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Territoires occupés. «  Les Palestiniens veulent la chute du régime  »

lundi 4 octobre 2021, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 4 octobre 2021).

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Lundi 4 octobre 2021

Assawra - الثورة (La Révolution)

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Ramallah, le 2 août. Les manifestants brandissent le portrait de Nizar Banat, décédé à la suite d’une violente arrestation par la police, chez lui, à la fin du mois de juin. Âgé de 32 ans, il était inscrit sur une liste indépendante. Abbas Momani/AFP

La répression et l’annulation des élections par Mahmoud Abbas ont provoqué la colère des jeunes. Ils dénoncent une Autorité incapable de leur offrir un avenir libre.

C’était le 24 juin, en pleine nuit. Nizar Banat est en train de dormir dans la maison de son cousin, à Hebron, dans le sud de la Cisjordanie. Selon les accords israélo-palestiniens, une partie de la ville se trouve sous contrôle israélien. Quatorze policiers palestiniens défoncent la porte et se mettent à le battre avec des barres de fer avant de l’emmener. Il décédera quelques heures plus tard, déchaînant la colère des Palestiniens dans l’ensemble de la Cisjordanie. De Naplouse à Hébron, en passant par Ramallah et Tulkarem, les manifestations enflent. Seul le drapeau de la Palestine est brandi avec le portrait de Banat. Et un slogan crié à pleins poumons par des milliers de jeunes  : «  Le peuple veut la chute du régime  !  »

Maillon de la politique d’Israël

Le régime, c’est celui de l’Autorité palestinienne (AP), dominée par Mahmoud Abbas, tout à la fois président de l’AP, du parti Fatah et de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Nizar Banat était l’un des critiques les plus médiatisés de cette Autorité palestinienne. Sur les réseaux sociaux, suivi par des dizaines de milliers de personnes, pourtant membres du Fatah, il dénonçait régulièrement les caciques du pouvoir, la corruption endémique et surtout la décision de Mahmoud Abbas, au mois d’avril, d’annuler les élections présidentielle, législatives et pour le Conseil national palestinien (le parlement de l’OLP) prévues en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est. La dernière fois que les Palestiniens ont été appelés aux urnes, c’était en 2005. Le mandat d’Abbas est arrivé à expiration en 2009. Le président les a pourtant annulées sous prétexte du refus de l’occupant israélien d’autoriser le scrutin à Jérusalem.

Une décision qui masque très mal les craintes des dirigeants du Fatah de perdre les élections. D’autant plus que les Palestiniens s’étaient inscrits en masse pour pouvoir voter et que des dizaines de listes indépendantes, sur lesquelles se trouvaient de nombreux jeunes – dont Nizar Banat (32 ans) – avaient émergé. Signe d’un rejet des partis traditionnels qui apparaissent comme inutiles pour mettre fin à l’occupation et à la colonisation israélienne, en finir avec la corruption. Le rejet de l’Autorité palestinienne est d’autant plus fort que la répression de toutes les manifestations, y compris celles dirigées contre les colons, la fait apparaître comme l’un des maillons de la politique israélienne. La fameuse «  coopération sécuritaire  » est l’un des rares volets des accords d’Oslo mis en application. Mahmoud Abbas a bien menacé à plusieurs reprises, y compris à la tribune de l’ONU, d’y mettre fin, il n’a jamais vraiment joint le geste à la parole, sauf pendant six mois. Comme le fait remarquer Yara Hawari, chercheuse à Al-Shabaka, le réseau politique palestinien  : «  L’AP facilite aussi souvent l’entrée de l’armée israélienne dans les zones sous son contrôle. Ce fut le cas en 2017, lorsqu’une unité des forces spéciales de l’armée israélienne a perquisitionné le domicile du militant Basel Al Araj et l’a tué. Al Araj n’était pas seulement un activiste qui luttait contre le régime israélien, il était aussi un critique féroce de l’Autorité palestinienne.  »

L’Autorité palestinienne, entité politico-­administrative, a peu à peu remplacé l’OLP. L’organisation historique du Mouvement national palestinien s’est ainsi vidée de sa substance, laissant notamment les camps de réfugiés palestiniens en déshérence et, avec eux, la question du droit au retour. Une AP qui ne règne que sur 40 % de la Cisjordanie (selon la division du territoire en trois zones, la plus importante étant la C, aux mains d’Israël, les Palestiniens ne contrôlant à 100 % que la A), alors que la bande de Gaza est dirigée par le Hamas.

«  Besoin d’un renouveau  »

Le Fatah de Mahmoud Abbas, empêtré dans ses querelles de pouvoir et les multiples tendances qui le traversent, avec la bénédiction de différents pays arabes, est incapable de la moindre initiative politique. Ce dont profitent les islamistes – eux aussi dépendants de parrains du Golfe, particulièrement le Qatar, et de l’Iran –, se présentant comme la seule résistance capable d’affronter Israël. Conséquence, le fait religieux imprègne de plus en plus la société palestinienne, y compris dans ses rouages politiques. L’idée d’un État de Palestine laïc et démocratique n’est plus guère mentionnée que par les partis de gauche, très affaiblis. Cette confrontation Fatah/Hamas se développe au détriment du peuple palestinien, pour le plus grand bonheur d’Israël. Ce dernier se joue des contradictions des deux organisations, notamment avec la normalisation de ses relations avec les Émirats arabes unis (EAU), Bahreïn, le Maroc et le Soudan.

«  Le système politique palestinien a besoin d’un renouveau, besoin d’être revigoré en incluant des jeunes, des femmes et des professionnels qualifiés. Il nous incombe à tous d’assumer nos responsabilités individuelles et de nous acquitter de nos fonctions avec honnêteté et intégrité, y compris en facilitant ce changement nécessaire  », a écrit Hanan Ashrawi, l’une des rares femmes membre du comité exécutif de l’OLP, dans sa lettre de démission envoyée à Mahmoud Abbas au mois de décembre. Une démission immédiatement acceptée par un président de 85 ans, totalement discrédité et qui préfère la répression politique à l’affrontement avec l’occupant. Un récent sondage réalisé par le Palestinian Center for Policy and Survey Research montre que 78 % des Palestiniens souhaitent la démission d’Abbas, donné perdant à la présidentielle face au candidat du Hamas. Marwan Barghouti, le leader emprisonné, membre du Fatah dont il représente la figure révolutionnaire et non corrompue, est, lui, donné gagnant dans tous les cas de figure.

Pierre Barbancey
L’Humanité du 04 octobre 2021

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