Réponse à un ami internaute idéaliste, au sens de Karl Marx. Cet ami contemple et réfléchit dans son monde imaginaire au lieu de vivre et de regarder le monde réel, selon les principes du matérialisme historique.
Matérialisme historique
Salut,
Tu raisonnes au sujet de la Palestine et des Palestiniens aussi mal qu’au sujet de la dette. En fait, tu es un idéaliste au sens où Marx utilisait ce mot. C’est-à-dire que tu vis dans tes idées et tu raisonnes à partir d’elles sans tenir aucun compte des faits réels. Il faut revenir au matérialisme, c’est-à-dire aux faits réels. Marx se disait "scientifique" parce qu’il se comportait en scientifique : il vérifiait dans l’expérience réelle si ce qu’il avait prédit se réalisait ou non (car une théorie scientifique se veut "prédictive"). Et les axiomes de base de ses raisonnements, il les prenait dans la réalité des faits et pas dans son imagination. C’est l’histoire qui sert d’expérience scientifique. Pour Marx, et pour moi aussi, c’est donc le fait historique bien réel qui décide si oui ou non une théorie est vraie ou pas. C’est pourquoi il parlait de matérialisme historique.
Au sujet de commencer la révolution quelque part,
Tu voudrais qu’on commence la révolution partout en même temps. Tu dis que si on commence la révolution quelque part et qu’on attend 10 ou 20 ans qu’elle se prolonge ailleurs, on se plante parce que le pays socialiste sera d’ici là détruit par la réaction internationale. Cela peut effectivement sembler vrai en imagination ; mais, prenons la réalité des faits : la Russie a fait une révolution en 1917 et cette révolution pourtant très imparfaite a tout de même tenu jusqu’en 1992, soit bien plus que les 10 ou 20 ans que tu prévois. Tu as seulement oublié de regarder les faits réels ! comme pour ton essai d’analyse de la dette.
Il faut bien voir aussi que la guerre contre la révolution russe a été permanente depuis 1917, avec les armées blanches financées par le capitalisme international, puis la deuxième guerre mondiale, où un Hitler financé par le capitalisme avait avant tout pour but de "détruire le bolchevisme", et ensuite avec la guerre froide et la provocation américaine en afghanistan.
Il faut voir aussi que ce n’est pas 10 ou 20 ans plus tard que la révolution commencée en Russie a tenté de s’étendre. C’est quasiment tout de suite après la défaite de l’Allemagne, et la destitution des Hohenzolern en 1918, que Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht et les spartakistes et leurs alliés dadaïstes essaient de faire la révolution en Allemagne. C’est évidemment pour lutter contre la révolution que le capitalisme international, et américain en particulier (Ford, Rockefeller, etc.), a financé Hitler et les nazis en Allemagne (tu dis que c’est pas vrai, mais c’est pourtant tellement évidemment vrai !).
La révolution en Russie a fini par disparaître, mais c’est aussi de sa faute, car elle était par trop imparfaite. En effet, en Espagne, Staline ne s’est pas comporté correctement (lis donc l’« hommage à la Catalogne » d’Orwell ou regarde le film « Land and freedom » de Ken Loach. Si Staline avait accepté que la révolution espagnole de 1936 ne soit pas dirigée par lui, Staline, mais par la population espagnole révolutionnaire elle-même, dont l’immense majorité était anarchiste ; alors, cette révolution aurait vaincu en Espagne. Et, ayant deux appuis, un "communiste" en Russie et un "anarchiste" en Espagne, la révolution aurait totalement vaincu dans le monde entier.
Mais, alors que les anarchistes espagnols avaient livré tout l’or de la banque d’Espagne à l’URSS, qui avait promis de livrer des armes en échange ; Staline n’a voulu livrer ces armes qu’à la petite minorité de communistes espagnols (80 000 communistes inscrits en 1936, et 2 millions d’anarchistes inscrits). Staline pouvait livrer les armes très facilement à l’anarchiste Barcelone, sur la mer méditerranée. Mais il n’a pas voulu livrer ses armes aux anarchistes. Il voulait les livrer aux "communistes". Or, les communistes étaient dans les Asturies, sur la côte atlantique. Pour parvenir à livrer les armes aux Asturies, il fallait franchir le détroit de Gibraltar. C’était très difficile parce que l’Angleterre avait livré Gibraltar à Franco pour qu’il s’en serve de central téléphonique et pour contrôler ce passage maritime très étroit. Il a fallu attendre de très nombreux mois afin que la marine soviétique puisse franchir ce passage pour aller aux Asturies. Et, pendant ce temps-là, les franquistes gagnaient du terrain. Si la révolution espagnole a été vaincue, c’est largement de la faute à Staline et donc à l’imperfection de la révolution russe.
Donc oui, je maintiens, il faut bien que la révolution commence quelque part. et se propage ensuite. C’est comme une grève, il faut bien que quelqu’un accepte de se lever en premier. Sinon, il n’y a jamais grève !
Et pour la Palestine, tu ne tiens là aussi aucun compte des faits.
Tu mets sur un pieds d’égalité le prolétariat palestinien et le prolétariat israélien. Ce qui s’avère une large erreur. Car les prolos israéliens votent Netanyahu et les rares écrivains israéliens de gauche disent tous qu’il n’y a quasiment plus de gauche, c’est-à-dire de position prolétarienne, en Israël.
Il faut bien voir que la fabrication artificielle d’Israël a fonctionné comme une sélection des Juifs du monde entier. Il y avait les salauds qui disaient à propos de la Palestine que c’était « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre ». Le peuple sans terre étant le soit-disant "peuple juif". Et il y avait les imbéciles qui acceptaient de croire qu’il n’y avait pas de Palestiniens en Palestine. En gros, les Juifs qui sont partis en Palestine sont soit des salauds soit des abrutis. Les salauds ayant manipulé les abrutis. Tu me diras que les enfants d’imbéciles et de salauds ne sont pas forcément des imbéciles et des salauds. Je te dirais que tu as raison, mais que dans ce cas, ils quittent israël ! Oui, le nombre de Juifs nés en Israël qui quittent ce pays artificiel est énorme. C’est bien pourquoi la direction sioniste cherche toujours par tous les moyens, notamment les plus infames, à pousser les Juifs du monde entier à émigrer en Israël. Et là aussi ce sont les plus idiots ou les plus salauds qui font leur aliyah.
Bien sûr, il reste quelques Israéliens très sympas en Israël qui font tout ce qu’ils peuvent pour aider les Palestiniens contre Israël. Je pense ici aux "anarchistes contre le mur". Mais ces gens-là sont tout aussi rares que courageux !
Tu ne peux donc pas mettre sur un pieds d’égalité le prolétariat palestinien naturellement présent en Palestine et le prolétariat israélien artificiellement sélectionné et importé par la propagande sioniste.
Tu dis que le Hamas, le Fatah, la bourgeoisie et la petite bourgeoisie Palestinienne peuvent bien crever. Rassure-toi, c’est ce qu’ils font ! mais, c’est surtout ce que tu appelles le prolétariat palestinien qui crève, bien plus que les Palestiniens riches ou au pouvoir.
Tu dis, exactement comme le CCI, que c’est en luttant contre sa propre bourgeoisie que le prolétariat palestinien évitera de se faire régulièrement massacrer. C’est carrément n’importe quoi ! Ce serait vrai si c’était la bourgeoisie palestinienne qui massacrait le prolétariat palestinien. Mais là encore tu regardes dans ton imagination au lieu de regarder la réalité des faits : c’est pas la bourgeoisie palestinienne qui massacre les Palestiniens, c’est les Israéliens qui les massacrent aussi souvent qu’ils en ont l’occasion ! Donc, l’ennemi principal du prolétariat palestinien, ce n’est pas la bourgeoisie palestinienne, mais Israël ! C’est le propre de l’impérialisme de prolétariser la bourgeoisie et la petit bourgeoisie du pays colonisé.
La position du CCI revient à dire aux Noirs d’Afrique, à l’époque de la chasse aux esclaves pour le commerce triangulaire :
Oui, c’est vrai, les Blancs sont en train de vous prendre en chasse pour vous amener sur des grands bateaux par delà les mers où vous irez leur servir d’esclaves. Comme vous vous défendez, ils tuent cinq d’entre les vôtres pour en capturer un et, pendant la longue traversée vers les Amériques, vous êtes tellement enchaînés et entassés qu’il meurt cinq esclaves pendant qu’il en arrive un "vivant" pour servir l’Homme blanc qui le battra, le violera et l’enchaînera comme bon lui semble ; mais, cela n’a aucune importance, songez à la "lutte de classe", et, au lieu de vous unir contre l’envahisseur blanc afin d’essayer d’être en mesure de vous défendre contre lui, mettez-vous plutôt en grêve contre vos exploiteurs noirs !
La position du CCI revient à dire aux Indiens d’Amérique en train de se faire exterminer par l’Homme blanc :
Oui, c’est vrai, les Blancs sont en train de vous génocider d’une façon absolue ; mais, ce n’est pas contre eux qu’il faut vous battre, luttez plutôt contre vos propres chefs et contre votre propre hiérarchie.
La position du CCI revient à dire aux Juifs enfermés dans les camps de la mort allemands :
Oui, c’est vrai, les Allemands sont en train de vous tuer les uns après les autres, et ils veulent vous tuer jusqu’au dernier ; mais, vous savez bien, la solution magique, c’est la "lutte de classe". Donc, pour être sauvés, c’est facile, mettez-vous en grève contre votre propre bourgeoisie, la bourgeoisie juive !
Vous êtes enfermés dans une maison en feu ? C’est pas grave, pour en sortir, il vous suffit de pisser dans un violon !
Refusant (officiellement) de choisir son camp entre Palestiniens et sionistes, le CCI est donc dans le camp du plus fort : le CCI n’est qu’un attrape-mouche pour juifs de gauche afin d’éviter qu’ils deviennent antisionistes !
A+
do
http://mai68.org