lecture…
" L’homme propose, et Dieu dispose…"
Bien amicalement.
Polo
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