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COMAGUER
BULLETIN N° 604
28.01.2025
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Un véritable gang
La justice internationale a jusqu’à présent rencontré de réelles difficultés pour que ces avis ou décisions concernant l’agression génocidaire de Gaza débouchent sur des actions concrètes contre les coupables.
La Cour Internationale de Justice (CIJ) qui d’une part a établi définitivement le caractère colonial de l’occupation de la Palestine , qui d’autre part a reconnu le caractère génocidaire de l’attaque de Gaza depuis le 8 octobre 2023 et constaté que cette attaque se poursuivait malgré sa mise en demeure d’y mettre fin. Elle a ainsi dit le droit international qui est la loi entre les Etats.
Mais l’ONU dont elle est l’organe juridique suprême n’a pas statutairement le pouvoir de sanctionner les coupables. Seul le Conseil de Sécurité a ce pouvoir et il est paralysé par l’usage du droit de veto utilisé en permanence par les Etats-Unis pour défendre le colonisateur : l’Etat sioniste créé en 1948.
De son côté la Cour Pénale Internationale (CPI) peut poursuivre et éventuellement condamner des personnes reconnues coupables d’une série de crimes de sa compétence dont le génocide est le plus grave à l’issue d’un procès. Pour organiser ce procès elle a donc lancé deux mandats d’arrêt internationaux contre Netanyahou et son ancien ministre de la Défense Gallant .
Or on a pu constater qu’un véritable complot international a été organisé pour que les deux prévenus ne soient pas arrêtés. Ce complot rassemble autour des Etats Unis non adhérents à la CPI et qui profèrent même des menaces contre la Cour, d’autres Etats membres de la CPI qui les uns après les autres, la France en tête par les propos honteux de Jean Noel Barrot ministre des affaires étrangères mais aussi l’Italie la Pologne se déshonorent en inventant de faux prétextes pour ne pas les arrêter au cas où ils poseraient les pieds sur leur territoire.
De jeunes juristes viennent de trouver un moyen de sortir de cette cruelle impasse.
Dans un document de 177 pages adressé à la CPI Ils ont mis en lumière l’existence d’un autre crime de la compétence de celle-ci : « l’incitation au génocide » . Ils ont pour ce faire rassemblé les déclarations génocidaires depuis le 7 octobre 2023 des plus hauts personnages de l’Etat sioniste pas moins de 8 personnes dont le Président de la république et 2 ministres en exercice dans le cabinet Netanyahou En voici la liste : Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu, Yoav Gallant Israel Katz, Giora Eiland, Bezalel Smotrich *, Itamar Ben-Gvir et Zvi Yehezkeli
Ce qui veut dire que Netanyahou n’est pas le seul criminel mais qu’il est l’expression de la volonté génocidaire du pouvoir sioniste dans son ensemble . C’est cette volonté génocidaire qui s’est brisée sur la résistance farouche du peuple de Gaza. Le document adressé au Procureur de la CPI contient des preuves accablantes de cette incitation. Il devrait donc s’en suivre l’émission de 8 nouveaux mandats d’arrêt.
Lien pour la consultation du document original en anglais :
Suit la brève présentation du recours par Omer Shatz jeune juriste diplômé de l’Université Yale qui a coordonné les travaux d’une équipe où figurent des étudiants du cours « droit international en action » de Sciences Po Paris. Pas étonnant que Gabriel Attal Premier Ministre se soit l’an dernier rendu personnellement à Sciences Po pour « rétablir l’ordre » !
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Le 5e Crime de la CPI et Gaza : l'incitation au génocide en tant que crime inchoatif*
Une enquête factuelle indique qu'entre octobre 2023 et décembre 2024, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu (fugitif), Yoav Gallant (fugitif), Israel Katz, Giora Eiland, Bezalel Smotrich, Itamar Ben-Gvir et Zvi Yehezkeli (les suspects) ont publiquement et directement incité d'autres personnes à commettre un génocide contre les Palestiniens de Gaza. Nombreux sont ceux qui pensent que la Cour pénale internationale (CPI) a compétence matérielle pour juger quatre crimes internationaux, dont le génocide. Mais il existe en fait un cinquième crime, sui generis : contrairement à tous les autres modes de responsabilité, l'incitation au génocide engage la responsabilité pénale individuelle sans qu'il soit nécessaire de prouver que le crime principal, en l'occurrence le génocide, a été commis ou même tenté. En tant que crime inchoatif, l'incitation au génocide peut et doit faire l'objet d'enquêtes et de poursuites indépendantes, que le crime de génocide puisse être prouvé pénalement ou non. La logique sous-jacente est préventive : la poursuite de l'incitation à la haine est un moyen d'empêcher d'autres actes génocidaires. La Cour internationale de Justice (CIJ) a compétence sur les États et la CPI a compétence sur les individus. Mais les constatations de fait et de droit d'un tribunal ont valeur probante pour le travail de l'autre tribunal lorsque les deux tribunaux statuent, parfois de manière similaire, sur la même affaire. Dans les faits, la CIJ a cité trois des déclarations incitatives des suspects susmentionnés et a déterminé qu'il était plausible que des actes génocidaires, y compris des incitations, aient pu être commis contre le groupe ciblé. Une analyse comparative montre que le critère de « plausibilité » de la CIJ correspond au critère de la CPI de « motifs raisonnables de croire » que le crime a été commis, le critère requis pour enquêter et émettre des mandats d'arrêt contre les suspects, respectivement. Légalement, en janvier 2024, la CIJ a ordonné à Israël de punir les incitateurs. En novembre 2024, cependant, la conseillère juridique israélienne du gouvernement a informé la Cour suprême israélienne de sa décision d'adopter la recommandation du procureur général israélien de ne pas ouvrir une seule enquête pénale sur l'affaire, au mépris de l'ordonnance de la CIJ. Par conséquent, et conformément au principe de complémentarité, l'incapacité d'Israël à poursuivre et à punir un crime relevant de la CPI redirige l'ordonnance de la CIJ vers la CPI et oblige son procureur à poursuivre ce crime à la place d'Israël.
La Chambre préliminaire de la CPI (CTP) a déjà déterminé qu'il existe des « motifs raisonnables de croire » que certains des suspects ont créé « des conditions de vie calculées pour entraîner la destruction d'une partie de la population civile de Gaza », ce qui constituerait un acte génocidaire en vertu du Statut de Rome. La CTP a noté que ces conditions ont causé « la mort de civils, y compris d'enfants, en raison de la malnutrition et de la déshydratation ». La CPI a expliqué qu'elle avait décidé de publier cette décision par ailleurs secrète car une « conduite similaire à celle abordée dans le mandat d'arrêt semble être en cours ». L'obligation d'empêcher d'autres crimes de la CPI ou de mettre fin à ceux en cours ne laisse au procureur de la CPI d'autre pouvoir discrétionnaire que d'étendre l'enquête sur la situation dans l'État de Palestine conformément à l'article 54 et d'enquêter sur l'incitation au génocide au sens de l'article 25(3)(e) du Statut de Rome. Tant que le procureur de la CPI enfreint l'ordonnance de la CIJ et ne respecte pas ses obligations en vertu du Statut, plus de deux millions de membres du groupe ciblé restent exposés à un risque imminent de devenir victimes de nouveaux actes de génocide et d'autres crimes de la CPI qui, comme la CPI elle-même l'a signalé, semblent se poursuivre. Comme le procureur de la CPI l'a lui-même dit dans une interview accordée à Der Spiegel, dans les circonstances où des crimes sont en cours, il a le devoir d'agir immédiatement et de ne pas « attendre que tout le monde soit mort ».
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*Inchoatif : ce terme rare n’est guère utilisé que par les juristes
Voici ce qu’en dit le Dictionnaire de l’Académie française, 9e édition (actuelle)
inchoatif, -ive
Prononciation : (ch se prononce k) adjectif
Étymologie : XIVe siècle. Emprunté du bas latin inchoativus, de même sens, dérivé du latin classique inchoare, « commencer, entreprendre ». Qui indique qu’une action est considérée dans son commencement ou dans sa progression.
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Citations de dirigeants israéliens apportées comme preuves de l’« incitation au génocide »
Ministre de la Défense Yoav Gallant, 9 octobre 2023 :
« J’ai donné l’ordre d’un siège complet de la Bande de Gaza. Il n’y aura ni électricité, ni nourriture, ni combustible, tout est fermé. Nous combattons des animaux humains et nous agissons en conséquence. »
Président Isaac Herzog, 12 octobre 2023 :
« C’est une nation entière, là-bas, qui est responsable. Elle n’est pas vraie, cette rhétorique à propos des civils non informés, non impliqués. Ce n’est absolument pas vrai. Ils auraient pu se soulever, ils auraient pu combattre ce régime maléfique … Mais nous sommes en guerre, nous défendons nos foyers, et quand une nation protège ses foyers, elle combat et nous combattrons jusqu’à ce que nous brisions leur colonne vertébrale. »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahou, 3 novembre 2023 :
« C’est la guerre entre les fils de la lumière et les fils de l’obscurité. Nous n’abandonnerons pas notre mission jusqu’à ce que la lumière domine l’obscurité — le bien vaincra le mal extrême qui nous menace, nous et le monde entier. »
Le ministre de l’Énergie (maintenant ministre de la Défense) Israel Katz, 12 octobre 2023 :
« De l’aide humanitaire à Gaza ? Aucun interrupteur électrique ne sera allumé, aucune borne d’eau ne sera ouverte et aucun camion de carburant n’entrera jusqu’à ce que les Israéliens enlevés ne soient revenus chez eux. Humanitarisme contre humanitarisme. Et que personne ne nous prêche la morale. »
Giora Eiland, major général des Forces de défense d’Israël (FDI), ancien chef du Conseil de sécurité nationale israélien, 7 octobre 2023 :
« C’est ce qu’Israël a commencé à faire — nous coupons l’approvisionnement en énergie, en eau et en diesel dans la Bande de Gaza … mais ce n’est pas assez. Pour rendre le siège efficace, nous devons empêcher les autres de donner de l’assistance à Gaza … On devrait dire aux gens qu’ils ont deux choix : rester et mourir de faim, ou partir. »
Le ministre des Finances Bezalel Smotrich, 8 octobre 2023 :
« Nous devons porter un coup comme on n’en a jamais vu en 50 ans et démolir Gaza. »
Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, 17 octobre 2023 :
« Aussi longtemps que le Hamas ne relâche pas les otages qu’il retient — la seule chose qui doit entrer dans Gaza, ce sont des centaines de tonnes d’explosifs par l’armée de l’air, et pas une once d’aide humanitaire. »
Le journaliste de télévision Zvi Yehezkeli, 19 décembre 2023 :
« Les FDI auraient dû lancer une attaque encore plus mortelle avec 100 000 morts pour commencer. Oui, il y a 20 000 membres du Hamas. Je ne sais pas qui était et qui n’était pas impliqué. Et qui est ou n’est pas innocent.
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*28.01.2025 La proposition du président Donald Trump de « faire le ménage » dans la bande de Gaza et d’envoyer ses habitants dans des pays de la région est « une excellente idée », a estimé dimanche un ministre d’extrême-droite du gouvernement israélien.
« L’idée de les aider à trouver d’autres endroits où commencer une vie meilleure est une excellente idée. Après des années de glorification du terrorisme, (les Palestiniens) pourront établir une nouvelle et belle vie ailleurs », a déclaré dans un communiqué le ministre des Finances Bezalel Smotrich.
Depuis la Jordanie et l’Egypte qui avaient été désignés par Trump comme pays d’accueil se sont sèchement récusés en rappelant qu’ ils soutiennent depuis l’origine la création de l’Etat de Palestine.
Leur fermeté doit tout à la force de la résistance.
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