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Comaguer 423 - 14 février 2021 - Politique chinoise et langue chinoise

vendredi 5 mars 2021, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 5 mars 2021).

Comaguer n° 423 - 14 février 2021

http://comaguer.over-blog.com

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Politique chinoise et langue chinoise

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Version PDF : http://mai68.org/spip2/IMG/pdf/Comaguer423.pdf

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Le débat occidental sur la politique chinoise actuelle a tendance à se concentrer sur l’affirmation de la direction chinoise selon laquelle elle construit un « socialisme à la chinoise ». Et d’aucuns d’ironiser. La question d’un modèle et d’une voie unique au socialisme est pourtant cruciale pour l’avenir de l’humanité.

Pour éviter l’enlisement du débat il peut être intéressant de faire un détour par la langue que parlent les chinois et les dirigeants du PCC

En chinois la Chine c’est Zhong guó deux caractères qu’en occident nous lisons dans l’ordre inverse. La traduction occidentale la plus répandue est : « L’empire du milieu ».

Cette formulation est trompeuse car elle permet deux glissements sémantiques : la Chine étant depuis 2000 ans un empire elle le resterait et deuxio elle se considère comme le centre du monde.

Les chinois eux-mêmes ne considèrent pas leur pays comme un empire. ?? Zhong guó c’est le pays au centre. En chinois tous les pays du monde s’appellent :’quelque chose qui les caractérise’ suivi de guó . La France est ??Faguó, le pays du droit, de la loi ou de la méthode (hommage à Descartes ?).

Pour parler d’autres empires (comme l’empire romain) ils utilisent le caractère ?? dì guó c’est-à-dire le pays de l’empereur .Ce même caractère peut également être utilisé pour désigner l’impérialisme dont la Chine a subi les outrages pendant un siècle.

Cette distinction a du sens. Les chinois savent qu’avant la création du premier empire au I° siècle avant JC la Chine était divisée, mais aussi qu’ensuite, à différentes périodes troublées de son histoire, elle l’a encore été à plusieurs reprises, les changements de dynastie n’ont pas toujours été des périodes calmes. Enfin, quand à l’issue de la longue guerre entre le Guomindang et les communistes chinois, qui n’a été que suspendue pendant la résistance commune à l’invasion japonaise, l’unité s’est reconstituée en 1949, il s’est agi de la refondation par le parti communiste chinois de l’unité du pays qui était en péril depuis la chute de l’empire.

Or rien n’interdit de proposer une autre traduction. Ce petit jeu est passionnant et donne par exemple des résultats troublants et contradictoires quand on met face à face deux traductions occidentales d’un même poème en chinois classique.

En proposant de remplacer EMPIRE DU MILIEU simplement par PAYS AU MILIEU on ne fait que prendre en compte le goût avéré des chinois pour la topographie et pour la référence constante dans leur langue aux quatre points cardinaux auxquels ils ajoutent un cinquième : le centre ou le milieu. Logique élémentaire : où que vous soyez vous avez un Sud, un Nord un Est et un Ouest. La Chine a bien identifié son Nord : les immensités mongoles, son Sud : la mer de Chine, son Est : le Japon et les iles au-delà et son Ouest : la masse himalayenne et un désert, tous espaces très différents de l’espace chinois lui-même. On passe ainsi d’une relation de possession « DU milieu » à une relation de position « AU milieu ».

La Chine, bien campée sur ses les deux vallées majeures de ses deux grands fleuves, a subi des invasions physiques (Mongols, Japonais) ou idéologiques (bouddhisme) mais n’est pas sortie de son cadre rectangulaire ZHONG et son histoire s’est déroulée dans cet unique espace avec des variantes qui donnent une CAPITALE AU NORD (et pas capitale du Nord) – BEI jing et une CAPITALE AU SUD (et pas capitale du Sud) NAN jing et des provinces portant le même nom l’une à l’ Est Shan DONG l’autre à l’ Ouest Shan XI ou l’une au Nord Hu BEI et sa voisine au Sud Hu NAN.

Avec son « socialisme à la chinoise » le pays au milieu est fidèle à lui-même. Il n’est pas le centre du monde mais le centre d’un espace où la Chine a construit une civilisation et où elle met en œuvre aujourd’hui un programme cohérent destiné à offrir selon l’expression officielle « une modeste aisance » à 1,4 milliards d’habitants (900 millions de plus qu’en 1949) bien formés dans une économie dont le niveau scientifique et technique atteint aujourd’hui dans la plupart des domaines est au plus haut.

Il ne propose pas un modèle universel mais une source d’inspiration. La France vieux pays est au milieu d’un espace, elle a son centre, son Nord flamand et britannique, son Ouest Atlantique, son sud Méditerranéen, son Est. Son socialisme, aujourd’hui une nécessité de salut public face à la régression en cours, est à inscrire là où s’est déroulée son histoire (moins longue que celle de la Chine mais un bon millénaire quand même). Soyons inspirés et recommençons à compter sur nos propres forces.

Note de do : La Chine étant taoiste, je pense plutôt qu’il faut chercher l’auto-dénomination d’« Empire du milieu » dans la volonté d’équilibre entre le in et le yang : le juste milieu.

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