Israël attaque l’Iran
Par Pascal Lottaz, un universitaire suisse basé au Japon, qui travaille à l’université de Kyoto.
Dans une attaque militaire sans précédent et non provoquée, Israël tue plusieurs hauts responsables de l’armée iranienne, cible les installations nucléaires du pays et commet un nouveau crime flagrant.
Du jour au lendemain Tel-Aviv a ajouté un nouveau crime d’agression à sa liste presque sans fin des pires crimes internationaux. Cette fois, il a attaqué l’Iran dans le cadre d’une campagne de bombardements massifs, que M. Netanyahou a déclaré vouloir poursuivre jusqu’à ce qu’il estime que ce qu’il appelle la « menace » des armes nucléaires inexistantes de l’Iran s’est estompée.
Il s’agit, bien entendu, d’une absurdité totale qui rappelle l’excuse invoquée par les États-Unis en 2003 pour commettre le même crime contre l’Irak, sous prétexte que les armes de destruction massive de Saddam constituaient une « menace imminente » pour les États-Unis et le monde entier.
Netanyahou évoque exactement le même fantôme – en utilisant même la terminologie d’une frappe « préventive » – mais avec encore moins de raison.
Non seulement c’est une vérité vérifiée et acceptée, même par Israël et les États-Unis, que les Iraniens n’ont actuellement pas d’armes nucléaires, mais les Américains étaient en négociations actives avec eux et devaient tenir une autre réunion dimanche, lorsqu’Israël a décidé de commettre cet acte de guerre flagrant.
Le prétexte
Le choix des cibles montre clairement que la question nucléaire n’est qu’une piètre excuse pour déclencher une guerre totale avec l’Iran (et finalement y engager les États-Unis). Israël ne s’est pas seulement attaqué aux installations nucléaires et au système de missiles des Iraniens, mais a également visé des généraux de haut rang, tuant le chef d’état-major des forces armées iraniennes, Mohammad Bagheri, et le général Hossein Salami, commandant en chef des Gardiens de la révolution islamique (GRI). Outre les victimes civiles, ces frappes sur la population endormie de Théran, qui ont entraîné l’assassinat ciblé des dirigeants, s’inscrivent parfaitement dans la stratégie militaire d’Israël, qui consiste à mener des frappes de « décapitation » contre les nations qu’ils jugent nécessaire d’éradiquer. Ils l’ont fait avec le Hamas à Gaza, avec le Hezbollah au Liban, et maintenant ils s’en prennent aux dirigeants de l’Iran et, ce faisant, terrorisent l’ensemble de la population civile du pays.
M. Netanyahou a même eu l’audace de déclarer dans son communiqué de presse qu’Israël ne visait pas les Iraniens ordinaires mais uniquement la « dictature » et qu’Israël ne voulait rien d’autre que la paix et le bonheur dans son voisinage.
On ne peut vraiment pas faire plus Hitler qu’avec ce cadrage déséquilibré de ce qui est clairement et totalement un crime en vertu de tous les statuts de l’ONU. Il s’agit d’une violation directe de l’interdiction de l’usage de la force prévue par la Charte des Nations unies, et c’est tout à fait inexcusable. Bien entendu, aucun pays européen n’osera s’y opposer et se contentera de déclarer qu’il exhorte « toutes les parties » à se retirer et à « éviter une guerre ». Je suis certain que nous entendrons cela de la part de toutes les capitales de l’UE, prétendant que la guerre n’a pas déjà été déclenchée par Tel-Aviv.
La vraie raison : Perdre le contrôle de la narration
La véritable raison pour laquelle Israël attaque l’Iran en ce moment est qu’il est en train de perdre la guerre de propagande. L’état d’esprit a changé de manière décisive, en particulier en Europe, où les grandes manifestations pro-palestiniennes sont désormais quotidiennes.
L’énorme succès de la flottille de la liberté en termes de relations publiques, ainsi que le changement dans la couverture médiatique du génocide israélien à Gaza, ont dû constituer un choc considérable pour le régime de Tel-Aviv.
Ils savent que la seule chose qui permet à leurs campagnes militaires d’extermination génocidaire est le soutien inébranlable de l’Occident collectif. Le fait que ce soutien s’érode sous leurs yeux est probablement la plus grande menace qui pèse sur le projet sioniste depuis 100 ans.
Israël est en train de perdre la carte de la victime ; plus personne ne croit à son « nous ne faisons que nous défendre ». Et il veut retrouver cette carte, désespérément. C’est pourquoi cette attaque vise à faire en sorte que l’Iran soit obligé de riposter. Et une fois que le premier Israélien aura été tué dans la contre-attaque, Tel Aviv criera à tue-tête que l’Iran est en train de commettre un nouvel holocauste et que les Juifs sont la cible d’un nouveau régime nazi (en fait, il a déjà fait ce lien dans le point de presse cité plus haut). Israël a besoin de retrouver le soutien médiatique de l’Occident ; il a également besoin d’entraîner les États-Unis (et peut-être aussi le Royaume-Uni) dans cette nouvelle guerre du Moyen-Orient avec l’Iran et d’engager autant de ressources étrangères que possible pour combattre l’ensemble de la région, en une seule fois.
Israël est désespéré et a besoin d’une guerre totale avec un récit de guerre totale du type de celui des Ukrainiens depuis trois ans. Il doit d’une manière ou d’une autre reprendre le contrôle de la narration en Occident. Les terroristes de Tel-Aviv savent parfaitement qu’une fois qu’ils auront perdu l’Europe et les États-Unis, c’en sera fini de leur État d’apartheid génocidaire.
Je ne peux que prier pour qu’au moins les Européens ne tombent pas à nouveau dans le panneau. Mais mes espoirs sont minces.
Pascal Lottaz
Source : https://arretsurinfo.ch/israel-atta…
Article original ici : https://pascallottaz.substack.com/p…