Le soutien à l’Ukraine vacille

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky à Ottawa, le 22 septembre 2023. — IMAGO/Sean Kilpatrick / IMAGO/ZUMA Press

Retranché au Kremlin ou dans sa datcha, Vladimir Poutine n’a certainement pas perdu une miette des débats tendus qui ont permis d’accoucher dans la douleur du nouveau budget américain. Peut-être que ses lèvres ont esquissé un rictus caractéristique. Celui qui le trahit à chaque fois qu’il entrevoit une occasion de prendre le dessus sur l’adversaire.

L’exclusion de l’aide à l’Ukraine du compromis auquel le Congrès des Etats-Unis a abouti ce week-end pour éviter une paralysie de l’administration fédérale rappelle à quel point l’enlisement de la guerre « pour la démocratie » est dangereux pour Kiev. Démocrates et républicains trouveront-ils un terrain d’entente pour débloquer les 24 milliards de dollars sur lesquels ils achoppent ? Les discussions qui pourraient débuter dès lundi s’annoncent houleuses, une partie de l’opposition préférant voir Washington concentrer ses efforts financiers sur la crise migratoire à laquelle le pays fait face à sa frontière avec le Mexique.

Leur issue donnera une première indication de la fiabilité du soutien du premier bailleur de fonds du gouvernement de Volodymyr Zelensky. Munitions, chars d’assaut, aide d’urgence… Depuis février 2022, les Etats-Unis se sont engagés à dépenser quelque 110 milliards de dollars pour l’Ukraine. Sans surprise, de l’autre côté de l’Atlantique, l’adhésion de l’opinion publique à ces dépenses faiblit.

Le temps joue contre Kiev

A une année d’une élection présidentielle très incertaine, alors que sur le terrain la contre-offensive ukrainienne ne produit pas les résultats escomptés, le véritable prix, astronomique, d’une résistance totale aux velléités expansionnistes de la Russie se dévoile. Rien n’est moins sûr que les politiciens et les citoyens occidentaux soient prêts à le payer sur la durée.

Bien que sa contribution ait crû ces derniers mois, difficile d’imaginer que l’Europe vienne compenser une baisse drastique de l’aide américaine, si par exemple Donald Trump était élu à la Maison-Blanche en novembre 2024. La victoire, dimanche, aux élections législatives slovaques d’un candidat opposé à l’aide à l’Ukraine n’a fait que confirmer que le temps va jouer contre l’Ukraine sur un Vieux-Continent dont l’union sacrée avait surpris il y a un an et demi.

Dans une guerre qui reste l’affaire de tous, c’est sur l’usure et les divisions que mise Vladimir Poutine. Lui vient de faire passer pour 2024 un budget militaire en hausse de 68%, à 103 milliards de francs, se disant prêt à résister à la « guerre hybride » que l’Occident mène contre la Russie en soutenant Kiev, « afin de la soumettre à ses velléités hégémoniques ».

Les Forges de Tarbes, dans le sud-ouest de la France, où sont produites des pièces utilisées dans la fabrication d’obus de 155 mm, équipant les canons Caesar. — LIONEL BONAVENTURE / AFP

Avec la victoire en Slovaquie du parti populiste de Robert Fico et l’adoption aux Etats-Unis d’un budget provisoire pour éviter le « shutdown », l’aide à Kiev est remise en question

L’Ukraine a subi deux déconvenues de taille durant le week-end. Rien de nouveau sur le front. En revanche, sur la scène diplomatique, le soutien à l’Ukraine se fragilise et fait craindre que l’aide militaire ne diminue au moment où elle serait plus nécessaire que jamais. Aux Etats-Unis, le Congrès a adopté in extremis samedi soir un projet de loi de financement provisoire pour éviter une fermeture partielle de l’administration fédérale américaine, le « shutdown ». Mais, pour faire passer ce budget, valable 45 jours, les députés démocrates ont dû en exclure l’aide financière et militaire apportée à l’Ukraine qui constituait une pierre d’achoppement avec les républicains.

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A quelques heures de la fin de l’année fiscale, le Congrès a trouvé un compromis pour financer le gouvernement jusqu’à la mi-novembre. L’aide à l’Ukraine est en sursis

Les fonctionnaires et les soldats américains poussent un ouf de soulagement. Leur salaire est garanti ces prochaines semaines. A quelques heures de la fin de l’année fiscale, samedi soir, le Congrès s’est entendu pour éviter une fermeture du gouvernement, qui aurait provoqué un ralentissement de l’économie américaine tout entière. L’arrangement n’est toutefois valable que jusqu’au 17 novembre. Les élus de Washington devront donc remettre l’ouvrage sur le métier pour trouver un compromis plus durable afin d’écarter la menace d’un shutdown au-delà de cette échéance.

Ces futures tractations risquent d’être encore plus incertaines. Car le psychodrame de ces derniers jours va laisser des traces. Martyrisé par son propre camp et incapable de lui faire accepter les lois nécessaires au financement du gouvernement, Kevin McCarthy, le speaker républicain de la Chambre des représentants, s’est finalement résolu à tendre la main aux démocrates qu’il vilipendait la veille.

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