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LE BLACK BLOC ET LA PETITE-BOURGEOISIE RADICALISÉE

vendredi 11 mai 2018, par Robert Bibeau (Date de rédaction antérieure : 11 mai 2018).

Qu’est-ce qu’une classe sociale ?

Une classe sociale ne se définit pas par son revenu. Le revenu (salaire, dividendes, intérêts et prestations gouvernementales) est la conséquence d’une position sociétale et non l’inverse. Le revenu moyen d’une classe sociale, ou de l’une de ses sections, peut varier, mais pas son statut social même si son rôle fluctue dans le procès de production et de reproduction élargie. Ainsi, une classe « moyenne » serait socialement la moyenne de quoi dans le procès de reproduction sociétal ?

Une classe sociale se définit par son rôle – sa position dans le procès de production et de reproduction sociétale. Ce positionnement détermine in fine le revenu de ses sujets. Si un individu membre de la classe bourgeoise – s’activant à une tâche quelconque dans la société globalisée – perd son emploi, alors il est expulsé de sa classe sociale et on dira qu’il est prolétarisé (les chômeurs forment une "armée" de prolétaires). Si un individu gagne le pactole à la loterie et qu’il quitte son emploi salarié pour œuvrer dans une autre activité comme usurier ou commettant dans une société alors il gravit un échelon social et adhère à la classe bourgeoise non pas parce qu’il est soudainement riche, mais parce qu’il pratique une nouvelle profession. C’est ce que l’on fait comme travail et nos rapports aux moyens de production, de commercialisation et de communication qui déterminent notre statut social.

La classe sociale petite-bourgeoise

La petite-bourgeoisie fait partie de la classe bourgeoise et elle partage les mêmes intérêts. Ainsi, la petite-bourgeoisie a pour rôle, pour tâche dans le procès de production, d’assurer la reproduction des forces productives sociales (de la naissance à la mort, et ce pour tous les sujets des classes existantes). En termes plus précis la petite-bourgeoisie assure les soins de santé, de l’accouchement à l’enterrement en passant par les soins médicaux, l’éducation, la formation, la gestion bureaucratique, l’administration publique, la culture, la religion et la morale c’est-à-dire l’aliénation idéologique, le formatage de la pensée (la propagande médiatique appelée frauduleusement information), le divertissement, le sport, les loisirs, tout ce qui est utile à la reproduction élargie de la force de travail (et de ses descendants) requis et nécessaire à la valorisation du capital, c’est-à-dire à la production et à la commercialisation des marchandises et des services non pas au bénéfice de la populace (ce qui n’est qu’une conséquence aléatoire), mais bien pour assurer la reproduction élargie du capital. C’est l’astuce sur laquelle s’est érigé le mode de production capitaliste et que Karl Marx a exposée. Autant dire que la gauche et la droite font fausse route quand elles brament et réclament de l’État fétiche des riches qu’il maintienne les services publics tellement appréciés par les salariés. Ce n’est pas le rôle de l’État des riches de maintenir de tels services et la preuve en est que si vous permutez un parti gauchiste et un parti droitiste ils appliquent les mêmes politiques qu’impose la conjoncture économique.

Sous la croissance et la prospérité

Tout va bien tant que le mode de production se développe et conquiert de nouveaux marchés dans la prospérité – tant que le système reproduit et valorise le capital – tant que la productivité aussi bien des forces productives sociales (ouvriers) que la productivité des forces de reproduction sociétale – la petite-bourgeoisie administrative bureaucratique et cléricale à l’hôpital, à la garderie, à l’école, à l’université, à la banque, à l’église, au marché, au cinéma, dans les transports, dans l’ONG des paumés, et dans toutes sortes d’institutions de services publics, etc. Tout baigne dans l’huile en ces temps de croissance économique, et avec elle la croissance de la petite-bourgeoisie de service. Même que cette croissance peut provoquer des turbulences entre l’État des riches et la petite-bourgeoisie aspirant à gravir les échelons de la promotion sociale comme on l’a vu en Mai-68 dans Paris assiégé et traumatisé par ses étudiants agités. S’il vous plait, ne pas confondre une insurrection populaire et une révolution prolétaire avec des revendications lycéennes même violemment exprimées.

La débandade économique et sociale

Mais voici que le système s’embourbe et ne parvient plus à trouver de nouveaux débouchés – de nouveaux marchés pour ses marchandises produites en grande quantité et à prix coupé. Le grand capital désemparé et ne sachant comment parer (ce n’est pas un problème de bonté ou de méchanceté des affidés c’est le fruit des paradoxes du système) coupe de mille-et-une façons dans les revenus de la population et dans les services publics afin de maintenir les taux de profits visant à assurer la reproduction élargie. Ce faisant, le capital rétrécit encore davantage son marché de consommation globale. Le prolétariat aussi bien que l’immense petite bourgeoisie de service voient ses salaires et ses revenus d’aide sociale et de retraite – stagné puis s’étriquer, ce qui entraine de nouvelles demandes des riches capitalistes à l’État fétiche antidémocratique en vue de nouveaux transferts de capitaux publics à verser aux entreprises milliardaires ne parvenant plus à satisfaire leurs actionnaires, ni à faire fructifier leurs capitaux ce qui est pourtant leur « affaire ». Le capital devient volatile, fragile et parfois invisible, on dit qu’il se dissipe en nuage spéculatif.

Je ne dis rien ici du crédit à la consommation et de la dette souveraine qui ne font que retarder temporairement l’effondrement inéluctable… La seule énigme étant de savoir combien de temps tiendra l’illusion de la croissance.

Le chemin de Damas du petit-bourgeois délaissé

Comme décrit ci-haut le processus d’effondrement sociétal, commence toujours dans la sphère économique pour ensuite s’étendre à la sphère sociale, politique, judiciaire, idéologique, morale, médiatique, diplomatique et militaire. La crise économique est le fondement de la crise sociétal, car elle entraine l’expulsion de la petite bourgeoisie du procès de reproduction de la force de travail social. L’État coupe dans les services constate amèrement le petit-bourgeois éploré après avoir perdu sa BMW et son loft dans la Cité. C’est qu’il est l’un des premiers congédiés – on dit alors que le petit-bourgeois est en voie de paupérisation (baisse de revenu, expulsion de sa maison, fin des vacances sur la côte, tout ce qui faisait sa fierté s’est effondré). On dit aussi que le petit-bourgeois est en voie de prolétarisation, car le capital l’invite à se recycler en micro-entrepreneur (sic), travailleur taxable et corvéable à volonté. Ou alors le petit-bourgeois devient chômeur, SDF, itinérants ou encore mercenaires, ou bien il devient bagarreur dans le Black Bloc, les groupes anarchistes ou maoïstes, ou dans les groupuscules néonazis et néofascistes, souvent sincèrement enragé contre le système, mais se laissant instrumentaliser pour justifier la répression de la société terroriser et totalitariser, autant d’embuches que le prolétariat devra surmonter quand il se sera résigné à se révolter pour s’émanciper.

Des couches entières de petits-bourgeois déclassifiés, paupérisés, prolétarisés crient leur frustration sur les pavés des cités et remplissent les phalanges des groupes de droite – comme de gauche, insoumis, revendicateurs, appelant de leurs pleurs le retour des « beaux jours », du temps de la croissance trépassée. Tout ceci démontre de la part des uns et des autres (gauche, droite, centre) une grande désespérance face à leur situation sociale inconvenante – dégradante et où chacun pense que l’on peut arrêter le processus d’effondrement social global en bloquant les migrants dans les Alpes, en Méditerranée, à la frontière mexicaine, ou indienne, ou que l’on peut enrayer la violence sociale et la prolétarisation en cassant des vitres, ou en brulant des voitures à Paris – à Montréal – à Berlin – à Rome – à Calcutta. Oublions les policiers infiltrés et les majordomes stipendiés, la majorité croit faire ce que doit, mais elle se fourvoie.

Le faux-drapeau « djihadiste »

Pour les mercenaires des pays du Moyen-Orient et d’Afrique, c’est autre chose. Là-bas les petits bourgeois deviennent mercenaires terroristes, de soi-disant « djihadistes » (faux-drapeau n’ayant rien à voir avec l’Islam) et ils sont rejoints par les paysans affamés et par le prolétariat désoeuvré. Tous ont trouvé un nouveau métier, un nouvel emploi, dangereux, mais lucratif, – et pour la plupart – (si on excepte les agents stipendiés par le grand capital qui jouent les sultans ou les imams) – ils n’ont que faire d’un nouveau sultanat. Oubliez les ONG de la "paix et des droits de l’homme" charger de colporter ces fadaises à propos de zélotes exterminateurs de mécréants à convertir, couper la solde et vous verrez l’armée du « djihad » s’évaporer dans les fumées du narguilé.

Aucune solution à l’intérieur du système

Il n’y a pas de solutions à cette série de crises économiques – sociales – politiques – idéologiques – militaires à l’intérieur du système contrairement à ce que pense les Blacks Blocs et les néonazis et compagnies. Il est impossible de stopper la décadence – ou la prolétarisation de la petite-bourgeoisie – en brisant des vitres et en matraquant des flics. Tout ce que cela rapportera c’est de nous mener collectivement à la troisième guerre mondiale, comme lors des affrontements précédents, communistes contre fascistes dans les années trente, qui préparèrent la Seconde Guerre mondiale. La chair à canon est toute trouvée, ce seront les manifestants des dernières rangées.

Les militants authentiquement anticapitalistes doivent reprendre confiance dans la classe prolétarienne, l’entendre et se mettre à son service – pas au service de Mélenchon – du PCF, du NPA, des anarchistes, des marxistes-léninistes, des maoïstes, des trotskystes, des Blacks Blocs et autres groupuscules de petits-bourgeois enragés, et comprendre que ce n’est que le jour où des dizaines de millions d’ouvriers cesseront la production et « paupériseront » le grand capital transnational que le capitalisme sera durement frappé et à la fin terrasser.

Alors s’il en est qui souhaite casser des mercenaires de riches, aller renforcer les lignes de piquetage des travailleurs grévistes et si des briseurs de grève s’amènent alors casser du casseur de grèves.

L’article est disponible sur le webmagazine :

http://www.les7duquebec.com/7-au-fr…


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4 Messages de forum

  • Salut Robert,

    Je ne suis pas du tout d’accord.

    Tout d’abord mai 68 n’est pas un affaire d’étudiants. Sur les barricades du 10 au 11 mai 1968, qui ont tout provoqué, il y avait surtout de banlieusards, c’est-à-dire des prolos et des fils de prolos. En mai 68, il y a eu jusqu’à 56 % de grévistes ! soit bien plus qu’en 1936 ! mai 68 est une révolte prolétarienne.

    Ensuite, le Black Bloc est peut-être composé en partie de petits-bougeois, mais aussi et essentiellement de banlieusards. (Et ils sont d’extrême extrême gauche, aussi les comparer aux nazis, c’est n’importe quoi !)

    Tu dis que tout ça va nous mener à la guerre mondiale, comme pendant la deuxième guerre mondiale. Mais, je dis que la deuxième guerre mondiale, en Europe, n’était rien d’autres que la lutte de classe poussée à son sommet :

    http://mai68.org/spip/spip.php?arti…

    Ensuite, tu dis que les prolétaires vont se réveiller et qu’ils seront des dizaines de millions à stopper la production des marchandises ; moi, je dis que les prolétaires vont être remplacés par des machines parce que les machines sont moins chères, plus efficaces et ne font pas grève.

    Et je pose la question : avec qui fera-t-on la révolution ?

    Amitié,
    do
    http://mai68.org/spip2

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  • LE BLACK BLOC ET LA PETITE-BOURGEOISIE RADICALISÉE 11 mai 2018 16:46, par Marc ARAKIOUZO

    Il me parait douteux de classer des chômeurs ou des RSA dans le lumpen prolétariat ou de classer les enseignants - soignants - travailleurs sociaux - animateurs et étudiants dans la "petite bourgeoisie" alors que ces statuts et professions ne peuvent fonctionner normalement que dans un cadre démocratique - progressiste - humaniste . Les revendications immédiates de ces EMPLOYES sont peut être réformistes et leurs opinions sont peut être keynésiennes - écolos - libertariennes , mais on ne doit pas juger les acteurs sociaux à partir de leurs discours . Ils claschent contre l’ordre établi AVANT le prolétariat parce que les pressions qu’ils subissent heurtent immédiatement les éthiques qu’ils défendent et les compétences qu’ils possèdent . Réduire le prolétariat aux usines est une grosse erreur théorique car le "petit peuple" des villes ne possède rien d’autre que sa force de travail , comme les ouvriers …
    Les révolutions commencent toujours par des phases confuses et ne peuvent triompher que si des fractions dominées de la classe dominante se rallient … Alors il ne faut en aucun cas mépriser les rebellions de certains cadres, médecins, chercheurs, avocats, journalistes …
    ET SURTOUT / faire une différence entre les classes sociales statistiquement définies ( CSP de l’INSEE ) et les classes sociales réellement mobilisées / Dans nos sociétés l’alliance entre prolétaires et paysans pauvres n’est plus stratégiquement pertinente pour des raisons démographiques et sociologiques , alors le "prolétariat" et le vrai parti communiste doivent repenser la subversion du capitalisme avec des données actuelles pertinentes…
    J’en profite pour affirmer que l’écologisation des opposants est une grosse connerie , mais c’est un vaste sujet !

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  • LE BLACK BLOC ET LA PETITE-BOURGEOISIE RADICALISÉE 11 mai 2018 23:47, par Jean Cendent

    Si un individu gagne le pactole à la loterie et qu’il quitte son emploi salarié pour œuvrer dans une autre activité comme usurier ou commettant dans une société alors il gravit un échelon social et adhère à la classe bourgeoise non pas parce qu’il est soudainement riche, mais parce qu’il pratique une nouvelle profession.

    Oui mais sans le pactole pas de nouvelle profession, pas d’élévation sociale pour adhérer à la classe bourgeoise donc c’est bien le fric qui fait le moine.

    Sans leur fric, les riches, les bourgeois, les dominants ils deviennent quoi sans relations, sans pistons, à poil, nus et seuls. Sans l’argent pour payer leurs flics, leurs militaires, leurs milices, leurs indics, leurs médias, leurs collabos, leurs politiciens, leurs bureaucraties, leurs technocraties, leurs hiérarchies tyranniques, népotiques, etc.

    Le fric c’est leur sang, le sang du capitalisme.
    Nus et paralysés de se retrouver seuls, sans l’essence de leur structure , ils sont qui, ils font quoi…
    ______________________________________________________________________­

    La grande bourgeoise, la bourgeoise, la moyenne bourgeoise, la petite bourgeoise, la très petite bourgeoisie, la minuscule bourgeoisie, la sous bourgeoise ? Etc.

    Bref, tout le monde serait donc une sorte de bourgeois, des SDF aux patrons, du flic à l’infirmière .

    La complainte des subdivisons ou sous-divisions des dominants donne comme effet de nous faire croire ou penser que nous sommes tous des dominants plus ou moins importants ( tous coupables / personne n’est innocent comme dit l’autre ) alors que nous sommes dans notre multitude des dominés assignés par les dominants à être sans importance, obéir et la boucler ( c’est pour ça que je vie ? c’est pour ça que je suis né ? )

    Cela me rappel Tonton 1er en Mai 81 et ce qui a suivi, les ouvriers, les ouvrières, le prolétariat et bien, tout a disparu… ? La France entière est devenue la classe moyenne.
    De la magie ? Non du vocabulaire mais cela à fonctionné et il en reste des séquelles encore de nos jours.

    Un manœuvre, ouvrier, prolétaire, précaire, chômeur.

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  • LE BLACK BLOC ET LA PETITE-BOURGEOISIE RADICALISÉE 14 mai 2018 19:27, par Luniterre

    Bonjour à tous les intervenants du débat « Black Bloc »…

    Je ne m’en suis pas encore mêlé, parce qu’il me semble qu’il y a d’autres sujets autrement brûlants et fondamentaux de par le monde… Néanmoins quelques questions à ce propos le dépassent lui-même et sont de toutes les époques de luttes…

    __légalité

    __légitimité

    __manipulations

    __contenu de classe

    Il est évident que la lutte contre l’ordre social bourgeois est amenée à « déborder », et de plus en plus largement, à mesure que la lutte se développe, le cadre de la « légalité » actuelle, et même, évidemment et finalement, tout à fait, sans quoi il ne peut y avoir construction d’un autre ordre social, par définition, le nouveau remplaçant totalement l’ancien, à terme.

    Mais tout aussi évidemment, ce n’est pas un processus linéaire, mais un processus dialectique, donc complexe, où les phases de luttes différentes s’entremêlent encore longtemps avant qu’une légalité socialiste prolétarienne s’impose durablement.

    Les « Black Blocs » se présentent donc comme un moyen « ouvert à tous » de franchir ce cadre…

    En quoi ce franchissement est-il utile au mouvement prolétarien ? Quelle perspective politique ouvre-t-il réellement ?

    Le « Black Bloc » fait parler des manifestations sociales, qui, autrement, seraient passées sous silence par les médias… C’est à la fois un argument des « pour », évident au premier degré, et des « contre », car il donne des mouvements sociaux une image négative de violence gratuite, de dégradation et de pillage. C’est à dire une image dissuasive, faite pour isoler la modeste « avant-garde des luttes sociales » qui reste mobilisée, de manif en manif, du reste des « mécontents silencieux », qui, las des « grèves par procurations », pourraient eux-mêmes se mobiliser sur le terrain.

    Évidemment, c’est cette image qui est véhiculée par les médias et cela semble donc au moins une raison d’être et de durer des « Black Blocs », avec toutes les suspicions de complicités et de manipulations policières et politiques qui vont avec…

    Le fait est que cela recoupe une bonne partie des témoignages sur le sujet. On ne peut donc balayer d’un revers ces assertions.

    Pour autant, le « Black Bloc » tend à être reconnu « sociologiquement » comme un réceptacle de diverses révoltes et frustrations sociales engendrées par la crise. Une révolte dont il serait en quelque sorte la « quintessence », le « mouvement » lui-même, selon certains… Autrement dit, il aurait vocation à incarner la légitimité des luttes sociales et à se substituer aux autres formes actuellement considérées comme « représentatives », syndicats et autres collectifs, front social, etc…

    Le fait de sa présence, le 1er Mai, relativement impressionnante sinon réellement « massive », et soulignée par les médias, serait l’indice de son émergence, et voire même, de son avenir en tant que tel.

    Le fait qu’avec le développement de la crise son recrutement soit de plus en plus assuré, cela contient également une logique facilement vérifiable mais n’en altère pas l’orientation politique, actuellement.

    Le problème est que par définition cette orientation politique reste indéfinie en tant que projet d’alternative, au delà d’une révolte à l’instant T de la manif, et dont l’aspect pillage semble être la seule atteinte, faussement symbolique, au capital. En effet, au delà de son insignifiance dans le rapport de force économique, elle ne donne encore qu’une image du « chacun pour soi » qui n’est qu’un prolongement de l’idéologie au pouvoir, et donc, finalement, davantage une justification et un renforcement, dans l’esprit du « spectateur », peu enclin à crever l’écran, même pour ce ridicule profit.

    Le fait est, également, que dans un mouvement social arc-bouté à la « défense » d’ « acquis sociaux » inéluctablement condamnés par la crise, dans le cadre du système, ce « Black Bloc » prenant de l’extension devient effectivement un substitut potentiel à l’échec inévitable. C’est en ce sens qu’il est réellement le « mouvement » tel que déjà durablement engagé dans une impasse.

    Cela ne l’empêche pas d’arborer les couleurs d’un apparent « radicalisme » évocateur de Mai 68, et de clamer haut et fort un prétendu « anticapitalisme » qui le verrait sauter le mur au fond de l’impasse.

    En bonne entente avec le préfet de police, c’est impossible, tout à fait incompatible, penserez vous… Alors qu’un « anticapitalisme » dépourvu de toute perspective politique réelle n’est en rien un danger pour le système, voire même, un exutoire commode pour recycler les jeunes énergies révoltées, comme on le voit notamment au « Rojava », zone syrienne occupée par l’impérialisme US et Français…

    « Black Bloc » et « Rojava » ne sont, pour le moins, pas incompatibles, et les passerelles entre ces deux « univers » bien entretenues par les puissances occupantes.

    La « sincérité » de tous ces éléments manipulés n’est pourtant pas nécessairement en cause, même en ce qui concerne quelques éléments qui jouent consciemment « double jeu » en se croyant engagés dans un « compromis tactique » qui ferait d’eux des « stratèges révolutionnaires » très supposément avisés…

    Des petits « Gapone » des grands boulevards, en quelque sorte… A cette différence près que le Pope Gapone a réellement emmené la foule prolétarienne au fond de l’impasse du « Dimanche Rouge » le 9 Janvier 1905, où plus de 1000 sont tombés sous les balles, les coups des sabres cosaques et les sabots des chevaux… Leur mort tragique a définitivement délégitimé le pouvoir tsariste et la nouvelle bourgeoisie "moderniste" (Stolypine) qui le soutenait encore.

    A cette différence près, également, que l’indic manipulateur Gapone avait donc réellement fini par incarner la légitimité des revendication populaires et prolétariennes de son temps, (*) au point de ne plus savoir lui-même, réellement, semble-t-il, où était sa vraie place.

    (Pour mémoire il est mort pendu en 1906 comme "traître à la cause", et par un autre indic « socialiste-révolutionnaire », celui-là…)

    Le Pope Gapone a donc, malgré sa courte vie, changé le cours de l’histoire, que cela fut ou non son souhait !

    Lénine lui-même, pourtant conscient de la manipulation déjà plus que probable, a invité les vrais révolutionnaires à investir et pousser ce mouvement effectivement jusqu’à sa limite.

    Au delà des manipulations, dont il sont nécessairement l’objet, la vraie question des « Blacks Blocs » est donc de savoir s’ils incarnent ou non une légitimité qui déborderait réellement la légalité du système non seulement sur le plan formel juridique mais aussi et surtout, en terme d’alternative politique perceptible par les masses populaires et prolétariennes, et là, la réponse est évidemment non… !

    Enfin, la question de la composition sociologique de cette mouvance est importante, mais pas déterminante non plus, contrairement à ce qu’affirme, une fois de plus, l’inénarrable M Bibeau, dans un de ces globi-boulgas dont il a le secret, mais qui n’est donc pas non plus une spécialité canadienne, tant s’en faut… ! Selon lui, cette composition serait entièrement « petite-bourgeoise », allant du lumpen au « fils à papa » des beaux quartiers, en rupture de ban, à l’instar des « proto-bobos », pseudos « dirigeants » de Mai 68…

    Une définition précise de « classe moyenne » est effectivement incertaine, comme il le souligne justement, mais sa définition extensive de « petite-bourgeoisie » ne l’est pas moins, et même fausse, en ce qu’elle y inclut des couches sociales de travailleurs qui, s’ils ne sont pas directement dans le secteur « productif » mais bien dans des fonctions économiques et sociales prolétariennes, sont néanmoins tout à fait à inclure dans le prolétariat, au sens basique du terme.

    Cela soulève la question du rôle de certains secteurs des activités de services proches du secteur productif, même si indirectement, et de plus en plus proches et liés, avec les technologies actuelles. Quelle serait la « valeur » d’un téléphone, par exemple, sans le service, qui, le plus souvent, est vendu directement avec ? Mais on aborde là une autre question, celle de la limite entre les pratiques opérationnelles de l’économie classique et néo-classique, zone restée quasiment « terra incognita » de la pensée marxiste, que l’on ne peut donc qualifier de « contemporaine », de ce fait… Un autre et vaste sujet !

    Luniterre

    (* http://www.gauchemip.org/spip.php?article15133 )

    A propos de légitimité révolutionnaire, voire aussi :

    https://tribunemlreypa.wordpress.com/2018/04/02/palestine-jour-de-la-terre-une-lecon-de-resistance-donnee-au-monde/

    https://tribunemlreypa.wordpress.com/2018/04/29/un-demi-siecle-apres-mai-68-en-finir-avec-la-gauche-kollaborationniste/

    ****************************************

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