VIVE LA RÉVOLUTION

Etats et Révolutions

samedi 25 mars 2023, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 25 mars 2023).

Document posté par Viriato afin de clarifier ce qui est la véritable conception marxiste de l’Etat.

Ce document vient d’un des plus éminents marxistes actuels, Gerry Downing, qui polémiquant contre les déformations courantes de la théorie marxiste, met les choses au point.

Dans un forum où il y a des camarades anarchistes, cette présentation peut aider à mieux se comprendre.

Voici la première partie qui est un exposé des principes marxistes sur l’Etat. Mes soulignés.

"Etats et Révolutions </sc> Internationalisme, démocratie soviétique Vs démocratie dans l’abstrait, droits démocratiques des travailleurs et États ouvriers : Réponse à Marc Mulholland

Par Gerry Downing

Introduction

Posons quelques principes marxistes avant d’aborder les spécificités de la vision politique du camarade Marc Mulholland, telle qu’elle est exposée dans ses deux articles parus dans le Weekly Worker des 9 et 16 mars.

L’État - tous les États - sont des instruments de la domination de classe. Seules les révolutions peuvent remplacer la domination d’une classe par une autre, plus progressiste.

Engels, dans L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État, déclare : « L’État n’est donc nullement un pouvoir imposé à la société de l’extérieur ; il n’est pas non plus "la réalité de l’idée éthique", "l’image et la réalité de la raison", comme l’affirme Hegel. C’est plutôt un produit de la société à un certain stade de développement ; c’est l’aveu que cette société s’est empêtrée dans une contradiction insoluble avec elle-même, qu’elle s’est scindée en antagonismes irréconciliables qu’elle est impuissante à dissiper. Mais pour que ces antagonismes, ces classes aux intérêts économiques contradictoires, ne se consument pas et ne consument pas la société dans des luttes stériles, il fallait un pouvoir, apparemment au-dessus de la société, qui atténue le conflit et le maintienne dans les limites de l’"ordre" ; et ce pouvoir, issu de la société mais se plaçant au-dessus d’elle et s’en éloignant de plus en plus, c’est l’État… L’armée populaire de la démocratie athénienne affrontait les esclaves en tant que force publique aristocratique et les tenait en échec ; mais pour tenir les citoyens en échec également, une force de police était nécessaire, comme nous l’avons décrit plus haut. Cette force publique existe dans tous les États ; elle se compose non seulement d’hommes armés, mais aussi d’accessoires matériels, de prisons et d’institutions coercitives de toutes sortes". [1]

Cela inclut les régimes bonapartistes. Le bonapartisme fait référence au régime français de Napoléon III (1852-70) et à d’autres administrations similaires qui étaient/sont dictatoriales et semblent s’élever au-dessus des classes conflictuelles de la société comme une force indépendante à la recherche de compromis.

Cependant, comme tous les États, ils empêchent fondamentalement la classe révolutionnaire montante, ou inversement la classe dirigeante réactionnaire vaincue dans le cas d’États ouvriers non démocratiques, déformés ou dégénérés, de renverser ses oppresseurs ou de revenir sur le devant de la scène. Le règne d’Henri XIII (1509-47) entre dans cette catégorie ; ses six mariages ont été des alliances tantôt avec les semi-féodaux, tantôt avec les capitalistes mercantiles en pleine ascension, mais toujours en maintenant essentiellement la domination de classe des semi-féodaux au pouvoir, même s’il a partiellement supprimé leurs institutions les plus réactionnaires, comme lors de la dissolution des monastères (1536-41). Il faudra attendre la révolution anglaise (1640-60) pour voir la résolution de cette contradiction.

Les États fascistes sont ceux où toutes les organisations de la classe ouvrière, les partis sociaux-démocrates de droite et de gauche (partis ouvriers bourgeois), les syndicats, les partis et courants marxistes centristes et révolutionnaires, ont été éliminés en prélude à l’élimination de tous les partis politiques, à l’exception de celui du dictateur au pouvoir.

C’est ce qui s’est passé en Italie après le triomphe de Mussolini lors de la Marche sur Rome, le 31 octobre 1922, et de Franco en Espagne, le 1er avril 1939, et en Allemagne après l’arrivée au pouvoir d’Hitler, le 30 janvier 1933. C’est ce qui menace l’Italie et les États-Unis aujourd’hui. Israël, sous le gouvernement d’extrême droite de Netanyahou, avec des ministres néo-nazis, se dirige clairement dans cette direction, tout comme l’État client des États-Unis et de l’OTAN à Kiev en Ukraine. Cela résout les contradictions au sein d’un État bourgeois d’une manière contre-révolutionnaire, comme le triomphe complet de la bourgeoisie.

Les véritables situations de révolution sociale sont gagnées ou perdues sur une très courte période de quelques semaines ou tout au plus de quelques mois, lorsque la classe montante gagne l’allégeance des masses à sa cause et consolide ce soutien par des actions révolutionnaires violentes qui renvoient la classe réactionnaire à la poubelle de l’histoire sur le plan idéologique et militaire/physique.

Nous pouvons le constater dans les trois grandes révolutions de l’histoire, l’anglaise, la française et la russe, ainsi que dans d’autres révolutions et, négativement, dans les révolutions ratées. Sans une action décisive dans la brève période d’une situation révolutionnaire, les masses perdent espoir et l’occasion est perdue.

Oliver Cromwell a coupé la tête du roi Charles Ier le 30 janvier 1649 à Whitehall, Londres, devant sa propre salle de banquet. Cet acte reste le plus révolutionnaire de l’histoire anglaise.

L’historien whig Thomas Macauley raconte que Cromwell a signé son arrêt de mort en premier, mais qu’il a dû prendre la main des autres signataires et les soutenir dans leur signature, tant ils craignaient de voir leurs âmes immortelles condamnées à l’enfer pour l’éternité pour régicide, un péché dont l’Église décrétait qu’il n’y avait pas de pardon possible, car le roi était le représentant de Dieu sur terre.

Idéologiquement, la bataille était gagnée. Mais une fois l’acte accompli, "tous les chevaux du roi et tous les hommes du roi n’ont pas pu recoller Humpty", comme le dit la comptine révolutionnaire ; l’État absolutiste semi-féodal a été relégué dans le panier (la poubelle) de l’histoire avec la tête coupée et Charles II, rétabli, a déclaré sans ambages : "Je ne souhaite pas repartir en voyage". Le Parlement, représentant les capitalistes mercantiles, a gouverné à partir de ce moment-là avec une monarchie plus ou moins constitutionnelle et avec des compromis limités avec l’aristocratie foncière whig, réajustés dans la "Glorieuse Révolution" de 1688 et dans la loi de réforme de 1832. La révolution a été consolidée militairement et politiquement principalement lors de la bataille de Naseby, le 14 juin 1645.

La révolution française a commencé avec la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, mais ce processus révolutionnaire a atteint son point culminant le 5 septembre 1793. La France révolutionnaire est alors confrontée à une alliance mondiale de contre-révolutionnaires, internes et externes. Cinq armées d’invasion se rapprochent de Paris, des révoltes monarchistes se préparent en Vendée et ailleurs, et des soulèvements fédéralistes menacent dans de nombreuses villes et régions françaises. Les Girondins et, plus tard, certains membres de la Montagne plus radicale de la Convention nationale ont cherché un compromis avec la réaction alors qu’il n’y en avait pas. Un autre massacre, bien plus dévastateur que celui de la Saint-Barthélemy (1572) [2], les attendait tous.

Mais "quand l’heure vient, l’homme vient". Le grand lion de la révolution, Maximilien Robespierre, sort Madame Guillotine et le règne de la terreur commence. La France révolutionnaire exécute d’abord les compromis girondins, puis les aristocrates et leurs partisans, soit quelque 17 000 personnes, du 5 septembre 1793 au 27 juillet 1794. Robespierre arme les masses parisiennes, les fameux sans-culottes, qui comprennent alors qu’il ne s’agit pas d’un faux jeu de politiciens opportunistes, mais d’une véritable révolution. Ils se précipitent sur le front de l’Est, où se trouve le danger prussien immédiat, avec comme cri de ralliement Le Marseillaise (24 avril 1792), qui vient d’être publié.

L’armée renforcée qui battait en retraite s’est retournée et s’est battue, l’armée d’invasion a été mise en échec et s’est enfuie, en partie parce que ses rangs étaient également infectés par l’esprit révolutionnaire, et la bataille/siège de Valmy (20 septembre 1793) a consolidé la révolution et a changé l’histoire du monde entier pour le meilleur. Le phénomène s’est répété sur les quatre autres fronts de bataille contre les armées d’invasion autrichienne, britannique, espagnole et italienne.

La révolution russe a commencé en février 1917 (à l’ancienne époque, avec 13 jours de retard sur le calendrier grégorien occidental). Le soulèvement des femmes a attiré sous sa bannière de grandes forces qui ont forcé le tsar à démissionner en l’espace d’une semaine. Vladimir Lénine, renforcé plus tard en 1917 par Léon Trotski, s’est battu pour l’idéologie de la révolution socialiste, "tout le pouvoir aux soviets", contre ceux qui apportaient un soutien critique à la guerre et au gouvernement provisoire, principalement Kamenev, Zinoviev et Staline. Mais l’heure des comptes a sonné en septembre et octobre 1917, lorsque la bataille au sein du comité central a été remportée contre les conservateurs de droite mentionnés plus haut. Après avoir obtenu le soutien des masses dans les soviets, en particulier celui de Petrograd dirigé par Trotski, la prise du Palais d’Hiver avec l’appui des rangs de l’armée a permis de gagner cette révolution. Elle a ensuite été assurée militairement dans la guerre civile par l’Armée rouge, créée et dirigée par Trotski d’une manière révolutionnaire, qui était dédiée dans son programme à la révolution mondiale. La victoire de l’Armée rouge contre l’avancée de Deniken sur Moscou en octobre-novembre 1919, l’opération Donbass, de décembre 1919 à janvier 1920, et la bataille de Tsaritsyne (Stalingrad), d’août 1919 à janvier 1920, ont été les principaux tournants décisifs de cette guerre contre les armées blanches et les 14 armées d’invasion étrangères.

Une fois l’État ouvrier russe conquis après octobre 1917 et la dictature du prolétariat établie pour réprimer l’inévitable contre-révolution, l’économie planifiée a été décidée démocratiquement à partir du point de production. Son projet était de produire pour les besoins humains et non pour le profit. Il s’agit d’un mode de production bien supérieur et plus efficace que le mode de production capitaliste.

Alors, suivant « l’Idéologie allemande » de Marx, quand la surabondance des richesses produites manifestera sa supériorité sur le système antérieur en crise et l’État commencera progressivement à s’étioler car sa suppression ne sera plus nécessaire. Mais cela dépend de la victoire de la révolution mondiale, où la production est basée sur la division mondiale du travail et le libre-échange international et culturel au bénéfice de toute l’humanité. Cette composante essentielle de la Révolution Permanente, telle qu’élaborée par Trotski, son internationalisme, est complètement ignorée par le camarade Marc.

Cette perspective de Lénine, Trotski et des bolcheviks a été directement contredite par la théorie du socialisme dans un seul pays, qui est encore plus impossible que le capitalisme dans un seul pays et qui est le principal trait d’identification du stalinisme et de ses apologistes.

Toutes les classes gouvernent, par l’intermédiaire de leurs États, avant tout de manière idéologique. Cela s’applique à la classe capitaliste d’aujourd’hui, ainsi qu’à toutes les classes dirigeantes esclavagistes, féodales et semi-féodales. Le poing maillé dans le gant de velours n’est brandi avec force qu’en de très rares occasions, lorsque leur domination est fondamentalement menacée.

Le gant de velours est aujourd’hui la démocratie bourgeoise via le suffrage universel et les parlements, et il s’écaille progressivement à mesure que de nouvelles lois contre les grèves et les manifestations pour le niveau de vie, contre les droits des femmes et contre les immigrants et les droits de l’homme en général sont de plus en plus brandies par les classes dirigeantes en Grande-Bretagne, aux États-Unis, dans l’Union européenne, etc."

2 Messages de forum

  • Etats et Révolutions 25 mars 2023 14:31, par do

    Salut Viriato,

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