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Ukraine - Le « Diplo » a choisi son camp : l’euro-atlantisme !

samedi 11 juin 2022, par Jean-Pierre Garnier (Date de rédaction antérieure : 11 juin 2022).

Le « Diplo » a choisi son camp : l’euro-atlantisme

11 juin 2022

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Version PDF : http://mai68.org/spip2/IMG/pdf/Le-D…

Depuis le déclenchement d’une riposte armée de la Russie à l’extension continue de l’OTAN vers ses frontières et à la tentative d’annihilation de la population russophone du Donbass par les forces militaires ukrainiennes, Le Monde diplomatique n’a cessé de louvoyer de manière plus ou moins adroite pour masquer son soutien à la coalition euro-atlantiste. Avec l’éditorial de son directeur, Serge Halimi, dans le numéro de juin 2022 imputant au seul Vladimir Poutine la responsabilité des « catastrophes » survenues en Ukraine et à l’armée russe une « conquête destructrice » des villes du Donbass, éditorial qui ne fait que reprendre le « story telling » des médias dominants, la bible journalistique du bobotariat français « degôche » a dévoilé avec plus de clarté le ralliement de facto de ses collaborateurs au camp du Bien « occidental ».

L’époque n’est plus où Halimi dénonçait, comme par exemple dans Le Grand Bond en arrière (2005), la mise à profit par l’impérialisme états-unien de l’effondrement du bloc soviétique, de la disparition du mouvement tiers-mondiste et du ralliement général de la gauche aux politiques néo-libérales pour précipiter le monde, les modes de pensée alternatifs ayant disparu, dans une époque «  non pas que postcommuniste, mais aussi postdémocratique  » comme l’avait pointé le philosophe russe Alexandre Zinoviev, une ère marquée par l’avènement de « la démocratie totalitaire ». Restait à apporter un soutien aux opposants russes à l’initiative soit disant belliciste du « Maître du Kremlin ».

Cela est chose faite avec un article publié dans le même numéro de juin du « Diplo » au titre aussi alléchant que significatif : « La gauche russe se déchire sur l’Ukraine ». L’auteur, Ilya Budraitskis, essayiste politique basé à Moscou, appartient à la mouvance des intellectuels dissidents qui reprochent au Parti communiste de la Fédération de Russie de ne pas se démarquer suffisamment de la politique menée par Poutine sur les plans intérieur et extérieur. Selon lui, le KPRF remplit avec trop de « docilité » son « rôle d’opposition “constructive” » avec un programme « empreint de stalinisme, de nationalisme et de défense d’un État-providence paternaliste ». Aussi se plait-il à distinguer ces « communistes nostalgiques » des « internationalistes » qui, comme lui, lorgnent plutôt vers l’ouest. Ce qui l’amène à fustiger l’appui donné par le groupe parlementaire communiste en faveur de « l’agression contre l’Ukraine ».

Ainsi, alors que les observateurs occidentaux un tant soit peu honnêtes s’accordent pour reconnaitre que les signataires non russes des accords de Minsk les ont considérés dès le départ, encouragés par leurs conseillers étasuniens, comme des chiffons de papier, ce serait, selon notre essayiste, la résolution de onze députés communistes de la Douma demandant au président russe de « reconnaître l’indépendance des “républiques populaires” de l’est de l’Ukraine et de mettre fin au “génocide” de leurs populations » qui aurait mis « un coup d’arrêt aux négociations ». Comme si les 120 000 soldats et mercenaires néo-nazis que le régime de Kiev était en train de masser à la lisière du Donbass avec l’armement correspondant pour opérer une « épuration ethnique » sur le mode de l’Opération tempête menée en août 1995 par les forces croates contre les séparatistes serbes en Yougoslavie, n’avaient jamais existé ! Il est vrai que l’on ne trouve pas trace de cette épuration en préparation dans les autres articles du « Diplo » consacrés au conflit en Ukraine. Pas plus que des 12 000 à 13 000 morts russophones tués de diverses manières depuis le coup d’État de Maïdan en 2014 par la soldatesque nazifiée envoyée purifier le Donbass par les présidents Porochenko puis Zelinski. Bref, le KPRF n’aurait fait en la circonstance que reprendre la « rhétorique officielle concernant la nécessité de “dénazifier et démilitariser” le pays voisin », si l’on excepte trois députés de la Douma et quelques élus locaux du parti qui, selon l’essayiste recruté par le « Diplo », « ont eu le courage de dénoncer publiquement l’invasion en Ukraine ».

Ce tableau de l’opposition russe de gauche à la « guerre criminelle menée par la Russie » n’aurait pas été complet s’il n’avait pas inclus le groupe anarchiste « Action autonome » appelant les soldats russes « à déserter, à désobéir aux ordres criminels et à quitter l’Ukraine immédiatement », et surtout le « Mouvement socialiste russe » qui, de concert avec une organisation ukrainienne idéologiquement sur la même longueur d’ondes, avait publié une déclaration commune de soutien à « toutes les mesures visant à mettre fin au conflit, y compris les sanctions et la fourniture d’armes de défense [sic] à l’Ukraine ». Cela au moment même où celles-ci servent à intensifier les bombardements de la population civile dans les localités du Donbass d’où les force armées kiéviennes ont été chassées. L’auteur croit bon de signaler que ce mouvement est « proche du NPA » français dont la position haineuse à l’encontre de la Russie poutinienne fait les délices des euros-atlantistes hexagonaux. Aussi ne s’étonnera t-on pas de voir publié dans Contretemps, revue de théorie critique, « radicale » bien entendu, proche du NPA, elle aussi, un long entretien de l‘auteur avec Mikhail Lobanov, l’une des figures de proue, au sein du KPRF, d’une « nouvelle vague de militant.e.s de gauche opposé·e.s au pouvoir de Vladimir Poutine ». 

Pour terminer en beauté, Ilia Butraitskis ne pouvait faire moins de conclure sur le parachèvement, grâce à la guerre avec Ukraine, de « la division entre les nostalgiques de l’ancienne puissance étatique de l’URSS et ceux dont le positionnement à gauche se veut un engagement en faveur d’un projet démocratique, antiautoritaire et tourné vers l’avenir ». Un projet passe-partout que le « Diplo » a fait sien depuis quelque temps déjà et qui n’engage à rien, mais qui n’empêche pas, quand la conjoncture géopolitique l’exige, un « positionnement » et un « engagement » résolus aux côtés des défenseurs attitrés du « monde libre » dont le « Diplo » fait désormais partie.

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