Le fait me semble donc suffisamment établi que cette pseudo-« citation » est typiquement le cas d’un apocryphe qui devient une sorte d’ « autorité » dans un domaine de pensée ou de recherche, à force d’être cité, créant ainsi, au fil du temps, ses propres « références ».
Pour ceux qui continuent à résister à ce système actuel, y a donc deux aspects dans cette recherche : la crédibilité des sources et le fond de la question.
Formellement, on ne saura donc jamais si Montagu a vraiment dit ou même pensé un truc pareil. C’est évidemment dans la logique cynique d’un système de domination de classe « pré-banco-centraliste », comme tu le formules à ta manière.
Donc, non, ça ne m’« embête » pas du tout que ce type de démarche, apocryphe ou non, soit « dénoncé » concernant une époque aussi ancienne, avec même exactement un siècle. Parler éventuellement de « préhistoire du banco-centralisme » est même tout à fait cohérent avec une approche dialectique de la compréhension des phénomènes. On en revient ainsi à la question de « date pivot » précisément évoquée dans cet article :
Economie mondiale : de quel nouveau pouvoir l’inflation est-elle le nom ?
http://cieldefrance.eklablog.com/economie-mondiale-de-quel-nouveau-pouvoir-l-inflation-est-elle-le-nom-a216333147
Edition VLR (dédiée au camarade Viriato) :
https://mai68.org/spip3/spip.php?article1693
Le propre de l’analyse dialectique consistant en pratique à distinguer la phase d’ « accumulation » des phénomènes du moment précis du « saut qualitatif » à partir duquel le phénomène change de nature et devient, en l’occurrence ici, « banco-centraliste » à proprement parler.
La phase impérialiste étant celle de la fusion du capital industriel productif et du capital bancaire, le capital productif y conserve néanmoins son rôle en tant que moyen d’élargissement du capital total.
A mesure de l’extension du capital financier-« fictif », son rôle se réduit évidemment, mais sans disparaitre complètement en tant que facteur déterminant de l’évolution économique et sociale.
Le banco-centralisme est structurellement établi, quant à lui, à partir du moment où le cycle de renouvellement du capital fixe devient le facteur déterminant de l’économie globale, ce qui est bien le cas au XXIe siècle. Ce cycle ne peut être assuré autrement que par une extension du cycle de la dette publique et privée en synergie avec la création monétaire banco-centralisée comme source et garantie ultime de sa « pérennité », tant que les peuples n’y trouvent rien à redire…
Ce qu’il faut essentiellement comprendre, dans ce processus, c’est qu’il ne s’est pas opéré au gré de la fantaisie de tel ou tel « gestionnaire » plus ou moins mégalo et manipulateur, dans le style de Norman Montagu, mais en fonction de la prééminence que le capital fixe était en train de gagner, au cours du XXe siècle, par rapport au capital variable « humain ».
Autrement dit, encore, c’est aussi la répartition du pouvoir réel entre les différentes parties et fonctions de la classe dominante qui change elle-même avec cette évolution. Que l’avidité de certains les ait poussés au-delà de ce qui semblait possible à leur époque précise, c’est ce qui pourrait éventuellement « authentifier » ce genre de propos, tel que celui « prêté » à ce Montagu.
Toutefois, l’accumulation systémique notable et durable de la dette publique et privée commence au cours de la décennie 70 et se trouve donc être cohérente avec l’apogée de la productivité du capital productif, de l’extension de la classe ouvrière productive, et surtout donc aussi avec le début de leurs déclins systémiques.
La « corde » reliant encore le capital productif au capital financier-« fictif », déjà tendue à l’extrême au tournant du siècle, a fini par se rompre au moment de la dite « crise des subprimes », dégageant le pouvoir des Banques Centrales comme seul recours pour « sauver » et continuer de faire tenir debout le système de domination de classe.
La dite « crise du covid » de 2020-2021 étant une sorte de « réplique » complexe venant par nécessité « compléter » ce processus comme expliqué dans l’article cité ci-dessus.
Donc, même si le « point de bascule » en termes de saut qualitatif du capitalisme au banco-centralisme me semble nettement situé ainsi dans le temps, l’ensemble du processus ressemble davantage, par son cheminement relativement « discret », à ce que fut la « révolution féodale » que la révolution « démocratique » bourgeoise des XVIIIe et XIXe siècles, qui n’en a pas moins connu diverses phases de « transitions » et même de « retours en arrière » de type réactionnaires.
Pour l’instant, l’extension mondiale du banco-centralisme ne connaît d’autre résistance, « réactionnaire » ou pas, que celle, précisément, dite de l’« axe de la Résistance » des nations en lutte au Moyen-Orient, avec la Palestine au premier rang, et désormais le soutien de plus en plus affirmé de la Russie, elle-même en lutte sur le front « ukrainien » devenu le champ de bataille otanesque.
L’émergence d’un front de lutte réellement populaire et démocratique contre le banco-centralisme reste encore à venir, mais il ne pourra précisément apparaitre comme tel que s’il est capable de désigner sa cible sans confusion possible, ce qui nécessite encore pas mal de clarification, comme le montre notre présent échange.
Luniterre
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