Lors de la manif mondiale contre la guerre du Golfe j’étais à Malmö. Cette manif, la plus grande de mémoire de militant, aurait du être le point d’orgue de l’alter mondialisme, un moment de rencontre, de partage et surtout de coordination pour préparer la suite, un mouvement pacifiste mondial. Ce fut un enterrement silencieux sous un soleil de plomb. Pas un slogan, des organisateurs quasis absents qui, quand on leur demandait où était les slogans répondaient invariablement "Vous verrez à la fin, lors des discours."
Ce fut vite vu, le chef des syndicats des transports fut le premier à prendre la parole. Il connaissait des chauffeurs qui étaient tous les jours en Iraq et il fit un bon compte-redu de la situation sur place. Il a continué en disant que les autres organisateurs (attac et les communistes) étaient tous des collabos, qu’il n’avait pas de stand et pas le temps de rester. Il a terminé en disant que vous savez où me trouver. Les discours suivants peuvent se résumer en 2 slogans, ils les ont finalement dit : "Rentrez bien chez vous" et "N’oubliez pas de visiter nos stands.".
Je trouve donc amusant et consternant, de la part d’un communiste, d’oser venir faire croire qu’il aurait participé à un mouvement qu’ils n’ont eu de cesse de dénigrer et de noyauter (comme pendant les forums sociaux où le public, je l’ai vu, se fichait d’eux et de leurs théories tellement grandioses qu’elles sont totalement déconnectées du quotidien des gens) pour finalement l’enterrer. Cela ne m’étonne même pas quand je constate qu’ils avaient fait le même coup aux écologistes lors de Mai 68 où ils avaient mis une semaine pour enterrer les "Non à la guerre" et les "Non à la société de consommation" par du business as usual sous forme de revendications de salaires même pour les ouvriers qui fabriquent les armes de guerres. Le pacifisme, cette exigence de démanteler le complexe militaro-industriel, et l’écologie, cette exigence d’un autre rapport avec la nature, d’une ontologie faite de respect et de solidarité, ne s’en sont jamais remis.
On a vu ce que vaut la gauche contemporaine avec le covid : des socialistes à l’extrême-gauche en passant par beaucoup d’anarchistes, c’est encore pire qu’avant. Le pire n’aura pas été les insultes choisies comme "complotistes", "fascistes" et même quelques bon vieux "anti-sémites", mais bel et bien alors que je voulais proposer une ligne d’action, de m’entendre répondre "On ne va pas discuter de ça, ça va nous pourrir la soirée." Je n’avais encore jamais été confronté à un tel niveau de manipulation égal aux niveaux -1000 de dialectique et 0 de l’action.
Puis est arrivé la guerre d’Ukraine. Et là au miracle la gauche renoue avec l’action, ceci pour organiser des manifs où elle renoue avec ses pires démons du passé pour crier des slogans nationalistes comme "Vive l’Ukraine". On sait tous ce que cela a donné quand dans les années 30, dans une même alliance avec la droite, elle criait "Vive l’Allemagne".
La réforme des retraites est donc aussi une manipulation grossière pour essayer de refaire une santé à la gauche, de lui redonner une légitimité. Elle fait croire que ses syndicats servent à autre chose que pacifier le mouvement et essayer de le rendre inoffensif. Pire, quand je vois la répression qu’à subi la manif pacifique contre les bassines, où des familles, des jeunes et des vieux se sont retrouvés sans somation plongés en zone de guerre par les keufs de la macronie, le mutisme de cette gauche sur cette répression me montre qu’il n’y a rien que nous puissions en espérer, sauf in fine à accepter d’être cruellement déçu par sa collaboration et ses manipulations.
Depuis ma Suisse, je vois une grande différence entre la Suisse et la France. En France vous y croyez et vous vous battez. En Suisse, quand la bande des 7 du Conseil Fédéral annonce qu’il n’y a pas d’argent pour exonérer les retraites à l’augmentation du coup de la vie et qu’en fait, ils vont les baisser en baissant leur taux de conversion, le Suisse baisse la tête sur son IA. Quand les mêmes, une semaine après, leur annonce qu’ils ont trouvé plus de 200 milliards pour des banques pourries, il baisse la tête encore plus. Le Suisse est un looser qui perd car il renonce à se battre, le Français est un looser qui se bat et s’en prend plein le gueule.
Le point commun est que la majorité des gens ne savent pas comment s’organiser. En effet, je retrouve ici les mêmes gauchistes qui nous ont insulté et manipuler pendant le covid dans toutes les luttes sociales. Ils noyautent même des mouvements comme XR et la grève du climat rebaptisée en grève pour l’avenir. Sans compter le grève féministe d’un jour, véritable point d’orgue de la saison où ils et elles se mettent sur leur 31 pour manifester pendant une journée.
Dans ma région, nous avons été quelques rares collectifs à réussir à continuer à animer des lieux pendant le covid. Cela s’est fait grâce à la volonté et l’engagement de quelques personnes. Dans un cas, la Valencienne à Lausanne, un lieu public au milieu d’un parc, cela aura nécessité de dissoudre et reformer 3 fois des collectifs. Cela ne nous aura pas empêché de continuer nos activités. Ceci pour dire que face à des citoyens déterminés et organisés, même à un petit niveau comme un lieu public autogéré, il est possible de naviguer au milieu des obstacles posés par les élus et leurs administrations et d’arriver à ses fins.
Après en France vous vous attaquez à un gros morceau : faire plier Macron. Je partage l’avis de do, ce n’est pas avec des syndicats collabos que vous y arriverez mais avec une grève générale organisée en coordination par la base des mouvements, par les travailleurs et par tous les méprisés de la macronie eux-mêmes. À la Valencienne, nous avons réussis à être forts et à traverser tout le covid et ses confinements sans plier car nous étions des gens du quartier qui nous retrouvions autour d’un intérêt commun, cet endroit. Ceci pour dire que nous devons nous retrouver au niveau du local, ce qui nous permet d’être fort et de pouvoir bâtir sur cette localité vers l’extérieur et les autres luttes sociales ou les autres collectifs.
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