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Paysans palestiniens : entre colonialisme israélien et néolibéralisme de l’Autorité palestinienne.

jeudi 17 janvier 2019, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 17 janvier 2019).

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17 janvier 2019

Assawra

Les agriculteurs représentent la résistance mais ils sont écrasés par le colonialisme israélien et le néolibéralisme de l’Autorité palestinienne.

L’agriculture est généralement perçue comme l’épine dorsale de la société et de l’économie palestiniennes, les agriculteurs étant considérés comme le dernier bastion de la résistance.

Travailler la terre est vu comme une illustration de la capacité à résister, alors que les agriculteurs continuent à préserver et à exploiter la terre, à devenir autonomes et à défier la dépendance forcée et l’immense déséquilibre économique. En substance, l’agriculture est un acte politique qui vise à défier l’oppression et à gagner la liberté.

En réalité, toutefois, cette colonne vertébrale a été gravement affaiblie, sinon paralysée, par la poursuite de l’occupation israélienne et par la politique néfaste de l’Autorité palestinienne. Les fermiers palestiniens ont été enchaînés à la fois par le colonialisme israélien et le néolibéralisme palestinien.

Voler des terres

En tant que puissance coloniale, Israël poursuit sa politique de confiscation de terres et d’annexion territoriale en développant les colonies de peuplement, en encourageant la violence des colons, en volant les terres et les ressources naturelles, en imposant des politiques de siège et de blocus et en contrôlant les exportations et les importations.

Chacun de ces éléments participe d’un système de contrôle visant à coloniser les Palestiniens.

Au cours des dernières décennies, les autorités israéliennes ont déraciné plus de 2,5 millions d’arbres fruitiers et 800 000 oliviers palestiniens, ce qui équivaut à 33 fois [tous les arbres] de Central Park à New York.

Dans le même temps, les politiques de l’Autorité palestinienne et le modèle de « développement » impulsé par les donateurs ont contribué à la détérioration du secteur agricole, avec moins de 1% du budget de l’Autorité palestinienne alloué au secteur sous occupation. Cette terrible négligence a contribué à un processus généralisé de dé-développement qui a progressivement privé l’agriculture de son potentiel de transformation, tout en renforçant la domination et le contrôle territoriaux d’Israël.

Tandis que les implications de ce processus délibérément engagé s’étendent au-delà de l’agriculture, ce secteur révèle clairement le problème. En adoptant comme principe de base la religion des « riches individus dans une nation pauvre », l’Autorité palestinienne a inconsciemment fait écho aux pratiques de l’occupant israélien.

Sombres perspectives

D’autres indicateurs illustrent les sombres perspectives du secteur. L’agriculture contribue à peine au PIB palestinien, tandis que la main-d’œuvre agricole a considérablement diminué en pourcentage de la main-d’œuvre totale. Le rendement moyen par jour (par 1000 mètres carrés) représente la moitié de celui de la Jordanie et seulement 43% de celui d’Israël, bien que ces pays partagent un environnement naturel presque identique. Selon les Nations Unies, l’eau utilisée par les Palestiniens pour l’agriculture est estimée à un dixième de celle utilisée par Israël.

Seuls un ménage sur quatre en Cisjordanie et à Gaza est en situation de sécurité alimentaire, alors que plus de 70% des communautés situées entièrement ou principalement dans la zone C de la Cisjordanie occupée – sous contrôle israélien intégral – ne sont pas raccordées au réseau de distribution d’eau. Environ 95% de la principale ressource en eau de Gaza est impropre à la consommation sans traitement préalable.

La Banque mondiale a estimé la production supplémentaire potentielle directe d’un certain nombre de secteurs, y compris l’agriculture, à environ 2,2 milliards de dollars, soit 23% du PIB palestinien de 2011. Dans l’intervalle, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement a estimé que le secteur agricole palestinien fonctionnait actuellement à peine au quart de son potentiel.

Cependant, du point de vue d’Israël, ces dommages se traduisent par des avantages évidents pour son économie et ses colons. Pour le gouvernement israélien, l’agriculture est une arme de guerre qui peut être utilisée pour nier les droits des Palestiniens. Une grande partie des produits agricoles cultivés par les colons israéliens dans les territoires palestiniens et syriens occupés sont exportés vers l’Europe.

Stratégie coloniale

Les carences fondamentales qui affectent le secteur agricole palestinien sont dues à la colonisation israélienne de la Palestine qui dure depuis plusieurs décennies. Ce processus de colonisation repose sur la conquête de la terre palestinienne, visant à restreindre et à limiter le développement palestinien indépendant, à la fois sur les plans politique et économique. Le développement n’est pas un résultat malheureux ou fortuit, mais une stratégie coloniale délibérée et déterminée.

Loin de défier ou de contester le pouvoir colonial, l’Autorité palestinienne a au contraire souvent servi de relais. Pris au piège entre le colonialisme israélien et le néolibéralisme palestinien, le secteur agricole palestinien est dans une double et pernicieuse liaison qui entrave son développement actuel et futur.

Continuer dans ces circonstances, c’est faire acte de résistance : cultiver la Palestine, c’est cultiver pour la liberté.

(Alaa Tartir - 9 janvier 2019 – Middle East Eye – Traduction : Chronique de Palestine)

Alaa Tartir est directeur de programme d’al-Shabaka : The Palestinian Policy Network, chercheur associé au Centre sur les conflits, le développement et la consolidation de la paix, et chercheur invité au département d’anthropologie et de sociologie de l’Institut de hautes études en études internationales et du développement (IHEID), à Genève, en Suisse.

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