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L’Allemagne n’a jamais été dénazifiée, les dirigeants sont restés les mêmes !

dimanche 8 juillet 2012 (Date de rédaction antérieure : 8 juillet 2012).

Bonjour à toutes et à tous,

Voici une partie d’un livre de Renaud DE JOUVENEL intitulé : « La guerre des Mercenaires », écrit en 1952. Il s’agit du début de son chapitre intitulé "Le bourbier allemand", qui prouve que l’Allemagne n’a jamais été dénazifiée : les dirigeants sont restés les mêmes.

On peut trouver les 70 premières pages de cet excellent livre historique sur le site internet de RoRo :

http://users.skynet.be/roger.romain/guerredesmercenaires_1952.htm

Voici aussi une sauvegarde sur mai68.org :

http://mai68.org/spip/spip.php?article4324

Extrait 1 : « Seule, l’armée allemande et non le peuple allemand a capitulé », déclara Adenauer le 25 mars 1949.

Adenauer, le grand européiste !

Extrait 2 : Le Traité de Potsdam prévoyait, on s’en souviendra, la démilitarisation et la dénazification de l’Allemagne, le démantèlement de ses usines de guerre et de ses installations militaires ainsi que des réparations aux pays victimes de son agression. Il n’est, depuis longtemps, plus question de tout cela. Le démantèlement des usines a été entrepris avec lenteur et abandonné dans le courant de l’année 1949… La dénazification a été sabotée dès le début et les commissaires occidentaux se sont empressés d’en annuler les effets en libérant, à tour de bras, les criminels de guerre nazis pour leur rendre leurs places dans l’industrie ou dans l’armée en formation. Quant aux réparations, abandonnées et sabotées, elles aussi

Extrait 3 : Le Général Halder ajoute sa voix à ce concert en déclarant que « les forces allemandes sont dirigées contre l’U.R.S.S ». Von Manteuffel reprend un leitmotiv hitlérien et réclame : « Un noyau de troupes blindées, forces allemandes de race pure, 30 divisions animées du plus haut moral de combat et d’expérience » (5-10-50). Adenauer met comme condition à la participation allemande au « front défensif » : « la pleine égalité des droits de l’Allemagne avec les autres nations de la défense européenne » (9-11-50). Le principe en est d’avance accepté car les Américains sont convaincus que leur principal allié, dans une guerre anti-soviétique, ne peut être qu’une armée allemande nazie. « L’Allemagne se fera payer par le rétablissement complet de sa souveraineté, la libération des derniers criminels de guerre et la suppression des ultimes interdictions de fabrication ou d’armement, l’indispensable concours de son armée reconstituée. Le renversement des alliances sera consommé et la situation rappellera singulièrement celle que nous avons connue au lendemain de l’autre guerre », écrit M.A. Fontaine (Monde, 21-11-51).

Bien à vous,
do
http://mai68.org

Bonne lecture :

V LE BOURBIER ALLEMAND

(Page 47 et suivantes de La guerre des Mercenaires)

Le Traité de Potsdam prévoyait, on s’en souviendra, la démilitarisation et la dénazification de l’Allemagne, le démantèlement de ses usines de guerre et de ses installations militaires ainsi que des réparations aux pays victimes de son agression.

Il n’est, depuis longtemps, plus question de tout cela. Le démantèlement des usines a été entrepris avec lenteur et abandonné dans le courant de l’année 1949. Aux dires des autorités occidentales, la démilitarisation était achevée en février 1950. La dénazification a été sabotée dès le début et les commissaires occidentaux se sont empressés d’en annuler les effets en libérant, à tour de bras, les criminels de guerre nazis pour leur rendre leurs places dans l’industrie ou dans l’armée en formation. Quant aux réparations, abandonnées et sabotées, elles aussi, afin de rendre à l’Allemagne de Bonn toute la puissance industrielle et économique exigée d’un allié, nous en sommes au stade où la France consent à payer les assurances sociales des travailleurs français déportés en Allemagne, comme il ressort d’une dépêche du 6 juillet 1950 : « Aux termes de cet accord (sur la Sécurité sociale), l’Allemagne se chargera au regard de la France des redevances au titre des assurances sociales pour les ouvriers allemands (page 47) travaillant en France depuis 1945. Inversement, la France remplira les mêmes obligations à l’égard de la République Fédérale en ce qui concerne les ouvriers français ayant travaillé en Allemagne de 1940 à 1945. »

La renaissance du parti national-socialiste en Allemagne et son activité de sabotage était signalée, dès janvier 1947, par le « Comité International pour l’Étude des questions économiques » qui groupe des personnalités aussi peu suspectes d’opinions démocratiques que Lord Vansittart, Lord Beveridge, le Président Herriot, etc… Leur rapport soulignait alors « l’activité des organisations national-socialistes à l’étranger, où 652 experts économiques auraient reçu l’ordre de se rendre, lors d’une conférence secrète tenue à Bâle en avril 1945, pour préparer la résurrection du Reich » (Figaro, 28-1-47). A cette fin, des capitaux considérables auraient été déposés en Suède, en Suisse (quelque 600 millions de dollars) et en Argentine. Ce rapport signalait que les nazis étaient déjà à la tête d’importantes affaires allemandes, mais il se gardait bien de donner les raisons et de désigner les responsables de cette situation. Nous les connaissons : ce sont les puissances occidentales qui, sabotant les accords de Potsdam, ont puissamment aidé à la reconstitution du fascisme en tant que force directrice de l’Allemagne Occidentale.

* * *

Il n’est donc pas étonnant que les dirigeants allemands aient si vite relevé la tête et se soient sentis autorisés à protester sans vergogne contre toutes les mesures prises à leur encontre. C’est ainsi qu’ils se sont élevés avec violence contre les accords de Londres sur le statut de la Ruhr. « … Ils s’imaginaient… depuis quelque temps, constate M. Georges Blun (Monde, 31-12-48), que les alliés étaient devenus (page 48) leurs débiteurs et que leur antisoviétisme leur vaudrait des concessions, dont la moindre devait être que l’on passât l’éponge sur le passé. »

« Seule, l’armée allemande et non le peuple allemand a capitulé », déclare Adenauer (25-3-49), sans que l’on relevât l’identité de cette déclaration provocante avec celle des pires militaristes après la défaite de 1918. « La République Fédérale ne reconnaît pas la frontière orientale de l’Allemagne », ajoutait le Chancelier des Américains (23-10-49), ce que son Ministre des Affaires Etrangères, Jacob Kaiser, confirmait : « Les territoires au delà de l’Oder appartiennent de jure à l’Allemagne » (Monde, 12-2-50) et aucune puissance occidentale ne protesta contre ces appels à la revanche, sans doute parce qu’elles ont l’intention de soutenir cette revendication.

Quant au rattachement économique de la Sarre à la France, un mémorandum du gouvernement de Bonn déclare que « la constitution sarroise est un statut de protectorat » (22-1-50) et le chancelier Adenauer confirme : « J’estime que la République Fédérale Allemande est propriétaire des mines de la Sarre. » Le gouvernement français a-t-il élevé la voix ? Non et sans doute est-il d’accord pour rendre la Sarre à Adenauer, le jour où ce sera le prix exigé pour une alliance franco-allemande plus étroite.

La « Koelnische Rundschau » préconise déjà l’incorporation des Sarrois aux contingents allemands de l’armée européenne (Monde, 18-1-52).

Le gouvernement de Bonn n’a pas cessé de protester contre la démilitarisation, de demander la constitution de troupes de police, la participation d’une armée allemande à la coalition atlantique ; ainsi que « le renforcement des forces alliées stationnées en Allemagne occidentale » (24-8-50), ce qui est une exigence curieuse de la part d’un tel nationaliste et donne la mesure de sa "Conception de l’indépendance nationale".

La politique occidentale d’intégration de l’Allemagne de l’Ouest aux forces d’agression atlantiques (page 49) a permis aux revanchards allemands de pousser plus loin leurs exigences, jusqu’à l’égalité absolue de droits.

« On ne saurait demander aux Allemands de servir comme mercenaires dans des armées étrangères : il faut qu’ils soient représentés sur un pied d’égalité au sein d’une armée européenne », dit Adenauer (11-12-49) et le Général von Manteuffel ajoute : « Il faut que ce soit une armée puissante, disposant, comme les autres armées européennes, d’armes lourdes, d’aviation et d’unités de protection côtière. Il est indispensable également que ces troupes soient représentées au sein du commandement en chef européen » (Monde, 15-9-50) et nous allons voir que ces revendications sont celles de tous les revanchards allemands. Cette démagogie, autorisée par les puissances occidentales, a pour but de faire croire à une revendication générale qu’il deviendra vite impossible de contrecarrer et que l’on satisfera. Mac Cloy, Haut-Commissaire américain, en est d’accord et c’est sur la base d’un aide-mémoire que lui ont remis des généraux allemands qu’il va en recommander la légitimation. Le Général baron Geyr von Schweppenburg, Président de l’Association des anciens officiers allemands, le reconnaît dans la Tribune des Nations : « Un armement sur une petite échelle n’a aucun sens », écrit-il (22-9-50) et, d’ailleurs, déclare le Général Guderian, lui aussi aux avant-postes de la défense de la civilisation américaine, nous ne croyons pas à ces histoires d’armées européennes : « S’il existe au monde un soldat capable d’arrêter une invasion de l’Europe, c’est le soldat allemand » (Interview, Monde, 22-9-50). « Si j’avais les quatre milliards de marks qui se dépensent ici chaque année pour les frais d’occupation, je vous mettrais debout quelques divisions allemandes qui pourraient vraiment stopper une invasion », ajoute-t-il, mais, bien entendu, « sous un Commandement allemand qui dépendrait, lui-même, d’un commandement en chef allié. » Quand on lui demande combien il envisage de divisions, il répond : (page 50) « Nous parlerons de la question si nous nous retrouvons tous à Fontainebleau », ce qui signifie que le jour n’est pas loin où l’État-Major allemand siégera à Fontainebleau avec les généraux allemands et français. Le Général Guderian confirme, en effet, que le Général Bradley a transmis son rapport au Président Truman et que les militaires américains partagent son avis. Comme il envisage vingt-cinq à trente divisions allemandes, il est aisé de prévoir que ce chiffre sera bientôt avancé par le Haut Commandement atlantique.

Le Général Halder ajoute sa voix à ce concert en déclarant que « les forces allemandes sont dirigées contre l’U.R.S.S ». Von Manteuffel reprend un leitmotiv hitlérien et réclame : « Un noyau de troupes blindées, forces allemandes de race pure, 30 divisions animées du plus haut moral de combat et d’expérience » (5-10-50). Adenauer met comme condition à la participation allemande au « front défensif » : « la pleine égalité des droits de l’Allemagne avec les autres nations de la défense européenne » (9-11-50). Le principe en est d’avance accepté car les Américains sont convaincus que leur principal allié, dans une guerre anti-soviétique, ne peut être qu’une armée allemande nazie. « L’Allemagne se fera payer par le rétablissement complet de sa souveraineté, la libération des derniers criminels de guerre et la suppression des ultimes interdictions de fabrication ou d’armement, l’indispensable concours de son armée reconstituée. Le renversement des alliances sera consommé et la situation rappellera singulièrement celle que nous avons connue au lendemain de l’autre guerre », écrit M.A. Fontaine (Monde, 21-11-51). Cette certitude encourage les fascistes à pousser de .nouveau des cris de guerre. Evêques, généraux et politiciens se réunissent sous le masque de l’ Académie protestante du pays de Bade et l’on entend l’évêque Wurm déclarer que la guerre, « si meurtrière qu’elle puisse être, doit être osée ». La paix, dit-il, n’est pas le but suprême, et il (page 51) ajoute : « La fin d’un peuple par l’anéantissement vaut mieux qu’une capitulation spirituelle. » « Je suis prêt à rouvrir la porte à Hitler », clame Lehr, Ministre de, l’ Intérieur de Bonn (31-1-51). « La Bohême et la Moravie sont des terres allemandes ». proclame le Ministre Seebohm. qui, reprenant à son compte les thèmes de la. propagande sudète, ajoute : « Prague et Eger sont de plus vieilles villes impériales allemandes que Berlin. ». Le jour où un tribunal français, poussé par la protestation populaire, condamne le Général Ramcke à cinq ans de prison, un parlementaire allemand proclame que cette condamnation et celle du GénéralFalkenhausen à Bruxelles, constituent « une violation du droit ». Les gouvernements de Paris et de Bruxelles s’empressent de le reconnaître en libérant ces pauvres généraux tortionnaires et le Chancelier Adenauer accueille Ramcke par ces mots : « J e suis heureux de vous voir en liberté. » (United Press 28-6-51. ) Quoi d’étonnant, au point où nous en sommes, à ce que Bonn envisage « un pool germano-espagnol des armements », comme l’ annonce l’agence United Press (18-10-51). Quoi d’étonnant à ce que l’ Associated Press (26-1-52) puisse annoncer que « le gouvernement fédéral de Bonn envisage la formation d’une nouvelle « Luftwaffe » de 1.500 appareils pilotés par des équipages entraînés par l’armée de l’air américaine. Les appareils seraient fournis par les Etats-Unis (Le Monde, 27-1-52).

* * *

L’attitude de la social-démocratie allemande est, en tous points, semblable à celle de la démocratie chrétienne et M. Schumacher est tout aussi revanchard que M. Adenauer.

M. Schumacher est le type même de ces dirigeants sociaux-démocrates vendus au grand capital. Le capitaine (page 52) Montfort, prisonnier de guerre allemand, a révélé que Schumacher s’était mis, en 1928, à la disposition du trust de cigarettes « Alphaus » et qu’il lui avait remis des dizaines de milliers de marks en remerciements de ses interventions auprès des milieux sociaux-démocrates. Tels sont les débuts de l’homme. Il fût arrêté et envoyé à Dachau lors de l’arrivée de Hitler au pouvoir, mais en fût libéré en 1943, au moment même où l’on arrêtait tous les suspects. Le journaliste soviétique Kraminov a révélé, dans la Komsomolskaïa Pravda, que Schumacher dénonça aux S.S. 92 officiers soviétiques, internés à Dachau, qu’il accusait d’avoir une activité illégale (20-1-47). Ce dénonciateur d’anti-nazis est devenu l’un des hommes des américains tout en demeurant, sans doute, celui des trusts. Les thèmes de ses discours et déclarations sont les mêmes que ceux des autres revanchards : « Le peuple allemand ne peut pas être indéfiniment rendu responsable des actes des nazis » (United Press, 22-6-46). « Je préférerais aller à genoux jusqu’à Versailles plutôt que d’ accepter les accords de Potsdam » (12-12-46). Opposé au rattachement de la Sarre à la France, à la neutralisation de la Ruhr, il est également opposé, et pour les mêmes raisons, à l’unification des forces ouvrières.

De même que les autres dirigeants de la social-démocratie allemande, les Ollenhauer, Heine, Reuter, Brauer, Knoeringen, il s’ est fait le défenseur du Plan Marshall, du statut d’ occupation, du révisionnisme. petit-bourgeois, de la transformation de l’ Allemagne en colonie américaine et est un agent décidé de la division de la classe ouvrière allemande. Son antisoviétisme forcené est bien connu.

Il est indispensable de souligner que le Congrès du parti social-démocrate de 1948 a adopté une directive de Schumacher, selon laquelle ce parti ne demande à personne de reconnaître le marxisme.

Sans doute est-ce même une exigence à l’égard des membres de ce parti qui considère mener une activité socialiste normale en pratiquant l’espionnage (page 53). Il a, en effet, fondé un « Bureau Oriental » dont telles sont les attributions et qui dispose, pour cela, de sommes importantes.

D’où viennent ces fonds ? La découverte, en 1948, d’un vaste réseau d’espionnage en zone orientale, nous offre une réponse. Il s’ agissait, en l’occurrence, d’un réseau, dirigé par le Général Halder, dont le recrutement était effectué par Hans Erasmus, ancien chef d’état-major de la division Brandenbourg. L’un de ses agents, le nommé Pinkert, a affirmé que l’organisation était financée par le Service de Renseignements américain et par de gros industriels allemands.

Peut-être les mêmes sources alimentent-elles le même effort, qu’ il soit fourni par les nazis ou par les sociaux-démocrates ?

* * *

Les journaux annonçaient, en septembre 1951, que toutes les associations de combattants allemands fusionnaient en un groupement unique. En y regardant de plus près, on s’ aperçoit qu’il s’agit d’ associations de nazis, exaltant l’ esprit de revanche.

Il y a là le B.V.W. ou Ligue des Soldats Allemands (85.000 membres, Président : l’ Amiral Gottfried Hansen) ; le Schutzbund ou Ligue de protection des soldats allemands. (55.000 membres, Président : le Général Krakau, des chasseurs de montagne ; publie un journal) ; Le Casque d’Acier ou Stahlhelm de sinistre mémoire, où s’agitent le Général comte von Schwerin, Conseiller militaire du gouvernement de Bonn et l’ancien dirigeant de la jeunesse hitlérienne Gottsleben ; les membres de l’ancienne division blindée Grossdeutschland du Général von Manteuffel ; les "Diables Verts", association de parachutistes du général Ramcke ; les anciens de l’Afrika Korps (Président : le Général de blindés Cruewell), etc… (page 54).

Le 8 septembre 1951, les représentants de ces diverses associations se réunissaient et constituaient l’Union des Soldats Allemands (Verband deutscher Soldaten) ; Président provisoire : le Général-Colonel Friessner ; membres du bureau : les Généraux Gille, Hauser, Guderian, Stumpf, Herr, Student, Hentschke, von Manteuffel, Cruewell et l’Amiral Hansen. L’ensemble de ses membres est estimé à 500.000. L’association a aussitôt annoncé qu’elle était en faveur de la remilitarisation de l’Allemagne et de la coopération avec les puissances occidentales.

Parmi les thèmes de propagande de ces membres, citons les suivants : « Nous, anciens soldats, nous ne renoncerons jamais aux terres d’au delà de l’Oder et de la Neisse ») (journal du Schutzbund) ; « que nous le voulions ou non, il nous faudra prendre les armes pour défendre notre espace vital » (Ramcke) ; « Les camps de concentration du Ille Reich… sont des institutions dont l’utilité et l’efficacité sont indéniables » (caporal Hermann Lamp, S.S. et chef du groupe-franc Pétain) ; et le but suprême du corps-franc Allemagne est « l’avènement d’une Allemagne militarisée ».

Quant à la célèbre association « Bruderschaft » (Fraternité), elle sert au regroupement des hautes personnalités du gratin nazi, et l’on trouve, à sa tête, d’importants personnages représentatifs des S.S., des divisions d’assaut hitlériennes, de la Gestapo, du Ministère de Goebbels et même l’ancien administrateur de la souscription hitlérienne pour le réarmement. Il s’agit donc, sous l’oeil bienveillant et avec les conseils des services d’espionnage anglais et américain, de la reconstitution des organes de direction de l’hitlérisme.

En attendant la reconstitution officielle d’une armée allemande, où tous ces bons sabreurs retrouveront la place qu’ils y tenaient au temps de Hitler, le gouvernement de Bonn s’est rabattu sur une armée de mercenaires dont les effectifs se montent à 120.000 hommes. Ces unités, dites « Unités de Service du Travail » sont recrutées par les occupants français, (page 55), anglais et américains et leurs membres signent un engagement où il est stipulé, entre autres, qu’ils sont tenus de remplir « n’importe quelle mission » et qu’ils ne peuvent être jugés par un tribunal allemand sans l’autorisation des occupants, « s’ils sont accusés de crimes commis dans l’exercice de leurs fonctions ou au service des troupes alliées ». On prend la précaution de les protéger à l’avance contre leurs actes criminels, comme-ci ceux-ci étaient dans leurs attributions. Cela nous rappelle fâcheusement la période de la République de Weimar pendant laquelle les militaires s’adonnèrent à l’assassinat politique : Rathenau et des militants ouvriers tels que Rosa Luxembourg, Karl Liebknecht, Kurt Eisner et tant d’autres furent parmi les victimes ; le social-démocrate Noske parmi les assassins.

* * *

Si les généraux nazis prodiguent leurs conseils aux Américains, les financiers de Hitler sont aussi les hommes de confiance de Wall-Street.

Thyssen, qui donna six millions de marks aux hitlériens et fut l’un des pilleurs de l’économie française, a été libéré ainsi que Krupp, l’homme qui disait à ses juges : « Comment peut-on assurer la paix de l’Europe sans le soutien de Krupp ? » Pferdmenfes, l’un des conseillers financiers de Bonn, fut le collaborateur des nazis et il est à la tête d’un consortium qui représente 40 % de l’industrie de l’acier. Paul Reusch, soutien de Hitler, est l’un des grands magnats des hauts fourneaux de la Ruhr ; Gunter Henle, criminel de guerre, est à la tête de quinze sociétés métallurgiques (dont le groupe Siemens) ; Herman Abs, directeur hitlérien de la Deutsche Bank et de la I.G. Farben Industrie, utilisatrice des os de déportés, dirige quinze sociétés de produits chimiques, d’électricité et de travaux publics. La Ruhr est redevenue un arsenal nazi (page 56).

Le nouveau plan américain « lie l’Allemagne au Plan Marshall, en vue de la reconstruction de l’Europe. Si ce plan est accepté par tous, il liera également l’Europe à une Allemagne reconstruite ! » , écrivait Edgar Mowrer, journaliste américain, en 1947 (Monde, 7-8-47), et il ajoutait : « Une fois le nouveau plan américain en vigueur, il ne restera plus au monde que la présence permanente d’armées étrangères d’occupation sur le soi allemand pour le protéger d’une troisième offensive teutonne ! ». Parlant de la Ruhr, Mowrer disait : « Si on leur retire le contrôle de cette centrale industrielle de l’Europe, les Allemands ne pourront dominer le continent, ni militairement, ni économiquement. » C’était clairement exprimé. Les avertissements n’ont pas manqué, tels ceux de Georges Blun qui constatait : « La preuve est faite — et ce sont des rapports officiels allemands qui en font foi — que la guerre n’a pas détruit la Ruhr) ! » (Monde, 31-7-47) et dénonçait la reconstitution des trusts (« Il n’y a que les noms qui changent. Les hommes restent les mêmes. Toute la crème, tout le gratin du nazisme est là. »). Blun s’étonnait naïvement de l’état d’esprit des nazis rendus à leur emploi : « Ces fauteurs de guerre n’ont pas désarmé. Eux, qui ont sur la conscience la mort de plusieurs millions d’hommes, et qui ont équipé les chambres à gaz, ils ne se sentent pas plus coupables qu’un ange. » Que dit, aujourd’hui, M. Georges Blun quand il peut voir, comme tout le monde, la production de l’Allemagne occidentale atteindre 90 % de celle de 1936, et qu’il peut savoir, comme tout le monde, que l’on fabrique cartouches, mitrailleuses, grenades, canons, obus, chars et chenillettes, torpilles, etc… dans une cinquantaine d’entreprises, à Bochum, Dusseldorf et ailleurs ? Que pense-t-il aussi de ce que l’industrie de la Ruhr ait été « miraculeusement préservée » des bombardements, comme il le constatait alors lui-même ?

Nous pensons, personnellement, que ce sauvetage miraculeux a été réalisé grâce à un plan soigneusement établi, comme l’était, sans doute, celui de la (page 57) « Commission d’Etudes du Bombardement Stratégique », dont M. Paul Nitze, de la banque Dillon Read, fondatrice du trust allemand de l’acier " Vereinigte Stahlwerke ", était vice-président.

Il permet, aujourd’hui, à l’Allemagne de Bonn de revendiquer de prendre part au réarmement. Le Comité des Sages estime, en effet, non seulement que l’Allemagne de l’Ouest est capable de fabriquer pour un milliard de dollars, d’équipement militaire, mais qu’elle devrait utilement soulager l’économie des autres pays européens. Autant dire qu’on a l’intention de faire, demain, de la Ruhr, le fournisseur d’armes principal de l’Europe Occidentale, ce que l’Associated Press écrit, noir sur blanc (18-1-52).

* * *

L’ Abwehr, ou Service secret allemand, a été reconstitué, dès 1948, avec la collaboration de Guderian et les conseils d’Allan Dulles, le célèbre agent de l’O.S.S. qui préparait, en Suisse, au cours de la dernière guerre, les futures entreprises de corruption du titisme. Lehr, Ministre de l’Intérieur de Bonn, l’a d’ailleurs officiellement annoncé en octobre 1951, ajoutant que l’Abwehr collaborerait avec les Services de renseignements occidentaux.

La reconstitution de la Luftwaffe a été confiée aux Généraux Student et Stumpf.

En septembre 1950, les forces armées allemandes des trois zones occidentales s’élevaient à 449.200 hommes, y compris 30.000 hommes des formations d’Anders et des personnes déplacées de différentes nationalités.

L’égalité des droits était reconnue à l’Allemagne par M. Schuman lui-même, et M. Mac Cloy, Haut-Commissaire américain, en profitait pour annoncer, (page 58) quelques jours plus tard (10-10-50), que les troupes occidentales d’occupation allaient pouvoir être disposées « le long de la frontière tchécoslovaque et de la République Démocratique Allemande ».

Malgré les notes soviétiques du 19 octobre 1950, avertissant solennellement les puissances occidentales que l’Union Soviétique ne pouvait admettre « la renaissance en Allemagne occidentale de l’armée régulière allemande », le réarmement est activement poursuivi et le Monde peut annoncer (22-6-51) que les plans de Washington comportent la constitution de « douze divisions allemandes, formant quatre corps d’armée, dont un corps cuirassé de trois divisions ». La longue discussion qui a précédé et au cours de laquelle les dirigeants occidentaux, dont M. Jules Moch, avaient affirmé, à maintes reprises, qu’ils n’accepteraient pas la reconstitution de divisions allemandes, a fait long feu. Tout le monde s’est incliné : les divisions seront des divisions, puisqu’aussi bien Adenauer et ses généraux ont proclamé que toute autre formation était une idiotie.

Si le plan Schuman de "Haute Autorité" a placé l’industrie française à la remorque des exigences des industriels allemands, M. Pleven, de son côté, n’hésite pas à accepter l’intégration des soldats français à l’armée européenne qui va se trouver sous commandement germano-américain.

Le Neue Zürcher Zeitung, journal conservateur suisse, commente ainsi le dernier abandon de souveraineté nationale du gouvernement français : « Aujourd’hui, il n’est plus question de ménagements, les informations de Washington font prévoir une fantastique accélération du rythme. Dans le bref délai des trois prochains mois… le plan Pleven recevra le sceau officiel : en d’autres termes, il n’y aura plus d’armée française, à part quelques effectifs conservés pour la protection des territoires d’outre-mer… Il n’y aura plus d’uniforme français, mais une livrée commune pour les troupes européennes, plus de ministère de l’armée française mais un commissaire international et, en conséquence un état- (page 59) major commun et une école d’officiers commune pour la nouvelle fédération d’États. On ne dit pas, pour l’instant si, dans le domaine militaire, le drapeau national tricolore aura droit à l’existence. »

Les Américains pratiquaient déjà le système de l’armée de mercenaires, puisque nous avons vu qu’ils utilisent, en Allemagne, des formations de Polonais d’Anders et de personnes déplacées. Les Français possédaient la Légion Etrangère et ils utilisent, en Indochine, des contingents importants de nazis. Mais voilà mieux, maintenant, grâce aux hommes de la démission nationale : ce sont les troupes françaises qui sont transformées en formations mercenaires, qui deviennent une Légion Etrangère au service des bellicistes américains et des généraux nazis. Il est difficile de croire que soldats et officiers français accepteront de servir sous les ordres des Guderian, Ramcke et autres criminels de guerre.

Si complètes que soient la démission et la soumission du gouvernement français, les États-Unis ne s’en sont pas satisfaits. L’Allemagne de Bonn est désormais autorisée à instituer le service militaire obligatoire, à former une armée de 400.000 hommes, à posséder une aviation tactique et l’on envisage sa participation au Pacte de l’Atlantique. « Il est clair, maintenant, que, dans un délai de douze mois, l’Allemagne occidentale possédera une force qui permettra d’opposer une forte résistance », comme le déclare triomphalement Truman (22 janvier 1952) qui, décidément, aura bien mérité de Hitler.

* * *

Cependant que se poursuit ainsi la préparation de la guerre, la lutte pour la paix s’intensifie en Allemagne et, si, en République Démocratique Allemande, elle jouit du soutien absolu du gouvernement, alors qu’elle est violemment combattue par (page 60) les fantoches de Bonn, il est juste de dire que le peuple allemand tout entier est opposé à la guerre et à la remilitarisation du pays. Le peuple allemand a beaucoup trop souffert de la guerre pour désirer recommencer une telle expérience et a compris, dans son ensemble, où l’hitlérisme l’a mené, puisque, selon les chiffres de l’Associated Press, agence américaine, 79 % des jeunes gens en âge d’être mobilisés sont opposés au réarmement et que les appelés de la dernière guerre ont répondu "Non"’, dans la proportion de 70 %, à la question : « Estimez-vous juste d’être appelé sous les drapeaux ? »

« Le monde ne doit pas s’imaginer que Bonn représente la capitale de l’Allemagne, s’est écrié courageusement le Pasteur Niemoller, ou que les bonzes qui s’y trouvent représentent le gouvernement allemand »… et il ajoutait : « Chaque arme qu’un Allemand prend en mains est dirigée contre nos frères et contre nos soeurs de l’Allemagne de l’Est. Ce serait agir d’une manière criminelle que d’accepter que le peuple allemand se laisse diviser par la haine sans scrupule de certains politiciens occidentaux. »

Non, le monde ne s’imagine pas que Bonn représente l’Allemagne.

Conclusion de do : Oui ! juste après guerre, les dirigeants de l’Allemagne de l’Ouest étaient les mêmes nazis que pendant la guerre ; et, par conséquent, les dirigeants actuels de la grande Allemagne en descendent génétiquement et/ou culturellement.

Cependant, juste après guerre, la population allemande avait constaté le désastre où les avait mené le nazisme et la guerre ; aussi, n’en voulait-elle plus.

On voit là l’opposition très nette entre la classe dominante allemande, toujours nazie, et la classe dominée, qui ne veut plus ni du nazisme ni de la guerre.

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