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Macron et Mélenchon s’en vont-en guerre

vendredi 4 mars 2022, par Jean-Pierre Garnier (Date de rédaction antérieure : 4 mars 2022).

4 mars 2022 : Quoiqu’en pensent et en disent les zinzins soumis du bobotariat, Mélenchon, même s’il ne s’en aperçoit pas, file un mauvais coton dans sa tentative électoraliste de se démarquer de Macron en matière de géopolitique. Face à la contre-offensive russe mené en Ukraine contre l’extension vers l’est européen de la zone d’influence du complexe euro-atlantiste, à laquelle le méchant Poutine est en train d’essayer de mettre le oh-là, il n’a rien trouvé de mieux, interrogé à deux reprises sur BFMTV, chaîne des plus pourries dont il est devenu un habitué et qu’il semble en retour très apprécier, que d’approuver dans ses grandes lignes le speech cocardier de Macron drapé sans son costume de « protecteur de la Nation »… Si on laisse de côté le reproche qu’il lui a fait de ne pas convoquer, pour une ultime négociation avec l’ennemi, une énième réunion de l’OSCE — régulièrement accusée de mollesse et de complaisance » vis-à-vis de la Russie et tenue pour cette raison en piètre estime par les Occidentaux —, le reste de son argumentaire s’est limité à faire écho à celui de Macron, éléments de langage compris.

Le Président et son adversaire prioritaire dans les urnes sont, en effet, bien d’accord pour vouer en chœur Poutine aux gémonies : « un dictateur » dit l’un, un « autocrate » répond l’autre, comme s’il fallait passer par pertes et profits la tyrannie covidiste imposée par l’un et tolérée par l’autre en France pendant des mois. Tous deux sont d’accord aussi pour imputer au seul tsar du Kremlin la responsabilité du déclenchement des hostilités guerrières en Europe, l’état de guerre larvé meurtrier entretenu depuis 2014 par le régime ukrainien contre la population russophone du Donbass (14 000 morts) ne comptant que pour des clopinettes. Aux yeux de Macron comme pour son opposant de service, les torts ne sauraient être partagés. Se référant au précédent de l’intervention russe armée en Syrie, Mélenchon a même été jusqu’à évoquer la menace venue de l’est du largage d’« un tapis de bombes comme à Alep », oubliant apparemment que celui-ci visait les terroristes djihadistes qui mettaient la Syrie à feu et à sang pour dégager un autre « ennemi juré de la démocratie », l’affreux Bachar el Assad. Poussant le bouchon du bellicisme antirusse encore plus loin que son rival, Mélenchon en est même arrivé au point de vouloir « empêcher Poutine d’installer des missiles nucléaires en Russie ». Voulait-il dire plutôt en Ukraine, et sa langue aurait-elle fourché ? Ou, peut-être que, l’âge venant, l’Insoumis en chef en arriverait-il à déraper ou… à se démasquer, l’européisme enthousiaste avec lequel il est censé avoir rompu refaisant subrepticement surface tel un retour du refoulé ?

N’oublions pas, en effet, car elle aurait dû être gravée dans le marbre des sottises impérissables dont sont coutumiers les politiciens experts en retournements de veste, sa prise de position claironnante en faveur du traité de Maastricht en 1992. « Maastricht, c’est le contrepoids politique à la libre circulation des capitaux et des marchandises. Si le oui donc l’emporte, là aussi nous irons dans un monde nouveau. […] Tout commence, tout reste à faire, mais avec des bases solides. Et nous aurons une chose nouvelle que moi j’estime formidable : un pouvoir plus grand du parlement européen, un pouvoir plus grand des instances démocratiques de la Communauté européenne, et donc on commencera enfin à avoir un début d’Europe des citoyens. Ça, c’est ça la nouvelle frontière ! » L’autocritique opportuniste dont Mélenchon s’est fendu par la suite ne l’a pas empêché cependant de briguer et décrocher une sinécure de parlementaire européen à laquelle il restera accroché durant presque deux mandats (2009-2017) jusqu’à abandonner le second pour entamer sa première course à l’Élysée.

Comme Macron, Mélenchon est un ardent partisan d’un durcissement des sanctions économiques contre la Russie. Mais, bonnes âmes l’un comme l’autre, ils tiennent à préciser que leur cible n’est pas le « peuple russe » mais les « oligarques » sur lesquels s’appuie l’« individu dangereux » — Baudruchon dixit — qu’est Poutine. Selon l’Insoumis en chef, ceux qui ont des avoirs en France doivent être particulièrement « soignés » et s’attendre à les voir confisqués dans leur totalité. Une mesure drastique qui ne s’appliquerait évidemment pas, si on lit L’avenir en commun, petit livre rosâtre de l’insoumission contrôlée, aux grands bourgeois de l’hexagone s’il accédait à l’Élysée : dans notre bienheureux pays, il n’y a pas d’« oligarques » mais seulement des « milliardaires » qu’il ne viendrait pas à l’idée des radicaux de campus et autres rebelles de confort, de purement et simplement exproprier.

Il n’empêche que l’« effondrement de l’économie russe » qu’il s’agit d’« asphyxier » et d’« étouffer » grâce à une « guerre économique totale », comme l’a promis le second couteau de Macron, l’ineffable Lemaire, avant de se rétracter sur ce dernier point, ferait des ravages parmi une population dont les stratèges de l’euro-atlantisme espèrent que, acculée et excédée par les privations, elle finira par se retourner tôt ou tard contre la cause de tous ses maux, à savoir Poutine et son gouvernement, entraînant même peut-être dans le sillage de la révolte populaire la fraction de la bourgeoisie russe qui lorgne depuis plus ou moins longtemps (les séquences Gorbatchev et Eltsine) vers l’Occident.

En résumé, si cette heureuse issue advenait, ce serait quant même au prix de dégâts humains immenses au sein du peuple de Russie, quoi qu’en dise le duo Macron-Baudruchon. Il est vrai qu’ils pourront toujours rétorquer aux bobos « degôche » saisis sur le tard de scrupules humanitaires ce qu’avait répondu la secrétaire d’État étasunienne Madeleine Albright à propos des 500 000 enfants irakiens morts de faim ou de manque de soins par suite du blocus infligé à leur pays, sacrifiés sur l’autel du « changement de régime » : « Je crois que c’est un choix très difficile. Mais on pense que ça en valait la peine ».

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