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Portrait de Shireen Abu Akleh, icône du journalisme palestinien tombée sous les balles de l’occupant

dimanche 15 mai 2022, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 12 mai 2022).

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12 mai 2022

Assawra

La journaliste d’Al-Jazira Shireen Abu Akleh a été tuée par balle le 11 mai 2022 alors qu’elle couvrait une opération de l’armée israélienne en Cisjordanie occupée. © AFP

La mort de la journaliste Shireen Abu Akleh, mercredi, a profondément bouleversé ses collègues de la chaîne de télévision Al-Jazira. Ceux-ci décrivent tous une "pionnière" et une grande professionnelle, dont la rigueur journalistique faisait l’unanimité.

Journaliste pour la chaîne de télévision panarabe Al-Jazira, Shireen Abu Akleh, tuée mercredi 11 mai par balle alors qu’elle couvrait une opération de l’armée israélienne en Cisjordanie occupée, était une reporter palestinienne de renom, saluée pour son courage et son professionnalisme.

Née en 1971 dans une famille chrétienne de Jérusalem-Est occupé, cette Palestinienne, qui détenait également la citoyenneté américaine, avait étudié le journalisme à l’université Yarmouk en Jordanie avant de cofonder la radio Voix de Palestine basée à Ramallah.

Elle avait rejoint Al-Jazira en 1997, un an après le lancement de la chaîne, dont elle est devenue une des reporters stars.

Pour Hoda Abdel-Hamid, une de ses collègues jointe par téléphone en Ukraine par l’AFP, "elle était assurément une journaliste très courageuse". "Je lui demandais : ’Tu ne te fatigues donc jamais ?’ Elle était toujours là, dès qu’il se passait quelque chose. Elle osait beaucoup plus que moi. (…) Mais c’était aussi une journaliste très expérimentée, pas du genre à prendre des risques stupides juste histoire d’en prendre."

Dans une interview récente avec une agence de presse locale, Shireen Abu Akleh ne cachait pas avoir fréquemment peur lorsqu’elle était sur le terrain. "Je cherche un endroit sûr où me tenir et cherche une façon de protéger mon équipe avant de me préoccuper des images", confiait cette journaliste, qui n’avait pas d’enfant.

Shireen Abu Akleh, qui portait un casque et un gilet pare-balles flanqué du mot "Presse", a été tuée mercredi à Jénine, ville palestinienne où l’armée israélienne, qui occupe la Cisjordanie depuis 1967, a récemment multiplié les opérations.

C’est de cette ville du nord de la Cisjordanie et du camp de réfugiés palestiniens adjacent que sont originaires plusieurs assaillants d’attaques anti-israéliennes meurtrières menées ces dernières semaines, sur fond d’accès de violences.

"L’une des premières femmes arabes correspondante de guerre"

Plus tôt cette année, la journaliste avait écrit dans la revue Cette semaine en Palestine que Jénine ne représentait pas "une histoire éphémère dans (sa) carrière ni même dans (sa) vie personnelle". "C’est la ville qui peut élever ma morale", affirmait-elle, car Jénine "incarne l’esprit palestinien qui parfois tremble et tombe mais, au-delà de toute attente, s’élève pour poursuivre ses combats et ses rêves".

Ayant couvert le conflit israélo-palestinien pendant deux décennies, elle était une icône pour nombre de Palestiniens. Aux yeux de son confrère Mohammad Daraghmeh, également un de ses amis proches, elle était "l’une des journalistes les plus fortes du monde arabe".

Elle "était l’une des premières femmes arabes à être correspondante de guerre à la fin des années 1990, lorsque le rôle traditionnel des femmes à la télévision était de présenter (les informations) dans un studio", a souligné sur Twitter Dima Khatib, une autre journaliste d’Al-Jazira, qualifiant sa collègue de "pionnière".

"Shireen était une journaliste courageuse, gentille, dotée d’une grande intégrité, et avec laquelle des millions de Palestiniens et moi avons grandi en la regardant", a salué Fadi Quran, l’un des directeurs d’Avaaz, une ONG basée aux États-Unis.

Sa chaîne de télévision lui a rendu hommage mercredi. Elle devait faire l’ouverture du journal "mais elle ne s’est jamais présentée" : refoulant ses larmes, Mohamed Moawad, chef d’édition sur la chaîne qatarienne, se remémore ses derniers échanges avec la journaliste.

"Notre dernière communication a eu lieu 20 minutes avant ce crime odieux. Elle a envoyé un courriel disant : ‘Bonjour, il y a une intervention israélienne à Jénine et je m’y rends maintenant. J’y suis presque. Je vous enverrai les détails’", raconte-t-il à l’AFP.

"Elle allait partout pour donner une voix à ceux qui n’en ont pas" Durant la minute de silence observée à l’antenne, des journalistes n’ont pas pu empêcher les larmes de rouler sur leurs joues. Dans les locaux de la chaîne à Doha, ses collègues se prennent dans les bras, serrant contre eux des portraits de la journaliste et des feuilles sur lesquelles est écrit : "Le journalisme n’est pas un crime". Derrière eux, sur des écrans, les images d’affrontements dans les Territoires palestiniens défilent.

"Elle allait partout pour donner une voix à ceux qui n’en ont pas. Il y a tellement de vidéos montrant Shireen se faire attaquer par les forces israéliennes, se faire tirer dessus et d’autres choses encore", se souvient Mohamed Moawad.

Al-Jazira a par la suite diffusé un communiqué disant que Shireen Abu Akleh avait été tuée "de sang froid" et demandant que les forces armées israéliennes soient tenues responsables de son décès.

L’État hébreu a indiqué enquêter sur sa mort mais a nié que la reporter ait été délibérément touchée. Après avoir dit qu’elle avait "probablement" succombé à un tir de combattants palestiniens, Israël a ensuite affirmé qu’il n’écartait pas que la balle ait été tirée par ses soldats.

"Nous considérons qu’il s’agit d’un acte intentionnel car la balle a touché exactement la zone située sous son oreille, là où il n’y a pas de protection", rétorque Mohamed Moawad, fustigeant des commentaires "irresponsables" en Israël sur la mort de la reporter.

Appels à une enquête indépendante

Les États-Unis ont appelé à une enquête "transparente", de préférence conjointe entre Israéliens et Palestiniens, tandis que l’ONU et l’Union européenne ont exhorté à une investigation "indépendante". Le groupe des pays arabes à l’ONU a réclamé "une enquête internationale indépendante" sur "l’assassinat" de la journaliste.

Mercredi soir, des Palestiniens ont déposé des gerbes de fleurs au passage du véhicule transportant sa dépouille en Cisjordanie, puis une foule s’est massée pour porter son corps, déposé sur un brancard et enveloppé d’un drapeau palestinien, jusqu’au bureau local d’Al-Jazira.

Une cérémonie officielle d’hommage est prévue jeudi en fin de matinée à Ramallah en Cisjordanie, au siège de l’Autorité palestinienne, en présence du président Mahmoud Abbas et de représentants de la presse, avant ses funérailles vendredi dans une église de Jérusalem, ville où elle a grandi.

Avec AFP du 12 mai 2022

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