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Anti-Loi El Khomri, … Et ensuite ? La Révolution des 4 Jeudis ?!

mercredi 23 mars 2016

L’idée de ce titre est naturellement venue, bien que sur le ton de la plaisanterie, à l’issue de la manif du 17 et de l’AG ayant décidé la manif du 24, pour ne pas relâcher la pression sur le gouvernement, en attendant la grande offensive sociale du 31 … Il fait clairement allusion à l’expression traditionnelle qui désigne la réalisation d’un vœu utopique : la semaine des quatre jeudis… !

Bien entendu, nous ne considérons pas pour autant la Révolution comme une utopie… Mai 68 avait fait renaitre l’espoir d’une autre société, au moment où personne n’y croyait plus, et alors que la crise du capitalisme/impérialisme n’était encore qu’en gestation, et non perceptible des masses populaires occidentales.

Aujourd’hui la situation est inverse : plusieurs générations n’ont déjà connu, à des degrés diverses, que la crise … Pourtant l’essai non transformé de Mai 68, à cause non seulement des bureaucrates révisionnistes thoréziens , mais aussi et surtout des « leaders révolutionnaires » en fait opportunistes petits bourgeois et surtout désireux de liquider la cause pour quelques strapontins universitaires, administratifs ou politiciens, lèches bottes du système, à amené les vagues de luttes suivantes dans le mur de l’économisme et du réformisme. L’échec des luttes pour sauvegarder les retraites en est l’exemple le plus amer.

Dans la présente lutte ce mur se profile à l’horizon du 31 Mars… Pourtant, le Mercredi 9 Mars a brusquement réveillé la flamme de la contestation sociale qui couvait sous la braise du mécontentement populaire, et qui paraissait jusque là étouffée sous les cendres de l’échec du mouvement pour la défense des retraites.

Après le million de signatures, objectif encore totalement improbable il y a seulement quelques semaines, la concrétisation de ce fait acquis, dans la rue, remet en question le rapport de forces concernant l’avenir de cette loi inique.

Ce retour brutal aux rapports sociaux du 19e siècle, brutal mais concocté en douce dans les couloirs des ministère avec la potion "multiculturelle" El Khomri pour faire avaler la pilule amère, n’a pu s’effectuer comme prévu avec la complicité des syndicats collabos et de ceux qui voulaient profiter de l’occasion pour surenchérir dans la négociation, mais simplement sur le prix de leur trahison …

Débordées par leur propre base, lassée de ces palinodies, les bureaucraties syndicales avaient bien entendu entrepris de "soutenir" et d’"encadrer" le mouvement de la jeunesse … Mais pour qu’une récupération soit efficace, il faut qu’elle ne soit pas trop voyante … Le mouvement de la jeunesse conserve donc la place de tête de manif dans ces premiers cortèges.

Et avec la jeunesse, rien ne se passe exactement comme prévu, ce qui est peut-être, aussi, la marque des évènements significatifs de l’Histoire…!

A Lyon, le 9 Mars, lorsqu’en fin de parcours elle tourne le coin de la Place Jean Macé, qui s’ouvrait, vide, comme un tremplin offert à son élan, la jeunesse se découvre instinctivement un nouveau pouvoir, fondé sur le rapport de force qu’elle vient de créer par se présence massive dans la rue.

Si la place était vide, c’était évidemment pour faciliter la dispersion de la foule, notamment vers les accès aux transports urbains.

Mais comme la nature a horreur du vide, la jeunesse improvise aussitôt un slogan propre à le combler :

« On est nombreux, on fait c’qu’on veut !! »

Mais le grand vide de cette Place Jean Macé n’en est pas moins dans l’axe de l’Avenue Jaurès, qui ramène au centre et à tous les quartiers "stratégiques" de Lyon …

Plus que jamais d’actu, et carrément de circonstances, en l’occurrence, un autre slogan s’est immédiatement imposé, dans une combinaison fort dynamique avec le premier :

« On s’arrête pas, on continue le combat ! »

Manifestement quelque peu désorganisée par ce nouveau départ aussi massif qu’imprévu, la police ne put intervenir efficacement dans cette configuration des lieux et de la foule, et se replie de plus en plus loin sur l’avenue, dans la vaine attente d’une dispersion. Bloquant l’accès à la préfecture, elle laisse le cortège se reformer en direction de Bellecour, Place la plus "centrale" de Lyon, mais sur l’autre rive du Rhône.

Après une deuxième tentative, sur la Place du Pont, plus violente, pour isoler et disperser l’avant-garde qui s’était effectivement portée trop loin en avant, elle ne put empêcher le cortège de se regrouper à nouveau et d’atteindre enfin la Place Bellecour, d’où le cortège était initialement parti, en longeant le Rhône.

Malgré la pluie glaciale qui avait déjà refroidi fortement l’ambiance, il faudra à la police encore plus d’une heure et beaucoup de violences pour dégager totalement la Place.

A quoi bon cet acharnement, s’il s’agissait seulement de revenir à son point de départ ?

Dès lors qu’elle se retrouva en "liberté" presque totale, ce que l’on peut appeler la "deuxième manif" se mit à débattre spontanément de ses objectifs à mesure de son avancée impressionnante…

La Préfecture, puis le Siège du PS, paraissaient attirer les suffrages, même si le rapport de force ne le permettait pas vraiment … Objectifs révélateurs de l’importance du discrédit de ce pouvoir d’état dans la jeunesse…

Mais finalement, réoccuper et tenir la Place Bellecour avait déjà, pour certains, à peine plus âgés, un sens symbolique en mémoire des répressions passées violentes d’autres luttes sociales où le rapport de force était moins favorable…

Mais ce qui est évidemment remarquable, c’est que l’état d’esprit, au cours de cette "deuxième manif", était bien différent de la première partie, et reflétait une volonté farouche d’émancipation, d’autonomie et de rejet des manipulations par les bureaucraties …

En ce sens, la fermeture de ce quadrilatère urbain n’était pas vraiment celle d’une boucle, mais restait en fait ouverte sur l’avenir, plutôt à la manière philosophique d’une spirale dialectique… Quadrature de la Spirale …?

C’était déjà presque, sur le terrain, une leçon de philo prolétarienne, telle que Georges Politzer tentait de l’enseigner, il y a fort longtemps, dans la première "Université Ouvrière" qu’il avait fondé, et qui était réellement ouverte à tous, quelque soit le niveau de départ, parfois très faible. (Rien à voir avec ses succédanés ultérieurs et actuels…) :

« Si nous examinons d’un peu plus près le processus (…), nous voyons que la pomme est le résultat d’un enchaînement de processus. D’où vient la pomme ? La pomme vient de l’arbre. D’où vient l’arbre ? De la pomme. Nous pouvons donc penser que nous avons là un cercle vicieux dans lequel nous tournons pour revenir toujours au même point. (…)… »

Mais en réalité :

« …Nous n’avons donc pas un cercle, comme les apparences tendaient à le faire penser, mais un processus de développement que nous appellerons un développement historique. L’histoire montre que le temps ne passe pas sans laisser de trace. Le temps passe, mais ce ne sont pas les mêmes développements qui reviennent. Le monde, la nature, la société constituent un développement qui est historique, un développement qu’en langage philosophique on appelle « en spirale ». »

Georges Politzer

« Principes élémentaires de philosophie »

(Philosophe, fondateur de l’Université Ouvrière

Résistant, assassiné par les nazis en 1942.)

Comme on l’a compris, depuis son nouveau départ de la Place Jean Macé, la manifestation lyonnaise a pris réellement un tour de libération. Et même si, après avoir cherché sa route en fonction du rapport de force incertain avec la police, elle est finalement retourné Place Bellecour, d’où elle était partie, c’est après avoir fait l’expérience que tant que le rapport de force est favorable, il reste possible d’avancer, même s’il reste à bien choisir la voie …

Pour ceux qui s’en souviendront, pour la jeunesse qui a fait là une expérience marquante, c’était encore , sur le terrain, une boucle, certes, mais déjà en spirale ascendante.

Mais pour le pouvoir aussi, ce fut une leçon concernant la capacité de développement de cette lutte, et pout lui, le début d’une escalade dans la répression, derrière les discours réducteurs sur l’ampleur du mouvement.

C’est pourquoi le 17 Mars ce fut, et à Lyon sans doute encore plus qu’ ailleurs, une manif sous haute surveillance policière !!

Suite à l’escapade de la manif du 9, le pouvoir y avait prévu un quadrillage extensif de tout le parcours, un suivi « serré de près » et le renfort de grilles pour protéger la préfecture !! In fine, une tentative pour repartir de la Place Guichard tournera court, mais aboutira néanmoins à une AG exceptionnelle sur la Place elle-même, décidant d’une prochaine manif le Jeudi 24 Mars, pour maintenir la pression sur le pouvoir, jusqu’à la grande manif interprofessionnelle, intersyndicale, travailleurs, chômeurs et étudiants réunis dans un même combat contre la loi El Khomri, le Jeudi 31 Mars !!

Mais même canalisée ainsi la manifestation a permis à la jeunesse d’exprimer à nouveau, et peut-être encore avec plus de force quant à l’avenir, sa détermination à combattre ce projet de loi ultra rétrograde et même à rejeter le modèle de société qu’il implique, pour leur futur proche et pour les générations à venir !

"Loi El Khomri, Précarité à vie, Cette société là, On en veut pas !"

Comprendre le choix de société que ce projet implique, c’est déjà poser la question d’une alternative.

Si ce projet de loi apparait de plus en plus clairement comme la goutte d’eau qui a fait déborder le vase du ressentiment populaire, il est aussi le révélateur de la boue obscurantiste et nauséabonde que le pouvoir remue en son fond pour tenter de sauver un système en crise chronique et qui, loin de s’assainir, vacille de plus en plus sur cette base putride.

Pour l’instant, si l’alternative n’est pas encore clairement tracée, cette lutte sociale est déjà un mouvement de masse qui unit les générations pour barrer la route à un retour vers une politique économique et sociale ramenant les rapports sociaux à ce qu’ils étaient à la fin du 19e siècle !

Et pourtant c’était l’époque où le progrès technique aidant, l’humanité ne pouvait qu’espérer en une amélioration radicale par l’avènement d’une société socialiste universelle, balayant la misère …, comme l’exprimait la grande Louise Michel, dans « L’Ère Nouvelle » … ( https://tribunemlreypa.wordpress.com/2016/01/01/lere-nouvelle-de-louise-michel-1887/ )

Et de plus, non seulement ce nouveau mouvement unit les générations, mais il rappelle aux anciens leur tentative révolutionnaire de Mai 68, et d’autant plus concrètement que cette mémoire s’incarne à la fois dans les slogans et dans la pratique démocratique des AG, comme ce fut le cas place Guichard, en dépit de la présence, puis de la répression policière !

Malgré l’intimidation, puis la répression, l’AG s’est prolongée à l’intérieur de la Bourse du Travail, pour préciser l’organisation de la prochaine manif importante, du Jeudi 24 Mars, qui prendra son départ Place Bellecour à 13 heures.

Rappelons qu’une manif encore plus importante est prévue, à l’échelle nationale, le Jeudi 31 Mars … Elle pourrait être un tournant décisif dans cette lutte, à la fin d’un mois de Mars prometteur en termes de Résistance…

Et ensuite ? La Révolution des 4 Jeudis, serait-on tenté d’écrire … Reste à l’écrire sur le terrain et dans l’Histoire !!

Pour endiguer ce mouvement et briser cette vague montante, le pouvoir s’affaire fébrilement à construire, avec l’aide des bureaucraties syndicales réformistes et kollabos, à des degrés diverses, le mur de la "négociation" sur lequel il espère bien la voir échouer comme tant de précédentes.

Dans la présente lutte ce mur se profile donc à l’horizon du 31 Mars…

Pourtant, céder sur la loi EL Khomri, c’est un billet sans retour pour l’obscurantisme social du 19e siècle. Un voyage dans le temps dont on se passerait bien.

L’idée d’une Révolution Socialiste Prolétarienne, dans ces conditions, redevient une idée d’avenir, qu’elle n’a jamais cessé d’être, en réalité, seulement enfouie sous les mensonges de la propagande anticommuniste forcenée de la bourgeoisie, aidée en cela par toutes les factions idéalistes petites bourgeoises, incapables d’assumer la responsabilité de reprendre en main l’outil Marxiste-Léniniste pour comprendre la réalité du monde actuel et ouvrir une voie politique à la fois réellement nouvelle et s’appuyant sur un bilan lucide de l’expérience passée du mouvement ouvrier.

La négociation, dans la lutte sociale, peut, selon les circonstances concrètes, rester un moyen utile, lorsque les objectifs sont clairement définis et que le rapport de force permet une avancée réelle sur les revendications immédiates.

Dans le cas de la loi El Khomri, il n’y a rien à négocier. Le retrait s’impose, comme seule nécessité.

La question fondamentale de l’avenir social, posée bien involontairement par le pouvoir comme une provocation plus que comme une interrogation, demeure.

On sait, désormais, ce pouvoir pseudo-"socialiste" incapable de la résoudre.

Luniterre

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Sources de l’article :

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2016/03/20/mercredi-9-jeudi-17-jeudi-24-jeudi-31-mars-et-ensuite-en-avant-pour-la-revolution-des-4-jeudis-nouvelle-edition/

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2016/03/18/mercredi-9-jeudi-17-jeudi-24-jeudi-31-mars-en-avant-pour-la-revolution-des-4-jeudis/

https://tribunemlreypa.wordpress.com/2016/03/11/lyon-libere-quadrature-de-la-spirale-un-peu-de-philo-proletarienne/

https://solydairinfo.wordpress.com/2016/03/18/loi-el-khomri-precarite-a-vie-cette-societe-la-on-en-veut-pas/

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