Publié le 01/05/2010 à 17:20 - Modifié le 01/05/2010 à 17:34 Le Point.fr
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FRANCE INTER
L’émission économique Rue des entrepreneurs a été subitement rayée de la grille, samedi 1er mai. DR
Rue des entrepreneurs : la version d’un journaliste licencié
Par Emmanuel Berretta
C’est une affaire très délicate : Radio France a licencié Didier Adès et Dominique Dambert pour faute grave après 28 ans de service. Leur émission économique, Rue des entrepreneurs , a été rayée de la grille, samedi 1er mai . La Maison ronde ne veut donner aucun détail et se réfugie derrière la décision d’un conseil de discipline, qui, le 16 avril dernier, après avoir entendu les deux intéressés de 9 heures à 14 heures, a tranché contre eux. Fait rarissime à Radio France… Le litige porte sur le comportement supposé de Didier Adès et Dominique Dambert envers les différents chargés de production qui se sont succédé ces dernières années. La lettre de licenciement (trois pages de griefs) ne nous a pas été communiquée. La direction de Radio France estime qu’elle se doit de protéger la réputation des deux journalistes licenciés. Quant à Didier Adès et Dominique Dambert, ils préfèrent, sur les conseils de leur avocat maître Hagège, réserver les pièces du dossier à la justice, qu’ils ne manqueront pas de saisir. Si bien que pour établir les faits et renseigner les fidèles et nombreux auditeurs (2,5 à 3 millions de personnes) de Rue des entrepreneurs sur le pourquoi du comment de la disparition de l’émission, la tâche n’est pas aisée.
"Erreurs de casting"
La version de Didier Adès est la seule que nous possédons à cette heure. "Depuis 3 ou 4 ans, la direction des ressources humaines de France Inter nous affecte des chargés de production qui ne conviennent pas à notre type d’émission. Nous sommes victimes d’ erreurs de casting . Nous avons signalé à plusieurs reprises ce problème. Une émission économique n’est pas une émission de variétés, et réciproquement. Chacune requiert des compétences distinctes." En somme, tout le monde n’est pas interchangeable. Et, cependant, la DRH de Radio France s’arrache les cheveux pour contenter tout le monde…
Il se trouve que la dernière chargée de production, Ralitsa Frison-Roche, affectée à Rue des entrepreneurs , était auparavant une représentante permanente de la CGC. Ce syndicat ne pèse plus assez lourd pour être représentatif à Radio France. Il fut balayé lors des dernières élections. Si bien que Ralitsa Frison-Roche a dû être recasée par la DRH. Elle rejoint l’émission début décembre et, très vite, ne s’y sent pas à son aise. "Ralitsa Frison-Roche a d’énormes dispositions pour les langues, car elle en parle six, précise Didier Adès, mais pas l’anglais, ce qui est assez fâcheux, car la presse économique de référence est anglo-saxonne." Au bout de deux jours de présence, elle est mise en arrêt maladie pour quinze jours, renouvelés quinze jours. Le 11 décembre, la DRH expédie un "avertissement" aux deux journalistes…
Didier Adès conteste la bonne foi des témoignages
Début janvier, après le retour des vacances, les trois protagonistes ne se retrouvent que très brièvement puisque, de nouveau, Ralitsa Frison-Roche est en arrêt maladie pour 15 jours, renouvelés 15 jours… Didier Adès et Dominique Dambert reçoivent une deuxième lettre de la DRH qui les accuse d’abus et leur supprime le poste d’assistant de production. Mais l’émission continue. Un dossier est monté pour un passage en conseil de discipline. Il contient sept lettres de collaborateurs divers qui chargent les deux journalistes. Didier Adès conteste ces "faux témoignages". "C’est notre honneur qui est en jeu. Il n’est pas question de transiger", annonce-t-il.
Didier Adès, 65 ans, avait obtenu de bénéficier des nouvelles dispositions de la loi sur l’emploi des seniors qui permet de prolonger sa vie professionnelle jusqu’à 70 ans. Dominique Dambert, 60 ans, n’a pas, quant à elle, complété ses trimestres. Un licenciement pour faute les priverait de leurs indemnités… après 28 ans de service. Ni Philippe Val, directeur d’Inter, ni Jean-Luc Hees n’ont jugé bon de rencontrer formellement leurs collaborateurs. Ils affirment appliquer strictement les règles du droit du travail et ne formulent, en revanche, aucun grief à l’égard de Rue des entrepreneurs. La commission arbitrale (spécifique aux journalistes) puis le conseil des prud’hommes trancheront.