Note de do : Il paraît évident qu’avant l’invention de l’imprimerie, les livres, étant écrits et recopiés à la main, sont extrêmement rares ; et que, par conséquent, fort peu nombreux sont ceux qui ont l’occasion d’apprendre à les lire.
Analphabétisme
http://fr.vikidia.org/wiki/Analphab%C3%A9tisme
« Analphabétisme » expliqué aux enfants par Vikidia, l’encyclopédie junior L’analphabétisme dans le monde.
L’analphabétisme est le fait pour une personne de ne pas savoir ni lire, ni écrire généralement à cause d’un manque d’apprentissage. Il ne faut pas le confondre avec illettrisme, qui lui touche les personnes qui ont reçu un certains apprentissage mais qui ne savent ni lire ni écrire malgré tout.
Dans certains pays du monde, le taux d’alphabétisation est très élevé comme en Inde, au Nigéria ou encore au Bangladesh alors que d’autres pays ont un taux d’alphabétisation mois élevé comme la France ou les États-Unis, grâce à un meilleur accès à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
Évolution de l’analphabétisme
Pendant des millénaires la plupart des hommes étaient analphabètes. Dans ces civilisations agricoles ou nomades, le seul savoir à connaitre était celui fourni par les observations de la nature, du cycle des saisons, de l’enchainement des travaux agricoles. La transmission orale de ces savoirs était suffisante. Seule une infime minorité de personnes savaient lire et écrire, c’étaient les scribes. Ils étaient indispensables au fonctionnement des états et à la religion.
Au début du Ier millénaire av. J.-C., le peuple marchand des Phéniciens inventa l’alphabet. En réduisant le nombres de signes nécessaires pour savoir lire et écrire, cette invention a permis l’« alphabétisation » d’un plus grand nombre de personnes. A Rome ou en Grèce pendant l’Antiquité, les garçons des familles aisées, pour une grande part d’entre eux destinés à la carrière politique, apprenaient à lire et écrire, la plupart du temps sous la direction d’un professeur particulier (le pédagogue). Les filles ne recevaient pas cette instruction. Il en était de même dans les civilisations chinoises (formation des mandarins) ou amérindiennes d’Amérique (formation des prêtres).
Dans les pays musulmans, l’Islam, bien que basé sur la Récitation du Coran, n’exigeait pas au début la connaissance de l’écriture arabe par les croyants. Un lettré pouvait faire faire apprendre par oral et par cœur, les versets qui seraient ensuite récités. Il en était de même dans les premiers siècles du christianisme où c’était le prêtre (plus ou moins bien instruit d’ailleurs) qui transmettait oralement les prières que la masse des fidèles répétaient.
Au Moyen Âge pour pouvoir former les recopieurs de manuscrits et fournir des fonctionnaires aux divers gouvernements, l’Église catholique se chargea d’instruire un tout petit nombre de garçons. Le reste de la population, y compris les chevaliers, étaient incapables de lire, écrire et même signer un document (d’où l’utilisation des bagues-sceaux que l’on appelle « chevalières »). À partir du XIIe siècle le développement du commerce sur de grandes distances multiplia les correspondances entre marchands, qui devaient savoir lire et écrire personnellement (afin de préserver la confidentialité des informations qu’ils se communiquaient). L’invention de l’imprimerie au XVe siècle permit la multiplication des livres ce qui demandait des lecteurs, qu’il fallait former. Au XVIe siècle l’extension du protestantisme, qui est basé une lecture personnelle des textes bibliques, allait aussi faire reculer l’analphabétisme.
Alphabétisation
L’alphabétisation est l’organisation de cours pour apprendre la lecture aux populations qui en ont besoin (adultes déscolarisés, étrangers, sans-abri…). Elle est organisée pour les migrants dans les pays riches ou directement dans les pays les moins avancés.
Alphabétisation
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F10394.php
19/09/2006
Hans-Ulrich Grunder
Version PDF :
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/…
Sauvegarde du PDF :
http://mai68.org/spip/IMG/pdf/alphabetisation_mpdf.pdf
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Par alphabétisation on entend aussi bien l’enseignement de la lecture et de l’écriture que son résultat (taux d’alphabétisation). Quoique encore mal connue, l’histoire de l’alphabétisation en Suisse est un thème d’actualité, lié à la question de savoir si l’Instruction publique remplit les tâches d’acculturation et de socialisation qui lui incombent, à l’heure où certains s’inquiètent d’un illettrisme croissant.
1 - L’alphabétisation du Moyen Age au début du XXe siècle
L’alphabétisation suit les progrès de la civilisation de l’ Ecrit. Durant des siècles, savoir lire fut le privilège presque exclusif des ecclésiastiques : au Moyen Age, les écoles capitulaires et conventuelles leur étaient destinées. Pour la plus grande partie de la population, il n’était pas utile de savoir lire, car les connaissances se transmettaient non par des textes, mais par le biais d’objets, de pratiques à imiter et de normes à respecter. Mais à la fin du Moyen Age, dans plusieurs régions, des chapitres (Sion ou Genève), des abbayes (Saint-Maurice) ou des curés (campagne genevoise) fondèrent les premières écoles. Ailleurs, par exemple dans les villes et villages du diocèse de Lausanne, les écoles furent dès le XIVe s. l’affaire des communautés. Ces écoles élémentaires urbaines ou rurales, appelées "écoles allemandes" en Suisse alémanique, de même que les écoles latines (Ecole secondaire supérieure) apparues dans les villes à la même époque marquèrent les débuts de l’alphabétisation.
Une conséquence de la production massive de textes imprimés au cours du XVIe s. fut de porter, en Europe, la proportion des lecteurs à 20% de la population adulte. Les Eglises soutenaient cette évolution. Outre l’accès à la Bible (dans les régions réformées), aux psaumes et au catéchisme, l’alphabétisation était en effet utile à la diffusion de la doctrine chrétienne, à la compréhension des textes de morale, au développement de la culture du peuple et à son éducation. En Suisse italienne particulièrement, la Contre-Réforme encouragea l’alphabétisation du simple fait que Charles Borromée et ses successeurs s’employèrent à diffuser le catéchisme dans les paroisses des diocèses de Milan et Côme. Le mouvement durable et massif d’émigration (métiers du bâtiment, du commerce et des services) créa au Tessin un besoin précoce d’instruction. Dans les bailliages transalpins, une quarantaine d’écoles sont attestées au XVIe s. et deux tiers des communes au moins avaient des classes à la fin du XVIIIe s. De niveau et d’organisation disparates, fondées grâce à des legs d’émigrés ou à l’initiative des communes, gratuites ou payantes, ouvertes en général seulement aux garçons, fils de communiers (vicini), elles apprenaient à lire, estime-t-on, à 30% de la population. Paradoxalement, quelques régions alpines étaient donc en avance sur le Plateau.
Dans la campagne zurichoise, la population masculine était alphabétisée à 30-35% vers 1650, à 40% vers 1700 et à 80% vers 1780. Les efforts de l’Eglise réformée et de ses rivaux piétistes avaient favorisé la maîtrise de la lecture, celle de l’écriture restant plus rare. Mais l’une et l’autre se répandirent rapidement au XVIIIe s., à des rythmes différents selon les régions et selon le sexe ; les écoles de plus en plus nombreuses à la campagne n’y sont pas étrangères, même si elles ne fonctionnaient d’abord qu’en hiver. Les foyers de la campagne zurichoise possédaient bien plus de livres au XVIIIe s. qu’au XVIIe s. (ce phénomène avait débuté en ville et dans les communes du lac, où il est perceptible au début du XVIIIe s.). Les retours en arrière, dus notamment aux résistances à la scolarisation, furent rares. Aux XVIIe-XVIIIe s., en territoire neuchâtelois, comme vraisemblablement en d’autres lieux, l’autodidaxie dans le cercle familial joua un rôle important. Presque tous les foyers possédaient des livres (Bible, psautier, almanachs, etc.), dont le déchiffrement, souvent sous la direction maternelle, favorisait l’apprentissage de la lecture. A 16 ans, la quasi-totalité des jeunes ouvriers des indienneries savaient lire. L’écriture s’acquérait aussi à la maison, en recopiant d’abord des lettres, des phrases, puis des textes. En ville de Genève, à la fin du XVIIIe s., 92% des nouveaux époux (même dans les classes populaires) signaient l’acte de mariage de leur nom. Autre exemple, Vallorbe en 1814, où la capacité de signer est aussi répandue. Il est possible que certains aient su signer mais non écrire, mais la lecture et l’écriture devaient être répandues depuis assez longtemps dans la population urbaine genevoise, de même qu’elles étaient maîtrisées par environ 90% des Lausannnois à la fin de l’Ancien Régime, selon les estimations. Dans la campagne genevoise, le taux d’alphabétisation variait, vers 1816, entre 75% dans l’ancien territoire cantonal et un chiffre beaucoup plus bas dans les communes cédées par la Savoie et la France en 1815-1816.
Il serait faux de croire qu’au XVIIIe s. un analphabète manquait d’informations. Les textes, même littéraires, se diffusaient oralement en de multiples occasions : sermons, catéchisme, foires, chansons de rue, contes à la veillée, lectures publiques et privées. Cependant, l’alphabétisation créa un public de lecteurs et contribua ainsi à démocratiser la société et à émanciper les individus aux XVIIe et XVIIIe s. (Lumières). Face à cette évolution, les autorités introduisirent la censure des livres et de la presse, afin de garder la population sous tutelle. La question de l’utilité de la lecture dans le labeur quotidien des paysans souleva un débat nourri. Des témoins ont relevé, outre les cas nombreux de personnes qui avaient appris à lire toutes seules, l’attrait exercé par la littérature et les craintes qu’inspiraient aux autorités leurs sujets alphabétisés. Il y eut des mises en garde contre le Livre et contre la lecture, que certains obscurantistes accusaient de "ramollir la moelle épinière" et d’inciter à la paresse. Dans les Ephemeriden der Menschenwelt (1776), Albert de Haller fait l’éloge de son honnête fermier de Goumoens-le-Jux, qui ne lit "ni poèmes ni romans", et l’oppose à Kleinjogg, le paysan lettré, le Socrate rustique de Hans Caspar Hirzel.
Au XIXe s., l’écrit d’une part, toujours plus répandu grâce à la presse, aux sociétés de lecture et aux bibliothèques, d’autre part l’Ecole primaire (l’instruction publique obligatoire est inscrite dans la Constitution fédérale de 1848) stimulèrent l’alphabétisation : son taux passa de 30% à 90% entre 1830 et 1890, gagnant 10% par décennie en effaçant les disparités régionales et celles dues au sexe ou à la confession. Au Tessin, par exemple, la scolarisation systématique fit reculer rapidement l’analphabétisme, surtout à partir des années 1840. Entre 1855 et 1865, seuls 10% des hommes et 35% des femmes signent encore leur acte de mariage d’une simple croix. Une analyse par classes d’âge montre en outre que la maîtrise de la lecture et de l’écriture s’accrut régulièrement chez les hommes entre 1820 et 1849, et irrégulièrement chez les femmes. Vers 1850, le futur conseiller fédéral Stefano Franscini estimait, peut-être avec un optimisme excessif, qu’en Suisse presque tout le monde savait lire, écrire et compter.
Les examens cantonaux des recrues, introduits en 1832 à Soleure, puis dans la plupart des cantons avant 1854, renseignent sur l’alphabétisation au XIXe s. Ainsi 10% des recrues lucernoises ne savent pas écrire en 1861, 10% le savent à peine. En 1864, 20% des examinés ont des capacités nulles ou très faibles en lecture et 30% en écriture. En conséquence, plusieurs cantons ouvrirent des classes dans les casernes ; dans le canton d’Argovie par exemple, 19% des conscrits les fréquentaient en 1863 et 8,4% en 1873. Les examens cantonaux des recrues, organisés et interprétés de manière très dissemblable ici ou là (Appenzell Rhodes-Intérieures annonce 60% d’"analphabètes", Genève 2%), se prêtent mal aux comparaisons. Ils firent place dès 1875 à des examens fédéraux, dont les résultats pour le taux d’alphabétisation mettent en tête des cantons fortement urbanisés (Bâle, Genève, Zurich), en queue des cantons ruraux (Appenzell Rhodes-Intérieures, Valais, Uri) ; en outre, les cantons protestants tendent à l’emporter sur les catholiques et les libéraux sur les conservateurs. Selon les examens de 1879, il y avait 1,6% d’analphabètes parmi les jeunes gens aptes au service ; en diminution régulière, ce taux était de 0,04% en 1913. A titre de comparaison, on estime qu’en Europe centrale, 25% de la population savait lire vers 1800, 40% vers 1830, 75% vers 1870 et 90% vers 1900.
Le taux d’alphabétisation connut une ultime hausse à la fin du XIXe s., grâce à une fréquentation plus régulière de l’école primaire, mieux organisée et confiée à des Instituteurs mieux formés. Tandis que l’industrialisation exigeait des travailleurs qualifiés et que régnait un esprit de concurrence entre nations, la justification religieuse de l’alphabétisation fit place à des motifs politiques et économiques : le citoyen du XIXe s. devait participer à la vie politique ; il devait savoir lire et écrire pour intervenir dans les débats et prendre des décisions en connaissance de cause. Pourtant, dans les basses classes et à la campagne, l’alphabétisation se heurta à toute une série d’obstacles qui la ralentirent : conditions d’existence précaires, forte natalité, refus de nombreux paysans d’envoyer leurs enfants à l’école, incompétence de certains maîtres. La pauvreté et le manque de loisirs limitaient les possibilités de lecture, même pour ceux qui avaient appris à lire.
A la fin du XIXe s., des pédiatres découvrirent les causes physiologiques de certains troubles de la lecture ou de l’écriture : faiblesses négligées de la vue ou de l’ouïe, infirmités motrices, dommages cérébraux non traités, qui ralentissent ou empêchent les apprentissages scolaires. Le traitement de ces difficultés (dyslexie), qui peuvent aussi avoir des causes psychologiques ou sociales, est le domaine d’une branche de la pédagogie curative, la logopédie, qui est devenue au XXe s. une science et un métier.
De manière générale, les variables suivantes ont influé positivement sur l’alphabétisation du XVIe au XIXe s. : la richesse des communes et les dépenses consenties pour l’école, la qualité du réseau scolaire, l’assiduité des élèves, l’homogénéité linguistique régionale, une forte densité démographique, une urbanisation élevée, la prépondérance politique des élites urbaines.
2 - L’illettrisme récent
L’illettrisme (incapacité de lire, en le comprenant, un texte simple et bref en rapport avec la vie quotidienne, selon l’Unesco) frappe dans les sociétés occidentales des gens qui sont allés en classe. La découverte de ce phénomène a montré que l’école n’assurait pas une alphabétisation automatique. La place que prennent les médias audio-visuels dans les sociétés postindustrielles à la fin du XXe s. fait craindre aux pessimistes que la capacité de lire et d’écrire ne recule, surtout chez les jeunes, qui pourraient en venir à préférer l’image à l’écrit.
D’après l’ONU, l’illettrisme touchait en 1989 environ 5% de la population des pays industriels occidentaux. A l’occasion de l’Année internationale de l’alphabétisation (1990), l’Unesco estima à 30 000 le nombre des illettrés en Suisse, chiffre certainement très inférieur à la réalité. En 1995, selon une étude de l’OCDE, 13 à 19% des adultes en Suisse n’avaient pas une maîtrise suffisante de la lecture, de l’écriture et du calcul pour affronter les exigences du monde du travail et de la vie quotidienne. L’association Lire et écrire (antennes alémanique, romande et tessinoise fondées respectivement en 1985, 1988 et 1994) s’efforce de réduire ce chiffre trop élevé. Grâce à quelques subventions et grâce surtout au bénévolat, elle organise des cours et tente d’attirer l’attention du public et de l’administration sur le problème. Comme elle le constatait en 1996, de nombreux participants à ses cours souffraient d’une forme d’exclusion économique, sociale et culturelle.
Bibliographie
– R. Girod, « Le recul de l’analphabétisme dans la région de Genève de la fin du XVIIIe au milieu du XIXe siècle », in Mélanges d’hist. économique et sociale en hommage au professeur Antony Babel, 2, 1963, 179-189 – R. Schenda, Volk ohne Buch, 1970 (31988) – R. Ruffieux, Du noir et blanc au rouge et blanc, 1975, 77-86 – F. Furet, J. Ozouf, dir., Lire et écrire, 2 vol., 1977-1978 – M.-L. von Wartburg-Ambühl, Alphabetisierung und Lektüre, 1981 – B. Andenmatten et al., Ecoles et vie intellectuelle à Lausanne au Moyen Age, 1987 – H.W. Giese, B. Gläss, éd., Alphabetisierung und Elementarbildung in Europa, 1989 – H.W. Giese, Analphabetismus, Alphabetisierung, Schriftkultur, 1991 (avec bibliogr.) – R. Ceschi, « La scuola per formare il cittadino », in Tra Lombardia e Ticino, éd. R. Ceschi, G. Vigo, 1995, 135-159 – P. Caspard, « Pourquoi on a envie d’apprendre ? », in Hist. de l’éducation, 70, mai 1996, 65-110 – W. Lustenberger, Pädagogische Rekrutenprüfungen, 1996 – I. Cappelli, C. Manzoni, Dalla canonica all’aula, 1997
De l’analphabétisme de Louis XIV…
http://www.entouscas.ca/2013/01/de-lanalphabetisme-de-louis-xiv/
Publié le 8 janvier 2013 par Anne-Marie Beaudoin-Bégin
Dans mon dernier billet, j’ai cité cette phrase de Louis XIV, en faisant de l’ironie sur la médiocrité de la langue du Roi-Soleil :
Jay souferplusieursennees desafoiblesse de sonopniastreté et desonjnaplication il men ascousté desschosesconcidérables je naypas profitéde tous les auantages queje pouuoisauoiret toucela parcomplaisance et bonté […].
Un lecteur a laissé le commentaire suivant :
Je n’ai pas la même interprétation que vous de ce texte de Louis XIV : à la même époque Molière, Racine, La Fontaine et toute la clique s’exprimaient dans le français qu’on enseigne aujourd’hui. Ce texte veut juste dire que Louis XIV était analphabète, comme quoi on peut être le plus grand roi de France et manquer de culture ….
La raison pour laquelle j’ai cité cet extrait, c’est que je désirais illustrer à quel point les jugements de valeur par rapport à la rectitude langagière sont… des jugements de valeur.
Si l’on analyse le texte de Louis XIV avec les critères modernes, on peut en arriver à la conclusion que le Roi-Soleil écrivait bien mal. Mais en histoire, et l’histoire de la langue ne fait pas exception, il faut prendre garde, justement, à ne pas analyser les données à partir des critères modernes.
Illustrons avec un phénomène non linguistique. Juger des données à partir des critères modernes mènerait à la conclusion, par exemple, qu’une grande partie de la population européenne du XVIIe siècle était ivrogne, malpropre et illuminée. Mais on sait que les connaissances de l’époque sur l’hygiène étaient bien inférieures à celles d’aujourd’hui, on sait que l’eau potable était beaucoup moins accessible et on sait que l’absence de culture scientifique rendait très attrayantes les notions de magie et de sorcellerie. Sachant tout cela, on se garde bien de poser le même jugement sur la population européenne du XVIIe siècle que celui qu’on poserait sur une population moderne, à laquelle on accorderait bien peu de valeur et de crédibilité si elle possédait ces caractéristiques d’ivrognerie, de malpropreté et d’illumination.
On relativise, donc.
Mais si on relativise par rapport au mode de vie, pourquoi ne relativise-t-on pas par rapport à la langue ?
Et si les critères de rectitude langagière du XVIIe siècle différaient de ceux du XXIe siècle ? Et si la valeur accordée à l’écrit à l’époque de Louis XIV n’était pas la même qu’à notre époque ?
On pourrait certes citer Racine et ses confrères comme preuve que la langue de l’époque n’était pas si différente de celle d’aujourd’hui. Et on aurait raison. D’un certain point de vue.
En effet, les règles modernes du français écrit sont issues de cette période : c’est sur les écrits de ces grands écrivains, entre autres, que l’on s’est basé pour structurer ces règles… mais cela s’est fait au XIXe siècle.
À l’époque de Louis XIV, contrairement à l’époque moderne, la langue orale avait une plus grande valeur que la langue écrite. Les règles de l’oral, auxquelles on peut associer les lourdes et complexes règles d’étiquette de Versailles, dictées par Louis XIV lui-même, prenaient toute la place dans l’échelle de valeur.
Ce n’est qu’au XIXe siècle, après le grand mouvement de scolarisation et, par le fait même, de standardisation de la langue, qu’on a commencé à accorder une valeur prépondérante à l’écrit. Avant cela, les règles de l’écrit étaient la préoccupation des scribes, des imprimeurs et des écrivains, ces écrivains qui, d’ailleurs, s’empressaient de coucher sur papier des œuvres, écrites en l’honneur du Roi (cet analphabète… !), dans une langue qui obéissait aux règles valorisées de l’oral. L’écrit, à l’époque, était le reflet de l’oral. La connaissance des règles de l’écrit était réservée à quelques initiés. Les autres, dont le Roi, ne s’en préoccupaient pas.
Personne à l’époque de Louis XIV, donc, et surtout pas Racine et al., ne lui a jamais reproché sa « piètre » écriture. Louis XIV, à l’époque de Louis XIV, n’était ni un analphabète, ni un inculte*. Loin s’en faut ! Le plus grand roi de France, même au XVIIe siècle, n’aurait pas pu l’être. Les critères étaient simplement différents de ceux d’aujourd’hui.
C’est pour illustrer cette notion de variabilité des jugements que j’ai cité Louis XIV. C’est pour illustrer le fait que si, aujourd’hui, on juge comme fautifs des phénomènes qui ne l’étaient pas à une autre époque, c’est que ces fautes ne vont pas de soi. Ces jugements sont, au même titre que les jugements sur les modes, fonction de la culture.
[…] le [francophone] moyen a les plus grandes difficultés à considérer d’un œil détaché les différentes variétés linguistiques qui ont cours dans l’espace social, porté qu’il est à attribuer à chacune d’elles une certaine signification en termes sociaux, signification fondée sur un certain nombre de stéréotypes véhiculés par la culture ambiante à travers lesquels nous avons tendance à évaluer les gens à qui nous avons affaire dans la vie de tous les jours.**
Si Louis XIV avait vécu à notre époque, il n’aurait pas porté de perruque, ne se serait pas poudré et n’aurait certainement pas été analphabète…
Notes :
* Une rapide recherche dans Wikipédia permet, d’ailleurs, de constater que Louis XIV était loin d’être inculte…
** LODGE, R. Anthony (1997), Le français. Histoire d’un dialecte devenu langue, Fayard, p. 15.
Question : Comment ce roi a-t-il pu échapper à tout ce qu’on lui a enseigné à partir des précepteurs qu’il a eus ? Ces gens devaient enseigner un français équivalent à celui des grands auteurs, non ?
Réponse : Le français de Louis XIV était non seulement équivalent à celui des grands auteurs qu’il leur servait de modèle. Comme je l’ai expliqué dans ce billet, les règles de l’écrit, à l’époque, n’étaient pas considérées comme « le français », mais bien comme un code réservé à quelques initiés. Je ferai le parallèle avec le langage de programmation : presque tout le monde, aujourd’hui, a un ordinateur, mais bien peu connaissent le langage de programmation, qui est réservé à quelques initiés. C’est, mutatis mutandis, comparable à la connaissance des règles de l’écrit au XVIIe siècle.
Question : Ceci revient à dire que les auteurs auraient eu accès, dans une école spécialisée à un langage, pour reprendre votre exemple : »de programmation. » Ceux qui sont passés, disons, par Port Royal en sortaient initiés à un tel langage littéraire. Mais là où je demeure intrigué, c’est que le roi n’ait pas eu un précepteur dont le niveau d’enseignement ait été aussi perfectionné que celui retrouvé dans les grandes écoles.
Toute proportion gardée, il me semble que son niveau d’écriture corresponde à celui d’un élève du secondaire I. J’imagine que le précepteur se soit concentré sur d’autres matières alors…on devait juger qu’un faible niveau de français écrit suffisait à sa Majesté…
Réponse : Je ne connais évidemment pas tous les détails de l’éducation qu’a reçue Louis XIV… Mais je pense qu’il y a une différence entre ce qu’on peut avoir appris dans notre enfance et ce qu’on applique dans notre vie d’adulte. Moi, durant mes études, j’ai appris à faire des dérivations, à faire des intégrales et à calculer des trucs à l’aide de formules trigonométriques. Tout cela ne m’est pas utile aujourd’hui, alors je ne m’en sers pas.
Le respect des règles de l’écrit n’était manifestement pas utile à Louis XIV quand il a écrit ses mémoires !
Au passage, il serait par contre intéressant de remarquer que la seule chose qui cloche dans l’extrait de Louis XIV, c’est la coupure entre les mots.
HISTOIRE d’ALPHABETISATION (ajout 2010)
http://www.jean-marcshdelporte.com/histoire-dalphabetisation.php
Les actes d’Etat-Civil de naissances, baptêmes, mariages et décès de nos aïeux se terminent le plus souvent par la formule suivante « de ce que requis pour signer, les déclarants ne le font pour ne savoir ». En clair, la plupart d’entre eux ne savait pas écrire dans les années 1700 et première moitié 1800. Etait ce une généralité dans la population française de cette époque ?
Exemples concrets dans la collection de nos actes d’Etat-Civil familiaux
Le livre d’Emmanuel Todd « Après la Démocratie », éditions Gallimard, 2008, apporte les réponses à cette question (merci à Karine pour la source). Page 53 : « sur la base des signatures au mariage, le taux d’alphabétisation des jeunes adultes était en France en 1686-1690, de 29% pour les hommes et de 14% pour les femmes. En 1786-1790, au moment du déclanchement de la Révolution, les hommes étaient à 47%, les femmes à 27%. Au lendemain de la Commune de Paris, en 1871-1875, la proportion des hommes sachant signer s’élevait à 78%, celle des femmes à 66% ».
Page 54 : « le recensement de 1911 permet d’évaluer le pourcentage d’illettrés parmi les hommes et les femmes qui avaient entre 20 et 24 ans en 1881. Il donne un taux d’alphabétisation plus élevé que ne le suggéraient les signatures des actes de mariage : 86% pour les hommes et 79% pour les femmes. En 1911, le taux d’alphabétisation à 20-24 ans était de 96% pour les deux sexes. En fait, dès cette date, le niveau éducatif des femmes dépassait légèrement celui des hommes… »… « le gros du mouvement s’est effectué avant que l’Etat ne légifère. L’instruction obligatoire est décidée par la III° République en 1882, à un moment où l’essentiel de l’alphabétisation est déjà réalisée. Au vu des courbes, Guizot apparait plus important que Ferry…L’invention de l’imprimerie et la réforme protestante donnèrent, à l’échelle européenne, un double coup d’accélérateur ».
Page 55 : « Jusqu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, le lycée resta un privilège bourgeois, fermé aux masses. Le taux de scolarisation en sixième bougea à peine entre les deux guerres : de 4,6% en 1925 à, 6,4% en 1938. Le taux d’obtention du baccalauréat par classe d’âge passa de 1% en 1881 à 1,1% en 1911, à 1,6% en 1926 et à 2,7% en 1936 ».
Page 56 : « le choc de la Seconde Guerre Mondiale relance la société. La proportion d’une classe d’âge obtenant le baccalauréat passa d’un peu moins de 5% en 1950 à 33% vers 1995. Le nombre d’étudiants s’élève de 200 000 en 1950 à 850 000 en 1970, 1 175 000 en 1980, 1 717 000 en 1990 et atteint 2 179 000 en 1995. Il entre en stagnation par la suite »
AUTRES CHANGEMENTS VECUS PAR NOS PLUS ANCIENS ANCETRES (ajout 2011)
C’est en 1539 que le français fut imposé par l’ordonnance de Villers-Cotterêts (sous le règne de François 1°).
En 1564, Charles IX, en présence de sa mère Catherine de Médicis, signa au château de Roussillon (38) un édit désignant le 1° janvier comme premier jour de l’année pour l’ensemble du Royaume. Jusqu’alors, chaque région fixait cette date à sa convenance.
C’est en 1582 que l’on adopta le calendrier grégorien en passant en une nuit du 4 au 15 octobre.
Les poids et mesures, dont le système métrique, furent bien évidemment unifiés au moment de la Révolution.
Changements tous aussi importants que celui du passage du franc à l’euro en 2002 !!!
PARTAGE DES RICHESSES (ajout 2011)
En 1913, le 1% des français les plus riches accaparait 53% du patrimoine total. En 1984, ils n’en accaparaient plus que 20%…Mais en 2010, ce 1% possède dorénavant 24% de la richesse du pays, les 10% les plus aisés en possédant 54%, tandis que les 50% les moins lotis n’en possèdent que 6% (cf travaux de Th Piketty).
Les impôts représentaient 22,% du PIB en 1982, seulement15,1% en 2009…Effet du bouclier fiscal et autres mesures ciblées pour les plus riches…
Les enfants de l’Ancien Régime étaient-ils analphabètes ?
Mille ans d’école - par François Lebrun dans collections n°6 daté octobre 1999 à la page 28
A la veille de la Révolution, près de 40 % des Français et des Françaises savent signer leur nom. Un siècle plus tôt, ils n’étaient que 20 %. Cette lente victoire sur l’analphabétisme, on la doit essentiellement à l’Église catholique, soucieuse de contrer le prosélytisme protestant.
En 1877, Louis Maggiolo, recteur en retraite, obtient du ministère de l’Instruction publique l’autorisation d’entreprendre une enquête sur l’évolution de l’alphabétisation* en France depuis la fin du XVIIe siècle. Son propos est de faire relever par les instituteurs, dans les communes de tous les départements, la proportion des époux et des épouses ayant signé leur acte de mariage sur les registres paroissiaux, puis d’état civil, et cela pour quatre périodes de cinq ans : 1686-1690, 1786-1790, 1816-1820, 1872-18761.
Près de 16 000 instituteurs* répondent à l’appel
La suite est ici : http://www.histoire.presse.fr/colle…
Une approche de l’illettrisme en France
La signature des actes de mariage au xixe siècle dans « l’enquête 3 000 familles »
http://histoiremesure.revues.org/816
Jean-Pierre Pélissier et Danièle Rébaudo
p. 161-202
Version PDF : http://histoiremesure.revues.org/pdf/816
Sauvegarde : http://mai68.org/spip/IMG/pdf/histo…
J’espère trouver un jour le temps (C’est un sacréboulot !) de mettre une version html de cette extrêmement importante étude scientifique.
La croissance de l’alphabétisation en France (XVIIIe-XIXe siècle)
http://www.persee.fr/web/revues/hom…
François Furet
Wladimir Sachs
Ce PDF parle de l’étude de Maggiolo basée sur la capacité des gens à signer leurs actes de mariage.
PDF :
http://mai68.org/spip/IMG/pdf/La-cr…
11 novembre : les soldats parlaient-ils le français dans les tranchées
https://www.lefigaro.fr/langue-fran…
Publié le 11 novembre 2023 à 07:00,
Modifié le 12/11/2023 à 12:31Victoire Lemoigne
Les dialectes régionaux perdurent dans la sphère de l’intime et du privé. Bridgeman
ENTRETIEN - On dit souvent que la Première Guerre mondiale a accéléré le processus de diffusion de la langue française et participé au déclin des dialectes. Qu’en est-il ? L’historien Erwan Le Gall analyse la question.
L’historien Erwan Le Gall est docteur en histoire contemporaine, spécialiste du fait militaire et guerrier, et enseigne à Hautes études internationales et politiques (HEIP). Il est notamment l’auteur d’Une armée de métiers ? Le 47e régiment d’infanterie pendant la Première Guerre mondiale, paru aux Presses universitaires de Rennes. Pour Le Figaro, il revient sur la « diglossie », c’est-à-dire la pratique de deux langues, qui prévaut pendant la guerre de 14 : les soldats écrivent en français, mais les dialectes régionaux perdurent dans la sphère de l’intime et du privé.
LE FIGARO. - Quelle était la langue des régiments au début de la Grande Guerre ? Les soldats étaient-ils regroupés en fonction de leurs régions d’origine ?
ERWAN LE GALL. - À la suite de la guerre de 1870, l’armée française se réforme en profondeur et, effectivement, le recrutement tend à s’opérer localement, au sein de régions militaires. Même si on relève de nombreuses exceptions, il n’est pas erroné de dire qu’en 1914 les Français servent localement : les Bretons sont affectés à des régiments bretons, les Auvergnats à des unités auvergnates et ainsi de suite. Mais tout le monde parle français ! Les lois Ferry datent du début des années 1880 et lorsqu’éclate la guerre, ce sont des hommes qui savent lire, écrire et compter qui sont envoyés au front. En 1914, le taux d’illettrisme en France, que l’on mesure très précisément à l’occasion du passage devant le Conseil de révision, est d’ailleurs de 4%. Il est aujourd’hui de l’ordre du double…
Qu’en est-il à la fin de la guerre ?
La chose est peu connue mais les mois les plus meurtriers de la Grande Guerre sont les trois premiers : août, septembre et octobre 1914. Le 22 août 1914, plus de 20 000 combattants sont morts pour la France, en une seule journée ! Il en résulte des vides dans les rangs que l’armée doit impérativement combler afin de préserver la ligne de front. Dans l’urgence, on recrute les hommes comme on peut, où ils sont, ce qui conduit à sortir du cadre régional.
Prenons par exemple le 47e régiment d’infanterie de Saint-Malo. Alors que les soldats de cette unité sont en 1914 à 92% nés en Ille-et-Vilaine et dans les Côtes-du-Nord, aujourd’hui Côtes d’Armor, cette proportion chute à 47% en 1918. Or non seulement cette évolution n’empêche pas le régiment de se revendiquer breton mais tout au long du conflit tout le monde se comprend. Les archives l’attestent sans aucune ambiguïté. Certes, les langues régionales – que l’on n’appelle d’ailleurs pas encore ainsi à l’époque – sont sans doute plus parlées qu’aujourd’hui. Mais tout le monde parle français. Comme aujourd’hui, c’est la diglossie, la pratique de deux langues qui prévaut alors. La seule différence est qu’au XXIe siècle, c’est l’anglais qui a remplacé le breton, le provençal ou le patois.
Quant aux ordres dans l’armée, étaient-ils donnés en dialecte ou en langue française ?
L’armée est celle de la République, une et indivisible : il est donc d’autant plus logique que les ordres soient donnés en français puisqu’encore une fois chacun le parle, le comprend et l’écrit. Certes, l’orthographe et la syntaxe ne sont pas toujours maîtrisées. Récemment publiée, la correspondance de guerre de Maurice Gastellier, un paysan briard, en est un exemple saisissant. Mais cette pratique du français n’empêche pas les régiments de s’ancrer dans la « petite patrie » de leur garnison et de cultiver les particularismes régionaux pour forger un esprit de corps.
À Guingamp par exemple, un certain Henri Miche de Malleray est à l’origine de la création, à la Belle époque, d’une clique – une fanfare en termes militaires – de binious ! L’ancêtre du célèbre bagad de Lann-Bihoué en quelque sorte. Or le parcours de cet officier de carrière est particulièrement intéressant puisque saint-cyrien, Henri Miche de Malleray est également membre de l’Union régionaliste bretonne. Comment s’étonner dès lors que pendant la guerre, le 248e RI, une unité dont la garnison se trouve aussi à Guingamp, publie un journal de tranchées intitulé Le Biniou à poil et comportant des pages entières en breton ?
Quels sont les principaux néologismes qui sont entrés dans la langue française pendant la Grande Guerre ?
Un certain nombre ne sont d’ailleurs pas des néologismes à proprement parler mais des mots anciens, issus du vocabulaire de la caserne, au temps du service militaire, et qui vont être massivement diffusés dans les tranchées. C’est le cas notamment du « pinard ». Certains mots par ailleurs disent l’immense brassage de population qu’opère aussi la Grande Guerre. Ainsi le mot « gourbi » qui encore aujourd’hui désigne une habitation de fortune, et qui vient de l’arabe. Mais on pourrait citer également le « toubib », ainsi que le « caoua », le café : deux termes qui encore aujourd’hui relèvent de l’argot courant. Une manière de rappeler que nombreux sont les combattants d’Afrique-du-Nord à combattre pour la France en 14-18.
Le français étant plus envisageable à écrire que les dialectes, la correspondance a-t-elle joué dans l’accélération de la diffusion de la langue française ?
Non, puisque les lois scolaires sont en 1914 en vigueur depuis plus de 30 ans et qu’elles ont eu le temps de faire effet. Alors certes, on trouve bien quelques exemples d’individus qui ne parlent pas le français et ne s’expriment qu’en patois ou autre langue régionale mais il s’agit de cas qui relèvent d’une anormalité aussi statistique que sociale. Certains ont d’ailleurs été considérablement mis en avant après la guerre par quelques mouvements régionalistes. En Bretagne, je pense notamment à François Laurent, originaire de Mellionnec dans les Côtes-du-Nord, et fusillé pour l’exemple en 1914. C’est lui que le mouvement Breiz Atao entend ériger en symbole d’une génération de Bretons morts non pas « pour » mais « par » la France. Mais la mémoire n’est pas l’histoire. Les archives montrent que le français est globalement la langue de l’écrit et que le patois, ou les langues régionales, relève plus de la sphère intime, et donc de l’oralité.