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Au Liban, le général Joseph Aoun succède au général Michel Aoun : qu’est ce que ça peut changer ?

vendredi 10 janvier 2025, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 10 janvier 2025).

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10 janvier 2025

Assawra

Le chef de l’armée libanaise, Joseph Aoun, marche après avoir été élu président du pays au parlement de Beyrouth, le 9 janvier 2025. / REUTERS/Mohamed Azakir

Le pays du Cèdre se trouvait sans président depuis plus de deux ans. La nouvelle donne régionale a débloqué la situation, marquant l’affaiblissement du Hezbollah et les tentatives des États-Unis, de la France et de l’Arabie saoudite de prendre la main.

L’élection à la présidence de la République du commandant en chef de l’armée libanaise, Joseph Aoun, a tout du conte de fées. Alors que le poste, réservé à un chrétien maronite (le premier ministre étant sunnite et le président du Parlement chiite), comme le veut ce régime confessionnel, était vacant depuis plus de deux ans, le général a réussi à se faire adouber par une majorité de parlementaires qui, jusque-là, n’étaient pas parvenus à se mettre d’accord.

Joseph Aoun a recueilli 99 voix sur 128 au Parlement lors d’une deuxième session dans l’après-midi du 9 janvier. Il n’avait obtenu que 71 voix au premier tour de scrutin dans la matinée, les 30 députés du Hezbollah et de l’autre mouvement chiite, Amal, ayant voté blanc. Il succède ainsi au général Michel Aoun, sans lien de parenté.

Le candidat des Etats-Unis, de l’Arabie saoudite et de Paris

Le Hezbollah avait auparavant soutenu un autre candidat, Sleiman Frangié, le chef d’un petit parti chrétien du nord du Liban qui a des liens étroits avec l’ancien président syrien Bachar Al Assad. Mais, le 8 janvier, Frangié a annoncé qu’il se retirait de la course et soutenait Aoun, ouvrant la voie au chef de l’armée.

Cependant, le Hezbollah aussi bien que l’Amal n’entendait pas laisser cette élection se concrétiser au premier tour. « Plus important encore, dans la logique de Nabih Berri, le chef du législatif a voulu adresser un message selon lequel un président ne pourra jamais être élu sans sa bénédiction, dans le but de rester maître du jeu pour la phase à venir, à savoir la formation du gouvernement et les prochaines législatives », note le quotidien libanais l’Orient-le Jour.

L’avènement de Joseph Aoun ne doit rien au hasard. Le conte de fées n’en est pas un. Des ambassadeurs de plusieurs pays ont assisté à la session parlementaire. Et les pressions diplomatiques se sont intensifiées sur les députés pour les pousser à choisir Aoun. Depuis le début de la semaine, les émissaires américain, Amos Hochstein, saoudien, Yazid Al Farhane, et français, Jean-Yves Le Drian, ont eu des rencontres séparées avec des députés et des personnalités politiques libanaises.

Ces derniers ont affirmé que Washington et Riyad soutenaient la candidature du commandant en chef. Il en est de même pour Paris. Parmi les autres candidats figuraient Jihad Azour, ancien ministre des Finances, aujourd’hui directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds monétaire international (FMI), et Elias Al Baysari, chef par intérim de l’agence de sécurité générale du Liban, qui s’est retiré le jour du vote.

Outre les pressions, les États-Unis et l’Arabie saoudite ont mis dans la balance leur aide à la reconstruction d’un pays exsangue, terrassé par la guerre menée par Israël et par une crise économique sans fin.

Vers un changement global au niveau régional ?

Ce dénouement à la libanaise est également le témoignage d’un changement régional. Le Hezbollah a été affaibli par les assassinats successifs de ses chefs, dont Hassan Nasrallah, et la chute du pouvoir des Assad en Syrie. Une perte d’influence qui a amené les députés du Hezbollah à finalement accepter de voter pour Joseph Aoun.

Lors de son discours d’investiture, ce dernier a insisté sur l’importance du rôle de l’armée et des forces de sécurité pour préserver la souveraineté nationale. Une façon de donner des gages aux États-Unis et à l’Arabie saoudite sans trop s’engager sur un désarmement du Hezbollah, objectif que recherche également Israël. Il a évoqué une stratégie de défense nationale couvrant les dimensions diplomatiques, économiques et militaires, tout en promettant de « restaurer ce que l’ennemi israélien a détruit » au Liban.

La mise en œuvre du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, entré en vigueur le 27 novembre, est encore fragile. Outre de multiples incidents, la radio de l’armée israélienne a affirmé le 4 janvier qu’Israël n’autorisera pas les habitants des villages libanais proches de la frontière à rentrer chez eux. Ce qui n’empêche pas l’émissaire américain, Amos Hochstein, d’affirmer qu’après le 27 janvier, date de la fin de la période de cessez-le-feu, « l’État sera la seule entité autorisée à détenir des armes au Liban, et il sera interdit aux partis et aux milices de posséder des armes ».

Ce qui n’est rien d’autre qu’une interprétation de l’accord. Washington n’a jamais caché sa volonté de parvenir à un désarmement total de tout groupe affirmant son opposition à l’occupation israélienne du Liban et des territoires palestiniens. Le même émissaire n’évoque jamais, en revanche, l’interdiction faite à Israël de violer les espaces terrestre, aérien et maritime libanais.

Le président Joseph Aoun, qui doit maintenant nommer un premier ministre, a promis : « Nous ne miserons plus sur l’étranger pour nous affronter les uns les autres, mais sur le potentiel du Liban. » Pas sûr que les parrains de la reconstruction l’entendent de cette oreille.

Pierre Barbancey
L’Humanité du 09 janvier 2025

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