Maurice Lemoine, 4 février 2020 : Les petits télégraphistes du coup d’Etat qui n’existe pas.
Dans leur malheur, il y a quelques décennies, les Chiliens ont eu la chance (même si on peut la considérer très relative) de ne pas voir leur tragédie défigurée. Au lendemain du 11 septembre 1973 et du renversement du socialiste Salvador Allende par le général Augusto Pinochet, aucun média digne de ce nom n’aurait osé nier qu’il y ait eu un « Coup d’Etat à Santiago ». Autres temps, autre type de « golpe » (dans la mesure du possible moins sanglant), autres « professionnels » de l’information. Le 15 novembre 2019, après que le chef de l’Etat en exercice, arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle, ait été contraint à abandonner le pouvoir sous la pression de la police et de l’armée, le quotidien Le Monde transformait la victime en responsable et se fendait d’un éditorial singulier : « Bolivie : les erreurs d’Evo Morales ». Et il ne fut pas le seul. En syntonie parfaite avec ceux de ses confrères qui, sur place – Pagina Siete, El Deber, La Razón, Unitel, Red Uno, Bolivisión, etc. –, ont accompagné et soutenu la défenestration du candidat du Mouvement vers le socialisme (MAS) en l’accusant de « fraudes » lors des élections du 20 octobre, la « commentocrature » hexagonale a elle aussi exécuté l’ex-chef de l’Etat.
En tout cas, entre Besancenot et Guillaudat, bon courage aux militants du NPA pour s’y retrouver. Sur le Venezuela, le Nicaragua et maintenant la Bolivie, à part la référence au peuple et à une imaginaire révolution irréprochable, on lit à peu près la même chose dans Inprecor (et quelques publications appartenant à la même mouvance) que dans Le Monde, Le Figaro, Libération ou Le Point… Un constat qui, d’ailleurs et hélas, au sein de la gauche radicale, ne concerne pas que le NPA.