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Coronavirus - Santé mentale : le confinement rend-il malade ?

samedi 28 novembre 2020, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 28 novembre 2020).

Santé mentale : le confinement rend-il malade ?

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28 novembre 2020

Assawra

Les services de psychiatrie sont de plus en plus sollicités ces dernières semaines. Faut-il craindre une « troisième vague » liée aux troubles psychologiques voire psychiatriques ?

Au dernier décompte de Santé publique France début novembre, 21% des Français présentaient un état dépressif s’exprimant par de la tristesse, des idées sombres, des difficultés de concentration ou de sommeil. Une proportion qui a presque doublé par rapport aux 11% recensés fin septembre. Les troubles anxieux, qui se manifestent par une peur constante et sans objet précis, ont aussi progressé de trois points depuis la fin du mois d’août.

L’évolution à la hausse est telle que le ministre de la Santé Olivier Véran s’est ému le 18 novembre de la possibilité d’une « troisième vague, qui serait une vague de la santé mentale pour les jeunes et pour les moins jeunes ». Comment explique-t-on cette brusque montée des pathologies psychiatriques ? A-t-on identifié des facteurs de vulnérabilité ?

« Pour moi, c’est une épidémie qui a un volet infectieux et un volet psychiatrique, ce qui élargit d’autant le spectre des personnes touchées », résume le Pr Pierre-Michel Llorca, directeur des soins à la Fondation FondaMental, qui participe à une étude internationale COH-FIT.

Les services de psychiatrie du pays voient ainsi la vague monter depuis quelques semaines. « Au CHU de Clermont-Ferrand, la demande de soins pour anxiété ou dépression a été multipliée par 6 ou 8 depuis la fin du mois d’août, parmi lesquels beaucoup de gens qui consultent pour la première fois », estime Jean-Michel Llorca, qui est aussi le chef du service de psychiatrie. « On voit aussi arriver des gens souffrant d’une pathologie psychiatrique dont l’état s’est beaucoup aggravé : ils consomment plus d’alcool ou de drogues, sont plus délirants ou plus déprimés », constate le Pr Xavier Laqueille, chef du service d’addictologie au Centre hospitalier Sainte-Anne à Paris (APHP).

Avoir des antécédents psychiatriques est l’un des facteurs de vulnérabilité identifiés à l’impact mental du confinement, avec le fait d’être jeune, d’être une femme, ou de se trouver dans une situation économique précaire. Le Dr Éric Charles, psychiatre hospitalo-universitaire au CHU de Limoges, voit ainsi dans ses consultations beaucoup de personnes dont l’activité professionnelle est menacée. « Non seulement le confinement les impacte tout de suite, mais il met aussi en jeu leur avenir », explique-t-il.

L’enquête épidémiologique de SPF pointe par ailleurs une forte hausse des états dépressifs chez les jeunes adultes (+ 16 points chez les 18-24 ans et + 15 points chez les 25-34 ans). La professeur de pédopsychiatrie Sylvie Tordjman, du CHU de Rennes, a pour sa part alerté dans les médias sur l’impact du reconfinement pour les enfants et adolescents. « Comparé à la même période en 2019, nous accueillons deux fois plus de jeunes patients aux urgences pédiatriques pour des crises suicidaires, trois fois plus pour les troubles anxieux avec somatisation (des douleurs physiques inexpliquées, NDLR), et quatre fois plus pour les troubles anorexiques », rapporte-t-elle.

L’isolement imposé par le confinement semble être la composante de la crise actuelle qui engendre le plus de souffrances mentales, « davantage que la peur du Covid pour soi ou ses proches », même si celle-ci peut exister, estime Éric Charles. Un avis partagé par Xavier Laqueille. « Nos patients en psychiatrie ont souvent une vie sociale réduite car il leur est difficile de nouer des interactions avec les autres. Mais ils ont besoin de ce minimum. Lorsqu’ils en sont privés par le confinement, ils le vivent encore plus mal car ils n’ont pas les capacités de compenser en allant vers les autres », explique-t-il. Toutefois, par rapport au premier confinement où les gens évitaient les lieux de soin, cette vague-ci se traduit plutôt par un afflux de personnes cherchant à se faire soigner, « ce qui est une bonne chose », estime-t-il. « Et nous avons appris de l’expérience et allons au contact des malades pour prendre de leurs nouvelles. »

Multiplier les interactions sociales est en effet le conseil récurrent des psychiatres adressé à tous pour se protéger des attaques du confinement sur le moral. « Téléphone, réseaux sociaux : tout est bon pour maintenir des contacts », estime le Dr Charles. Jean-Michel Llorca recommande aussi de se contraindre à structurer ses journées, pour éviter par exemple que le télétravail n’empiète sur les autres activités. « Beaucoup d’études ont montré que la désynchronisation des rythmes est un facteur de vulnérabilité à la dépression. »

Ultime conseil : être attentif à son ressenti, à d’éventuels troubles du sommeil, de l’humeur ou de la concentration, et ne pas hésiter à s’adresser à son médecin traitant ou à un psychiatre si l’on se sent mal. « Ce n’est pas une question de faiblesse ni de manque de volonté : nous vivons une période très stressante qui peut rendre les gens malades, insiste le Pr Llorca. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que nous voyons une hausse de nos consultations alors que d’habitude, la psychiatrie fait un peu peur : c’est le signe de souffrances importantes. »

Par Pauline Fréour - Le Figaro du 23 novembre 2020

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