Comme le remarque justement le camarade Xuan, le mouvement meurt essentiellement de ses propres contradictions, alors que rien d’autre, potentiellement, ne pouvait l’arrêter. Le pouvoir n’a fait qu’en jouer, comme d’habitude, après avoir suffisamment longtemps analysé la situation et tenté de la contrôler en dosant répression, provocations et manipulations (terrorisme)…
Analyser les contradictions du mouvement et tenter d’y apporter des solutions pour le renforcer, c’est, une fois de plus, ce que n’a pas su faire la « gauche militante », même avec son intervention tardive.
Pas su, ou pas voulu ?
On est évidemment en droit de s’interroger, selon les cas …
Ceci-dit, même ceux qui ont soutenu ce mouvement dès le départ, peu nombreux, il est vrai, n’en ont pas été capable non plus.
Le juste constat du camarade Xuan :
« Ce qui a cassé le mouvement c’est d’abord les contradictions entre les intérêts des petits patrons et ceux des ouvriers, retraités et chômeurs, qui se traduisent par le rapport à la violence, les slogans politiques révolutionnaires et réformistes, et des revendications opposées comme la suppression des cotisations et l’augmentation du SMIC. »
Cette contradiction était-elle pour autant réellement insoluble ?
La « solution Macron » est un panachage de pansements apportés à ces contradictions.
Une partie repose sur une exonération des charges sociales, qui était déjà dans ses promesses de campagne, et qu’il n’a fait qu’avancer.
Une autre partie provient d’une rallonge au budget de l’Etat, c’est à dire Impôts et taxes, soit exactement le contraire des buts initiaux du mouvement.
Dans l’un comme dans l’autre cas, c’est littéralement faire payer aux salariés le prix de la crise et le prix du mouvement GJ.
Ce que la dite « gauche », même extrême, s’est trouvée incapable de dénoncer et encore plus, incapable de contrer par d’autre revendications apportant une solution, même provisoire, à ces contradictions.
La solution du pouvoir est évidemment tout à fait « provisoire », mais la survie du capitalisme est elle-même du « provisoire », mais comme le pouvoir le sait aussi, un provisoire qui peut durer très longtemps, et dont il conserve donc la maîtrise.
La décrédibilisation des organisations syndicales confédérales est peut-être le seul acquis de ce mouvement, mais le pouvoir lui-même a besoin de le relativiser.
La décrédibilisation des partis politiques parlementaires était déjà bien engagée, et s’est trouvée confirmée par ce mouvement, mais là aussi, le pouvoir doit « sauver les meubles ». Le RIC sera, et même, est déjà, le moyen idéal d’ « institutionnaliser » la nouvelle forme de contestation.
Là aussi, la « gauche militante » n’a pas su analyser ni répondre, voire a carrément joué le jeu de la récupération.
Si l’on reprend le propos du camarade Xuan, on peut en revenir au départ du mouvement GJ :
« contradictions entre les intérêts des petits patrons et ceux des ouvriers, retraités et chômeurs, »
(…)
« des revendications opposées comme la suppression des cotisations et l’augmentation du SMIC »
En réalité, si ces revendications se sont trouvée un temps convergentes, par la nécessité, c’est qu’elles n’étaient pas nécessairement contradictoires non plus…
Leur apporter une autre solution que celle imposée par le pouvoir aurait été une stratégie adaptée pour conserver la dynamique du mouvement, et même la renforcer, en lui procurant une unité qu’il n’avait pas forcément au départ, au delà de la convergence des mécontentements.
__Les classes « moyennes » accablées de taxes et prises à la gorge par ce biais se trouvaient en voie de quasi-insurrection…
__Les « petits patrons », représentant une partie importante de ces classes, se trouvaient pris à la gorge, en plus des surtaxations qui les visent spécialement, par le poids relatif des charges sociales.
__Les prolétaires avaient, et on toujours, un besoin vital d’augmentation du SMIC et des minima sociaux, y compris des retraites, et d’une revalorisation durable de celles-ci.
Il est évident qu’une réduction globale des charges sociales, qui est une réduction du salaire indirect, reste une solution contre-révolutionnaire.
L’argument « libéral » et même, idéologiquement « ultra-libéral », visant à assimiler charges sociales et taxes, c’est ce qui a facilité et finalement amené la solution réactionnaire actuelle.
La « gauche militante » s’est donc trouvée incapable d’apporter la réponse immédiate évidente qui consistait à défendre globalement le salaire indirect, voire même l’augmenter, tout en en faisant porter le poids sur le capital financier, et en soulageant la pression relative sue les « petits patrons » pris à la gorge et qui étaient au départ le fer de lance des classes « moyennes » en révolte, dans ces circonstances.
Autrement dit, assortir la revendication d’augmentation réelle du SMIC d’une répartition nouvelle des charges, augmentant au prorata du nombre de salariés par entreprise, c’était un moyen de consolider la convergence des classes en lutte en leur trouvant même un intérêt commun, fut-il également « réformiste » et « provisoire »…
Du moins aurait-il permis de conserver, voire même, d’augmenter, la dynamique « spontanée » du mouvement GJ et de commencer à mettre en cause la responsabilité du capital financier, tout en le visant au portefeuille.
Parallèlement, avancer sur une alternative répondant au souci exprimé de remettre concrètement et littéralement la valeur-travail au centre du débat social, cela devenait une possibilité, à condition que la volonté politique de construire réellement une alternative politique anticapitaliste existe, ce qui, effectivement, ne semble pas être le cas actuellement.
Luniterre
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