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Egypte - 29 janvier 2011 - La police secrète sème la terreur

jeudi 3 février 2011, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 3 février 2011).

Egypte : La police secrète sème la terreur

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Le Caire, 29 janvier 2011.

Depuis le 28 janvier au soir des événements inquiétants se produisent en marge des manifestations. Des vitrines du Musée du Caire sont brisées et des sculptures millénaires sont jetées au sol. Des banques sont attaquées. Des dizaines, (peut-être des centaines) de criminels dangereux sont libérés des prisons de Tora, Abou Zaabal, Wadi Natrum el Anater.

Les foyers, à l’échelle de la nation, sont attaqués par des bandes armées jusqu’aux dents qui pillent et terrorisent la population.

La tactique est limpide. Terroriser la population qui demandera à genoux le retour des forces de police qu’elle a combattu.

Il suffirait d’un peu de bon sens pour conclure que des criminels prétendument isolés et indépendants ne sont pas à l’origine de ces crimes. Mais le bon sens ne suffit pas, car l’accusation est grave. Il faut des preuves et il y en a. Elles sont irréfutables.

Avant de les fournir, je voudrais vous décrire la ville du Caire en cette nuit du 29 au 30 janvier. Je vais faire l’impasse sur l’attaque du Musée du Caire qui est une machination médiatique burlesque car nous n’avons pas le cœur à rire.

Depuis les affrontements du 28 janvier, le Caire s’est vidé de l’intégralité de ses forces de police et de sécurité publique. Pas un policier en vue, ni même devant les ambassades ou les bâtiments administratifs. La ville est livrée à ses seuls habitants qui assurent désormais leur propre sécurité, ainsi que la circulation.

A l’annonce de ces raids criminels, dès 18 heures, et toute la nuit durant (du 29 au 30 janvier), des hommes gardent tous les accès à leurs quartiers. Derrière des barricades improvisées ou des barrières métalliques, ils se relaient et contrôlent tous les passages. La présence militaire est mince et jugée totalement insuffisante. Les habitants des quartiers s’arment de barres métalliques, de fusils à plomb, de carabines, de battes de baseball, de couteaux de cuisine, d’armes de poing. D’est en ouest, ce service de protection partage un même code diffusé par l’armée qui permet à celle-ci de distinguer les individus pacifiques des hommes de main de la police secrète. Ce code est un brassard blanc à porter sur son bras gauche.

Les militaires, avec lesquels la population a spontanément passé un contrat de confiance et de solidarité, sillonne les quartiers pour décrire le type de véhicules et d’individus dont il faut se méfier. Une Fiat 127 blanche aux vitres fumées, avec à son bord un homme muni d’une arme automatique ; des ambulances ; des hommes à moto qui passent en éclaireurs pour voir si les quartiers sont gardés ou non ; des minibus touristiques. Ces hommes tirent à balles réelles, pillent, cassent et terrorisent.

Ces hommes de main, nous les connaissons aussi bien que nous connaissons Hosni Moubarak, on les appelle les Baltagueyya. Ce sont les mêmes qui sèment la terreur pendant les élections ou qui sèment le trouble lors de manifestations pacifiques. Ils sont payés par la caisse noire du Parti National Démocratique ou par les services de police. Le butin collecté s’ajoute à leur salaire.

Les preuves d’un terrorisme d’état :

1. La preuve du quartier d’El Agouza : deux rôdeurs de 19 et 14 ans sont envoyés en éclaireurs dans une rue du quartier. Ils sont repérés par les habitants qui les arrachent et les giflent jusqu’à obtenir des aveux. Il s’avère qui sont envoyés par des hommes de main de la police secrète qui les ont déposés en minibus.

2. La preuve du centre ville : un témoin oculaire –une de mes connaissances directes- a vu entrer et sortir du commissariat de police du Caire, des véhicules comme ceux décrits plus haut : ambulances, voitures banalisées, motos et minibus. A leurs bords, des hommes en civil armés. Pas d’ambulanciers, donc.

3. La première preuve de l’armée. Des militaires debout sur des chars s’adressent à la population de Suez pour les prévenir des méthodes utilisées par les Baltagueyya de la police. Ouvertement, l’armée pointe du doigt les responsables et rassure la population qu’elle n’est pas dupe des coups bas de la police secrète et qu’elle saura faire la différence.

4. La seconde preuve de l’armée : Monsieur Y est un acteur célèbre de cinéma et de télévision qui a préféré garder l’anonymat. Monsieur Y a appelé le numéro vert mis en place par l’armée pour signaler le pillage et la destruction d’une bibliothèque de quartier, la Bibliothèque Moubarak. Au téléphone, le sergent qui a reconnu le nom et la voix célèbre de son interlocuteur lui répond : « la Bibliothèque… Moubarak, dites-vous ? Laissez les faire et rassurez vous, Monsieur Y. Dès qu’il s’en ira, nous nous occuperons des Baltagueyya. Vous savez de qui je parle en disant « Il » ? « oui », répond Monsieur Y

5. La preuve d’Alexandrie. Le 29 janvier, deux individus armés qui s’attaquaient à une banque sont pris à partie par des manifestants. Ceux-ci les immobilisent, les fouillent et s’emparent de leurs « carnets ». En Egypte, les carnets sont des cartes professionnelles que chacun porte sur soi, comme une carte d’identité. Les deux individus sont des policiers.

La télévision égyptienne diffuse sans interruption les cris de panique des mères de famille.

Sans commentaire.

Propos recueillis par téléphone par Danièle Dompé.

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