POUR CEUX
QUI ÉTAIENT LÀ ET CEUX QUI N’ÉTAIENT PAS LÀ
TEXTE
PROVISOIRE
La
plus grande partie de notre travail est absorbé par le profit. C’est toujours la
partie la plus petite et strictement indispensable pour vivre qui nous revient.
Tout le projet capitaliste se résumme en une phrase, comment faire travailler
les pauvres. La principale fonction de notre activité n’est plus de satisfaire
nos besoins mais de produire du profit.
Plus nous produisons, plus la
part que nous retirons de notre produit diminue. Plus l’employé travaille, plus
il sappauvrit. La misère accompagne fidèlement les progrès du
capitalisme.
Les nouvaux moyens de production
que développent constamment le capitalisme aboutissent systématiquement à
l’asphixie des marchés. Les crises à répétition ne sont pas le résultat d’une
prétendue mauvaise gestion mais le fonctionnement normal du capitalisme. Pour la
première fois dans toute l’histoire de l’humanité produire trop devient un
problème. C’est maintenant l’abondance capitaliste qui a échoué.
Nous ne produisons pas seulement
des marchandises, nous nous produisons nous-mêmes en tant que marchandises. Nous
travaillons à renforcer la puissance qui nous attache au travail.
Une part grandissante du travail
des sociétés vise à former des jugements et des opinions qui s’accordent au
capitalisme. Les idées dominantes ne sont pas autre chose que les idées de la
classe dominante. Ceux qui nous dirigent sont aussi ceux qui parlent. Aucune
critique sérieuse ne doit plus être entendue. Ce qui est incompatible avec cette
société c’est la vérité sur cette société. Le capitalisme veut une population
aux ordres.
Nos dirigeants ont bien su
montrer dans tous les domaines l’étendue de leur incompétence. Nous ne pourrons
jamais faire pire. Nous sommes l’immense majorité qui a perdu tout pouvoir sur
l’emploi de la vie. Il faut vouloir quand on le peut car l’histoire n’attend
personne. Nous ne désirons qu’une chose, ruiner l’économie comme elle nous ruine
et reprendre enfin la direction de ce monde que le capitalisme a changé en camp
de travail.
POUR
RÉPONDRE AUX CRITIQUES ÉVOQUÉES
L’HOMME EST
UN LOUP POUR L’HOMME, AUCUNE AMÉLIORATION DE LA SOCIÉTÉ N’EST SÉRIEUSEMENT
ENVISAGEABLE
Il faut considérer que c’est la
rareté qui produit la concurrence. Or justement le capitalisme ne cesse
d’entretenir en permanence la pénurie et la concurrence tout en prétendant le
contraire dans sa fameuse société de l’abondance. Rareté du travail, de revenus,
de logement. Par conséquent tout ce qui va de paire avec l’absence d’argent fait
que nombreux sont ceux qui manquent même de l’essentiel aussi bien en France
qu’au niveau mondial. La France produit aisément 10 fois plus qu’elle ne
consomme, l’Argentine 6 fois plus. La rareté est donc une illusion d’optique
entretenue par le capitalisme pour aiguiser les rivalités nécessaires à son
règne. Nous avons dépassé depuis bien longtemps les temps de pénurie.
LE SECOND
PARAGRAPHE EST UNE REDITE DU PREMIER
Le premier paragraphe évoque le
fait que sur notre travail c’est la partie la plus réduite qui nous est laissé
en salaire et que tout le reste est cédé gratuitement, c’est-à-dire sans salaire
en contrepartie, et absorbé par le profit. C’est ce qui se passe depuis toujours
que l’on soit esclave ou salarié. Le deuxième aborde une question plus
précisément lié au capitalisme et aux progrès de productivité. L’augmentation de
la production avance plus vite que l’élévation des salaires. Si je produit deux
fois plus avec une nouvelle machine je ne suis pas payé deux fois plus. Mon
salaire se réduit sans cesse par rapport à ma production.
LE SALARIÉ
NE S’APPAUVRIT PAS SI SON SALAIRE RESTE LE MÊME
La richesse comme la pauvreté ne
sont pas des choses absolues. Si une personne reçoit deux fois moins que son
voisin elle est plus pauvre que lui. Si ensuite elle reçoit quatre fois mois que
son voisin elle s’est appauvri même si ce qu’elle reçoit est resté identique en
valeur absolue. Tel valeur est petite relativement à une autre et pas en
soi.
NOUS NE
VIVONS PAS DANS UNE DICTATURE
Le fait que les personnes qui
gouvernent et celles qui dirigent l’économie soient pratiquement toujours issues
du même cercle aboutit de fait à une oligarchie. Les dominants dominent.
Évidemment il ne s’agit pas d’une dictature grossière comme l’union soviétique.
Mais dès que le pouvoir se sent menacé il réagit. Se souvenir des menaces sur
Coluche pour lui faire renoncer à sa candidature ou plus près de nous le
journaliste de Paris Match qui s’est fait viré après les révélations sur la
femme de Sarkozy. Se souvenir à propos du traité de Lisbonne qu’on a repassé à
l’assemblé et les braves Irlandais qu’on refait voter. Les méthodes sont moins
brutales, elles n’en sont pas moins efficace. On n’élimine plus les gens
physiquement, encore que, on les congédie, c’est l’avantage du capitalisme.
Alors c’est vrai on peut faire quelques petites choses mais certainement rien
qui remette en question le pouvoir en place.
POUR
MÉMOIRE
LES
PROPRIETAIRES DU MONDE
Tout notre travail se change en argent. Mais tout
cet argent ne nous revient pas. On ne nous donne qu’une partie de cet argent
sous forme de salaire. Tous les excédents qui ne sont pas nécessaires à notre
entretien vont ailleurs. Cet argent qu’on nous enlève est équivalent au travail
que les paysans fournissaient autrefois pour leurs maîtres. Nous ne savons plus
mesurer cette partie de travail qui nous échappe. Le paysan, au contraire,
distinguait clairement le temps qu’il passait sur son champ et celui qu’il
passait sur celui de son maître. Chacun de nous doit ajouter au temps de travail
nécessaire à son entretien un surplus destiné aux maîtres. Il est toujours
préférable pour n’importe quel vol de paraître le contraire de ce qu’il est. On
prétend nous donner un salaire quand on prend sur notre travail tout ce qui
n’est pas nécessaire à notre entretien. Les maisons misérables, la nourriture
infâme, les années de vie en moins, ils sont là, dans cette partie de notre
travail qu’on nous enlève.
Ce sont les luttes de pouvoir qui sont à l’origine
de cette organisation du monde. Le partage des richesses n’est rien d’autre que
le partage du pouvoir. L’histoire n’est qu’une longue lutte pour le pouvoir. Le
peu que la plupart des gens reçoit en salaire a pour conséquence de les priver
de tout pouvoir. Ceux qui ne reçoivent rien ne sont rien. La direction du monde
est assurée par ceux qui s’approprient les excédents. Tout cet argent qui va
dans d’autres mains est la puissance qui nous domine. Tout le projet capitaliste
se résume en une phrase, comment faire travailler les pauvres.
Cette situation obéit toujours à la même mécanique.
Dans le prix d’une marchandise se retrouve la valeur de tous les éléments qui
sont entrés dans sa fabrication. Ce qui se trouve sous forme d’argent après la
vente peut être réinvesti pour produire à nouveau la même marchandise. Il n’y a
pas besoin d’investissement supplémentaire. Chaque production, une fois vendue,
finance la suivante. A chaque nouvelle production, le salarié cède gratuitement
tout l’excédent de son travail. Tous les progrès de productivité ont pour
principal objectif d’augmenter au maximum la part de travail qui nous échappe.
La principale fonction de notre activité n’est plus de satisfaire nos besoins
mais de produire du profit.
L’organisation du monde qui nous a déjà tous soumis
a développé un secteur particulier qu’on appelle les médias. Parce qu’ils sont
entre les mains des maîtres, les médias diffusent la parole des maîtres. Ceux
qui nous dirigent sont aussi ceux qui parlent. Ce monopole de la parole rend le
discours du pouvoir indiscutable. Aucune critique sérieuse concernant
l’organisation du monde ne peut plus être entendue. Cet espace qui concentre
tout le discours devient naturellement le lieu privilégié où s’exprime et
s’exerce le pouvoir. Nous ne devons rien connaître d’autre que ce qu’on aura
bien voulu nous dire. Les médias changent tout en spectacle et aussi chacun de
nous en spectateur. Ceux qui regardent toujours n’agiront jamais et tels doivent
être les spectateurs. Dans le spectacle nous contemplons notre propre
renoncement. C’est l’existence misérable qui nous fait aimer le
spectacle.
La vie devient, de part en part, malsaine, bruyante,
laide et sale comme dans une usine. La majorité des individus est parquée en
masse et à l’étroit dans de mauvaises bâtisses où elle meurt sans cesse des
mêmes mystérieuses maladies. Nos dirigeants ont bien su montrer dans tous les
domaines l’étendue de leur incompétence. La question n’est plus de savoir s’il
faut reprendre ce qui effectivement nous a été enlevé mais décider si nous
préférons la vie ou la mort.
Jamais il ne nous sera donné de prendre part
réellement à l’exercice du pouvoir. On ne nous donnera jamais rien d’autre que
des miettes, le reste il faudra le prendre. La gestion véritable de la vie peut
commencer partout où les individus réunis ne reconnaissent que leur propre
autorité et placent leur volonté au dessus de tout. Dans les bureaux, les
usines, les magasins, les personnes assemblées, refusant tout encadrement,
peuvent tout reprendre en main. Ne travaillez pour personne.
Ce changement doit se préparer à rencontrer de
grandes résistances. L’histoire nous montre que l’ordre établi cherche
constamment à se reconstituer et à se maintenir. Les forces qui s’opposent à
nous ne négligeront rien pour protéger leurs positions. L’action la plus extrême
qu’elles entreprendront et qu’elles pratiquent déjà couramment sera
d’intensifier partout le chaos. Elles pourront ainsi continuer d’incarner cet
ordre qu’elles ont pourtant si peu fait régner.
Il n’existe qu’un péril au monde pour les maîtres,
c’est que nous puissions enfin discuter et décider ensemble de la marche du
monde.