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Gauche, droite, c’est quoi ???

samedi 10 février 2024, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 10 février 2024).

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10 février 2024

Romain de Courcelles

DROITE, GAUCHE : DEPUIS QUAND CETTE APPELLATION ? QUEL CONTENU ?

L’expression politique droite/gauche a son origine en Grande Bretagne. À la chambre des Communes, les sièges sont disposés en deux rangées face à face ; la majorité gouvernementale (conservatrice ou travailliste selon la conjoncture) siège dans ceux de droite, l’opposition sur ceux de gauche. C’est la concrétisation de la bipolarisation. Siéger à droite, en Angleterre, implique seulement qu’on est le parti du gouvernement.

Dès 1789 à l’Assemblée Constituante (9 juillet 1789), les royalistes qui sont le parti du roi, donc du pouvoir en place, siègent à droite (selon l’usage britannique), les partisans du changement, de la révolution (quoi qu’ils mettent dans ce mot), siègent à gauche. Depuis et sans interruption, en France, la gauche est considérée de façon un peu simplificatrice comme le camp des idées de progrès, des changements, la droite comme celui des valeurs traditionnelles ou de l’ordre existant. Dans la Constituante, les Noirs ou Aristocrates, les Monarchiens et les Constitutionnels tels La Fayette et Sieyès siègent à droite, les républicains siègent à gauche. Entre les deux, les indépendants, à l’extrême gauche, le groupe démocrate, partisan du suffrage universel (Robespierre, Pétion). L’Assemblée ne siège pas dans une salle divisée en deux par une allée centrale comme en Angleterre, mais dans un hémicycle où peuvent se matérialiser, sans être séparées comme en Angleterre, toutes les nuances de la représentation nationale : une gauche et une extrême gauche, une droite et une extrême droite et un ou plusieurs centres, disposition qui favorise le pluralisme qui s’inscrit dès lors dans la tradition politique de la France.

À l’Assemblée législative (1er Octobre 1791), sur les 745 députés, 264 se réclament du club des Feuillants et siègent à droite, 345 occupent le centre, 136, pour la plupart du club breton, (plus tard appelé Jacobin), à gauche : Condorcet, Brissot (avec ses amis brissotins) et à l’extrême gauche : Couthon, Camot, Robespierre. Mais cette gauche de l’Assemblée législative est hétérogène et elle se scindera rapidement. Robespierre et Brissot sont déjà adversaires et les brissotins sous l’appellation de girondins siégeront à droite dans la Convention (21 septembre 1792). Quant aux députés jacobins les plus engagés dans le processus révolutionnaire, ils portent le nom de Montagnards parce qu’ils siègent bien à gauche, mais dans les travées supérieures, les travées inférieures étant occupées par le Marais. Parmi les Montagnards Robespierre, Marat, Saint-Just et Danton (fondateur du club des Cordeliers) qui sera accusé de corruption par le girondins, et qui à la tête des Indulgents entrera en opposition (dès la fin 1793) avec le Comité de salut public et sera considéré comme suspect. Partisan de l’arrêt et même de l’abolition de nombreuses mesures révolutionnaires, il est aussi compromis par sa solidarité avec Fabre d’Églantine, coupable avéré « d’enrichissement personnel et d’usage de faux » dans la liquidation de la Compagnie des Indes. Danton sera attaqué par la fraction la plus avancée de la Montagne, et Robespierre, après avoir hésité, fera traduire ce compagnon de luttes, nullement incorruptible, lui, devant le tribunal révolutionnaire.

Dans les quelque cinq années de la Révolution (de la prise de la Bastille au 9 thermidor), se sont fondées nos traditions politiques, et même l’organisation en partis qui ne portaient pas ce nom. Les révolutionnaires n’en voulaient pas, ils pensaient qu’ils auraient été un facteur de division de la nation « une et indivisible ». Cependant ils existent en germe dans les clubs. Jacobins, Cordeliers, Feuillants… et dans les cercles qui prolifèrent…

On a longtemps dit « les gauches » dénomination qui met l’accent sur les différences, puis la gauche (qui implique l’idée d’union) que remplace aujourd’hui (pour combien de temps encore) l’expression la gauche plurielle.

Il convient d’affiner la division classique droite /gauche en montrant les limites de celle-ci. Le regroupement des centres autour d’une République modérée en 1875 et dans les années 1890, la politique d’union nationale entre les deux guerres mondiales, la troisième force en 1947 nuancent la vision schématique d’une France où une gauche intangible et farouche s’opposerait à une droite éternelle. « II existe trois gauches en France depuis le guerre de 14 : modérée, radicale, socialiste… trois gauches encore entre 1920 et le début des années 30′, radicale, socialiste, communiste d’abord divisées et même affrontées avant de s’unir pour la défense de la République (Raymond Huard, dans : La France contemporaine). Le glissement des formations de gauche vers la droite, dans notre pays dominé par la bourgeoisie, est un phénomène ancien, il commence avec les girondins. On l’observe avec l’évolution du puissant parti radical et radical socialiste de moins en moins radical dans ses programmes et plus du tout socialiste, hostile à la lutte des classes et opportuniste qui finira par n’être plus que l’ombre de lui même, dont une fraction passera à droite, l’autre restant à gauche mais ayant l’une et l’autre perdu toute influence. On l’observe avec le parti SFIO devenu socialiste que son hostilité aux communistes rapproche sans cesse de la droite, en 1937/39 comme de 1947 à 1970, qui finit par accepter le dialogue avec le PCF pour s’en servir et qui, finalement, arrivé au pouvoir, renoncera à toute référence à la lutte des classes et au Socialisme et finira par se rallier au libéralisme économique en entraînant dans son sillage les formations des gauches parlementaires d’un poids très inférieur au sien. Les phases d’union comme le Front Populaire (sans participation communiste) sont rares et brèves. Seul le PCF prône l’union de la gauche comme stratégie permanente depuis 1930 jusqu’à la signature du Programme commun qui en est l’aboutissement, stratégie dont il a fait finalement les frais, où se dissoudra sa nature de classe et sa vocation révolutionnaire jusqu’à opérer, lui aussi, avec la mutation un glissement vers la droite. La gauche plurielle est finalement la manifestation de l’acceptation du capitalisme par toute la gauche institutionnelle ».

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