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Le jour où « Libé » a manqué de se faire dépouiller de sa marque

mardi 4 mars 2014, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 4 mars 2014).

http://ecrans.liberation.fr/ecrans/…

Les salariés de « LIBÉRATION », le 3 mars 2014 à 21:16

La une "Nous sommes un journal" datée du 8 février2014

NOUS SOMMES UN JOURNAL Les actionnaires ont cherché à nantir l’identité du titre au détriment du quotidien.

Libération, c’est un journal, un site web, des forums, près de 250 salariés… Autant d’« actifs » précieux servant à valoriser financièrement l’entreprise. Mais Libération, c’est aussi une marque, un logo - son ADN -, dont la réputation et la renommée vont bien au-delà des frontières et qui, visiblement, a aiguisé l’appétit de certains actionnaires. Une notoriété sans commune mesure avec les difficultés financières du moment. Aux yeux des spécialistes, la « marque » Libération vaut mille fois plus que la simple photographie de son compte d’exploitation. « Si l’on applique la méthode de la valeur comparative, c’est-à-dire la somme à débourser pour obtenir la même notoriété, la marque Libération doit valoir plusieurs centaines de millions d’euros », estimait récemment Marcel Botton, de Nomen, dans le Figaro.

Protocole. Est-ce cela qui aurait fait saliver Bruno Ledoux, actionnaire de Libération et nouveau président du conseil de surveillance ? Et pas les « ringards » de salariés qui ne veulent pas de son projet de « Flore du XXIe siècle » ? La question se pose après avoir pris connaissance d’un courrier envoyé à tous les actionnaires le 20 février et signé de Philippe Nicolas, le directeur général de Libération révoqué brutalement la veille. Ce dernier y affirme avoir été « le dernier rempart » des intérêts du journal en s’opposant « depuis des semaines au détournement de la marque Libération, que Bruno Ledoux tente de récupérer à son seul profit ». Il a tenté de la « sortir de la société pour se l’approprier au détriment du journal ».

Le projet semble avoir émergé en novembre. Bruno Ledoux et François Moulias font savoir à Philippe Nicolas que, en échange de l’argent déjà apporté au journal, les actionnaires ont besoin de prendre des garanties en nantissant la marque, c’est-à-dire en la gageant. Un tel nantissement avait déjà été mis en place au profit des banques, au début des années 2000. Mais en toute clarté et avec l’accord des dirigeants et des représentants des personnels.

A l’automne 2013, les choses se sont faites en toute opacité. Un protocole d’accord est transmis au directeur général à la fin de l’année. Il prévoit que la marque Libération, qui appartient à la SARL Libération, soit apportée sous forme de caution au holding Refondation (qui détient 95% du journal). Intérêt de la manœuvre ? En cas de dépôt de bilan de Libération, cela rendrait caduque toute offre de reprise. Qui rachèterait un journal sans nom, c’est-à-dire sans son identité ? En revanche, le holding Refondation pourrait alors lancer son fameux projet d’espace culturel siglé « Libération », sans que personne ne puisse s’y opposer.

Mais le projet n’aboutit pas. Malgré l’insistance de Ledoux et de Moulias, qui reviennent plusieurs fois à la charge. Philippe Nicolas refuse de signer ce protocole. Il a été révoqué et remplacé par… François Moulias, tandis que Bruno Ledoux s’installait dans le siège de président du conseil de surveillance.

« Pas en péril ». Pour les élus du personnel, cette prise de pouvoir par le duo Moulias-Ledoux fait craindre une mise en œuvre très rapide de ce plan. Inquiet, le représentant des salariés-actionnaires (SCPL) au conseil de surveillance a demandé à Ledoux la tenue d’une réunion extraordinaire du conseil. Réponse : « L’intérêt de la société n’est pas en péril. Il n’y a pas lieu de convoquer un conseil extraordinaire. » Sauf que, dans sa réponse, l’intéressé reconnaît qu’un nantissement de la marque a bien été envisagé : « Le document auquel se réfère Monsieur Philippe Nicolas n’était qu’un projet de 2013 entre Refondation, et non moi-même, et Libération concernant la mise en place d’une éventuelle garantie, projet qui n’a pas été poursuivi. » Et Ledoux d’ajouter : « Si l’opération s’était poursuivie, elle serait intervenue évidemment en toute transparence et concertation, et la SCPL aurait été consultée. » Dans ce cas, pourquoi avoir opéré en toute clandestinité ? Les salariés de Libé, eux, n’accepteront jamais un projet qui prévoit une dépossession de leur nom, et donc, de leur identité.

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