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COMAGUER
BULLETIN
N° 605
01.02.2025
***
RECONSTRUIRE GAZA
L’institut
TRICONTINENTAL créé en souvenir de la Conférence TRICONTINENTALE qui avait en
1966 lancé depuis Cuba un
appel à la décolonisation réelle du monde incluant l’Afrique, l’Asie et
l’Amérique latine, publie des travaux sur l’état de cette partie du monde où
vivent 7 des 8 milliards d’habitants de la planète. Il a pris la suite de la
revue du même titre publiée par l’OSPAAL Organisation de solidarité des pays
d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine jusqu’à la dissolution par le
gouvernement cubain de cette organisation en 2019
Le texte dont nous
publions la traduction française apporte un éclairage supplémentaire sur les
conséquences du génocide en cours sur le territoire de la Palestine :la
chute très brutale de l’espérance de vie des palestiniens de Gaza. Démonstration
supplémentaire de la volonté exterminatrice des génocideurs.
Il y ajoute un
bilan des destructions et une estimation du coût de la reconstruction : 80
milliards de dollars. Une nouvelle démonstration du fait de l’inflexibilité du
peuple de Gaza qui, au milieu des décombres , pense toujours à la
reconstruction.
Où trouver ces 80
milliards de dollars. Certains à Washington pensent aux amis riches comme
l’Arabie saoudite mais ce financement signifierait l’introduction en Palestine
du wahhabisme et du système monarchique réactionnaire saoudien et transformerait
le souverain de Ryad en gouverneur colonial. La Palestine ne serait toujours pas
libre, elle serait recolonisée par une puissance mandataire de
Washington.
Ce projet est
porté par l’envoyé de Trump dans la région :le milliardaire étasunien
Witkoff l’homme qui a conduit la réunion d’organisation de la trêve à Ryad avec
L’Arabie et le Qatar, l’homme qui a préparé la prochaine rencontre de Trump et
Netanyahou à Washington et qui visitant Gaza ces derniers jours s’est déclaré
surpris de l’ampleur des destructions.
Fausse
piste !
En réalité toute
démarche rationnelle conduit à la solution juste , juste moralement, juste
politiquement : les casseurs doivent être les payeurs. Oui les casseurs
doivent payer .
Qui
sont-ils ? Au premier chef Israël mais sans l’appui politique des
Etats-Unis, sans l’argent des Etats-Unis, sans les avions des Etats-Unis, sans
les munitions des Etats-Unis, Israël ne peut rien et ne serait même pas autorisé
par le patron à utiliser ses bombes atomiques.
Donc le casseur,
le vrai , le casseur en chef est à Washington. Aucun doute n’est permis
là-dessus. Et les Etats-Unis sont incontestablement coupables d’incitation au
génocide.
Pour autant même
en rêvant d’une condamnation d’un Président des Etats-Unis par la CPI , justice
ne serait pas rendue car elle ferait porter le poids des crimes sur un seul
homme et ferait croire qu’il est lui seul coupable d’une succession
d’entreprises et d’actes barbares commencée depuis un
siècle.
Ce que tous les peuples du monde ont vu à Gaza et ce qu’ils savent
des horreurs permanentes de l’empire doit maintenant conduire à formuler une
exigence nouvelle non pas celle de regrets. Biden a tenu une réunion
publique à Hiroshima sans même évoquer le bombardement mais celle des
REPARATIONS
Les organisateurs
séculaires de la colonisation, les promoteurs du génocide,les financeurs de
l’extermination doivent enfin payer et réparer tout ce qu’ils ont détruit,payer
des pensions aux survivants blessés, aux mutilés, verses des pensions aux veuves
aux veufs et aux orphelins payer pour tous les oliviers arrachés, payer pour
toutes les terres volées parce que le langage du dollar est le seul qu’ils
comprennent parce que ce pays est gouverné et tenu par des milliardaires. Il
faut qu’une bonne foispour toutes une guerre dont ils sont les organisateurs
leur coûte.
Sur cette
voie : 80 milliards de dollars pour la reconstruction de Gaza est un
modeste début.80 milliards de $ c’est à peine un dixième du budget annuel du
Pentagone et c’est une goutte d’eau dans la mer des profits du complexe
militaro-industriel- combien Lockheed a-t-il vendu de chasseurs-bombardiers
àIsraël depuis 1948 ? combien de logements pour le prix moyen de 100 000
dollars d’un chasseur bombardier ?
Mais ce serait vraiment une grande première, une vraie défaite de
l’impérialisme, une grande leçon donnée au tueur, un vrai principe
d’internationalisme politique :
TU CASSES TU PAYES
UNE INCITATION A LA PAIX comme répliqueà L’INCITATION AU
GENOCIDE
***
Comment mettre en œuvre cette politique de
réparations ?
Voici une
proposition de feuille de route dont la logique est que le coupable ne siège pas
parmi les juges
1-
Par décision de
l’Assemblée générale,l’ONU prend en charge le dossier de la
reconstruction
2-
L’ONU demande à la
Cour Internationale de justice de statuer sur l’incitation au génocide des
Etats-Unis. Les preuves sont abondantes et incontournables ( aide financière
massive, aide militaire massive …) et la CIJ valide l’estimation du coût de la
reconstruction établie par un panel d’experts
agréés.
3-
L’Assemblée
générale de l’ONU vote à son immense majorité une résolution demandant au
casseur de payer laquelle prévoit la constitution d’un fonds particulier dont la
gestion est assurée par l’ONU
4-
Cette résolution
est proposée au Conseil de Sécurité pourmise en application .Veto des
Etats-Unis
5-
Comme elle l’a
fait pour l’Afrique du sud pour l’obliger à supprimer l’apartheid,l’ONU suspend
Etats-Unis
6-
Pendant cette
suspension le Conseil de sécurité approuve la mise en route du
processus.
Si cet agenda est
confirmé par les faits, au-delà de notre étape 6 nous sommes dans un monde
différent où l’ONU est sauvée, où le sanctionneur maladif est lui-même
sanctionné et dont les contours prévisibles mais non assurés sont stimulants.
L’Histoire se fait en
marchant !
***
Article
de la Revue Tricontinental
L'espérance
de vie des Palestiniens a chuté de 11,5 ans au cours des trois premiers mois du
génocide : cinquième bulletin d'information (2025)
30
janvier 2025
Le
génocide soutenu par les États-Unis à Gaza a entraîné une baisse brutale de
l'espérance de vie de la population. Même si le cessez-le-feu permet à l'aide
d'entrer à Gaza, il faudra des générations pour que cette profonde perte
démographique se rétablisse.
Chers
amis,
Salutations
du bureau de Tricontinental :
Institut de recherche sociale.
L'idée
d'un cessez-le-feu est aussi vieille que l'idée de guerre. Dans les vieux
registres, on lit que les tirs cessent pour que les humains mangent ou dorment.
Les règles de combat se sont développées à partir d'une compréhension selon
laquelle les deux parties devaient se reposer ou se rafraîchir. Parfois, cette
compréhension incluait la vie des animaux. Lors de l'insurrection de Pâques en
1916, par exemple, les rebelles irlandais et les troupes britanniques ont
cessé
leurs tirs autour de St. Stephen's Green à Dublin afin que James Kearney, le
gardien du parc, puisse entrer et nourrir les canards. C'est cette
césure, ou pause, des tirs qui a popularisé le terme de « cessez-le-feu
».
Pour
les Palestiniens de Gaza, tout cessez-le-feu qui promet d'arrêter les
bombardements et de permettre l'arrivée de l'aide humanitaire (en particulier de
la nourriture, de l'eau, des médicaments et des couvertures) est un soulagement.
Dans les jours qui ont suivi l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu temporaire,
une aide à grande échelle a pu atteindre les Gazaouis, a confirmé le
porte-parole du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations
Unies, Jens Laerke.
Le premier jour du cessez-le-feu, 630 camions sont
entrés à
Gaza – bien plus que les cinquante à cent camions par jour qui ont eu du mal à
entrer pendant les bombardements israéliens. Ces camions « acheminent de la
nourriture, ouvrent des boulangeries, fournissent des soins de santé,
réapprovisionnent les hôpitaux, réparent les réseaux d'eau, réparent les abris,
réunifient les familles » et effectuent d'autres travaux essentiels, a déclaré
M. Laerke. Après près de cinq cents jours de violences génocidaires, cette aide
est plus qu'un soulagement. C'est une bouée de sauvetage. Mais cet accord de
cessez-le-feu avait été présenté
pour la première fois en mai 2024, lorsqu'il a été approuvé par le gouvernement
israélien, puis accepté par le Hamas jusqu'à ce qu'il soit finalement rejeté par
Netanyahu. Les armes auraient pu être réduites au silence à ce
moment-là.
La
Palestine a été profondément touchée par le génocide. À l'aide des estimations
des Perspectives de la population mondiale 2024 des Nations Unies,
Tricontinental : Institute for Social Research et Global South Insights ont
analysé la baisse de l'espérance de vie palestinienne causée par le bombardement
israélien à Gaza et ont constaté que l'espérance de vie à la naissance des
Palestiniens a chuté de 11,5 ans entre 2022 et 2023, passant d'un respectable
76,7 ans en 2022 à seulement 65,2 ans en 2023. Ce sont les trois premiers mois
des bombardements israéliens soutenus par les États-Unis – d'octobre à décembre
2023 – qui ont entraîné cette terrible baisse de l'espérance de vie totale. Nous
n'avons connaissance d'aucun déclin aussi rapide de l'espérance de vie à aucune
autre période de l'histoire de l'humanité moderne. La vie d'un Palestinien a
maintenant plus de dix-sept ans de moins qu'une vie israélienne. Cet écart est
plus grand que celui qui existait entre les Noirs et les Blancs dans l'Afrique
du Sud de l'apartheid, qui était de quinze ans en 1980.
Onze
ans et demi de pertes par Palestinien. Cela représente près de 60 millions
d'années perdues pour les 5,2 millions de Palestiniens restants qui sont restés
en Palestine et ont survécu au génocide. Cette perte n'est pas facilement
récupérable. Il faudra des années d'immense travail pour reconstruire la société
palestinienne et atteindre l'espérance de vie d'avant le génocide. Les systèmes
de santé devront être reconstruits : non seulement les hôpitaux et les
cliniques, qui ont presque tous été détruits à Gaza, mais aussi de nouveaux
médecins et infirmières devront être formés pour remplacer ceux qui ont été
tués. Les systèmes alimentaires devront être récupérés : non seulement les
boulangeries, mais aussi les champs devront être détoxifiés et les bateaux de
pêche réparés. Les logements devront être reconstruits pour remplacer les 92 %
de maisons
de Gaza qui ont été détruites
ou endommagées (ce que l'ONU a appelé un «
domicide »).
Les écoles devront être reconstruites. Le traumatisme mental qui afflige les
enfants devra être guéri afin qu'ils aient le sentiment que ces structures ne
sont pas des tombes mais des lieux de sécurité et
d'apprentissage.
.
Les
données sont désordonnées. Des dizaines de milliers de Palestiniens ont été tués
dans le carnage, dont au
moins
14 500 enfants. Selon un rapport
produit par le Conseil danois pour les réfugiés, l'Association de développement
agricole et le Centre des affaires féminines, entre octobre 2023 et octobre
2024, « plus de 90 % de la population de Gaza a été déplacée, avec des personnes
déplacées en moyenne six fois, et certaines jusqu'à 19 fois ». En outre, le
rapport indique que les Palestiniens ont fait face à des ordres de déplacement
forcé avec un « avertissement insuffisant » et ont lutté pour survivre car les «
zones de sécurité désignées » ont été « soumises à des bombardements et manquent
de ressources de base ». Les problèmes neurologiques auxquels sont confrontés
les survivants sont extrêmes. « Il y a une préoccupation constante pour la santé
mentale de tout le monde à Gaza, en particulier pour les enfants qui sont si
profondément traumatisés », a déclaré NebalFarsakh de la Société palestinienne
de la Croix-Rouge,
soulignant qu'« il y a au moins 17 000 enfants non accompagnés ou séparés de
leurs parents ». Comme nous l'avons noté dans la première lettre
d'information de cette année, un rapport de décembre 2024 réalisé par le Centre
de formation communautaire pour la gestion de crise à Gaza a révélé que « 96 %
des enfants de Gaza pensaient que la mort était imminente
».
Une
évaluation préliminaire suggère que la reconstruction de Gaza coûtera 80 milliards de dollars. Le Programme des
Nations Unies pour le développement a signé
un accord avec l'UniversitàIuav di Venezia pour concevoir une nouvelle bande de
Gaza qui propose d'abord de construire un « noyau » urbain pour 50 000 personnes
au milieu des décombres, puis de construire vers l'extérieur. Il y a au
moins
50 millions de tonnes de décombres à Gaza en raison de la destruction de plus
des deux tiers des infrastructures de la région (y compris 92 % des unités de
logement), dont le déblaiement prendra des années. Dans les ruines, à côté des
corps de Palestiniens disparus, se trouvent des munitions non explosées et des
matériaux toxiques : il n'est pas possible de simplement aligner une rangée de
bulldozers et de conduire d'un bout à l'autre de la bande de
Gaza.
Les
institutions palestiniennes n'ont tout simplement pas l'argent pour reconstruire
Gaza. Les États arabes du Golfe, qui ont l'argent, tenteront certainement
d'arracher des concessions politiques impardonnables aux factions politiques
palestiniennes en échange de toute aide. Les pays qui veulent faire payer Israël
pour la dévastation qu'il a infligée aux Palestiniens n'ont pas le levier
politique pour le faire, et ils ne peuvent pas non plus espérer pousser les pays
qui ont armé Israël (comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne) à
payer pour les dommages causés par leurs munitions.
Les
auteurs du génocide veulent faire de Gaza leur terrain de jeu immobilier. Le
président américain Donald Trump a
déclaré que
Gaza est un « endroit phénoménal » qui ressemble actuellement à un « site de
démolition massive », faisant écho à l'évaluation de son gendre et conseiller en
stratégie au Moyen-Orient, Jared Kushner, en février 2024, selon laquelle la «
propriété en bord de mer » de Gaza pourrait être très précieuse. L'année
dernière, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a
déclaré
que la partie nord de Gaza, y compris la ville de Gaza, resterait en ruine et
serait annexée, tandis qu'Israël contrôlerait le reste de Gaza et construirait
des colonies le long de ses bords. Le mouvement des colons, qui est déterminé à
nettoyer ethniquement les Palestiniens – et une partie de la base de Netanyahu –
est prêt
à s'emparer des fronts de mer et à y construire leurs propres colonies. La
pression sur les Palestiniens pour qu'ils quittent Gaza restera intense, malgré
ce cessez-le-feu momentané.
Les
Palestiniens, qui ont perdu au moins 11,5 ans de leur vie à cause de cette
horreur, prendront ce qu'ils peuvent obtenir maintenant – même ce cessez-le-feu
usé. Mais ils méritent beaucoup plus, et ils continueront leur lutte pour
l'obtenir.
C'est
pourquoi, le 27 janvier, des centaines de milliers de Palestiniens qui s'étaient
réfugiés à Gaza ont commencé à marcher
vers le nord pour rentrer chez eux. Ils ne vivront pas une autre Nakba
(catastrophe). Ils reconstruiront les doigts dans la terre si
nécessaire.
Chaudement
Vijay