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PFAS - Dans l’eau du robinet, une contamination massive par les polluants éternels

jeudi 23 janvier 2025, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 23 janvier 2025).

https://reporterre.net/Dans-l-eau-d…

Publié le 23 janvier 2025 à 09h03
Modifié le 23 janvier 2025 à 16h09

Alexandre-Reza Kokabi

UFC-Que choisir et Générations futures publient le 22 janvier 2025 une étude alarmante sur la présence des PFAS, ces « polluants éternels », dans l’eau du robinet en France. - / Emmanuel Clévenot / Reporterre

L’eau du robinet est largement contaminée par les PFAS, selon une enquête menée dans 30 communes par UFC-Que choisir et Générations futures. La réglementation française est loin des standards adoptés dans d’autres pays.

L’eau du robinet est massivement contaminée aux PFAS, révèlent UFC-Que choisir et Générations futures. L’association de consommateurs et l’ONG publient une étude alarmante sur la présence des PFAS, ces « polluants éternels », dans l’eau en France. Les analyses ont été menées sur trente communes. 96 % des échantillons présentent des traces de ces substances perfluorées, connues pour leur persistance dans l’environnement et leurs effets toxiques potentiels. Des études lient déjà certaines à des risques accrus de cancers, de maladies thyroïdiennes ou de troubles hormonaux.

Parmi les trente-trois PFAS recherchés, le TFA (acide trifluoroacétique), issu de la dégradation de pesticides fluorés et d’autres composés industriels, se révèle particulièrement préoccupant. Il a été détecté dans vingt-quatre des trente échantillons analysés, avec des concentrations records dans le Xe arrondissement de Paris (6 200 nanogrammes par litre), à Lille (290 ng/l) et Lyon (120 ng/l). Certaines zones, comme Tours ou les environs de Rouen, affichent des « cocktails » impressionnants de polluants : jusqu’à onze PFAS différents relevés dans un seul prélèvement.

La faute aux rejets industriels et agricoles

« L’eau du robinet est le premier aliment que nous consommons. Or, nous constatons qu’elle est systématiquement contaminée par ces substances issues de décennies de rejets industriels et agricoles dans les cours d’eau et les nappes phréatiques », dit Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l’UFC-Que choisir. Et si des dispositifs de filtration et de dépollution de l’eau du robinet existent, « ils ne permettent pas d’éliminer efficacement les PFAS », déplore-t-il.

Malgré cette présence généralisée, ces concentrations en PFAS restent conformes à la législation française — bien moins stricte que celles d’autres pays. Elle fixe un seuil de 100 ng/l pour un ensemble de vingt PFAS, un niveau bien au-dessus des normes danoises (2 ng/l pour 4 PFAS) et étasuniennes (4 ng/l pour 2 PFAS). À titre de comparaison, aux États-Unis, six des échantillons analysés en France seraient jugés non conformes, et avec la norme danoise, ce chiffre grimperait à quinze sur trente.

Alors que certains pays européens ont déjà adopté des seuils drastiques, la France continue d’appliquer des normes peu contraignantes, notamment en ignorant la présence du TFA dans les contrôles règlementaires. « C’est un véritable angle mort. Les autorités ne surveillent pas le TFA, donc elles ne considèrent pas qu’il y a un problème. Pourtant, nos analyses montrent qu’il est présent absolument partout, qu’il s’agit probablement du contaminant le plus répandu dans les robinets de France », constate François Veillerette, porte-parole de Générations futures. Il exige le retrait rapide des pesticides contenant le TFA, comme le Flufenacet.

« Plus de 40 % des hectares intègrent un herbicide d’automne formulé avec du flufénacet », peut-on lire sur le site de Bayer, géant des pesticides. Flickr / CC BY 2.0 / Frédéric Bisson

L’UFC-Que choisir et Générations futures plaident pour une réforme profonde des normes en vigueur. Elles demandent un abaissement des seuils autorisés, une évaluation toxicologique du TFA et son intégration dans les contrôles de l’eau potable, ainsi qu’un renforcement des restrictions sur les PFAS, notamment ceux issus de pesticides.

Elles appellent également à une responsabilisation des industriels et des producteurs de pesticides, estimant que le coût de la dépollution ne doit pas reposer sur les consommateurs. Il a été récemment chiffré, par le quotidien Le Monde, à 100 milliards d’euros par an en Europe.

Au-delà des seuils et des chiffres, c’est toute une approche qui doit changer. « Aujourd’hui, les molécules chimiques sont évaluées sur la base des données fournies par leurs fabricants eux-mêmes. Cela crée un biais profond dans l’estimation de leur dangerosité. Il ne devrait pas falloir attendre des décennies de preuves accumulées pour agir », regrette Olivier Andrault.

Alors que la directive européenne sur la qualité de l’eau potable entrera en application en 2026, les associations espèrent que la France en profitera pour adopter des mesures plus protectrices. En attendant, elles appellent les parlementaires à relancer la proposition de loi, portée par le député écologiste Nicolas Thierry, visant à interdire ces substances dans les produits du quotidien et à renforcer la responsabilité des pollueurs.

Les ONG alertent aussi sur les pressions des lobbys industriels dans les discussions européennes sur la restriction des PFAS. « Le projet est en train d’être démantelé par une multiplication des dérogations », alerte Olivier Andrault. « Sans volonté politique forte, la contamination de l’eau aux polluants éternels se poursuivra pendant des décennies », prévient François Veillerette.

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