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Pour des banderoles au balcon, la police à domicile.

vendredi 17 avril 2020, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 17 avril 2020).

https://www.mediapart.fr/journal/fr…

16 avril 2020

Camille Polloni

À Paris, Marseille et Caen, des habitants confinés ont reçu la visite de policiers parce qu’une banderole à connotation politique décorait leur fenêtre. Selon les cas, ils ont exigé son retrait ou demandé des précisions sur leurs « revendications ».

Mardi midi, la sonnette retentit chez Thomas et Simon, dans le XIXe arrondissement de Paris. À travers la porte, Thomas demande qui c’est. « La police », lui répond-on de l’autre côté, « à propos de la banderole ». Depuis deux semaines environ, elle orne la fenêtre de leur appartement, au deuxième étage : « Macron, on t’attend à la sortie !! » En noir sur fond blanc, bien visible depuis la rue. Certains passants la prennent en photo.

Thomas ouvre la porte. Ce metteur en scène de théâtre, âgé de 40 ans, dit s’être retrouvé face à « deux policiers en civil, dont l’un portait un masque de protection et l’autre non. Ils avaient des sortes de pendentifs avec “police” écrit en orange sur la poitrine ». Ils n’auraient pas précisé de quel commissariat ils venaient. Thomas rapporte leur dialogue.

« C’est bien vous qui avez mis la banderole ?
— Oui.
— On est montés parce que votre banderole ne plaît pas à tout le monde. Il serait bon de la retirer. »

Selon son récit, les policiers estiment que l’expression « on t’attend à la sortie » pourrait constituer « une menace », voire un « outrage à magistrat ». Thomas explique avoir clarifié ses intentions et celles de son compagnon, âgé de 34 ans. « On peut attendre quelqu’un à la sortie pour discuter, pour s’expliquer. C’est le but. On veut des réponses sur le manque de masques, de tests, demander des comptes sur la gestion de la crise. Pacifiquement. »

La banderole de Thomas et Simon, à Paris, après le passage de la police

À la demande des policiers, Thomas va chercher sa pièce d’identité, pendant que Simon continue à argumenter sur le fond auprès des fonctionnaires. Ceux-ci leur annoncent qu’une « une main courante va être déposée au commissariat » et répètent que la banderole « ne plaît pas à tout le monde ». Après avoir relevé l’identité de Thomas et pris son numéro de téléphone, les agents demandent au couple s’ils vont « retirer » la banderole de leur fenêtre. « On va réfléchir », répondent-ils. Sitôt les policiers partis, ils l’enlèvent, par « peur » d’avoir commis un acte répréhensible qui pourrait les conduire « en garde à vue ou même en comparution immédiate ». Dans la foulée, ils se renseignent auprès d’un avocat et racontent leur mésaventure sur Facebook. Contactée par Mediapart pour préciser le cadre légal de cette intervention et le service auquel sont rattachés ces policiers, la préfecture de police n’a répondu à aucune de nos questions depuis mardi.

À Marseille, une autre banderole provoque depuis quelques jours une succession d’efforts policiers. R., 28 ans, vit avec des amis dans un squat, près de la gare Saint-Charles. Pas un lieu de réunion qui aurait pignon sur rue, mais un simple immeuble d’habitation où vivent quelques personnes. Assignés par le propriétaire, R. et ses amis sont en instance d’expulsion, avec une date d’audience prévue dans plusieurs mois. Certains d’entre eux font partie d’un collectif qui organise des distributions de nourriture pour les plus démunis. Au début du mois d’avril, les occupants de l’immeuble ont apposé une banderole à leur fenêtre : « Tu veux savoir si t’as le corona ? Crache sur un bourgeois et attends ses résultats. Solidarité avec les travailleuses. » Cette phrase à la tonalité satirique fait écho au tweet d’un humoriste américain qui dénonçait, le 20 mars, l’inégalité d’accès aux tests : « Pour un Américain moyen, la meilleure manière de savoir si vous avez le Covid-19, c’est de tousser au visage d’un riche et d’attendre ses résultats. » Un mot d’esprit partagé 188 000 fois sur Twitter et largement repris par des anonymes.

R. raconte qu’en une semaine, l’immeuble a reçu cinq visites de la police. Le 9 avril, les habitants entendent « de grands coups dans la porte » de chez eux, qui donne directement sur la rue. Ils tombent sur des fonctionnaires qui disent avoir été « appelés pour la banderole », veulent entrer et relever leur identité. Face à des occupants qui refusent d’ouvrir, ils repartent bredouille.

Deux jours plus tard, poursuit R. « plusieurs policiers profitent que quelqu’un monte chez [eux] pour forcer le passage et monter dans les escaliers, gazeuse à la main ». Là encore, ils sont éconduits. « On les a invités à descendre en disant qu’on ne parlerait pas avec eux et qu’ils n’étaient pas autorisés à faire ça. Ils ont à nouveau demandé notre identité et que nous enlevions la banderole. Ils ont parlé d’incitation à la violence, prononcé le mot “haine”. » De leur fenêtre, les occupants voient « quatre voitures de police » arriver en bas. Ils décident de retirer la banderole pour avoir la paix et racontent l’épisode sur le site militant Marseille infos autonomes.

Le lendemain, « deux OPJ sont venus, un homme et une femme », rapporte R. « Ils nous ont dit qu’ils voulaient vérifier le nombre d’habitants, procéder à des contrôles d’identité et récupérer la banderole si elle [était] toujours là. » Quatre personnes acceptent de se plier au contrôle d’identité, sans remettre la banderole.

Ce mercredi, à 9 heures du matin, deux policiers sonnent à la porte et remettent une convocation à ces quatre occupants, pour une audition libre l’après-midi même au commissariat de Noailles. Le motif n’est pas précisé. Laurence Henry, l’avocate qui les assiste dans leur procédure d’expulsion, appelle le commissariat pour en savoir plus. « Affichage sauvage », s’entend-elle répondre.

La banderole de R. et de ses amis à Marseille

« L’affichage est effectivement soumis à autorisation préalable, ou réservé à des endroits dédiés », rappelle l’avocate, qui s’étonne quand même du traitement réservé à ses clients : « Quand des gens mettent à leur fenêtre des banderoles de soutien au personnel soignant, on ne les convoque pas. L’OPJ m’a aussi parlé “d’incitation à la haine”, mais, que je sache, “les bourgeois” ne sont pas une catégorie protégée. On n’est pas là pour faire de la morale, on fait du droit. »

Deux des personnes convoquées se rendent à leur audition, qui dure deux heures. R. se souvient que les policiers ont posé quelques questions sur leurs fréquentations et leurs activités militantes, mais qu’ils n’ont accepté de répondre que sur la banderole. « Les policiers en ont profité pour prendre leurs empreintes en les menaçant de garde à vue s’ils refusaient », précise Laurence Henry.

R. raconte une nouvelle intervention de police « ubuesque » à domicile, mercredi soir : « Ils ont forcé notre porte pour venir “expulser et fouiller les lieux”. Puis, face à nos protestations, ils ont sauté dans leur voiture et sont partis. » Contactée jeudi, la préfecture de police de Marseille ne confirme que deux interventions de police : celles du 11 et du 15 avril. La préfecture explique que la première a eu lieu quand « une patrouille a repéré cette grande banderole de quatre mètres sur deux aux fenêtres d’un appartement, mais les policiers n’ont pas pu entrer ». La deuxième aurait eu pour objectif de « convoquer les occupants » au commissariat de Noailles. La préfecture n’a livré aucune explication sur les trois autres visites rapportées par les occupants.

Selon la préfecture, l’enquête n’a pas été ouverte pour « affichage sauvage » mais vise plutôt « le message inacceptable » écrit sur la banderole : « La nature de ces propos peut constituer une incitation à la haine, voire une mise en danger d’autrui en incitant à contaminer volontairement quelqu’un en lui crachant dessus en période d’épidémie. » Elle ajoute qu’après les auditions, « la procédure a été transmise au parquet pour étude ».

Un troisième témoignage est parvenu à Mediapart. L’histoire est racontée par Victor, doctorant en histoire âgé de 23 ans. Au début du confinement, il a accroché une banderole « assez soft » à son balcon du premier étage, en plein centre-ville de Caen : « Il y en a de l’argent magique : du fric pour le service public ! »

Le 8 avril, Victor est réveillé par la sonnette. « Deux policiers municipaux en uniforme, équipés de masques et de gants, se présentent en restant à distance de ma porte d’entrée. » À leur demande, il confirme que la banderole est bien à lui. « Ils m’ont dit que ma banderole “interpelle” – eux ou les voisins, je ne sais pas – et qu’ils aimeraient “connaître mes revendications”. Ils m’ont demandé si je “faisais ça souvent”. C’était lunaire. Je leur ai répondu que le message était assez limpide, pour la défense du service public, et que même si j’ai manifesté contre la réforme des retraites, c’est effectivement ma première banderole. »

La banderole de Victor, à Caen

D’après son récit, les policiers municipaux poursuivent la discussion sur un ton « aimable et cordial ». « Ils m’ont demandé ce que je pensais de la politique locale. J’ai répondu que j’étais en désaccord avec notre maire [Joël Bruneau, ex-LR désormais LREM – ndlr] mais que la banderole portait plutôt sur la politique nationale. Ils m’ont alors demandé si je voulais rencontrer le maire. Là, j’ai pas du tout compris le projet. »

Les policiers municipaux demandent à Victor son nom, sa profession et ses coordonnées (numéro de téléphone et adresse mail). Il accepte de les donner. Contrairement à Thomas et R., Victor n’a pas fait l’objet d’un contrôle d’identité et les agents ne lui ont à aucun moment demandé de retirer sa banderole de la fenêtre.

Au service communication de la mairie de Caen, on confirme que « la police municipale est passée et lui a proposé de rencontrer le maire, qui continue à échanger avec les habitants quelles que soient leurs demandes, malgré le confinement ». Interrogée sur l’opportunité d’initier de tels « échanges » en envoyant la police municipale au domicile d’un particulier, la mairie de Caen ne s’est pas prononcée pour l’instant.

1 Message

  • Pour des banderoles au balcon, la police à domicile. 17 avril 2020 11:32, par a_suivre

    Sur son lit défait, quatre robes de couleur étaient étalées.
    Elle n’arrivait pas à décider laquelle elle mettrait.
    Elle verrait plus tard.
    Elle allait commencer par prendre un grand bain parfumé aux huiles essentielles de Lavande et d’Orange douce.
    Après ce bain relaxant, elle passerait sur ses jambes et sur ses bras cette lotion au jasmin enrichie en huile d’olive et huile d’avocat, qui lui avait été offerte à son anniversaire dans un joli coffret de produit Sabon.
    Elle n’allait pas oublier de soigner ses cheveux, un bon shampoing suivi d’un après- shampoing de chez l’Occitane, sa boutique préférée.
    Avant de se maquiller, elle allait quand-même se décider pour la robe qu’elle mettrait parmi les quatre sur le lit.
    Elle avait choisi les plus printanières car vraiment ce mois de Mars ressemblait à un mois de Mai.
    Elle pouvait s’habiller léger, elle rajouterait juste son grand foulard indigo ramené de son dernier voyage en Grèce.
    Son choix fait, sa tenue de soirée enfin revêtue, elle s’admira dans le miroir intérieur de l’armoire de sa chambre. Elle se plaisait beaucoup.
    Elle sortit de sa petite trousse à maquillage tout ce qui lui fallait pour terminer ses soins de beauté.
    Elle passa avec un petit coton sur son visage sa lotion tonique à l’immortelle biologique, puis sa crème anti-âge à l’immortelle précieuse.
    Ensuite, elle appliqua un fard très clair sur les coins internes de ses yeux puis une légère couche de mascara prune pour agrandir son regard.
    Elle termina par le rouge à lèvres, celui qu’elle préférait, le mat, couleur fuchsia.
    Elle était prête, elle était contente d’elle.
    En sortant de sa chambre, dans le bas de la penderie du couloir, elle balaya rapidement du regard ses diverses paires de chaussures, sûre d’elle, elle enfila les escarpins noirs talons bottiers qu’elle ne mettait pas souvent car ils n’étaient pratiques pour marcher, mais pour ce soir, ça irait.

    Sur le porte manteaux elle prit le foulard indigo et avec entrain elle rejoint son mari qui était au salon.
    Il était littéralement avachi sur le canapé, en jogging, pied nu, le visage pas très frais.
    Fan de Rumba, il regardait en podcast sur son ordinateur un reportage de RFI, la retransmission de l’émission Couleurs Tropicales qui rendait hommage à Aurlus Mabélé, un musicien congolais, figure du Soukous, la Rumba congolaise.
    Malade depuis quelques années, affaibli, le musicien était décédé il y a quelques jours du Covid-19.
    Il leva les yeux vers elle quand elle rentra dans la pièce et en resta bouche-bée.
    Cela faisait des semaines qu’il ne l’avait pas vu ainsi apprêtée …
    Il se pencha sur son ordinateur et mit la vidéo sur « pause ».

    Il la regardait abasourdi.

    - Mais qu’est ce qui t’arrive, ça fait deux heures que tu es dans la salle de bain, je me demandais ce que tu faisais et maintenant te voilà en princesse ! qu’est ce qui te prend ?

    - Et bien, c’est l’heure d’y aller lui dit-elle …

    - Mais d’aller où, tu es frappée ou quoi ? tu as oublié qu’on ne peut pas sortir, qu’on est confiné …

    - Oh, mais quel rabat joie, tu ne changeras donc jamais ! Allez va te raser, met un pantalon, je prends les olives et les cacahuètes, quand tu seras prêt, passe par la cuisine et prend la bouteille de rosé qui est dans la frigo et … rejoins moi sur le balcon, c’est l’heure de l’apéro, les voisins de l’immeuble d’en face y sont déjà.

    Ooooh

    Toulouse - le 21 mars 2020 - Cathy MAYOR (Corona historiette - 3)

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