10 janvier 2007

UN 11 SEPTEMBRE INDIEN

http://mai68.org/ag/1103.htm
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Le 13 décembre 2001, le Parlement, à New Delhi, sanctuaire de la démocratie indienne depuis 1947, était attaqué.

L'événement star, avatar indien du 11-Septembre, a une répercussion immédiate sur la vie de plusieurs millions de personnes, vivant paisiblement sur le sous-continent.

Outre qu'Il faillit provoquer un blitzkrieg nucléaire entre l'Inde et le Pakistan, son actualité brûlante, en février, mars 2002, entraînait des pogroms au Gujarat, d'une ampleur inégalée depuis la Partition.

Plusieurs milliers de personnes dont le seul malheur est d'être né musulman et pauvre, à l'intérieur du pays, étaient massacrés par la police et les hordes criminelles du Bharatiya Janata Party.

Par égard envers « la plus grande démocratie au monde », l'ONU continue à être aveugle et sourd dès lors qu'on évoque cette période…

Rares sont les journalistes qui relient l'attaque du Parlement, l'engagement discret de la « Royal » Indian Navy, auprès des forces de l'OTAN, la possession d'armes de destruction massive et les pogroms au Gujarat.

Tout juste parlent-ils du Cachemire…

Pour les ambassades, l'attentat du 13 décembre, à New Delhi, est simple : il s'agit d'une réponse à la Libération américaine de l'Afghanistan.

Or, en matière de guerre secrète et de terrorisme, les choses ne sont pas exactement ce qu'elles paraissent…

Des faits extraordinaires comme l'attaque du Parlement indien ou l'assassinat spectaculaire de toute la famille royale, au Népal, le 1er juin 2001, doivent être examiné sous toutes leurs coutures, dans la durée, et à la lumière de toutes leurs retombées.

Tout laisse à penser, aujourd'hui, que l'attaque du Parlement, comme le génocide du Gujarat en février, mars 2002, leur organisation, gestion et exploitation, est l'œuvre d'un gouvernement indien, allié aux Américains, jouant la carte de la Terreur.

Rappel des faits, documents et analyses.

Cet article est dédié à l'honneur du Cachemire blessé, à Mohamed Afzal, impliqué malgré lui dans l'attaque du Parlement de l'Union indienne.

Condamné à mort pour raison d'Etat, l'homme attend sa pendaison à la prison Tihar de Delhi.

Je remercie Arundhati Roy, auteur du célèbre « Dieu des petits riens » : son article « And his Life should be extinct », paru le 30 octobre 2006, dans le magazine indien « Outlook », a servi de canevas à mon étude.

Rappel des faits, documents et analyses.

HIMALOVE

himalove@yahoo.com

NOUVELLE DEHLI, 13 DÉCEMBRE 2001. Le Parlement indien est en pleine session d'hiver. Le gouvernement de Atal Behari Vajpajee, dirigeant une coalition, New Democratic Alliance, semble en proie à un énième scandale de corruption…

À 11 heures 30 du matin, 5 hommes fortement armés, bardés d'explosif, vêtus de la combinaison des Black Cat (1), à bord d'une voiture officielle du ministère de l'Intérieur (2), une Ambassador de couleur blanche, forcent les portes de l'enceinte de la Lok Sabha, le Parlement indien.

Pris à partie rapidement par la garde, Center Reserve Police Force, les commandos bondissent hors de leur véhicule et ouvrent le feu, de manière indiscriminée, sous l'œil des caméras*.

*IMPORTANT : le rôle des caméras, dans cette affaire, est essentielle, car leurs images (3) mêlées à une fiction, produite par une chaîne privée, établissent la réalité des faits ; et sont projetées, à la télévision, en mai 2002, juste avant la confirmation des peines, infligées aux présumés organisateurs de l'attentat.

Le documentaire, produit par la chaîne Zee TV, s'intitule « December 13th ; The Truth based on the police chargesheet »…

Selon la représentation donnée par la presse : dans la fusillade du 13 décembre, tous les assaillants arborant un faux drapeau sont tués ; huit membres de la sécurité et un « mali » (jardinier) périssent dans les jardins.

Les hôpitaux donnent le chiffre et les noms de 15 blessés dont un photographe de presse.

À en croire la police (Special Cell of Delhi), les corps des terroristes abattus ont suffisamment d'explosif sur eux pour faire sauter le symbole de la Démocratie et de munitions pour tenir tête à un bataillon.

Curieusement les kamikazes, morts, revêtus de l'uniforme ennemi, laissent derrière eux une rivière d'indices : armes aux numéros non limées, portables, numéros de téléphone, cartes d'identité, photographies, paquets de fruits secs afghans et même une lettre d'amour…

Les officiers des forces spéciales, qui parlent beaucoup à la presse, ce jour-là, ne laisseront toutefois personne examiner les dépouilles.

La loi sur le droit à l'information, motif de la campagne électorale du printemps 2004, gagné par une coalition, United Progressive Alliance, dirigée par Sonia Gandhi, ne sera votée que quelques années plus tard, en 2005.

Sans surprise, le Premier ministre A. B. Vajpajee saisit l'opportunité de l'incident pour comparer l'assaut du Parlement à l'attaque du 11-Septembre (4).

1.Terreur au Parlement et main basse sur la démocratie

La « maladroite » tentative d'attentat, qui n'a pas égratigné un « Netaji » (5) ni bougé une pierre du « Fort rouge », sert de casus belli à une mobilisation générale.

Dans les jours qui suivent le 13 décembre 2001, la Lok Sabha est fermée ; les sessions parlementaires, ajournées.

L'état-major profite de l'opération alliée en Afghanistan, pour échafauder les plans fous d'un engagement total contre l'ennemi, le Pakistan.

Les parlementaires sont tenus à l'écart des décisions prises par le Premier ministre, son adjoint Lal Krishna Advani, le ministre de la Défense, Georges Fernandes, et les généraux.

Un blitzkrieg nucléaire est même envisagé en dépit de la doctrine officielle « no first use ».

On ne saura jamais le rôle exact, tenu en coulisse, des alliés états-uniens dont la marine indienne assure l'escorte des pétroliers dans l'Océan indien (6) lors de l'opération « Liberté Immuable ».

Depuis la première guerre du Golfe, la Royal Indian Navy, adoubée par l'US Navy, est chargée de la sécurité maritime du détroit d'Ormuz à celui de Malacca.

L'attaque du 13 décembre 2001 est-elle le méga mensonge par lequel commence une guerre ?

2.L'attaque du Parlement force la Lokh Sabha à un alignement atlantiste

Médiamensonge et guerre pour de vrai

L'opération Parkaram (Victoire en hindi), déclenchée après l'attaque du Parlement, ouvre un second front à l'est de l'Afghanistan ; et fixe les troupes pakistanaises, susceptibles de fournir un appui logistique aux talibans…

Les menaces nucléaires, de part et d'autres des frontières, tétanisent l'effort d'une guerre conventionnelle.

Cette opération de l'armée indienne est capitale dans la victoire rapide des coalisés à Kaboul, le 20 décembre 2001.

La preuve : aujourd'hui, 5 ans après, la relative détente entre l'Inde et le Pakistan autorise une offensive des forces unies de la résistance contre les troupes d'occupation de l'OTAN.

3.Le 13-Décembre, un mal nécessaire ?

Beaucoup de partis politiques, même au sein de la Brigade safran (7), en Inde, sont hostiles à toute alliance stratégique avec l'OTAN, qui installerait des bases militaires à demeure, en Asie centrale, coupant l'accès, par exemple, aux pétroles et gaz du Turkménistan…

L'Inde, le Pakistan, l'Iran se voient légitimement les gardiens de cette région, carrefour des échanges entre le sous-continent, la Perse, l'Asie centrale et la Chine.

Ce qui va être déterminant dans l'avenir de l'Afghanistan, dirigé par une marionnette de Washington, ex-employé d'une compagnie pétrolière, c'est leur attitude à l'égard de la force coloniale occupante, de plus en plus, rejetée par les populations…

Durant la seconde guerre du Golfe, au printemps 2003, les députés indiens comme leurs homologues pakistanais votent contre l'expédition coloniale en Irak, et empêchent l'envoi de troupes à Bagdad.

Cette condamnation des guerres du Golfe est cependant détournée, chaque fois, par des agences anglo-saxonnes, chargée de recruter des ex-cadres de l'armée comme mercenaire, et par l'implication de la compagnie d'état ONGC (Oil National Gas Company), dans des pseudos projets de reconstruction de l'Irak.

En fait, toute une partie de la collaboration militaire, engagée depuis la première guerre du Golfe, avec l'US Navy, en particulier dans la mer d'Arabie et l'Océan indien, est conduite à l'insu des parlementaires.

IMPORTANT : les armées britanniques dont la Royal Navy, actionnaire principal de la British Petroleum, recrutent directement sur l'ensemble de la sphère du Commonwealth leurs soldats et marins.

Cette prérogative de l'ex-puissance coloniale, sur le sol national, n'a jamais été abolie par les gouvernements du sous-continent…

4.Les Etats-Unis disposent d'agents infiltrés au plus haut sommet de l'État indien

La double appartenance des hommes d'Etat indiens et de leur Nomenklatura à des organisations subversives comme les RSS ou des services secrets étrangers a toujours été au centre des controverses.

Nombre de scandales relatifs aux ventes d'armes (Scorpène) attestent, aujourd'hui, d'une pénétration des États-majors, en particulier la marine, par des intérêts étrangers ou des multinationales…

Lal Krishna Advani, le bras droit du Premier ministre Vajpajee, à son apogée en 2001, est l'homme des Américains.

Né à Karachi, cet ancien terroriste RSS, qui participa aux massacres de la Partition, est le seul homme politique indien, connu, qui, intronisé au sommet de l'Etat, se rend, au grand jour, au siège de la CIA, à Langley, en janvier 2002…

Le propos du lobby proaméricain qu'il dirige à Delhi, à l'occasion du 13-Décembre 2001, est simple :

1.Souder l'armée, la police, les forces paramilitaires et un Parlement désuni derrière l'État-major, devenu le « gurkha » du Pentagone.

2.Faire basculer l'Amérique de Bush du côté des indiens afin qu'elle reconnaisse l'Inde comme une superpuissance, ayant droit à une place au Conseil de sécurité, à la droite des États-Unis.

Exit la question « futile » du Cachemire* dont l'Inde possède, illégitimement selon les critères de l'ONU, 45 % du territoire…

*En 1947, le décret d'un maharaja, Hari Singh, confiait le royaume du Jammu et Cachemire à l'armée indienne, et avait prévalu sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Dans le courant de l'année 2005, l'idiot du Texas reconnaîtra l'Inde, quoiqu'elle ne soit pas signataire du Traité de non-prolifération, comme une puissance nucléaire « légitime », à l'exception de tout autre, dès lors que cette dernière abandonne ses relations avec l'Iran.

Le gage idéal, après l'invasion de l'Afghanistan en décembre 2001, « semble » l'abandon stratégique du Pakistan, et la neutralisation des missiles balistiques, détenue par le général Musharraf.

Chimère entretenue par des militaires indiens corrompus et américains complices.

Cette prospective qui intoxique le Ministère des Affaires étrangères, à Delhi, procède d'une mauvaise évaluation, volontaire, des intérêts yankee dans la région.

Le rapprochement de l'Inde et d'Israël, qui supplée lors de l'embargo (1998-2001) décidé par Clinton, aux besoins en matière de Défense, alimente, avec un motif non dissimulé, l'illusion d'un front commun entre les Etats-Unis, l'Inde contre les républiques islamiques du Pakistan et d'Iran.

Au début 2002, le journaliste Seymour Hersh évoque, dans un article du « New York Times », un plan élaboré par la CIA et le Mossad afin de s'emparer des sites de lancement de missiles pakistanais…

De multiples articles de la sorte sont plantés dans la presse internationale pour faire accroire que le salut de l'Inde est du côté d'Eden.

5.Le Cachemire, l'endroit, après l'Irak, le plus dangereux de la Terre

S'il est une région, des peuples au monde pris en otage par la dissuasion nucléaire, c'est bien les peuples qui vivent au Jammu et Cachemire.

La possession légitime d'armes de destruction massive y est la Grande Affaire.

Leur utilisation, le cas échéant, joue un rôle dans les modalités du conflit depuis 1989, et l'atmosphère qui règne dans la région…

La course aux armements entre l'Inde, le Pakistan, la Chine, atteint des hauteurs himalayennes.

Et les profits avec…

Décréter une zone de paix dans les Himalayas serait une hérésie et une catastrophe pour les marchés américains, russes et européens.

Hérésie qui coûte, peut-être, la vie en cette année 2001 au roi Birendra du Népal et toute sa lignée, opposée à une guerre prolongée contre les maoïstes.

Nombre de pays et de sociétés comme Thalès participent à des combats hautement lucratifs dont les attentats terroristes et les guerres considérés comme épiphénomènes émaillent l'actualité...

La France vend, par exemple, des sous-marins, pouvant porter des ogives nucléaires, aussi bien à l'Inde qu'au Pakistan.

Résultat : le 8 mai 2002, 11 ingénieurs français de la Direction de la Construction Navale, venus assembler les sous-marins de type Agosta 90-B, sont victimes d'un attentat suicide à Karachi.

Plus tard, le 3 mai 2004, ce sont des techniciens chinois, venus bâtir une installation portuaire stratégique à Gawadar, qui tombent victimes de la jalousie du grand voisin.

Par égard à l'honorable marché et aux armées alliées, les diplomates évoquent la piste Bin Laden…

6.Déroulé de la crise du 13 décembre, en Inde

Le 14 décembre 2001, la Cellule Spéciale de la police de Delhi clame qu'elle a identifié les complices et commanditaires de l'attaque du Parlement.

Le 15 décembre, la police annonce qu'elle a « plié l'affaire » : l'attaque est une opération montée par deux groupes terroristes, basés au Pakistan, Lashkar-e-Toiba et Jaish-e-Mohammed.

Officiellement, « ces affreux à but non lucratif » oeuvrent aux côtés de l'armée pakistanaise à la libération du Jammu et Cachemire, occupé par l'armée indienne.

Officieusement, « ces prestataires de sévices » participent, à leurs manières, à la Libéralisation, Privatisation et Ensauvagement du monde.

Les agences BlackWater, Dynacorps, GlobalRisk, Vinel, AEGIS, qui sous-traitent certaines opérations de l'US Army en Irak, Afghanistan et ailleurs, sont la vitrine légale de cette tendance.

Pour mémoire : la dernière insurrection au Jammu-et-Cachemire a été, en 1989, financée par la CIA, qui « encadraient » les officiers de l'Inter Service Intelligence, services secrets pakistanais et les moudjahiddines dont un certain Ben Laden…

7.Carré d'as cachemirien, vulgarisation de la crise

Les salopards, aujourd'hui, sont d'après les renseignements, donnés par l'Intelligence Bureau indien, au nombre de douze :

(On peut aisément se procurer les photos de leurs cadavres, criblés de balles, auprès des journaux et magazines indiens.)

Les cinq terroristes, déguisés en commandos indiens, « morts au champ d'honneur », le 13 décembre 2001, au centre de Delhi, porteraient les noms de Mohammed, Rana, Raja, Hamza et Haider.

Aucun journaliste ne se préoccupe de leur itinéraire et de leur origine réelle ; personne ne questionne l'Intelligence Bureau et n'ose importuner leurs services.

Le prix d'une telle curiosité vous ferait arrêter comme espion au nom du Official Secret Act, 1923…

L'Intelligence bureau indien (IB) et le Research and Analyses Wing (RAW), l'équivalent du MI5 et MI6 anglais, n'ont de compte à rendre qu'au Premier ministre.

Ils constituent en relation, avec la direction, à Nagpur, des Rashtriya Swayamsevak Sangh dont certains officiers sont secrètement membres, un club très privé*.

*Lire « Open Secrets ; India's Intelligence Unveilled » de Maloy Krishna Dhar, Manas Publication, New Delhi, 2005

Les journalistes, les juges et les chercheurs sont invités aimablement à s'occuper des terroristes, c'est-à-dire des musulmans qui menacent la nation.

En l'occurrence les figures fantomatiques, dirigeant les groupes Lashkar-e-Toiba et Jaish-e-Mohammed : Ghazi Baba (Usual suspect n°1), Maulana Masood Azhar (Usual suspect n°2) et un abominable Pakistanais du nom de Tariq Ahmed ; tous vivant, libres de nuire, à en croire la légende.

Et du « carré d'as » Cachemiriens bien réels, haïs de la brigade Safran : Syed Abdur Rahman Geelani (Usual suspect n°3), Shaukat Hussain Guru, son épouse Afsan Guru, et Mohammed Afzal ; présentés comme « une cellule de commandement et de soutien logistique », arrêtés en périphérie de l'attentat, à New Delhi et à Srinagar.

Le jeune professeur en littérature arabe Geelani de l'université de New Delhi et l'indicateur de police, Afzal, font l'objet d'une surveillance très serrée depuis bien longtemps…

8.Leur sort est décidé

Les 14 et 15 décembre 2001, les 4 « pigeons » sont cueillis et, après avoir été salement travaillé, font l'objet d'une instruction très expéditive.

Ils sont jugés et condamnés le 18 décembre 2002.

Arundhati Roy, dans son article « And his life should be extinct », publié le 30 octobre 2006, par le magazine « Outlook », dresse la liste des hommes politiques, journalistes, policiers, ayant accéléré le cours de la Justice.

Lors des interrogatoires au troisième degré, les 4 lampistes sont contraints à confirmer un scénario écrit par l'Intelligence Bureau, et à avouer des liens « supposés » avec les terroristes morts, dont les autorités sont seules à connaître l'exacte identité, les familles, et la mission.

Les proches des suspects « élus » sont menacés et pris en otage par les services spéciaux de l'état du Jammu-et-Cachemire (Special Task Forces) durant toute l'enquête.

Les lois de prévention des actes terroristes, Prevention of Terrorism Ordinance & Prevention of Terrorism Act, 2002, cette dernière votée par le gouvernement Vajpajee-Advani, et surtout les pleins pouvoirs accordés aux militaires, dans certains états, semblent autoriser toute forme d'aberration.

9.État d'urgence et pogroms

Le 21 décembre 2001, l'Inde rappelle son haut-commissaire en poste à Islamabad ; le gouvernement suspend tous les vols des compagnies indiennes vers « le frère ennemi »...

Depuis la guerre de libération du Bengladesh en 1971, qui a marqué l'entrée de l'armée indienne sur la scène internationale, on a jamais vu pareille mobilisation.

Après la victoire militaire du Bengladesh, le gouvernement indien supporta l'intervention soviétique en Afghanistan (1979) comme, aujourd'hui, Vajpajee puis son successeur Singh y soutiennent les forces de l'OTAN.

Mettre en parallèle la guerre de Libération de l'Est-Pakistan et l'alliance stratégique avec Brejnev qui l'a permise, et la nouvelle alliance avec Bush pourrait éclairer la tentation d'envahir l'Ouest-Pakistan.

Les crapules en uniforme du sous-continent ont toujours eu besoin d'être sous un regard impérial pour agir…

Même pendant la guerre de Kargil, au printemps 1999, les observateurs de l'ONU, postés sur la ligne de contrôle, n'ont jamais vu réunir autant de troupes.

Un million de « Jawan » sont sur le pied de guerre le long des montagnes du Cachemire, des plaines du Pendjab, des déserts du Rajasthan et des marais salants du Gujarat*.

*À noter ces troupes n'interviendront pas lors des pogroms antimusulmans, au Gujarat, en février et mars 2002 : elles ont une autre mission.

Le Monde « libre » retient son souffle et parle d'une guerre, peut-être nucléaire, imminente entre l'Inde et le Pakistan.

Tout ce cirque coûte à l'Union indienne une bagatelle de 10 000 milliards de roupies, et le décès accidentel de quelque centaine de soldats, morts durant la panique provoquée par la mobilisation et les simulations de combat.

Si les casques bleus, sur la ligne de contrôle, notent peu d'engagement entre les troupes pakistanaises et indiennes, la campagne d'hystérie, à caractère islamophobe, orchestré au plus haut sommet de l'Etat, devient dramatique à l'intérieur du pays.

À la suite d'un incendie accidentel de train, au mois de février 2002, au Gujarat, à Godhra (8), où périssent 58 pèlerins hindous en route vers Ayodha, deux à trois mille hommes, femmes, enfants musulmans sont massacrés pendant plusieurs semaines*.

*Révisionniste, le site Internet du ministère des Affaires étrangères français parle simplement de quelques jours…

La police et les troupes hétéroclites du Bharatiya Janata Party, les Rashtriya Swayamsevak Sangh, Shiv Sena, Vishna Hindu Parishad, Bajrang dal, Durga vahina procèdent à des nettoyages ethniques sans précédent*.

*Pour savoir ce que fut le génocide 2002 au Gujarat, téléchargez le documentaire « Final Solution » de Rakesh Sharma.

Le Chief Minister du Gujarat, Narendra Modi, complice de l'holocauste, n'est pas inquiété. Au contraire…

« C'est la guerre nucléaire qui n'a pas eu lieu, entre l'Inde et le Pakistan, qui est responsable des dimensions dantesques du carnage au Gujarat, région frontalière du Pakistan. La frustration des masses, chauffée à blanc par des semaines de propagande, justifie la lâcheté des dirigeants, qui couvrent les auteurs des pogroms. » écrit rétrospectivement un psychologue indien, attaché à l'étude comportementale des foules.

C'est dans cette atmosphère empoisonnée que les quatre Cachemiriens, en février et mai 2002, passent en procès.

« La chose » qui a failli déclencher une guerre nucléaire et produit des pogroms d'une ampleur inouïe depuis la Partition conduit les lampistes, arrêtés autour de l'attentat du 13 décembre 2001, à la peine capitale et à la prison à vie.

10.Leurs avocats font appel

Finalement, la cour suprême devant le vide abyssal du dossier annule les jugements, en octobre 2003, libère le professeur Geelani et Afsan, l'épouse de Shaukat, et réduit la sentence du mari à dix ans de réclusion.

Hormis les confessions dictées par la police, sous la torture et la menace, établissant des liens supposés avec les terroristes morts, et une prose débile, retrouvée sur les lieux de l'attentat, revendiquant le crime, rien ne fonde l'accusation.

Pis les juges n'ont jamais fait parler les terroristes morts, ni examiné, de leurs propres yeux, les indices les identifiant, leur origine et leur motif.

Aucune reconstitution du crime n'a été permise ! Aucune instruction indépendante n'a été bâtie !

Confiant en sa défense, « l'ennemi public n°3 » Geelani, libre, met à jour la machination made in Bollywood ; dénonce les aveux extorqués par la torture, et défend l'indicateur de police, Mohammed Afzal, toujours condamné à mort.

Le professeur Geelani est victime d'une tentative d'assassinat près de la Cour suprême, à Delhi, le 8 février 2005.

Cinq balles dans le corps, c'est un miracle s'il survit…

Unique dans les anales judiciaires, la police fait alors inculper, par des attorneys complaisants, la victime dans l'organisation de son propre assassinat !

11.Les juges indiens, prisonniers de la raison d'Etat

Près de trois ans et demi après l'attaque du Parlement, le 4 août 2005, la Cour suprême indienne délivre son verdict et qualifie l'Attentat « d'acte de guerre » - ce qui permet aux juges de ne pas entrer dans les détails... « La tentative d'attentat contre le Parlement indien, le 13 décembre 2001, est nul doute une invasion du territoire souverain d'une nation… (…) Les terroristes tués étaient motivés par un fort sentiment anti-indien, à en croire le libelle collé sur le pare-brise de la voiture abandonnée, ayant servi à leur méfait. »

On est stupéfait à la lecture des attendus...

L'affiche placardée sur le pare-brise de l'Ambassador, ayant servi à « l'acte de guerre », déclinerait en lettres majuscules les motivations profondes des auteurs de l'attentat du 13 décembre 2001 :

« INDIA IS A VERY BAD COUNTRY AND WE HATE INDIA WE WANT TO DESTROY AND WITH THE GRACE OF GOD WE WILL DO IT GOD IS WITH US AND WE WILL TRY OUR BEST. THIS EDIET WAJPAIVAND ADVANI WE WILL KILL THEM. THEY HAVE KILLED MANY INNOCENT PEOPLE AND THEY ARE VERY BAD PERSONS THERE BROTHER BUSH IS A VERY BAD PERSON HE WILL BE NEXT TARGET HE IS ALSO THE KILLER OF INNOCENT PEOPLE HE HAVE TO DIE AND WE WILL DO IT. »

Les fautes d'orthographe sont authentiques.

Le manifeste grossier qui faillit déclencher une guerre nucléaire entre l'Inde et le Pakistan pourrait être écrit par un humoriste voulant parodier l'Incendie du Reichstag et le 11-Septembre.

Le 4 août 2005, la cour suprême déclare à propos de la condamnation à la pendaison du petit indicateur de police, Mohammed Afzal : « Il n'y a aucune preuve de l'appartenance de Afzal à un groupe ou une organisation terroristes. Comme dans la plupart des cas de complot, il ne peut y avoir d'évidences prouvant l'implication directe du comploteur (sic) Ce sont l'étude des circonstances et les liens supposés et répétés de l'accusé avec les fedayins tués qui prouvent sa collaboration à l'acte criminel. »

Ce qui a déterminé, en dernière analyse, la condamnation à mort de Mohammed Afzal, souligne Arundhati Roy, « c'est l'indigence de l'accusé. Faute d'argent, Afzal n'a pas eu droit à une défense digne de ce nom ».

Le condamné « à la peine la plus rare qui soit » d'après le code pénal indien appartient au peuple des ombres et des sacrifiés.

Ce qui n'a pas été le cas du brillant professeur Geelani, membre de l'assemblée du Cachemire, Hurriyat, soutenu par sa famille et son milieu.

Aucune preuve directe n'a semblé nécessaire, dans l'esprit des juges, pour envoyer un pauvre bougre, malmené par la police et la vie, à la potence : de « circumstantial evidence » suffisent… « L'attentat du 13 décembre 2001, qui a entraîné un grand nombre de victimes (sic), a secoué la nation entière ; la conscience collective ne peut être satisfaite que si la peine capitale est requise à l'endroit de l'accusé. L'unité du pays, l'intégrité et la souveraineté de l'Inde, mises en péril par ces actes de terreur, ne peuvent être sauvegardé qu'en punissant, de la plus forte peine, toute personne dont l'enquête a prouvé qu'elle est liée à la conspiration ».

Invoquer « une conscience collective », nation, peuple, communauté, pour justifier un meurtre rituel s'appelle un lynchage…

Il semble que les juges de la Cour suprême indienne, éduqués à l'Anglaise, pratiquent, parfois, ce genre de sport sans état d'âme.

Incapables d'inculper leurs propres services secrets et dirigeant dans l'Attentat du 13-Décembre 2001, les juges sacrifient le maillon faible de la chaîne…

Là nous touchons la raison pratique de la condamnation à mort de Mohammed Azfal :

(je laisse la phrase en anglais afin que vous puissiez en savourer la saveur) :

« The appelant, who is a surrendered militant and who has bent upon repeating the acts of treason against the nation, is a menace to the society and his life should become extinct. »

« AND HIS LIFE SHOULD BECOME EXTINCT. »

Traduction : « et sa vie doit être effacé ou aboli. »

Cette phrase a pu être prononcé dans un local de l'Intelligence Bureau, proche de la Cour Suprême, à South Blok…

Car Mohammed Afzal, ex-militant renégat, ex-indicateur des State Task Force, au Cachemire, connaît les véritables auteurs et commanditaires de l'attentat du 13 décembre 2001 : il a travaillé pour eux.

12. Petite biographie d'un traître cachemirien

Mohamed Afzal a connu la traversée du miroir comme tout être vivant dans un pays occupé, coupé en deux par la soldatesque.

En 1989, le jeune Azfal franchit clandestinement la Line of Control pour rejoindre un camp d'entraînement de militants au Cachemire « azad » ; il en revient sans entraînement et désillusionné sur la cause.

L'homme abandonne sa carrière de « militant » et s'inscrit à l'université de Delhi.

En 1993, sans avoir été réellement militant, Azfal profite d'un programme gouvernemental relatif au renégat et rejoint volontairement les Border Security Force.

Selon lui, c'est à ce moment que son cauchemar commence. Sa reddition est considérée comme un crime dans les deux Cachemires occupés, et sa vie bascule en enfer.

Le « malgré lui » Azfal n'a plus comme territoire que sa peau à défendre : il ne connaîtra ni médaille ni retraite.

Sa vie martyrisée est le symbole d'un pays malmené, le Cachemire. 100 000 morts et 10 000 cachemiriens disparus depuis 1989...

La vallée de Srinagar* est l'espace au monde, excepté la Palestine et la ville de Bagdad, qui connaît la plus grande concentration de crapules en uniforme et d'espions : 1 militaire pour 15 habitants, et, sans doute, 1 mouchard sur 3 individus.

*Lire mon article : Indian Army hors du Cachemire ! sur parisindymedia

Le modèle de surveillance et de répression des populations y est made in Israël, le dernier état colonial au monde.

C'est à l'état sioniste que l'Inde commande son barbelé, ses miradors et ses systèmes d'écoute sophistiquée, qui équipent la frontière coupant le Cachemire en deux.

Certains Border Security Force font même des stages en Palestine occupée…

À l'encontre de Tsahal, le Moloch hindou n'est pas tendre avec ses propres espions et agents doubles ; beaucoup croupissent, indigents, dans les geôles pakistanaises ou finissent, couverts de mouches, lobotomisés, dans les mouroirs indiens.

Mohammed Afzal, une fois pendu, lui, connaîtra un destin extraordinaire : il sera, pour les livres d'histoire, celui qui faillit déclencher une guerre nucléaire.

Arundhati Roy, dans son long plaidoyer qui démonte pièce par pièce l'accusation, donne la parole au cachemirien condamné à mort, reprenant les aveux extorqués où filtre la lumière :

« Je vivais à Sopore dans l'Etat du Jammu et Cachemire. En 2000, l'armée avait pris l'habitude de me harceler quotidiennement ; puis régulièrement une fois par semaine. Un certain Raja Mohan Rai me conseillait de donner des informations sur les militants. Je faisais partie d'un groupe de renégats ; les militants repentis devaient pointer chaque dimanche dans les baraques de l'armée. À cette époque, je n'étais pas physiquement torturé, simplement menacé. J'avais pris l'habitude de leur donner de petites informations glanées dans les journaux de Srinagar afin de les satisfaire et de sauver ma peau… En juin et juillet 2001, je déménageais et venais m'installer à Baramullah. J'y tenais une boutique d'instruments de chirurgie ; je vivais chichement à la commission. Un jour que je circulais en scooter, les gens des Special Task Force m'arrêtèrent, m'emprisonnèrent et me torturaient pendant cinq jours. Quelqu'un avait raconté que j'avais renoué avec les militants... Je fus confronté à cette personne qui fut relâchée sous mes yeux. On m'a gardé en prison durant 25 jours et je réussis à me libérer en payant 1 lakh de roupies (environ 2000 dollars) un officier. La Special Cell de Delhi a confirmé cet incident. Après mon séjour en prison, les Special Task Force me donnèrent un certificat et me nommèrent Special Police Officer pour six mois. Pourtant ils savaient que je ne voulais plus travailler pour eux… Tariq (le Pakistanais présenté comme le mastermind de l'attentat) me rencontra plus tard à Srinagar ; et me confia qu'il travaillait ordinairement pour les Special Task Force. Je lui répondis que moi aussi, je bossais pour eux. Mohammed (qui a été tué lors de l'attentat du Parlement le 13 décembre 2001) accompagnait Tariq. Tariq me dit qu'il était originaire de Keran secteur au Cachemire et me pressa d'accompagner en voiture Mohammed à Delhi car ce dernier devait quitter le pays après quelque temps. Je ne sais pas pourquoi j'étais arrêté le 15 décembre 2001 à Srinagar… »

L'ex-renégat et indicateur de police Afzal n'a aucune raison de mentir.

Son sort de « pièce sacrifiée » est scellé depuis l'instant où il est entré au service des forces spéciales de l'armée indienne...

L'homme n'a commis qu'une faute comme il dit : « je ne savais pas ».

Les peuples comme les individus n'ont qu'un ennemi : leur propre gouvernement.

Pour en savoir plus :

Lire dans la dernière livraison de « Courier international », un extrait traduit du « J'accuse les intégristes hindous » écrit par Arundhaty Roy.

India : Stop the State murder of Mohammed Afzal wsws.org

Don't Hang Afzal ; There are too many unanswered questions, par Arundhaty Roy www.outlookindia.com

Lire « December 13th : Terror Over Democracy », écrit par Nirmlangshu Mukherjee ; « Trial of Errors and Balancing Act », publié par The People's Union for Democratic Rights, Delhi.

Et si vous êtes avocats ou étudiant en droit, demandez à la High Court et à la Supreme Court of India, les trois épais volumes des minutes de procès relatifs à l'affaire ; ces documents sont désormais publics.

1.Les Black Cat sont une unité d'élite, chargée en temps normal de la protection des dirigeants politiques et économiques de l'Union indienne. 2.Un même type d'attentat « déjoué » a eu lieu le 1er juin 2006, au siège des RSS à Nagpur ; des juges indépendants ont mis en question sérieusement la réalité de l'événement… 3.À l'encontre du 11-Septembre, le public du 13-Décembre est bombardé d'images filmées par des cadreurs professionnels qui ont tourné à huis clos l'opération terroriste, à l'intérieur d'un espace, normalement inaccessible ; la Lok Sabha, bâti par l'ex-puissance coloniale, est situé dans un large Champ de Mars, éloigné et protégé des zones de population…

4.Le 13 décembre 2001, c'est aussi le jour choisi par Washington pour diffuser une cassette vidéo dans laquelle Ben Laden s'attribue la paternité, responsabilité et planification des attentats du 11-Septembre. 5.Netaji, nom honorifique des dirigeants en Inde.

6.L'attaque du Parlement a lieu pendant l'opération « Liberté immuable », débutée le 7 octobre 2001, à laquelle la Royal Indian Navy participe très discrètement....

7.Brigade safran : nom donné à la mouvance des fascistes hindous.

8.Une enquête du Ministère des chemins de fer conclut, en 2005, à propos de l'incident de Godhra, que l'incendie qui a déclenché le génocide au Gujarat était accidentel ; mais qu'il avait été utilisé par le gouvernement du Gujarat, dirigé par le B.J.P., pour stigmatiser les musulmans et provoquer des pogroms.

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QUELQUES LIENS par do :

"And His Life Should Become Extinct" de Arundhati Roy :

http://www.outlookindia.com/fullprint.asp?choice=2&fodname=20061030&fname=Cover+Story+%28F%29&sid=1

INDIAN ARMY HORS DU CACHEMIRE ! d'Himalove :

http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=42578

Le film "Final Solution" de Rakesh Sharma :

http://www.rakeshfilm.com/finalsolution.htm

Final Solution is a study of the politics of hate. Set in Gujarat during the period Feb/March 2002 - July 2003, the film graphically documents the changing face of right-wing politics in India through a study of the 2002 genocide of Moslems in Gujarat. It specifically examines political tendencies reminiscient of the Nazi Germany of early/mid-1930s.


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