VIVE LA RÉVOLUTION
Accueil du site > Comment publier un article > Catalogne – Espagne : jaune et rouge ou bien Rouge ou Jaune ???

Catalogne – Espagne : jaune et rouge ou bien Rouge ou Jaune ???

jeudi 12 octobre 2017, par Luniterre

Contrairement à une idée répandue dans l’ »extrême-gauche » française, le mouvement ouvrier catalan n’est ni inféodé ni à la remorque de la bourgeoisie nationaliste…  

« Le refus du gouvernement central de négocier la possibilité d’un référendum et l’application disproportionnée et autoritaire de la loi a poussé de nombreux citoyens, qui étaient relativement indifférents, à réclamer maintenant ce référendum à cor et à cri. Indépendamment de leurs positons pour ou contre a l’indépendance. Les adhérents de la CGT sont le reflet de la société catalane. En ce sens, nous respectons l’opinion de chacun d’entre eux. Mais nous ne soutenons pas le gouvernement catalan contre celui de Madrid. En tant qu’organisation syndicale, nos objectifs et préoccupations sont la défense des intérêts et des droits des travailleurs et des citoyens. »

Thomas Lanssens (Syndicaliste CGT)

Depuis plusieurs semaines, l’utilisation de la force par le gouvernement de Mariano Rajoy contre la tenue du référendum sur l’indépendance de la Catalogne a plongé l’Espagne dans la crise. La tension était maximale Dimanche 1er octobre, jour du vote. La CGT avait, le jour même, lancé un appel à la grève générale pour le 3 octobre dans toute la Catalogne. Interview avec Thomas Lanssens, représentant de la centrale anarcho-syndicaliste, au Comité d’entreprise d’AtoS Spain à Barcelone.

LE CONTEXTE : Le gouvernement régional catalan, dominé par une alliance de trois partis indépendantistes, a lancé l’organisation d’un référendum d’autodétermination pour le dimanche 1er octobre. Jugé illégal par la Cour constitutionnelle espagnole, ce référendum est l’objet d’une crise majeure entre le gouvernement central et la Catalogne.

Depuis mi-septembre, Madrid a choisi d’intervenir par la force pour empêcher sa tenue. Arrestation par la Guardia civil de 14 membres de l’exécutif catalan, saisie de millions de bulletins de vote, mise sous tutelle de la région font partie des mesures de rétorsion prise par l’État. Avec pour résultat de déclencher des manifestations massives, l’occupation de l’université et de multiples actes de désobéissance dans toute la région. Parmi ces derniers, le refus des dockers de Barcelone et de Tarragone de décharger le matériel destiné aux forces de répression venues de Madrid.

C’est dans ce contexte que la CGT — troisième force syndicale en Espagne — a appelé à une grève générale le mardi 3 octobre en Catalogne. Thomas Lanssens, représentant syndical CGT au Comité d’entreprise d’AtoS Spain à Barcelone, a répondu aux questions de "Rapports de force".

La rédaction : Pourquoi la CGT appelle-t-elle à une grève générale le 3 octobre ?

Thomas Lanssens (CGT) : Ces dernières années, les travailleurs en Catalogne ont subi une détérioration significative de leurs conditions de vie. Nous avons connu une baisse générale des salaires. Nous avons vu comment les réformes du Code du travail des années 2010 et 2012 ont réduit nos possibilités d’actions face aux employeurs. Cela a entraîné une précarité accrue et une aggravation générale de nos conditions de travail.

Parallèlement, nous avons assisté à une augmentation de la répression, contre les grévistes et les militants sociaux avec des condamnations et des amendes dans le cadre de la « Llei Mordassa » (la loi bâillon).

Enfin, au cours des derniers jours et semaines, nous avons également observé comment cette répression s’est étendue à de nombreux autres secteurs de notre société. Cela ressemble à un processus général de suspension des droits civils par l’État.

La rédaction : Est-ce aussi une réponse à la réaction du gouvernement espagnol face au référendum en Catalogne ?

Thomas Lanssens (CGT) : Nous refusons la présence policière et militaire (la Guardia civil est un corps militaire correspondant à la gendarmerie) que nous avons dû subir ces dernières semaines dans de nombreux lieux de travail. Nous voulons mettre fin à la suspension des droits civils survenue ces derniers jours en Catalogne : perquisitions, fermeture de pages web, violation des correspondances, interdiction d’actes collectifs. Cette grève générale s’inscrit aussi dans l’appel général, de notre organisation et d’autres mouvements et groupes sociaux, à défendre les libertés publiques. En ce sens, il vise à stimuler et à protéger une large mobilisation sociale.

La rédaction : Comment va se passer la grève du 3 octobre ?

Thomas Lanssens (CGT) : La grève générale est convoquée uniquement pour le 3 octobre. Mais devant l’impossibilité de prévoir le déroulement des événements après le 1er octobre (jour du référendum pour l’indépendance) et en tenant compte de la législation sur le droit de grève, la CGT a déposé un préavis jusqu’au 9 octobre. Trois autres organisations appellent à la grève générale en Catalogne : l’intersyndical CSC, l’Intersyndical alternativa de Catalunya (IAC) et la Coordinadora obrera syndical (COS), proche du parti indépendantiste et anticapitaliste la CUP.

C’est une occasion pour les travailleurs de montrer que s’ils sont prêts à manifester pour pouvoir voter un référendum ou pour réclamer l’indépendance, ils sont là aussi pour défendre leurs droits civils et un travail digne.

La rédaction : Quel regard la CGT porte-t-elle sur le référendum et l’indépendance ?

Thomas Lanssens (CGT) : Les décisions au sein de la CGT se prennent par votation depuis la base jusqu’au plus haut niveau. Ainsi, nous sommes pour l’autodétermination des peuples, même s’il est vrai que ce référendum n’offre pas toutes les garanties nécessaires. La CGT n’a pas de position définie vis à vis de l’indépendance parce que son objectif, comme syndicat, est la défense des droits de tous les travailleurs.

Par contre, notre organisation juge intolérable la réponse autoritaire donnée par le gouvernement central et les administrations de l’État. Le refus du gouvernement central de négocier la possibilité d’un référendum et l’application disproportionnée et autoritaire de la loi a poussé de nombreux citoyens, qui étaient relativement indifférents, à réclamer maintenant ce référendum à cor et à cri. Indépendamment de leurs positons pour ou contre a l’indépendance. Les adhérents de la CGT sont le reflet de la société catalane. En ce sens, nous respectons l’opinion de chacun d’entre eux.

Mais nous ne soutenons pas le gouvernement catalan contre celui de Madrid. En tant qu’organisation syndicale, nos objectifs et préoccupations sont la défense des intérêts et des droits des travailleurs et des citoyens.

La rédaction : Comment imaginez-vous la suite des événements ?

Thomas Lanssens (CGT) : L’impossibilité des politiques à résoudre un conflit politique, social et économique a conduit une partie chaque fois plus prononcée des Catalans à chercher d’autres voies pour les résoudre. L’indépendantisme leur promet une solution. S’il y a une progression du nationalisme en Catalogne, à la différence d’autres pays, il n’est pas accompagné de discours xénophobes.

La situation est assez complexe et change chaque jour. Il est donc très difficile de prévoir comment cela va évoluer. Personnellement, je pense que cela va finir en de nouvelles élections principalement centrées sur le thème de l’indépendance.

https://rapportsdeforce.fr/linterna…

A la suite, une autre approche, assez similaire, de cette situation, par un groupe anarcho-syndicaliste français, mais qui semble avoir une bonne connaissance du terrain…

Catalogne : la stratégie de la matraque

Publié le 3 octobre 2017

(par le groupe anarcho-syndicaliste Salvador-Seguí )

« Il n’y a pas eu de référendum d’autodétermination en Catalogne. » Par cette déclaration, Mariano Rajoy fait un peu plus étalage de sa stupidité politique. Les images qui défilent en boucle sur tous les écrans TV et réseaux sociaux le contredisent : il s’est bien passé « quelque chose » ce dimanche 1er octobre, en Catalogne. Plus de 2 millions de personnes se sont exprimées sur l’autodétermination, malgré la brutalité, pour ne pas dire la sauvagerie, de la Garde civile, qui a tout fait pour les empêcher d’accéder aux bureaux de vote. On a pu voir aussi des anti-indépendantistes manifester (y compris à Barcelone), brandissant le drapeau national et entonnant Cara al Sol, chant cher à Franco. La coupure est nette et souligne, si besoin était, la « différence » catalane (langue, culture, traditions…). Le spectacle des violences policières a finalement renforcé les indépendantistes et affaibli l’autorité d’un Rajoy qui, en guise d’arguments, a surtout la matraque.

Et, maintenant, vers quoi va-t-on ? Un État catalan indépendant ? Mais pour quoi faire ? Une république catalane en lieu et place d’une monarchie espagnole ? Oui, mais quelle république ? Traditionnelle, comme ici en France ? Avec des exploiteurs et des exploités, des riches et des pauvres ? Bref, une démocratie bourgeoise avec ses possédants et ses possédés (dans tous les sens du terme) ? État catalan ou État espagnol ? Nous défendons évidemment le droit des peuples à l’autodétermination, les frontières étant plutôt tracées par les vainqueurs de l’Histoire que par les peuples. Demain, le gouvernement de la Generalitat sera-t-il plus aux mains du peuple, ou sera-t-il toujours sous la coupe d’une oligarchie semblable à celle de Madrid ? Pour reprendre la main, les organisations de classe doivent impérativement rappeler quels sont les intérêts des travailleurs.

C’est le sens de l’appel à la grève générale en Catalogne lancé par la CGT catalane, la CSC (Confédération syndicale catalane), l’IAC (Intersyndicale alternative de Catalogne), la COS (Coordination ouvrière syndicale) et la CNT (Confédération nationale du travail). Ces organisations ne se prononcent pas quant à l’indépendance ou non de la Catalogne, tout en rappelant que leurs adhérents sont libres de leur choix. Toutefois, elles dénoncent unanimement les violences policières de ces derniers jours et les attaques contre les droits civiques. Le comité confédéral de la CGT de Catalogne rappelle, lui, que ces attaques et violences existent depuis déjà longtemps. La grève générale en Catalogne déclenchée ce mardi 3 octobre a pour objet d’exiger l’abrogation des « réformes » du travail de 2010 et 2012, de dénoncer la précarité grandissante, la baisse générale des salaires, la dégradation des conditions de travail, la répression exercée contre les grévistes et les militants syndicaux, les amendes administrées au nom de la loi Baillon (Ley Mordaza).

Il s’agit d’un seul jour de grève. Au cas où, la CGT à déposé son préavis jusqu’au 9 octobre. À suivre, donc.

Ramón Pino Groupe anarchiste Salvador-Seguí

_https://salvador-segui.org/2017/10/…

Catalogne : du respect des aspirations démocratiques à… l’autonomie ouvrière

( Publié le 1 octobre 2017 par le groupe anarcho-syndicaliste Salvador-Seguí )

Panique en Ibérie : le gouvernement central de Madrid n’est pas disposé à laisser s’échapper la riche région de Catalogne. La Generalitat (gouvernement catalan) rêve de délimiter officiellement son territoire par de véritables frontières (un mur, peut-être ?)

Bref, ces dernières semaines ont été plus qu’agitées et celles qui viennent ne le seront pas moins. Il faut dire que, plus bête que Mariano Rajoy, ça doit être dur à trouver, lui qui est un digne relais de la pensée du généralissime Franco qui voulait une « Espagne une » (et ne parlant que le castillan). Les diverses opérations policières menées contre les institutions catalanes n’ont fait que renforcer la cause des indépendantistes.

Mais de quoi parle-t-on exactement ? Qui dirige et qui contrôle ? Sûrement pas le prolétariat. Car on assiste quand même à de bizarres prises de positions dans les milieux radicaux (ou prétendus tels). S’opposer à l’autoritarisme de l’État central et sa brutalité, oui, bien sûr, mais il ne s’agit pas de tomber dans le dilemme simpliste « pour un bon État catalan, contre un méchant État espagnol ». Les deux gouvernements ont autant de casseroles au c…, autant d’impliqués dans les scandales de corruption, autant de méthodes musclées pour réprimer les mouvements sociaux de leurs régions respectives. La brutalité des mossos d’escuadra (policiers catalans) n’a rien à envier à celle des gardes civils. Les uns et les autres ont la même mission : défendre les pouvoirs en place et pas les travailleurs. Et on assiste pourtant à ce spectacle étonnant de militants radicalisés prompts à défendre l’autonomie des flics de la Generalitat menacés de passer sous le contrôle du gouvernement de Madrid. Eux aussi vont-ils « embrasser un flic » ?

Où sont passés tous ces « indignés » qui, il y a six ans, voulaient prendre d’assaut le Parlement et qui scandaient : « Ils ne nous représentent pas » ? Se sentent-ils représentés aujourd’hui ? Les coupes budgétaires, les mesures antisociales, les 22 % de chômeurs, les expulsions de celles et ceux qui ne peuvent payer leur hypothèque, tout cela serait-il devenu acceptable si ça émanait du gouvernement d’une Catalogne indépendante ? Sommes-nous devant une sainte alliance du genre des Bonnets rouges en France : exploiteurs et exploités catalans tous unis ? Et lutte des classes aux oubliettes ?

On se souvient que, bien avant 1936, les catalanistes, dans le but d’obtenir l’indépendance, ne cessaient (sans résultat) de solliciter l’aide des militants de la CNT anarcho-syndicaliste alors toute-puissante en Catalogne. On se souvient aussi du traitement qu’ils leur réservèrent pendant la contre-révolution de mai 1937…

Il s’agit aujourd’hui de ne pas se tromper de combat. La lutte indépendantiste n’est pas la lutte des classes. Le patronat catalan n’est pas plus tendre que le patronat espagnol, et, comme le disait en son temps Salvador Seguí, leadeur de la CNT (et accessoirement catalan) : « Le seul ennemi qu’il y a en Catalogne est le même qu’il y a à Madrid : le capitalisme. »

La leçon a été retenue par nos camarades ibères : mieux qu’un référendum le 1er octobre, la CNT et la CGT espagnoles appellent à une grève générale le 3 octobre contre les interventions policières dans de nombreuses entreprises et imprimeries, sans oublier la fermeture de sites Web, la confiscation d’urnes, la fermeture d’écoles, etc. Car, au-delà de la seule question indépendantiste et du résultat du référendum, c’est celle, plus large, du respect des aspirations démocratiques d’une population qui se pose, dans l’urgence.

Pas de paix entre les classes.

_https://salvador-segui.org/2017/10/…

Ramón Pino Groupe anarchiste Salvador-Seguí

.

Un rappel historique de la situation, depuis ses origines au début du XXe siècle, assez long mais assez utilement détaillé a été publié sur « Révolution », blog d’une des tendances trotskystes qui font de l’ »entrisme » au sein de la pseudo « gauche » du PCF. En voici une édition PDF :

HISTO CATALOGNE TMI-PCF

Dans le même ordre d’idée, parmi les « tendances de gauche » du PCF, (mais « non trotskyste », celle là…) a été récemment publié cet autre témoignage encore relativement assez avisé, par sa connaissance du terrain :

"Sur la situation en Catalogne par Andres B. Alonso, ancien militant des JC d’Aragon et secrétaire des Jeunesses communistes de Saint-Martin-d’Hères, 3 octobre 2017

Ce dimanche 1er octobre, le gouvernement régional de la Catalogne (région de plus de 8 millions d’habitants – la plus riche d’Espagne) a appelé les Catalans à voter pour l’indépendance. L’Etat central espagnol avait décrété ce referendum illégal. Depuis des semaines, le président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, avait affirmé que ce vote n’allait pas se tenir. Sa promesse s’est matérialisée le matin même par l’intervention de l’ensemble des forces de police (police nationale et « Guardia Civil » – équivalent espagnol de la gendarmerie), qui ont délogé avec une grande violence les occupants des bureaux de vote.

L’intransigeance d’un disciple du franquisme.

Des jeunes, des parents d’élève, des travailleurs et des retraités avaient occupé dès vendredi soir les écoles où était censé avoir lieu le référendum. Les policiers les ont sortis de force à coups de matraque. En faisant cela, Mariano Rajoy continue à s’ériger en bon disciple de Franco, réglant les différends nationaux en faisant charger la police. Rajoy est bien mal placé pour donner des leçons de démocratie partout dans le monde, spécialement quand il se réfère au Venezuela.

En effet, si la situation en est venue à ce point, c’est premièrement le fait de l’intransigeance de Mariano Rajoy et de la droite du PP (Parti populaire) sur la question catalane.

L’expression nationaliste des intérêts de la bourgeoisie catalane.

Le mouvement indépendantiste catalan, s’appuyant sur une langue et une culture catalanes voisines mais différentes de celles de la Castille, existe depuis plusieurs siècles. Le mouvement indépendantiste et nationaliste moderne a pris ses formes au XIXe siècle, lorsque la Catalogne est devenue un des trois pôles industriels majeurs de l’Espagne.

Les intérêts de la bourgeoisie industrielle catalane se sont développés dans un autre sens que les intérêts de la bourgeoisie rentière de Madrid. C’est cette divergence qui a donné naissance au mouvement nationaliste qui a perduré au long du XXe siècle. La répression primaire de Franco contre la langue et la culture catalanes l’ont alimenté.

Après la mort de Franco, ce mouvement politique a pris une autre forme. L’avènement de la démocratie espagnole a amené une décentralisation de l’Etat. A l’image des nationalistes du Pays Basque, la bourgeoisie catalane s’est dit qu’elle pouvait obtenir plus de privilèges, vis-à-vis des autres régions du pays, en s’organisant en force politique nationaliste. Sur une justification culturelle, deux organisations nationalistes majeures se sont ainsi constituées dans les années 70 : la CDC (Convergence Démocratique de Catalogne, devenue PDeCAT en 2016), de droite, et l’ERC (« Esquerra Replublicana de Cataluña », gauche républicaine de Catalogne).

Ces relais politiques sont un levier pour la bourgeoisie catalane pour faire pression sur le gouvernement espagnol. Ils se montrés efficaces lors de la négociation des financements régionaux. Ils ont aussi permis de faire céder au gouvernement socialiste de Zapatero, en 2006, un statut d’autonomie encore plus important, reconnaissant entre autres, la Catalogne comme une nation, statut qui sera invalidé en 2010. En 2011, l’arrivée au pouvoir de la droite de Mariano Rajoy a marqué la fin de toute négociation en vue de plus d’autonomie à la Catalogne. Les parties sont rentrées dans une impasse.

Le contexte du show de Puigdemont et Junqueras (dirigeants nationalistes catalans).

Le nationalisme catalan a toujours été « sage » en Espagne. Du moins en comparaison avec le nationalisme basque, plus médiatisé, plus polarisé, et violent avec l’ETA, durant le dernier quart du XXe. Les nationalistes catalans, eux, sont restés en bons termes avec les partis espagnols. Ils ont notamment permis en 1996, avec les voix de leurs députés au Parlement, de faire élire le chef de file de la droite du PP de l’époque, José Maria Aznar, président du gouvernement. Tout ceci, dans la logique évoquée précédemment.

Mais la situation se précipite lorsque, en 2010-2011, la droite nationaliste catalane (la CDC) enchaîne les succès électoraux, profitant de l’écroulement des socialistes du PSOE. Elle s’empare du gouvernement régional et de plusieurs municipalités dont Barcelone. Tout cela dans un contexte de profonde crise économique au niveau du pays. Dès 2011-2012, la région et les municipalités doivent appliquer des coupes budgétaires énormes. Elles coupent notamment dans l’éducation et la santé, gérées, en Espagne, entièrement par les régions. Des mouvements de contestation très larges émergent pour tenter de faire barrage à ces politiques qui provoquent la colère de tous les travailleurs d’Espagne.

Dans ce contexte, où les nationalistes de droite doivent ouvertement mener une politique rejetée par l’ensemble des travailleurs, s’ajoutent plusieurs scandales de corruption, remontant à loin. Le cas du « 3% » est le plus emblématique. Il touche directement des membres de CDC, qui s’étaient enrichis en prenant des commissions (de 3% – mais, en fait, c’était même plus) lors de l’attribution de marchés publics.

Pour sauver sa situation politique, la droite nationaliste s’est mise à agiter plus fort que jamais le drapeau de l’indépendance : une diversion en direction des travailleurs de la Catalogne qu’elle a si durement frappés avec ses politiques antipopulaires. Une consultation sur l’avenir politique de la Catalogne s’en est suivie en 2014, à l’initiative du président nationaliste CDC, Artur Mas, demandant si la Catalogne devait être indépendante. Elle déclenchera l’invalidation politique de Mas par Madrid. Mais le mouvement indépendantiste est lancé. Aux élections régionales de 2015, la droite nationaliste réussit à gagner l’appui de la gauche nationaliste sous le drapeau du « oui » à l’indépendance. Elles remportent les élections, et la droite et la gauche nationalistes forment ensemble un gouvernement grâce au soutien de l’extrême-gauche indépendantiste de la CUP. Cette victoire électorale est à l’origine du référendum du 1er octobre 2017, ressuscitant le spectre politique de l’indépendance de la Catalogne.

Contrer la division des travailleurs.

Communistes, nous condamnons les violences policières de ce dimanche 1er octobre. Elles en sont un signe du caractère autoritaire du gouvernement de Madrid. Pour autant, nous ne suivons pas les bourgeoisies catalane et espagnole sur l’opération de diversion que représente la question de l’indépendance.

Ainsi, l’actualité politique de l’Espagne des dernier mois a été polarisée sur le référendum en Catalogne. Elle a permis d’évacuer des questions fondamentales et graves de la vie politique espagnole, comme la baisse des salaires, la précarisation de l’emploi, la montée du chômage après la saison d’été, les problèmes issus du tourisme de masse (sociaux, environnementaux…), l’avenir bouché pour la jeunesse, etc.

De plus, cette diversion sert à monter les travailleurs les uns contre les autres, à raviver l’extrême-droite qui voit clairement la devise franquiste (« Una, grande y libre », une [Espagne] grande et libre) menacée.

Communistes, nous pensons qu’au moment où nos acquis sociaux sont remis en cause en Europe et dans le monde, 25 ans après la chute de l’URSS, ce n’est pas le moment de se laisser diviser par la classe dominante et par le venin du nationalisme qu’elle diffuse.

Unité de tous les travailleurs face à leur adversaire de classe !

http://vivelepcf.fr/6383/sur-la-sit…

Enfin, ce qui aurait pu être en quelque sorte « le meilleur pour la fin », cette prise de posi­tion à prétention « marxiste-léniniste » exprimée par le PCPE en Juin dernier et seulement traduite récemment par ses « amis » français du « PCRF » (les parties soulignées en gras le sont par nous, et on verra rapidement pourquoi ensuite, en guise de conclusion…)

"Le Président de la Generalitat (Gouvernement auto­nome cata­lan, ) a concré­tisé la date et la ques­tion du réfé­ren­dum sur l’indé­pen­dance de la Catalogne. Face à ceci, nous expri­mons nos réser­ves :

1. La classe ouvrière ne tire aucun profit du débat sur le type de ges­tion capi­ta­liste ni sur les cadres dans les­quels celle-ci est struc­tu­rée. Ce sont les dif­fé­ren­tes cou­ches de la bour­geoi­sie qui, dans leur lutte per­ma­nente pour la répar­ti­tion des fruits de notre tra­vail, ont un inté­rêt dans cette bataille. Malheureusement, le manque de cons­cience et d’orga­ni­sa­tion de notre classe amène celle-ci à adop­ter des posi­tions étrangères à leurs inté­rêts, qu’elles soient indé­pen­dan­tis­tes ou anti-indé­pen­dan­tis­tes. Aucune de ces deux options ne repré­sente un futur sou­hai­ta­ble pour notre classe. Notre chemin est celui de l’indé­pen­dance de la classe ouvrière.

2. Ce réfé­ren­dum, avec des garan­ties et la pos­si­bi­lité d’appli­quer le résul­tat, ne se pro­duira pas. La recher­che de recoins légaux pour réa­li­ser le réfé­ren­dum est basée sur une illu­sion, celle qu’on vit dans un État démo­cra­ti­que où opère la sépa­ra­tion de pou­voirs. En réa­lité, nous vivons dans un État qui est l’outil de domi­na­tion d’un bloc oli­gar­chi­que-bour­geois et qui main­tient le mono­pole de la vio­lence pour s’assu­rer ses inté­rêts. Les inté­rêts de cette oli­gar­chie para­si­taire ne pas­sent pas par le sup­port du pro­ces­sus indé­pen­dan­tiste, donc le pro­ces­sus est voué à l’échec, si cette classe n’est pas déga­gée du pou­voir.

3. La recher­che d’alliés inter­na­tio­naux pour attein­dre l’objec­tif indé­pen­dan­tiste va contre la réa­lité. L’Espagne est un fidèle sou­tien des États au sommet de la chaîne impé­ria­liste, contri­buant à sta­bi­li­ser des allian­ces inter-étatiques comme l’UE ou l’OTAN. Aucun de ces États n’est inté­ressé par l’affai­blis­se­ment et la rup­ture de l’Espagne. Il n’existe donc aucune base maté­rielle du sup­port des prin­ci­paux pays occi­den­taux au pro­ces­sus indé­pen­dan­tiste.

4. Les prin­ci­pa­les forces gou­ver­ne­men­ta­les (Parti Populaire au gou­ver­ne­ment cen­tral et Junts pel Sí – Ensemble pour le oui en cata­lan, NDT – en Catalogne) ont un grand inté­rêt à main­te­nir vive la confron­ta­tion en termes natio­naux, faci­li­tant ainsi sa ges­tion et la paix sociale. Il est ainsi empê­ché que la classe ouvrière s’orga­nise et lutte pour ses prin­ci­pa­les préoc­cu­pa­tions comme le chô­mage, la pré­ca­rité, la dis­pa­ri­tion des négo­cia­tions col­lec­ti­ves, les bais­ses des budget des ser­vi­ces sociaux, etc.

5. Nous sommes alors dans un pro­ces­sus qui n’a aucune pos­si­bi­lité de triom­pher, mais qui est vivant grâce à son uti­lité. Communistes Catalans – PCPE appelle la classe ouvrière à ne pas lutter sous un dra­peau étranger à elle, ni pour la cause indé­pen­dan­tiste ni, encore moins, contre elle. La seule voie que l’oli­gar­chie nous montre pour appli­quer le droit à l’auto­dé­ter­mi­na­tion du peuple de Catalogne passe par l’unité de notre classe avec celle du reste de l’État pour abat­tre le pou­voir établi.

Notre chemin est celui de l’indé­pen­dance de la classe ouvrière !

Comunistas Catalanes – PCPE

http://www.pcrf-ic.fr/Referendum-en-Catalogne-la-position-du-PCPE

Publiée le 25 Septembre en France, par le « PCRF », cette déclaration a suscité l’approbation de diverses tendances, dont le blog « Les-7-du-Québec », de l’inénarrable Robert Bibeau…

http://www.les7duquebec.com/7-de-garde-2/independance-de-la-catalogne-ou-independance-de-classe/

Manque de chance pour cet emballement de sympathie « de gauche », le retour de flamme du social-chauvinisme n’était pas loin, et il s’est produit dès le « succès » très relatif du referendum, suivi de contre-manifestations réactionnaires tout aussi massives que celle des « indépendantistes »…

Le prétexte de ce retournement de veste est la violence de la répression, qui aboutirait, un fine et malgré l’impasse qu’il représente toujours, à « légitimer » le processus enclenché par la bourgeoisie nationaliste réactionnaire…

Difficile de faire plus confus et contradictoire… Extraits :

« La répres­sion exer­cée par le Gouvernement espa­gnol contre les ins­ti­tu­tions cata­la­nes est une agres­sion sans pré­cé­dent dans l’Histoire récente, qui va à l’encontre du dis­cours offi­ciel sur l’inva­li­dité et l’inu­ti­lité du réfé­ren­dum du 1er octo­bre 2017. »

(…)« Nous avons été inca­pa­bles de pro­po­ser une alter­na­tive indé­pen­dante qui mette l’accent sur les ques­tions qui nous ras­sem­blent en tant que classe, et non pas sur celles qui nous sépa­rent par rap­port à la cons­cience natio­nale. C’est pour cela que la classe ouvrière est pri­son­nière de l’idéo­lo­gie domi­nante, c’est pour cela que la défense des aspi­ra­tions natio­na­les du peuple cata­lan est diri­gée par des forces bour­geoi­ses et que la classe ouvrière espa­gnole se laisse entraî­ner par un Gouvernement bour­geois qui ne com­prend que le lan­gage de la vio­lence et la répres­sion. Pour toutes ces rai­sons, il est d’autant plus néces­saire que les com­mu­nis­tes cla­ri­fient publi­que­ment leurs posi­tions. »

Clarifier ?? Ici, c’est carrément « l’hôpital qui se moque de la charité », car ce qui était « le chemin de l’indépendance de la classe ouvrière » est devenu :

« Nous appe­lons à par­ti­ci­per aux mobi­li­sa­tions contre la répres­sion, et à incor­po­rer plei­ne­ment la lutte de clas­ses, les reven­di­ca­tions de notre classe, à la lutte démo­cra­ti­que. Elles doi­vent néces­sai­re­ment être unies pour donner tout son sens à la mobi­li­sa­tion ouvrière et popu­laire. »

Une « lutte démocratique » qui est donc désormais tout à fait à la remorque de la bourgeoisie nationaliste réactionnaire, dont le processus « indépendantiste » vient juste encore, dans ce même texte, d’être décrit comme une impasse…

A noter que si le « PCRF » a pu republier, à quelques jours d’intervalle et sans sourciller, ces deux aspects d’un revirement « gauche-droite », son compère en social-chauvinisme, le « PRCF ( P-R-CF >-< P-C-RF, pour ceux qui ont du mal à s’y retrouver…), le « PRCF », donc, plus prudent, et surtout, plus cohérent, apparemment, dans son social-chauvinisme, s’était, semble-t-il, habilement abstenu de publier le premier communiqué, ce qui lui permet, en outre, de « revendiquer » actuellement, quasiment et implicitement, « l’amitié » du PCPE :

« Les communistes d’Espagne (PCPE), expliquent les tenants et aboutissants de la situation dans un communiqué qu’ils ont adressé à la commission internationale du PRCF »

Pour nous, le véritable honneur, c’est celui qui consiste à ne pas être de ces « amis » là…

Pour mémoire, d’un point de vue réellement ML, une lutte démocratique suppose une majorité populaire réelle et implique que que le parti prolétarien puisse y intervenir de façon réellement autonome, c’est à dire, précisément, sans brader sa propre indépendance, comme c’est le cas actuellement pour tous ces pseudos « partis »…

Luniterre

************

Source de la compilation :

https://solydairinfo.wordpress.com/2017/10/11/catalogne-espagne-jaune-et-rouge-ou-bien-rouge-ou-jaune/

***********************

1 Message

  • PAS DE RÉACTIONS, ICI, MAIS UN DÉBAT AMORCÉ SUR SOLYDAIRINFO,

    DONT CE POINT :

    Bonjour à tous !

    Comme il n’est pas possible de mettre un commentaire sur le site du « PC Maoïste » (Dazibaos, où êtes vous…??!), et qu’un camarade québecois a voulu citer en exemple un de ses articles sur Solydairinfo, voici la réponse que nous y faisons… :

    https://solydairinfo.wordpress.com/…

    *****************************************

    M.L.

    13 octobre 2017 à 14 h 53 min

    Vous trouverez ci-après un lien hypertexte qui mène à une anlayse qui rejoint un peu la tienne sur la question nationale en Catalogne. https://reconstructioncommuniste.wo…

    Extrait : « Que se passe-t-il en Catalogne ? Cette nation présente sur plusieurs territoires de culture catalane (Valence, Baléares, Andorre,…), située principalement dans l’Etat espagnol, et en partie dans l’Etat français, a une situation politique qui évolue rapidement : une crise politique sans précédent s’est déclarée. Le gouvernement de la Generalitat (l’organisation politique détenant les pouvoirs exécutifs et législatifs régionaux de cette « communauté autonome », intégré il y a plusieurs siècles dans l’Etat espagnol) a promis depuis 2015 d’avancer vers la voie de l’indépendance. Pour cela, la Generalitat a convoqué un référendum pour le 1er octobre 2017.

    (…)

    NDLR : ICI, NOUS NOUS PERMETTONS DE COUPER LA CITATION, DE TOUTE FAÇON INCOMPLÈTE, POUR LA REMPLACER PAR LA CONCLUSION DE L’ARTICLE CITÉ, AVEC LE LIEN VERS L’ARTICLE D’ORIGINE, CE QUI NOUS PERMET D’Y RÉPONDRE PLUS FRANCHEMENT… :

    « Le nationalisme bourgeois de toute nation opprimée possède un contenu démocratique qui est dirigé contre l’oppression, c’est celui-là que nous soutenons. En revanche nous ne soutenons pas le contenu qui vise à renforcer le nationalisme et les privilèges de la bourgeoisie nationale et qui casse la conscience de classe du prolétariat en effaçant les distinctions de classes entre bourgeois, petits-bourgeois et prolétaires.


    « Sous prétexte que ses demandes sont « pratiques », la bourgeoisie des nations opprimées va appeler le prolétariat à soutenir ses aspirations sans condition… Le prolétariat est opposé à une telle pratique. Tout en reconnaissant l’égalité des droits à un Etat national, il valorise surtout et avant tout l’alliance des prolétaires de tous les pays, et évalue toute demande nationale, toute séparation nationale, sous l’angle de la lutte de classe des travailleurs. Pour les travailleurs, la chose importante est de distinguer les principes des deux tendances. Dans la mesure où la bourgeoisie de la nation opprimée combat l’oppresseur, nous sommes toujours, dans tous les cas, et plus fortement que quiconque en sa faveur, car nous sommes les ennemis les plus constants et les plus fervents de l’oppression. Mais dans la mesure où la bourgeoisie de la nation opprimée est favorable à son propre nationalisme bourgeois nous somme contre. » (Lénine, cité par Ibrahim Kaypakkaya dans La Question Nationale en Turquie, 1971)

    Nous soutenons donc le droit à l’autodétermination de la nation catalane. Et nous soutenons l’unité du prolétariat catalan et espagnol contre les intérêts de la bourgeoisie et des propriétaires. »

    Source :

    http://www.pcmaoiste.org/communique…

    Réponse

    tribunemlreypa

    13 octobre 2017 à 16 h 13 min

    En tenant compte de la citation de Lénine, d’une part, et des passages soulignés en gras par nous dans cette conclusion, ne vois tu pas la contradiction, camarade ?

    C’est à dire la pirouette pseudo « théorique » pour pouvoir adhérer au consensus vaguement « de gauche », et en réalité, tout à fait social-chauvin que certains « ML », maoïstes,trotskystes (NPA), et autres supposés « gauchistes » s’empressent de tisser autour de ce mouvement tout à fait réac, sous le juste prétexte, par contre, de protester contre la répression ?

    Protester contre la répression est une chose, être solidaire de cette pseudo « lutte de libération », une autre… ! En effet, où sont les critères qui définiraient une « oppression » de la nation catalane ? Nulle part ! Où sont les critères qui définissent l’oppression du prolétariat catalan et espagnol œuvrant pour la bourgeoisie « nationaliste » catalane ? Ils sont précisément d’abord dans la politique de cette bourgeoisie "nationale" catalane et de son embryon d’État, sa « Generalitat », et nulle part ailleurs !

    C’est ce qui ressort de toutes les études économiques sur le sujet, et c’est pourquoi je n’ai pas jugé utile d’y revenir dans cette revue de presse, tant le fait paraît déjà évident, à travers les témoignages cités.

    Il n’y a rien d’une « lutte de libération », là dedans, et contrairement également à ce que tente d’accréditer le groupuscule d’activistes catalans tout à fait « bobocratique » de la « CUP », en réalité une officine de collaboration de classe avec le nationalisme, entièrement pilotée par la petite bourgeoisie, tout comme notre « FI » ou notre « NPA » et autres « verts-rouges », en France !

    Luniterre

    Répondre à ce message

Répondre à cet article

SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0