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Catalogne, libre ou à l’orée de l’enfer ?

lundi 23 octobre 2017, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 23 octobre 2017).

Catalogne, libre ou à l’orée de l’enfer ?

dimanche 8 octobre 2017, par Robert Paris

La Catalogne a voté pour l’indépendance et est presque prête à la proclamer. La violence avec laquelle l’Etat espagnol a fait donner sa police contre les indépendantistes et les fonctionnaires catalans qui organisaient le vote n’a fait que radicaliser la situation. Tout est fait pour que la guerre civile se mette en place brutalement, que l’économie catalane s’écroule en conséquence et que la grande bourgeoisie, aussi bien espagnole qu’européenne, fasse payer le plus cher possible à la bourgeoisie catalane, si celle-ci va au-delà… Les couteaux sont tirés et le sang n’est pas loin… L’Etat espagnol frappe : répression, arrestations, condamnations.

Qu’est-ce qui amène la bourgeoisie, catalane comme espagnole ou européenne, à radicaliser ainsi violemment la situation ?

La revendication autonomiste est très vieille en Catalogne mais ce n’est pas un hasard si c’est dans la situation mondiale actuelle que l’affrontement explose.

Ce n’est certainement pas pour des raisons économiques que cela se produit. Si la région catalane est la plus active et riche du pays, elle ne le sera pas si elle est indépendante. L’Espagne, elle, a tout à perdre à l’indépendance, économiquement comme politiquement.

Alors pourquoi la métropole ne choisit pas ce qu’elle avait fait précédemment : négocier doucement une autonomie améliorée ? Pourquoi choisit-elle directement l’affrontement le plus violent possible ?

La raison est à chercher dans la montée, en Espagne, et particulièrement en Catalogne, des mouvements sociaux, des luttes ouvrières, d’une radicalisation de la population. Ce sont les risques de développement d’une lutte de classe radicale opposant les milieux populaires, avec les travailleurs en tête, et la classe possédante qui ont amené les classes possédantes à pousser à l’affrontement avec la Catalogne. La question nationale ne prend un tour violent que pour détourner de la question sociale.

Le fossé entre les classes possédantes, ultra minoritaires et plus riches que jamais, et les travailleurs, plus frappés que depuis longtemps par la crise et les politiques d’austérité, a atteint un niveau de dangerosité maximum. Et c’est à cette situation de crise sociale qu’un affrontement avec la Catalogne répond : il crée une situation nouvelle dans laquelle la classe possédante peut appeler la population espagnole, y compris les travailleurs, à se solidariser avec elle et contraint la Catalogne ouvrière à se solidariser avec la bourgeoisie catalane. Ce sont les calculs que pouvait faire les bourgeoisies et c’est ce qui s’est produit en fait.

Il y a une autre raison de penser que les bourgeoisies locales, espagnole comme catalane, aient pu faire un tel calcul, pour détourner la colère sociale vers une colère nationale : c’est le fait que toutes les bourgeoisies du monde aillent, avec des particularités locales diverses, exactement dans le même sens. On retrouve cette politique dans le choix du Brexit entre la bourgeoisie anglaise et européenne, dans la montée du séparatisme écossais avec la Grande-Bretagne, dans le choix de plusieurs pays de l’Est, à commencer par la Pologne ou la Hongrie, à s’éloigner de l’Europe.

On retrouve encore cette politique de montée des oppositions nationalistes en Europe dans l’augmentation des votes d’extrême droite, qui expriment à la fois la haine contre les migrants, les accusations envers l’institution européenne, les sentiments sécuritaires face aux attentats terroristes, les peurs liées à l’accroissement incessant des guerres et des guerres civiles dans le monde et la hausse des discours et des actes bellicistes des Etats et des bourgeoisies.

La classe possédante mondiale, qui apparaît de plus en plus comme une infime minorité de profiteurs incapables d’offrir un quelconque avenir aux milieux populaires et aux jeunes, ne voit pas d’autre solution que de détourner la colère sociale contre elle vers une révolte nationale contre les peuples voisins. C’est ce qu’a fait la bourgeoisie anglaise. C’est aussi ce que fait Trump, que ce soit contre les migrants mexicains et latino-américains, contre les musulmans, contre la Corée du Nord, le Venezuela ou l’Iran : il dresse les milieux populaires contre tous les peuples. Tout est bon pour éviter que les travailleurs prennent la tête d’une situation de crise sociale pour la tourner contre les classes possédantes !

Ces choix des gouvernants peuvent étonner tant ils sont destructeurs au plan économique ou politique. Les classes possédantes se lancent ainsi dans des affrontements radicaux qui nuisent au fonctionnement économique et aux affaires, ce qui ne peut qu’étonner. Le protectionnisme de Trump, sa fermeture des frontières, sa hausse des tensions internationales, sont aussi négatifs économiquement que politiquement. La seule interprétation d’une telle politique ne réside nullement dans la bêtise ou la folie de son auteur. Elle provient des risques révolutionnaires que ne peut manquer de poser à terme la situation critique du capitalisme mondial.

Ce sont les pays musulmans qui ont été les premiers à expérimenter où mène une telle politique des classes possédantes. Des pays entiers ont été détruits par cette fuite en avant des bourgeoisies nationales vers l’affrontement violent sur des bases nationalistes cherchant à détourner la montée d’un affrontement social, bien plus risqué pour les classes possédantes.

Cela a été le cas, sous des formes diverses, en Egypte, en Turquie, en Libye, en Syrie ou en Irak. Dans tous ces pays, la montée sociale, la lutte des classes a grimpé avant que les classes possédantes fassent le choix de détourner la situation vers des affrontements entre peuples, vers des guerres et des guerres civiles.

En Allemagne, par exemple, la montée de l’extrême droite, qui exprime le détournement du mécontentement social vers le nationalisme exacerbé, a été produite par une politique volontariste des classes possédantes consistant à pousser les masses populaires à accuser les migrants, les étrangers, les musulmans et l’Europe.

En même temps, les bourgeoisies du monde entier poussent les peuples à s’accoutumer aux interventions armées, aux bombardements des populations civiles, à l’idée d’une nouvelle guerre mondiale, en soulevant même les risques d’un conflit thermonucléaire !

Ce n’est pas seulement Trump qui provoque les peuples, les Etats, les races, les travailleurs, les femmes, les manifestants, ce sont tous les gouvernants ! Et la bourgeoisie espagnole, en faisant donner sa police, en insultant sciemment les catalans, en les réprimant violemment, n’a pas agi différemment. Elle jette de l’huile sur le feu d’un conflit national pour étouffer et détourner la montée d’un conflit social qui aurait des conséquences bien plus risquées pour les classes possédantes du monde. Cela explique aussi le ton très dur des gouvernants européens contre les Catalans, comme également leur ton contre les Anglais. Rien n’est fait pour calmer les conflits nationaux, mais, au contraire, tout est fait pour les monter en épingle, les rendre plus radicaux, plus violents. Il n’y a aucun intérêt économique à agir ainsi : les affaires craignent la violence et les ruptures.

Il y a seulement un intérêt social à agir ainsi : l’intérêt de classes possédantes qui se savent en bout de course, qui n’attendent plus que le prochain krach financier, et qui préparent à leur manière l’avenir : un enfer de feu et de sang pour les peuples, en Catalogne, en Espagne, dans toute l’Europe comme dans le reste du monde !

Si la perspective de montée d’affrontements nationalistes, fascistes, guerriers, xénophobes, séparatistes, bellicistes monte partout, comme pare-feu aux risques de révolution sociale dans un monde capitaliste dont le moteur (l’investissement productif) est en panne, cela signifie aussi que la seule réponse à la situation pour les travailleurs et les milieux populaires est justement de faire monter la lutte des classes révolutionnaire, la seule capable d’unir les prolétaires et les peuples opprimés du monde !

En 1936, la Catalogne a lancé une lutte de classes révolutionnaire. Aujourd’hui, elle est tout à fait capable d’en faire autant au lieu de se lancer dans un bain de sang entre nationalismes !

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