23 mars 2002

 

Une file de kamikazes qui attendent
par Uri Avnery
[traduit de l'anglais par R. Massuard et S. de Wangen]

          23 mars 2002 - Quand tout un peuple est saisi par la rage, il devient un ennemi dangereux, parce que la rage n'obéit pas aux ordres. Quand elle existe dans le cœur de millions de gens, elle ne peut pas en être extirpée en appuyant sur un bouton. Quand cette rage déborde, elle crée des kamikazes - bombes humaines alimentées par la puissance de la colère, contre laquelle il n'y a aucune défense. Une personne qui a renoncé à la vie, qui ne voit pas d'autre issue, est libre de faire tout ce que lui dicte son esprit perturbé. Certains des kamikazes sont tués avant même d'avoir atteint leur but, mais quand ces kamikazes sont des centaines, des milliers, aucune méthode militaire ne rétablira la sécurité. Les actions du général Mofaz durant le dernier mois ont porté cette rage à un niveau sans précédent et l'ont instillée dans le cœur de chaque Palestinien, qu'il soit professeur d'université ou gamin des rues, ménagère ou étudiante, militant de gauche ou intégriste. Quand les tanks se déploient n'importe comment dans le centre d'une ville, écrasant les voitures et détruisant les murs, défonçant les routes, tirant sans discrimination dans toutes les directions, paniquant une population entière - cela provoque une rage désespérée.

          Quand des soldats défoncent un mur pour entrer dans le salon d'une famille, traumatisant les enfants et les adultes, saccageant les biens, détruisant les fruits d'une vie de dur labeur, et ensuite cassent le mur du logement voisin pour tout y détruire - cela provoque une rage désespérée. Quand des soldats tirent sur tout ce qui bouge - parce que c'est la panique, parce que c'est l'anarchie ou parce que Sharon leur a dit de " causer des pertes " - cela provoque une rage désespérée.

          Quand des officiers donnent l'ordre de tirer sur des ambulances, tuant des médecins et des infirmiers en train de sauver des blessés saignant à mort - cela provoque une rage désespérée.

          Quand de tels actes et des milliers d'autres humilient un peuple entier, lui brisant l'âme - cela provoque une rage désespérée. Et puis il s'avère que la rage n'est après tout pas désespérée. Les kamikazes s'engagent pour prendre une revanche, avec un peuple entier derrière eux les bénissant et se réjouissant à chaque Israélien tué, soldat ou colon, jeune fille dans un bus ou adolescent dans une discothèque.

          Les Israéliens sont abasourdis par ce terrible phénomène. Ils ne peuvent le comprendre, parce qu'ils ne savent pas (ou ne veulent pas savoir) ce qui se passe dans les villes et villages palestiniens. Seuls leur parviennent quelques faibles échos de ce qui s'y passe réellement. Les médias dociles ne donnent pas l'information ou la diluent de telle façon que le monstre ressemble à un chaton inoffensif. La télévision, qui est désormais soumise à une censure de style soviétique, ne dit pas à ses spectateurs ce qui se passe. Si quelqu'un est autorisé à en dire quelques mots, au nom de " l'équilibre ", ses paroles sont noyées dans un océan de bavardages par les politiciens, les commentateurs agissant comme des porte-parole officieux des généraux responsables des ravages.

          Ces généraux observent sans réagir une lutte qu'ils ne comprennent pas et font des discours arrogants sans rapport avec la réalité. Des déclarations comme " nous avons empêché des attentats ", " nous leur avons donné une leçon ", " nous avons détruit l'infrastructure du terrorisme " dénotent un manque de compréhension infantile de ce qu'ils font. Loin d'avoir " détruit l'infrastructure du terrorisme ", ils ont construit une pépinière de kamikazes.

          Une personne dont le frère aimé a été tué, dont la maison a été détruite dans un déchaînement de vandalisme, qui a été mortellement humilié devant ses enfants, va au marché, achète une carabine pour 40.000 shekels (certains vendent leur voiture pour cela) et part prendre sa revanche. " Donnez-moi une haine couleur de cendre comme un cilice " (" Give me a hatred gray like a sack ") a écrit notre poète Nathan Alterman, plein de rage contre les Allemands. La haine dont parle le poète est désormais partout.

          Des bandes d'hommes armés parcourent maintenant toutes les villes et tous les villages de Cisjordanie et de la Bande de Gaza, avec ou sans masque noir (disponibles pour 10 shekels sur les marchés). Ces bandes n'appartiennent à aucune organisation. Des membres du Fatah, du Hamas, et du Djihad s'associent pour programmer des attaques, sans tenir compte des institutions établies.

          Ceux qui croient qu'Arafat peut arrêter cela en appuyant sur un bouton rêvent. Arafat est le chef adoré, maintenant plus que jamais, mais quand un peuple est envahi par la colère, même lui ne peut l'arrêter. Au mieux, la pression de la cocotte-minute peut diminuer lentement, si la majorité des gens sont persuadés que leur honneur a été rétabli et leur libération garantie. Alors le soutien public aux " terroristes " diminuera, ils seront isolés et s'évanouiront. C'est ce qui est arrivé dans le passé. A l'époque d'Oslo, il y avait aussi des attentats, mais ils étaient organisés par des dissidents, des fanatiques, et l'aversion populaire à leur encontre limitait les dégâts qu'ils causaient.

          Les hommes politiques américains, comme les officiers israéliens, ne comprennent pas ce qu'ils font. Quand un vice-président dominateur met des conditions humiliantes à une rencontre avec Arafat, il jette de l'huile sur le feu. Une personne dénuée d'empathie pour la souffrance d'un peuple occupé, qui ne comprend pas la situation dans laquelle celui-ci se trouve, ferait mieux de se taire. Parce que toute humiliation de ce genre tue des dizaines d'Israéliens. Après tout, les kamikazes sont prêts et attendent leur tour.

___________________________________

NOTES de do :

1°) Shimon Peres est coupable aussi !

Merci à Uri Avnery pour cette excellente explication de texte.

Je voudrais dire aussi que j'ai lu ici et ailleurs des textes bien sympathiques. Encore tout récemment, L'écrivain portugais Saramago (prix nobel) comparait Gaza à Auchwitz, et, en effet, plus le temps passe et plus ce qui semblait n'être, à l'origine, qu'un bantoustan (lieu géographique où les Blancs d'Afrique du Sud parquaient leurs esclaves noirs à l'époque de l'apartheid)finit par ressembler de plus en plus à un camp d'extermination.

Je voudrais dire surtout que Sharon n'est pas seul coupable. Et que le comparer à Hitler, même si plus le temps passe et moins cette comparaison semble audacieuse, n'enlève en rien la responsabilité de la gauche sioniste israélienne.

De même que Voynet, en n'ayant pas démissioné à l'époque où le maïs transgénique a été imposé en fRANCE s'est rendue coupable de la transgénisation de ce pays, méritant en cela son surnon de ministre du maïs transgénique ; de même que le Parti "communiste" en ne démissionant pas lors de la fermeture de Renault Vilvorde en Belgique ni lors de la privatisation par Jospin des télécoms ; de même que ces deux tristes personnages (les Verts et le P"C") sont autant responsables que Jospin des saloperies que nous a faites le gouvernement "socialiste" ; de même qu'ils lui ont servi de caution morale ; de la même façon, Shimon Peres et les sionistes de gauche apparaîtront aux yeux de l'histoire comme tout autant responsables que sharon du génocide des Palestiniens : ils n'ont pas démissioné, acceptant par là de servir de caution morale à celui qui est dors et déjà nommé le Hitler juif : Sharon.

Shimon Peres et toute la gauche sioniste sont coupables !

Merci pour votre attention,
Meilleure salutation,
do
http://mai68.org

Post Scriptum :
¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯
Les sionistes de gauche sont des sionistes : on a beau être à la gauche du pire parti d'extrême-droite, on n'en est pas moins dans le pire parti d'extrême-droite !

_____________________________________

2° NOTE de do : Salut,

Shimon Peres a-t-il démissioné du gouvernement Sharon ? !

NON !

Donc il est tout autant coupable que Sharon !

C'est trop facile d'accuser Sharon sans parler des autres sionistes.

C'est tout le sionisme qui est coupable !

Pas seulement Sharon !

Comme personne à par moi n'aura dénoncé que Shimon Peres n'a pas démissioné et qu'il a donc servi de caution morale aux exactions de Sharon, Si les Israéliens virent Sharon, alors Shimon Peres pourra prendre la tête d'Israël !

Vous contenteriez-vous de ça ?

Et que se passera-t-il ensuite, Dans ce cas ?

Les sionistes attendront simplement que le monde les oublie un peu, ils attendront des temps plus favorables, puis il y aura de nouvelles élections, et pendant la campagne électorale le Shin Beth ou le Mossad (services secrets israélien) manipuleront un quelconque groupe islamiste pour qu'il fasse du terrorisme aveugle en Israël dans le style kamikaze, puis un nouveau Sharon sera élu, et les sionistes auront enfin la possibilité de continuer leur travail là où Sharon avait dû l'abandonner.

Vous avez qu'à regarder l'histoire : ce que je viens de projeter pour l'avenir, c'est ce qui s'est déjà passé ! comment Sharon a-t-il pu être élu ? de la façon que je décris plus haut !

Et tous les gens qui ont un peu de pouvoir, et donc Peres lui-même, le savent, et personne ne le dit ! Tous complices !

___________________________________

3° NOTE de do : C'est TOUT Israël qui est une colonie !

C'est tout Israël qui est une colonie !

C'est tout Israël qui est un territoire occupé !

Les cow-boys n'ont respecté aucun traité de paix !

Les cow-boys ont tué tous les Indiens afin de leur voler TOUT leur territoire !

Les frontières de 1967, c'est comme la ligne de démarcation en France pendant la guerre de 39-45 !

La frontière de 1967, c'est comme la ligne nord-sud, dans ce qui était en train de devenir les USA, que les envahisseurs-voleurs-génocideurs-cow-boys avaient promis aux Indiens que si les Indiens acceptaient que les cow-boys aient le droit de rester à l'Est, alors les cows-boys n'iraient pas à l'ouest !

Les cow-boys n'ont jamais eu l'intention de respecter aucun traité de paix ils ont envahi l'Amérique et ils ont tué tous ceux qui ont cherché à les en empêcher. Les traités de paix n'ont servi que les cow-boys, quand ils avaient envie de se reposer de leur guerre contre les Indiens et de réfléchir à comment la mener plus intelligemment, comment convaincre ceux qui parmi eux commençaient à se poser des questions, et à se demander si finalement les Indiens n'auraient pas une âme !

Les cow-boys n'ont respecté aucun traité de paix !

C'est tout Israël qui est un territoire occupé !

C'est tout israël qui est une colonie !


Retour en AG

Vive la révolution : http://www.mai68.org
                                    ou : http://www.cs3i.fr/abonnes/do
           ou : http://vlr.da.ru
              ou : http://hlv.cjb.net