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La propagande de guerre sur l’Ukraine commence à s’épuiser

vendredi 19 août 2022, par Jean-Pierre Garnier (Date de rédaction antérieure : 19 décembre 2022).

Voilà de quoi alimenter ta réflexion.

Le CNRS publie vraiment n’importe quoi, n’importe quoi qui puisse ajouter encore à la propagande antirusse euro-atlantiste. Je me demande qui a bien pu dénicher le bouquin que tu m’a filé hier et donner son aval à sa publication en France par le CNRS.

En ficher joint, deux extraits particulièrement gratinés de cette prose. L’un est le premier paragraphe de l’intro, et le second l’avant-dernier paragraphe de la conclusion. Ci-dessous, en prime, un article parmi d’autres sur la propagande de guerre euro-atlantiste pour défendre l’Ukraine contre les agissements du vilain Poutine.

Il se trouve en plus que, lorsque je travaillais à Montpellier à la Maison de la géographie, j’y ai croisé à maintes reprises le traducteur français du livre, le géographe Denis Eckert, auquel l’auteur adresse « un remerciement particulier » à la fin de son intro. Il y a là de quoi ! En guise de prologue, Eckert a en effet pondu un « avant-propos » de son cru suintant la servilité à presque chaque ligne, comme c’est l’usage en milieu universitaire, à l’égard d’un « professeur émérite » avec lequel il s’était acoquiné dès 2O18, mais surtout un véritable morceau de bravoure littéraire anti-poutinienne.

Quelques mots auparavant, cependant, pour en éclairer la généalogie idéologique, sur le directeur et fondateur de la Maison de la géographie, le géographe Roger Brunet, qui avait été le directeur de thèse de Denis Eckert et s’était empressé de le recruter pour l’associer à ses recherches. Au bout de 14 ans de militance stalinienne au PCF, Brunet, comme nombre de renégats de l’extrême-gauche, avait rejoint les rangs de la deuxième droite rocardienne après un bref séjour comme conseiller scientifique auprès de Chevènement, ce qui avait facilité ses démarches bureaucratiques pour créer la Maison de la Géographie, une fois celui-ci promu ministre de la recherche. Celle-ci abritera un « Groupement d’intérêt public » (GIP), un dispositif créé en 1982 par le ministère de la Recherche. Brunet, qui ne doutait de rien, aura le culot de choisir de baptiser son GIP « Reclus », en référence au géographe libertaire Élisée Reclus, pour placer d’emblée le groupe sur la gauche de l’échiquier politique. En fait, c’est plutôt nettement à droite qu’il conviendrait dé le classer. Ce qui nous ramène à Denis Eckert.

Sous la houlette de Brunet, Eckert, qui n’était pas encore à l’époque où je l’ai connu directeur de recherches au CNRS, sera fortement impliqué dans la production de discours pseudo-scientifiques, accompagnés de cartes aussi mensongères que tarabiscotées — grâce aux progrès de l’informatisation —, en particulier contre le « régime russe » et ses « satellites » étatiques. Le summum avait été atteint avec la publication en 1989 — pour fêter le bicentenaire de la Révolution française ! —, d’un « Atlas mondial des libertés », en collaboration avec Médecins sans frontières (animés par ce pourri opportuniste de Bernard Kouchner) et Reporters sans frontières (association dirigée alors par l’infâme facho Robert Ménard). Le gros des sources émanait de la National Endowment for Democracy et de la Freedom House de George Soros, deux institutions soi-disant « non gouvernementales » liées au Département d’État et, de manière plus ou moins moins discrète, à la CIA.

À cet égard, cet atlas aurait mérité la palme de l’anticommunisme savant pour peu que l’on considère comme communistes les systèmes de capitalisme d’État qui en étaient la cible. Pour casser un peu l’ambiance festive de sa présentation officielle à la Maison de la Géographie, je m’étais concerté avec deux collègues féminines pour placarder sur les murs des couloirs des « dazibaos » dénonçant de manière comique la collusion du GIP-Reclus avec l’impérialisme yankee. Inutile de dire que la haine de Denis Eckert et de son patron d’alors à mon encontre ne fit que redoubler !

L’avantage avec le genre de panégyrique que nous offre Denis Eckert est qu’il dévoile involontairement au grand jour la fonction idéologique du livre qu’il encense. Ainsi, nous apprend-il que, si l’auteur, Andreas Kappeler, « est fidèle à sa conviction que toute histoire se doit être polyphonique », les « trames narratives dominantes » dont « il cherche aussi à se dégager » se limitent à celles « proposées par les historiographies impériales russe, puis soviétique ».

Rien, en revanche sur le narratif exclusif diffusé partout et non stop en Europe de l’ouest et aux États-Unis dont les gouvernements et leurs servants abreuvent la population pour expliquer la guerre en Ukraine, et que D. Eckert se garde bien de contester. Si « polyphonie » il y a, en somme, elle n’empêche donc pas le même son de cloche ukrainolâtre de retentir en sourdine ou parfois de manière moins discrète dans le bouquin de l’historien viennois.

Aussi ne faut-il pas s’étonner que, aux yeux de D. Eckert, « la question centrale » d’Andreas Kappeler » soit « l’instrumentalisation des arguments historiques par le pouvoir russe actuel ». Et d’ajouter un peu plus loin, au cas où l’on n’aurait pas compris, que l’« objectif central » de son livre est de « décrypter les arguments de légitimation “historique” invoqués par le pouvoir russe actuel pour dénier à l’Ukraine le droit à une existence autonome ». Les guillemets sont bien entendu de Eckert car il n’est pour lui comme pour tout « influenceur », fût-il bardé de diplômes, de légitimité, historique ou autre, que celle frappée du sceau euro-atlantiste.

De fait, pour relayer leur propagande les pouvoirs en place n’ont jamais manqué de gens qui à force de se positionner du côté du manche finissent par raisonner comme des manches. Ainsi en va t-il de Denis Eckert lorsqu’il déclare par exemple dans son avant-propos : « En relisant le manuscrit après le premiers bombardements russes de 2022, j’ai eu l’impression que ce texte prenait feu sous mes yeux : l’ensemble de l’argumentaire poutinien de 2014, brillamment décortiqué et contextualisé par A. Kappeler, et qui avait couvé sous la cendre au long de la “ligne de contact” du Donbass pendant huit ans, se transformait en brasier pour justifier cette fois une attaque à grande échelle, sans précédent en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale ».

En bon pompier pyromane universitaire, Eckert, qui oubliait au passage la destruction de la Yougoslavie menée par l’OTAN sans autorisation des Nations unies à la fin du siècle précédent dans le cadre de l’opération « Force alliée » ne fait que suivre l’exemple de son maître autrichien en ne disant mot des massacres et exactions en tout genre dont n’avaient cessé d’être victimes, des années durant, les populations russophones, à Odessa d’abord puis dans l’est de l’Ukraine de la part de l’armée et/ou des milices néo-nazies à partir du coup d’état de 2014, significativement dénommé Euromaïdan par Radio Free Europe. Sa masse de manœuvre n’était-elle constituée de manifestants pro-européens opposés à la décision du gouvernement ukrainien en place de ne pas signer un accord d’association avec l’Union européenne au profit d’un accord avec la Russie ?

Pour terminer en beauté son avant-propos à la fois louangeur et trompeur, Denis Eckert félicite son condisciple d’avoir « su retirer l’uniforme de l’historien sans en abandonner la posture rigoureuse, la capacité réflexive et argumentative, la solidité des connaissances, pour endosser la casquette de l’essayiste ». En réalité, c’est bien de posture qu’il s’agit, mais au sens de pose et de positionnement affichés, et la casquette endossée par les deux personnages serait plutôt celle du propagandiste, encore que le terme « livrée » serait en l’occurrence plus adapté à leur propension à obéir aux ordres sans qu’il soit même besoin de leur en donner, assez répandue dans un milieu qui se targue pourtant plus qu’un autre d’esprit critique.

Bises

Jean-Pierre

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